Tomber sous mon charme. Mots soufflés. Réalité inimaginable. Je soufflais ces propos à l’attention du sauveur qui m’avait secouru ce soir. Je balançais ce risque existant à Yohan. Pourtant, je ne parvenais pas du tout à y croire. Ce n’était pas possible pour qui que ce soit de tomber sous mon charme. Enfin… Si, c’était possible. Néanmoins, cela n’arrivait jamais avec la signification que moi je donnais à ces mots. Tomber sous mon charme signifiait tomber réellement sous mon charme au point d’envisager et de vouloir une histoire sérieuse avec moi. Tomber sous mon charme signifiait avoir de réels sentiments à mon égard. Comme mon défunt mari était vraiment tombé sous mon charme. Mais, cela n’arrivait pas. Cela n’arrivait plus. Jamais. Je ne laissais pas l’occasion à cette réalité de se produire peu désireux de remplacer celui que j’avais aimé par le passé. Je savais que j’étais canon. Je savais que j’étais sexy. Je savais que je faisais tourner des têtes. Je savais que j’éveillais des envies. Cependant, personne ne tombait pour de vrai sous mon charme. Je plaisais bien sûr et c’était pourquoi il était si aisé pour moi de trouver une proie avec qui finir la nuit. Et ça se stoppait là. La magie du charme s’arrêtait au niveau sexuel. Ce n’était que de la baise. C’était simplement du plaisir. Parfois ça se répétait. Mais, c’était juste ça. Personne ne tombait vraiment pour moi. C’était logique de toute manière. Ça faisait sens. Lorsque la voix de Yohan me percutait, je le fixais curieusement. Son air sérieux me faisait douter un instant. Mon état de mec totalement défoncé n’aidait pas à voir tout de suite claire dans la plaisanterie. Je finissais par le voir. Je finissais par savoir qu’il se contentait de plaisanter et je ne pouvais m’empêcher de lui donner une petite tape sur le bras en lui tirant la langue face à ça. J’y avais cru un millième de secondes. Stupide Ange. Ma stupidité ne s’arrêtait pas là puisque je babillais sur le statut de Yohan. Il n’était pas n’importe qui. Dans un premier temps, peu désireux de répondre, je venais juste exagérer son surnom de sauveur grognant à sa remarque en retour. Je baragouinais un « Suis pas un puppy ! » avec une moue boudeuse. L’idée d’être un chiot me déplaisait parce qu’elle renvoyait au fait qu’il fallait veilleur sur moi, prendre soin de moi, s’occuper de moi. Et, putain, dans notre contexte actuelle, elle renvoyait aussi au fait qu’il fallait me sauver, me soutenir. Tout ça n’était guère plaisant. Ange habitué à sa solitude. Ange habitué à se démerder sans l’aide d’autrui. Pourtant, quelque part, la dénomination faisait son chemin et je finissais par murmurer « Mais… Veux bien être l’tien… » avec le fol espoir qu’il n’ait pas entendu cette partie là. Cette partie où j’abandonnais les armes. Cette partie où j’étais prêt à être à lui. Cette partie où j’étais prêt à être tout ce que je n’étais pas, si cela signifiait qu’il était dans les coins. Et, comme si je n’en révélais pas assez, je venais souffler bien trop de mots à propos de Yohan. Je balançais tout un tas de compliments et cette envie bien trop présente. Sa réponse me tirait un léger rire avant que je n’acquiesce en rétorquant un simple « Yeaaap ! » Cette envie qu’il me prenne était ma motivation pour être clean au moins une fois pour lui. Mais, pour le moment, je n’avais pas la moindre motivation. Le périple de la rue terminé, c’était un autre qui commençait. Je me retrouvais dans la salle de bain du sauveur seul pendant un instant avant qu’il ne me rejoigne.