Marchant dans la rue qui mène à l'abri de bus, il branche les écouteurs et les porte à ses oreilles au cas où le Pfo répondrait. Il fait encore jour dehors, le soleil a allongé sa tournée, et ce n'est pas plus mal pour le doctorant qui ne dormait que quelques heures par nuitée. Il navigue au milieu des gens, jusqu'au moment où Thanom répond et le salue gaiement.

« Pas trop mal, je viens d'aller boire un verre avec une connaissance, c'est pour ça que je ne te répondais pas. »

Obligation de l'informer et de s'excuser d'avoir dû mettre l'appel de côté. Il est heureux de voir que l'étudiant semble aller mieux. La dernière fois il l'avait quitté dans un triste état mais ne s'était pas permis de pousser plus loin que ça.

« C'est rare quand je reste enfermé, si ce n'est pour travailler. »

On pouvait mettre ça sur le goût de la liberté.

« Je n'ai pas beaucoup de place et je ne saurais où les planter, mais merci d'avoir pensé à m'offrir un cadeau. Et toi, comment tu vas ? Ça se passe comment les examens de ton côté ? »

Ji-hun ne comprend pas la remarque, parce qu'il a simplement le désir d'assurer à Thanom qu'il ne le snobe pas, malgré sa mauvaise humeur de la dernière fois. Toutefois, il ne peut s'empêcher de rire, ses interventions le font vraiment sourire, à chaque fois.

« Je n'ai pas de copine et je crois que je suis plutôt entrain de m'envoler. »

LiNK d'ailleurs est un grand pas de fait pour lui, puisque Ji-hun ne parle que rarement du passé et du pays qu'il a fui. Une manière de défendre les droits des nord-coréens et de leur offrir la liberté. Une façon de se rapprocher de la vérité et l'opportunité d'avoir des nouvelles de sa famille et peut-être de les retrouver.

« Ça fait du travail supplémentaire, mais je crois que j'aime bien l'idée. »

Prendre la parole devant des tas de gens, ça doit être son truc, il le faisait régulièrement maintenant, et ça ne lui est pas pesant.

« J'ai appris que tu allais au bal avec une certaine Lilia. Elle est vraiment sympa, je pense que tu as choisi la bonne personne pour t'y rendre. Elle va te faire oublier tout ce qui s'est passé le temps d'une soirée. »

02 août, 1:00am Ji-hun a passé un mauvais moment à échanger avec son ex, alors à une heure du matin il est toujours réveillé, complètement choqué et blessé de ce qu'il a bien pu lire dans les messages qui lui ont été envoyés. Injustes et incompréhensibles, ce sont les mots qui les caractérisent le mieux, parce qu'ils tachent tout ce qu'il est, et être malade ne l'aide pas à relativiser. Alors quand l'appel vient à popper, il hésite à répondre, mais c'est Thanom, ça fait un moment qu'ils n'ont pas parlé. Son colocataire est parti dormir chez sa chérie, pour éviter d'attraper sa maladie – un truc viral duquel il ne faut pas se faire de souci, mais ça se refile facilement, alors il vaut mieux rester à l'abri.

« Qu'est-ce qui se passe, t'as l'air crevé.  »

C'est la première chose qu'il remarque en observant le visage qui apparaît à l'écran de plus près. Il sent que ça va durer un instant, alors il se penche vers le lampadaire, attrape l'interrupteur et allume la lumière.

Ce n'est pas compliqué de voir que le sommeil de Thanom est agité, parce qu'il a une sale mine et que ça doit l'amener à forcer plus qu'il ne devrait. Avec tout ce qu'il a vécu ces derniers mois, ça serait tellement chouette qu'il puisse souffler et se reposer. Ça inquiète Ji-hun, mais il n'a pas envie de trop le materner, il sait ce qui est bon pour lui ou mauvais, il en est persuadé. En revanche, il peut l'écouter, le conseiller, l'accompagner.

« Une mauvaise grippe qui s'est déclenchée ce week-end, avec les médicaments ça devrait passer.  »

Il espère que ce n'est que ça, il attend d'autres résultats. Mais il remarque la douleur qui le fait réagir, et le nord coréen ne peut s'empêcher de grimacer.

« Ça ne s'est toujours pas amélioré, ou il s'est passé quelque chose entre temps que tu ne m'as pas dit ?  »

Ça devient sérieux si ce sont les restes de ce qui s'est passé au TD Garden, il ferait mieux de se faire visiter alors que ça n'empire plus que ça, perde l'usage complet de son bras.

Ji-hun n'a d'autre choix que d'acquiescer, parce que son interlocuteur dit vrai : il faut boire suffisamment pour éviter de se déshydrater, mais pas trop non plus dans son cas, à cause de son unique rein qu'il ne devait pas faire fonctionner comme un acharné, au risque de le fatiguer. Il secoue la tête pour le rassurer, parce que mis à part cette grippe un peu plus longue que d'accoutumée, tout allait bien de son côté – si on ne parlait pas de l'échange qui l'avait bouleversé.

« Ils ne t'ont pas fait des examens pour savoir réellement ce que t'avais ? »

Choqué, les yeux du Nord coréen s'agrandissent, il n'osait imaginer le supplice. Ce n'était pas très professionnel de la part du personnel.

« Tu aurais dû y retourner si ça persistait, vu la douleur que tu sembles ressentir, ça ne m'étonnerait pas que le tendon soit déchiré ou que tu aies une fracture...  »

Et plus il attendait, plus ça devenait sérieux, il ne fallait pas traîner, et Ji-hun tenta de lui faire comprendre que ça pressait.

« Tu devrais aller aux urgences, Thanom... »

Il l'aurait bien accompagné, mais avec le virus qu'il se trimballait ce n'était pas sérieux de sortir de l'appartement qu'il occupait et de risquer de contaminer toutes les personnes qu'il croisait.