Ji-hun comprend sa peur sans la comprendre. Il n'est pas dans cette situation, et ne le sera probablement jamais puisqu'il n'a aucun doute sur son orientation contrairement à son interlocuteur qui, semble-t-il, vient de se la voir révéler.

« Au courant de quelque chose ? Non, absolument rien. Je ne connais pas non plus Mery. »

Il secoue la tête, sûr de lui. Notamment parce qu'il ne se doute pas une seule seconde que "Mery" est le surnom de "Meryana", la fameuse cliente de la Luna Caffe qu'il vient de retrouver sur les réseaux. Il acquiesce aux paroles suivantes, ne trouve rien de plus à ajouter. Les conseils ont été donnés, à prendre ou à laisser – c'est toujours pareil.

« Je comprends... Et bien, je n'en ai aucune idée. Je ne vois personne avec qui m'y rendre, là tout de suite. »

Aucun prénom en tête pour l'heure. Il verra au moment venu.

Les idées s'emmêlent dans la communication, et Ji-hun peine à suivre le rythme mais il fait de son mieux, se concentrant lorsque ça devient trop éprouvant de faire deux choses en même temps : tenir la conversation et répondre aux messages qu'il reçoit. D'autant plus que Thanom le surprend en utilisant le tuyau d'arrosage. Non pas sur quelconques fleurs du jardin, mais lui-même ; aurait-il bu ?

« Tu vas attraper froid... »

Le printemps était là, mais les soirées étaient encore un peu trop fraîches pour se permettre une douche improvisée en extérieur.

« Uhm, je n'irai peut-être tout simplement pas. Après tout, ça ne m'a pas tué l'année dernière de ne pas y aller. »

Il hausse les épaules, pas certain de se sentir à sa place parmi tous ces étudiants de première, deuxième et troisième années, malheureusement. Il verra bien lorsque le moment sera venu, il n'y avait que les nigauds qui ne changeaient pas d'avis.

« Tu te sens mieux ? »

Il demande ; de lui avoir parler, est-ce que ça l'avait un peu apaisé ?

Dernière bouffée de nicotine aspirée entre ses lippes, Ji-hun retire le tube de sa bouche pour venir écraser le mégot dans le cendrier présent sur la terrasse. Moment même où il entend des chiens aboyer et Thanom courir à l'intérieur.

« Tu en fais un boucan ! »

Il s'exclame, rieur avant d'hocher discrètement la tête. Il n'a certainement pas l'intention de laisser quiconque l'obliger à quoi que ce soit, de toute façon. Et la seule femme avec qui il aurait pu imaginer s'y rendre n'était plus sienne depuis quelques jours maintenant.

« Ton best ? »

Il plisse les yeux, amusé qu'on puisse le penser capable d'une amitié aussi forte, mais il n'en fait pas grand débat, laisse Thanom l'appeler ainsi s'il le souhaite.

« Il n'y a pas de raison pour que ça se passe mal. »

Il déclare, avant de ne pouvoir se retenir de bailler. Il commence à se faire tard, ils devraient probablement aller se coucher avant de ne pouvoir se réveiller le lendemain.

Même s'il ne comprend pas encore très bien tous ces liens qui peuvent relier plus ou moins les hommes et les femmes, Ji-hun est heureux d'entendre que sa personnalité pouvait être tout autant appréciée malgré ça. Il sourit davantage au petit cœur formé entre le pouce et l'index de Thanom, mais n'en rajoute pas ; il reste toujours dans la retenue et la subtilité.

« Le thème du bal... »

Il réfléchit et comprend à présent les discussions qu'il semble avoir entendues dans les couloirs de la Pfoho : chaque Maison devait proposer un thème.

« On verra si j'ai le temps de m'attarder sur l'événement, je ne savais même pas qu'il y avait des inscriptions. »

Pas le plus organisé en-dehors du travail, il peine encore à utiliser proprement un agenda, habitué à ce que les évènements principaux de la journée soient annoncés par les hauts parleurs ; on n'effaçait pas vingt-cinq années de coutumes en claquant des doigts.

« Si tu n'y vas pas avec la demoiselle avec qui on t'a arrangé le coup, tu as une idée de la personne qui pourrait t'accompagner ? »

La manière de pensée de Thanom semble si simple quand tout lui paraît compliqué aux États-Unis. Beaucoup de choses encore à comprendre et interpréter, Ji-hun n'est pas vraiment certain d'un jour pouvoir être considéré comme un américain à part entière, mais il aura eu le courage d'essayer.

« L'officier de police... Il est donc sur Boston ? »

Il n'a pas vraiment suivi l'histoire, a simplement compris qu'il y avait eu un instant intime entre son interlocuteur et celui-ci, mais il ne savait ni d'où, ni comment ils s'étaient rencontrés, encore moins quel était son nom.

« Tu penses qu'il pourrait dire non ? »

Est-ce que Thanom a peur que ce représentant de l'ordre public puisse s'être égaré dans ses draps jusqu'à vouloir à présent l'oublier ? Les one night stand sont fréquentes, il ne fallait pas l'oublier.