Situation inhabituelle. Refus inédit. Je me retrouvais avec un Yohan ivre au-dessus de moi qui me demandait deux choses. Deux choses que je déclinais sans doute un peu trop rapidement. Je refusais de l’embrasser. Et, putain, je refusais même de le baiser sur cette plage. Cela ne faisait guère partie de mes habitudes. Ce n’était jamais le chemin que j’empruntais dans ma vie de tous les jours. Ange qui adorait le sexe. Ange qui ne refusais jamais de baiser. Et ça, Yohan le savait. Il savait que je pouvais refuser d’embrasser les gens. Néanmoins, il savait que pour le reste le non ne franchissait jamais mes lèvres. J’avais l’habitude de coucher à tout va sans jamais me soucier de la situation dans laquelle je me trouvais. Je pouvais baiser avec des mecs clean, des mecs ivres, des mecs drogués. Peu m’importait. Je m’en foutais. Si on me demandait une baise, je le faisais purement et simplement. Je baisais sans me poser de questions. Je baisais sans chercher plus loin. Je baisais et je profitais juste de ce moment de plaisir. Yohan me connaissait assez pour savoir que j’avais toujours fonctionné ainsi. Aussi, le fait qu’il soit ivre n’aurait pas dû m’arrêter. Malgré l’alcool dans ses veines, je n’aurais pas dû être du genre à lui refuser une partie de jambe en l’air. Encore moins dans cette situation actuelle où l’envie ne manquait pas. Il ne pouvait guère en être autrement. La main de Yohan sur ma peau à pincer mon bouton de chair me donnait envie de lui céder. Son corps au-dessus du mien allongé dans le sable me donnait envie de lui dire oui en coupant totalement mon cerveau. J’avais chaud. Bien trop chaud. Cette situation était foutrement excitante. Encore plus avec lui. Lui que je désirais constamment. Lui avec qui j’avais sans cesse envie de baiser. Je n’aurais pas dû refuser. Ce n’était pas logique. Pourtant, c’était ce que je faisais gardant sagement mes mains sur les hanches du saveur sans bouger. Il s’empressait de dire que c’était sa règle et pas la mienne lorsque je déclinais la possibilité de le baiser alors qu’il était ivre. J’haussais doucement les épaules avant de répondre « Ta règle peut devenir la mienne quand cela te concerne… » et uniquement quand cela le concernait lui. Pas les autres. Les autres je m’en foutais. Je ne faisais pas autant d’histoire avec les étrangers. Je ne soufflais pas de refus avec des inconnus. Je n’avais pas autant de principes avec ces mecs avec qui je ne baisais qu’une fois. Mais, avec Yohan, c’était différent. Et, j’osais jouer encore plus en lui demandant si je devais aller lui chercher un autre mec pour qu’il le baise. Après tout, c’était ça le chantage que Yohan avait voulu mettre en place. Si je refusais, il fallait bien un autre mec. Non ? Le pincement était stoppé. Les mots tombaient me poussant à lever les yeux au ciel tandis que je marmonnais un « C’est faux ! » que je voulais un peu trop certain. Néanmoins, dans le fond, j’étais loin d’être sûr de moi. Peut-être qu’il me détestait vraiment. J’espérais que non. Je n’avais pas envie qu’il me déteste. Je ne voulais pas qu’il ressente ça à mon égard. L’idée qu’il puisse me détester venait craqueler douloureusement mon cœur. Ça faisait mal ça.

Heureusement pour moi, je n’avais pas le temps de me perdre dans ces douloureuses hypothèses puisque la voix de Yohan se mettait à résonner de nouveau. Les propos tombaient alors. C’était aussi soudain que violent. C’était aussi douloureux que déchirant. Ça me donnait envie de pleurer. Je n’avais pas envie qu’il pense qu’il était bon qu’à me vider les couilles. Il n’était pas ça. Il ne serait jamais ça. J’ouvrais la bouche prêt à répliquer sur le champs. Cependant, sa main abandonnait ma peau et il se redressait restant tout de même assis sur moi. Et, avant même que je ne puisse prendre la parole, il se mettait à parler sans s’arrêter. Il babillait beaucoup trop. Les mots lui échappaient. Les mots glissaient incessamment entre ses lèvres entre nous sans même me laisser l’opportunité de lui répondre. Je ne pouvais pas le contrer. Je ne pouvais pas attaquer. Et ça résonnait sans cesse entre nous. Il y avait bien trop de questions. Il y avait bien trop d’accusations. Il y avait aussi cette foutue jalousie qui se faisait sentir. Au fil des propos, mes doigts serraient de plus en plus les hanches de Yohan. C’était trop. Vraiment trop. Je prenais sur moi pour ne pas le dégager de sur moi. Je prenais sur moi pour ne pas juste le virer et partir loin d’ici, loin de lui. Je prenais sur moi pour rester calme en dépit de tous les mots qui lui échappaient. Ces mots déplaisants qui me heurtaient. Ces mots qui me donnaient envie de pleurer et de fuir. Le silence finissait par tomber. Le soupir passait alors entre mes lèvres tandis que je fermais les yeux un bref instant. Ce n’était vraiment pas la soirée que j’espérais passer. Ce n’était vraiment pas ce que j’avais envie de subir pendant des putains de vacances. Me redressant doucement en position assise, je laissais mes doigts remonter dans le dos du sauveur. L’une de mes mains abandonnait son dos pour glisser sur sa joue en une douce caresse tandis que je murmurais « Tu es ivre Love… » C’était doux. C’était léger. La constatation ne faisait que glisser entre mes lèvres comme indiscutable. Ce n’était que la vérité après tout. Abandonnant sa joue, je déposais de nouveau ma main à côté de l’autre dans le dos du sauveur. Mes doigts montaient et descendaient le long de sa colonne vertébrale. Je cherchais son regard. Et, lorsque je le trouvais, je reprenais calmement « Je n’ai pas baisé avec qui que ce soit aujourd’hui, Love. Même s’il était sexy ce type du bar, je n’ai pas baisé avec lui. Tu es là putain. Je n’ai pas besoin ni même envie d’aller en baiser un autre. » Clairement pas. Je parlais lentement comme pour laisser le temps à Yohan d’enregistrer le moindre de mes mots. Je parlais calmement comme pour l’inviter à se calmer, comme pour l’apaiser. Et, bordel, j’étais surtout foutrement sincère. J’avouais que le mec qui m’avait approché était sexy, mais j’avouais aussi que Yohan était suffisant. Il m’était amplement suffisant. Je n’avais pas besoin d’autres mecs. Ma langue glissait sur mes lèvres avant que je ne murmure « Tout me plaît chez toi… Tu es plus qu’assez bien pour moi… Et… F*ck chéri… J’ai très envie de te baiser là… » Mes mains redescendaient sur les hanches du sauveur. Et, comme pour confirmer cette envie de le baiser, je le pressais un peu plus contre moi. Je le laissais sentir cette érection présente dans mon pantalon. J’aurai pu céder à cet appel de luxure. J’aurai pu décider de renverser la situation pour me mettre au-dessus de Yohan et le baiser là tout de suite. Pourtant, je ne cédais pas et je continuais de parler « Mais, Love, tu n’es pas les autres… Je n’ai aucune envie de te baiser comme les autres… » L’aveu était lancé à demi-mot. Il fallait sans doute lire entre les propos et je savais que le sauveur n’était pas en état pour le faire. Je savais qu’il ne comprendrait sans doute pas ce que je voulais dire derrière mes mots et ça me convenait parce que, putain, je n’étais pas prêt pour une réelle histoire. Si ? F*ck. Je n’en savais rien. L’une de mes mains remontait sur le torse du sauveur en un frôlement bien trop léger tandis que je murmurais « Avec toi, je préfère faire l’amour… » Approchant doucement mon visage du sien, je venais frôler ses lèvres sans pour autant l’embrasser. Une fois. Deux fois. Trois fois. Et, je finissais par laisser mes lèvres dériver dans son cou parce que je ne voulais pas l’embrasser alors qu’il était ivre et qu’il venait de me balancer tout ça. Néanmoins, je déposais des baisers dans son cou laissant tantôt ma langue goûter sa peau, tantôt mes dents la mordiller. Ange qui faisait tant d’efforts pour ne pas céder aux pulsions de le baiser là tout de suite. Ange qui tentait de bien faire les choses.

Règles peu nombreuses. Règles pourtant présentes. Je n’aimais jamais fixer des limites dans mon existence. Depuis que mon mari n’était plus à mes côtés, je n’avais aucune envie de me fermer dans un espace avec des règles pour régir mon existence. Ce n’était pas de cette manière que je fonctionnais. Pas pour le sexe en tout cas. Bien sûr, au vu des événements de ma vie, quelques règles s’étaient instaurées au fil du temps comme le refus de la tendresse, le refus d’embrasser, le refus de la douceur, le refus de l’attachement, le refus des sentiments. Et, encore, je devais bien vous avouer que ces règles pouvaient valser trop facilement parfois. Yohan avait su les faire valser en tout cas. Il avait su les envoyer au loin et me replonger dans une existence où les règles n’avaient plus leur place. Parmi les règles que j’appliquais, je n’avais certainement pas la règle du sauveur dans la liste. Moi je couchais avec tout le monde peu importait l’état dans lequel ces personnes se trouvaient. À partir du moment où ça devenait chaud et où la baise était demandée, ça arrivait sans plus de questionnement. Que la personne soit ivre ou non n’était guère ma préoccupation. Encore moins dans des situations comme celle que je vivais actuellement et qui jouait déjà trop avec mon envie. Le corps de Yohan se trouvait au-dessus du mien. Sa main pinçait mon bouton de chair. Et il demandait cette baise. Tous les paramètres étaient réunis pour que je cède sans réfléchir. Tout était en place pour que la baise ait lieu. Pourtant, je ne cédais pas si aisément ce soir. Je refusais de plonger si facilement dans ce corps à corps. Au-delà du fait que Yohan était ivre, il avait été prêt à coucher avec un autre ce soir alors, bordel, qui pouvait dire s’il avait réellement envie de moi. Peut-être que son envie était destinée à un autre. Non ? Et puis il y avait ces mots qu’il soufflait. Il y avaient ces propos qui pouvaient faire mal. Je ne savais plus où se trouvait la vérité dans tout ça. Je ne parvenais pas à savoir si sa fuite du début n’était que de la jalousie ou s’il y avait autre chose derrière. Quelque chose qui lancerait l’alerte rouge et le besoin de s’éloigner avant de finir piétiné. Alors, malgré l’envie dans l’être, je me tenais sagement gardant mes mains posées sur les hanches du sauveur et expliquant mon refus. Presque instantanément, la protestation était balancée par Yohan. Il ne perdait pas de temps. Il ne réfléchissait pas. Il protestait juste. F*ck… Ne voyait-il pas ce qu’il y avait derrière ? Ne voyait-il pas que je faisais en sorte qu’il ne soit pas comme tous les autres ? Ne voyait-il pas que j’avais envie qu’il ne soit pas au même niveau que ceux que je baisais en m’en foutant ? Apparemment non puisqu’il continuait à babiller soufflant trop de mots qui me déplaisaient. Des questions douloureuses. Des accusations emplis du venin de la jalousie. Je prenais grandement sur moi pour ne pas dégager sur le champs. Mes doigts serraient les hanches de Yohan pour ne pas céder à mon envie de l’abandonner là alors qu’il était ivre.

Lorsque le silence se faisait enfin, je me redressais avec douceur comme pour éviter qu’il ne prenne mon mouvement comme une menace. Mes mains se déposaient dans son dos avant que l’une d’entre elle ne vienne glisser sur sa joue. Je constatais son ivresse à haute voix et ça le faisait simplement rire. Mes mains retrouvaient alors leur place dans son dos à monter et à descendre le long de sa colonne vertébrale comme un doux bercement pour l’apaiser et lui faire oublier l’envie. Et, tout en continuant mes mouvements, je venais répondre aux mots qu’il m’avait balancé. Je parlais avec l’impression de le faire dans le vent. Yohan ne semblait guère m’écouter. Il ne réagissait à aucun de mes propos. Il ne tentait pas de me répondre. Rien. C’était le néant absolu et ça jouait avec mes nerfs.