Aaron hoche doucement la tête, attrapant ensuite la bouteille de bière, remerciant le barman. Du genre coincé ? Ce n'est pas un si mauvais caractère. Enfin, vu sous l'angle d'Aaron, bien entendu. Excuse-moi mais je dois avouer qu'en apparence, ce n'est pas l'idée que je me fais de toi. C'est vrai qu'elle renvoie davantage une fille, plutôt sûre d'elle, justement. Et puis, tu es sortie. dit-il d'un petit sourire amusé avant de prendre sa bière pour pouvoir trinquer avec elle. À cette nouvelle habitude. Et soirée. Il ne peut s'empêcher de rajouter ce détail. Il finit par boire quelques gorgées avant de reposer le tout, sur le comptoir.

C'est pas le premier à me dire ça : Que j'ai pas l'air coincée, de premier abord. Sa remarque m'arracha un nouveau rire, alors que je haussais une épaule.  « C'est parce que c'est tout un art de paraître détendue. » Alors que dans ma tête c'est les montagnes russes. Je le montre juste pas souvent, même si là, en l’occurrence, ça va mieux. Je hochais la tête face à sa constatation:  « Tu y es pour beaucoup. » Admis-je avec un petit sourire en coin, tournant mes yeux vers lui. Enfin, nous trinquions, et je hochais la tête à son ajout: « Et à cette soirée qui me plait beaucoup. » Et c'est pas gagné avec moi. Je portais mon verre à mes lèvres pour boire quelques gorgées. C'est pas si mauvais, la bière, dans le fond.

Tu as de l'entraînement. Sourire amusé. Bien qu'il reste intrigué par la jeune femme. De toute façon, il est très souvent intrigué par les gens. Surtout les femmes. Mais c'est ce qu'il adore. À croire que je t'aide beaucoup, ce soir. C'est vrai. Puis, elle l'a aidé à sortir de l'université, pourquoi pas l'aider à son tour ? Même si c'est inconsciemment. Un sourire s'affiche alors qu'il vient à trinquer avec elle. Avant de boire quelques gorgées de sa bière. Puis, il repose la bouteille sur le comptoir. Alors, c'est quoi l'histoire de Maddy ? Curieux ? Certainement. Mais il ne demande pas non plus tout les détails de sa vie. Bien sûr que non.

Je hochais la tête tout en souriant légèrement pour répondre à sa phrase. Ah ça, de l'entraînement, j'en ai eu et intensif, surtout ces dernières années.  « C'est le revers de médaille pour le coup du concierge de tout à l'heure. » Observais-je en haussant une épaule avec un petit rire? Je buvais une longue gorgée de ma bière, avant de reposer le verre, tournant les yeux vers Aaron. Mon histoire ?  « Oh, y a pas grand chose à en dire, tu sais. Maddy c'est la gamine dans les étoiles, cachée derrière un ordinateur ou un violon. » Bon, y a bien plus à en dire, mais quel intérêt de dire que je suis autiste, que je parle dix langues, que je fait du calcul calendaire?  « J'ai toujours été plus douée dans l'apprentissage que dans le social. » Je buvais à nouveau, avant de demander:  « Et Aaron, alors? »

Un sourire, un rire puis il finit par trinquer avec elle avant de boire quelques gorgées. Mais, c'est ensuite qu'il veut en savoir davantage sur elle. Elle l'intrigue énormément. Mais après, il ne demande pas tout les détails de sa vie. Ce n'est pas le but de sa question et elle a vite compris. Cachée dans l'ombre.. dit-il à voix basse, comme s'il se parlait à lui-même. Parce que bon, ça lui rappelle une partie de sa vie. Seulement ce mot : cacher. Dans l'apprentissage ? Comme quoi ? Plutôt curieux, encore. Puis, la question se retourne. Aaron, c'est... Les secrets, la fuite, le danger qui cherche la stabilité. Qui ne veut pas obéir aux gens. À ses parents, surtout. À ce mariage forcée, qui est terminé, maintenant.

Dans les grandes lignes, je lui parlais de ma vie. C'est la partie cachée dans l'ombre, d'abord, qui sembla le marquer. Puis, l'apprentissage, particulièrement, qu'Aaron sembla retenir, et il demanda des détails  « J'apprends les choses très vites.. Et j'ai toujours eu le nez dans les livres d'avantage que dehors. Les mathématiques, par exemple. Je fais du calcul calendaire depuis l'enfance. Et ... Je connais huit langues, neuf avec le Russe mais je sais pas bien l'écrire. J'ai appris à jouer plusieurs instruments, aussi. » Je m'arrêtais là, pour mieux l'interroger à mon tour. Je l'écoutais, curieuse.  « Un vrai mystère à toi tout seul, en somme.. » Murmurais-je avant de boire, esquissant un bref sourire.  « Et tu parviens à te stabiliser ..? » Demandais-je, curieuse à mon tour.

Voulant en savoir davantage sur la jeune femme, Aaron tente de la questionner mais en douceur. Il ne forcera personne à parler de sa propre vie. Il en sait quelque chose. Il lui demande même quelques détails sur l'apprentissage. Et autant dire qu'il est plutôt fasciné par les paroles de Maddy. Beaucoup de théories. dit-il, dans un premier temps. Il manque presque de s'étouffer, à la suite de ses paroles. Attends, attends. Qu'est-ce que le calcul calendaire ? C'est bien rare qu'il entend ça, voir la première fois. Huit langues ? Mais comment tu fais ? Deux, je trouve ça bien assez. Il reste amusé, tout de même. Donc, tu joues du piano ? Et après ça, il finit par raconter une petite partie sur lui. Un petit sourire s'étire quand elle parle de mystère. Parfois, je crois être stable mais le passé revient toujours. Et il espère que c'est terminé, maintenant. Que tout ira bien.

Et comme beaucoup de personnes, Aaron manqua de s'étouffer en m'entendant énumérer tout ce que je sais, et tout ce que je suis capable d'apprendre depuis que je suis gamine. Je ris en l'entendant me demander ce qu'est le calcul calendaire.  « En gros... Tu peux me donner n'importe quelle date de naissance, je te dirais de quelle jour de la semaine il s'agit. » J'ai toujours eu un grand intérêt pour les chiffres premiers, et c'est ce qui m'a conduite progressivement à m'intéresser à l'informatique. Les maths et la technologie. Il s'étonna également du nombre de langues que je parle.  « A partir de quatre ans, j'ai fais une sorte de "boulimie de lecture", et j'ai commencé à lire.. A retenir. Avant d'arriver dans ce pays, j'étais déjà trilingue, à onze ans. » Et pour finir, la musique. Je hochais doucement la tête à la question d'Aaron, énumérant:  « Piano, violon, violoncelle. J'apprends la guitare en autodidaxie. » Et ça me suffit, pour l'instant. En grandissant, ma soif d'apprendre s'est calmée. Je m'intéressais alors à lui, à ce mystère, à sa recherche de stabilité. Je l'écoutais tout en buvant.  « Il faut rester tourner vers le présent et l'avenir, alors.. » Déduisis-je en reposant mon verre, avec un sourire fin.

Ce n'est pas tout les jours qu'il rencontre une personne comme Maddy. peut être la première fois. Il se sent, un peu nul, à côté. Il arbore alors un sourire, en voulant en savoir davantage sur toutes ces choses. Curieux et pas honteux de ne pas savoir. Heureusement. Donc là, si je te donne un exemple, tu trouves ? Sceptique ? Non, pas tellement. Juste trop curieux et trop intrigué. C'est ensuite qu'il apprend qu'elle parle huit langues. Pour lui, deux, c'est assez. Trois, lui, il pourrait s'emmêler les pinceaux. Et bien, je sais pas quoi dire. Huit, c'est vraiment beaucoup, je ne sais pas comment tu fais pour autant retenir. Franchement, je m'inclines. dit-il à demi sérieux et à demi amusé. Non mais faut l'avouer, cette fille a un don. Piano... J'en joue depuis petit. dit-il d'un petit sourire avant de prendre quelques gorgées de sa bière. C'est ce que je fais mais faut dire que mon passé avait des comptes à régler. Tellement. Maintenant, terminé.

Cet air étonné sur son visage, je l'ai déjà croisé sur tellement d'autres. Avec le temps, j'ai appris à ne plus m'en offusquer, et je hochais simplement la tête à sa question:  « Vas y, donnes moi une date, celle que tu veux. » Et il s'étonnait encore pour les langues, se demandant comment c'était possible. Son expression étonnée sans être hostile me donnait confiance, alors j'expliquais, timidement:  « Ca a une explication, à vraie dire.. Je suis scientifiquement qualifiée d'autiste. Syndrome d'Asperger. » Je relevais les yeux vers lui, guettant sa réaction. Peu de personnes le savent, ce détail. Facilités à apprendre, handicap social. That's my life.  « Tu joues souvent? » demandais-je pour le piano, avant de l'écouter me parler de son passé.. De comptes à régler. J'essayais d'ironiser la situation:  « Tu avais la mafia russe aux basques ? » .