Lundi 11 mars. Soirée. South Beach.

Pensées virevoltants. Cœur douloureux. Prunelles bleues rivées sur l'horizon, je m'étais éloigné de la fête où je me trouvais quelques minutes plus tôt. Personne n'avait su attirer mon attention pour m'entraîner sur le chemin de l'oubli. La bouteille d'alcool volée et la drogue dans la poche de mon pantalon seraient mes seules compagnes pour m'éloigner loin de cette souffrance qui me bouffait. Il avait été foutrement illusoire de croire que quitter Boston pour ce spring break serait suffisant pour panser les blessures et effacer les souvenirs. Il avait été idiot de penser qu'il me suffisait de m'éloigner pour que cette torture prenne fin. Elle ne prenait pas fin. J'avais beau tenter de m'éloigner de cet Enfer, j'avais l'impression de le retrouver à chaque respiration. Le juron passait la barrière de mes lèvres à cette désagréable constatation. Mes doigts venaient ouvrir la bouteille que je portais à mes lèvres sans hésiter. Une gorgée. Longue. Agréable. Je fouillais dans ma poche tirant l'une des quelconques pilules miracles que j'avais et je la glissais entre mes lèvres sans réfléchir. Une nouvelle gorgée d'alcool pour l'accompagner et je refermais la bouteille la déposant à mes côtés. Mains posées sur le sable, je fermais les yeux un instant priant pour que les substances agissent rapidement et m'entraînent ailleurs. Loin. Au sein d'un univers plus tentant. L'envie cognait soudainement. La folie s'invitait. Je finissais par rouvrir les yeux fixant l'océan. Je glissais à nouveau mes doigts dans ma poche pour tirer mes dés. Ces dés qui étaient les maîtres de mon destin. Ils roulaient à mes côtés. Le chiffre s'affichait. La décision était prise : un bain de minuit s'imposait. Sourire aux lèvres, je me remettais sur pied. Ma chemise tombait rapidement au sol. J'étais en train de déboutonner mon pantalon lorsqu'un bruit se faisait entendre. Mes gestes s'interrompaient. Mon regard se relevait en quête de la silhouette qui venait perturber mes plans.

Océan attirant. Folie enivrante. Aller me baigner dans l’océan alors que l’alcool et la drogue se trouvaient dans mon corps ne semblait guère être la meilleure idée au monde. Cependant, cela faisait des années que la mort ne semblait guère vouloir m’accueillir. Cela faisait des années que les accidents ne laissaient que des marques sur l’être sans jamais me pousser à l’extinction. Alors, je n’avais pas la moindre appréhension à me glisser dans l’eau. J’en crevais d’envie. Les dés me poussaient eux-aussi sur ce chemin si foutrement attirant. Le hasard avait confirmé ma volonté. Aussi, l’hésitation n’était guère permise. Un bout de tissu tombait dans le sable. Les autres restaient à leur place sur ma peau car une voix venait interrompre mes actes. Une voix qui attirait un sourire sur mes lèvres. Enzo venait de débarquer. Était-il à cette fête lui aussi ? F*ck. Pourquoi je ne l’avais pas vu plus tôt ? Enfin… Ce n’était peut-être pas une mauvaise chose puisqu’à présent nous nous retrouvions en tête à tête. Mon regard se posait sur sa silhouette et je soufflais « Je comptais effectivement profiter de ce moment sans toi… » Les mots tombaient sans la moindre hésitation. Mais, bien trop vite, le sourire prenait place sur mes lèvres et je complétais « … Mais, ta présence va rendre ce moment mille fois meilleur. » Et ça c’était la vérité. Ange toujours sincère. Ange qui ne cachait jamais ce qu’il pensait. La présence du jeune homme allait me permettre de tenir à l’écart les démons de la tête. Sa présence allait surtout m’offrir un moment des plus délicieux. Ça j’en étais persuadé. Cela ne tardait d’ailleurs pas à commencer avec sa proposition directe. J’haussais un sourcil hésitant un bref instant. Ma langue glissait sur mes lèvres et me tournant un peu plus vers lui, je susurrais « Je ne suis pas contre ton aide Darling » sans le quitter des yeux. Ange joueur. Ange qui provoquait encore plus en lançant « Et je pourrais peut-être te rendre la pareille... Ou que dirais-tu de m'offrir un strip-tease... » Ma tête se penchait sur le côté tandis que l'idée d'un spectacle privé chauffait l'être.

Distraction bienvenue. Bonheur réel. Un agréable moment se profilait à l’horizon depuis qu’Enzo s’était manifesté. Je savais qu’avec sa présence, je ne me perdrais pas dans mes pensées trop sombres. Je savais qu’il me garderait focalisé sur ce moment qui promettait d’être des plus agréables. C’était toujours le cas avec le jeune homme que je me plaisais à attirer sur des chemins qu’il n’aurait jamais emprunté seul. Sourire amusé collé aux lèvres, je rétorquais du tac au tac « Je change tous mes plans pour toi quand tu veux ! Surtout si ça t’implique nu. » Ce n’était pas vraiment la vérité qui glissait entre mes lèvres à cet instant. Après tout, moi je n’avais jamais de plan. Je me laissais porter par le destin et par mes dés. Je les laissais décider de la totalité de mon existence ne prenant jamais de décision seul et ne me définissant jamais d’emploi du temps. Je préférais juste profiter de cette liberté et me laisser porter par les vagues de la vie. Ça évitait de nourrir la culpabilité lorsqu’un événement sombre arrivait comme cette culpabilité qui ne se taisait jamais depuis l’accident de voiture avec mon mari. Je chassais au loin les ombres me concentrant sur le moment et je n’offrais qu’un bref hochement de tête pour confirmer au jeune homme que je lisais dans les pensées. Mes prunelles claires l’observaient s’approcher de moi. La bière était posée. Ses mains se posaient sur moi à présent… Enfin, pas directement sur moi et c’était frustrant. Il venait déboutonner le dernier bouton du pantalon qui glissait à mes pieds. Le tissu était retiré et je me retrouvais totalement nu sur cette plage face à mon compagnon de soirée. Ange qui ne portait pas de sous-vêtement. La question attirait un sourire joueur à mes lèvres sur lesquelles ma langue glissait de nouveau. M’approchant d’Enzo, mes mains se posaient sur ses hanches. Mon visage s’approchait du sien. Mes lèvres frôlaient les siennes sans pour autant offrir de baiser. Et, tout contre ses lèvres, je murmurais « Je suis toujours gourmand si tu es dans les parages… » Mes prunelles claires restaient rivés aux siennes quelques instants. J’en oubliais tous mes démons. Et la demande était là. Cette demande qui me poussait à m’éloigner de plusieurs pas. Regard rivé sur le jeune homme, je me mettais alors à fredonner une musique de strip-tease prêt à me délecter du show qu’il allait m’offrir. Ange musical. Ange joueur. Ange impatient.