C'est le crâne en vrac que le japonais est installé dans la bibliothèque. Il a encore trop fait la fête, trop bu, trop fumé. Toujours trop tout. Et il baille, à s'en décrocher la mâchoire, à se dire qu'il serait mieux dans son lit à compter les moutons. Quelle idée aussi de vouloir faire médecine. Au fond, il aime ses études, il ne changera jamais. Mais il aime aussi trop faire la fête. Sûrement parce qu'il s'est rapidement rendu compte que Harvard est totalement démesuré. Les américains sont démesurés. Tout est en excès ici et il l'a bien compris. Il termine de réviser son cours et quitte la grande salle, déambule un peu dans les couloirs quand il aperçoit la chevelure brune d'une petite crevette qu'il n'a pas vu depuis longtemps. « Yeji ! » Qu'il lance, lui courant alors après pour arriver à sa hauteur. « Hey... Ça fait longtemps... Ça va ? »

déambule sur le campus, les yeux perdus dans la vague, l'âme en peine. qui aurait cru que ça ferait aussi mal ? trahie à répétition, le coeur en vrac, à plus vraiment savoir pourquoi elle donne autant quand on le lui arrache. les papiers qu'elle doit récupérer, l'espoir de peut être réussir à sauver une chose si elle faisait les efforts nécessaires. voulait-elle les faire ? et elle soupire, range dans son sac le dossier récupéré, déjà prête à fuir les lieux pour s'enfermer peu importe l'endroit tant qu'elle était coupée du monde. et son prénom qui résonne, gamine qui regarde autour d'elle dans l'incompréhension, jiro qui approche à grand pas. oh, oui ? remonte la lanière de son sac sur son épaule, les opales qui te regardent quelques secondes. et par habitude -traumatisme infligé par ceux de sa propre promotion, elle sort son portefeuille, billet de vingt dollars qu'elle lui tend. tiens, c'est tout ce que j'ai aujourd'hui

Il sourit le gosse. Puis, il s'éteint, les yeux se posent sur ce billet tendu vers lui. Elle lui doit de l'argent ? Commence à fouiller sa mémoire, à ne plus savoir ce qu'il fait. Peut être qu'il devient fou. Son visage se tord en plusieurs expression comme l'incompréhension et la surprise. Puis, il repousse doucement sa main en riant légèrement. « Qu'est ce que tu fabriques avec ça, range le. » Même s'il lui a prêté de l'argent, il n'a pas envie qu'elle lui rende. Il l'observe la gosse, petite poupée qui semble en proie à bien des malheurs. Si jeune et déjà bien écorchée. « Ça ne va pas ? Ça fait super longtemps que je ne t'ai pas vu... » C'est peu dire. Puisque la dernière fois devait être un peu avant Octobre. Quand elle assistait encore au groupe d'entraide des étudiants en médecine. Et puis, elle a disparu. Même des couloirs.

espère que ça sera suffisant quand elle voulait juste pouvoir rentrer chez elle sans problème. ne pas ajouter encore la moindre chose à la longue liste de ce qu'elle traînait déjà. à juste vouloir pouvoir récupérer définitivement la joie de vivre qui avait pu l'animer par le passé avant qu'on ne lui arrache tout petit à petit.  j'ai vraiment rien d'autre, désolé presque honteuse l'enfant quand le billet reste entre ses doigts.  euh, si ? ça va, ça va souffle finalement quand elle ne sait pas vraiment quoi répondre à la question. ça allait mieux. elle n'était plus vraiment certaine désormais. et elle inspire profondément, se balance d'une jambe à l'autre l'air un peu hagard. et le silence gênant qui s'installe quand elle sait pas vraiment si elle était supposée ajouter autre chose, regarde ses pieds pendant une éternité. tu voulais me demander quelque chose ? peu probable mais à tenter.

Il a déjà vu ça. Il connaît ce qu'elle fait. Des gosses de son école qui subissaient la même chose quand lui, petit gamin téméraire n'hésitait pas à montrer le poing si nécessaire. Il n'en dit rien cependant. La crainte de la faire fuir. Et il peine un peu à arracher des bouts de phrase. Peut être qu'elle n'est pas à l'aise avec lui. Le gosse s'étire, frotte l'arrière de sa tête de manière nonchalante. « Bah euh... » Lui demander un truc ? Vite, un truc Jiro. Un truc à demander. Il réfléchit et il commence à avoir un début de migraine quand enfin ses opales tombent sur une affiche du bal de fin d'année. « Dis ! Tu vas au bal ? J'ai pas de cavalière ! » Q U O I ? Est ce que t'es sérieux là ? Même lui se surprend d'avoir dit ça comme ça, à voix haute. « Enfin... ahah... si t'as pas de cavalier hein... » Ahah. Malaise.

et c'est pourtant la première à vouloir rire avec les autres, à sympathiser avec le premier venu juste parce que la gamine a toujours été réputée pour être solaire. pas aujourd'hui, pas maintenant. pas quand le coeur semblait avoir été arrachée pour une raison inconnue. pas quand même se lever le matin devenait une épreuve. hein ? l'air surpris, idiot, à pas vraiment comprendre la question, à pas y voir le sens. l'inviter elle ? pourquoi ? j'ai pas de cavalier mais.. regarde autour d'elle, cherche les regards observateurs comme si tout ça été une mise en scène. c'est un pari ? qu'est-ce que ça pourrait être d'autre quand ils n'avaient pas échangés le moindre mot depuis des mois ? je serais pas fâchée mais j'ai vraiment pas envie qu'on se moque de moi aujourd'hui parce que c'était trop, parce qu'elle avait besoin de souffler un peu. respirer loin de tout ce qui était en train de la bouffer.

Ça semble plus compliqué. Et elle va pas bien ça se voit. Il papillonne des cils, pas à l'aise avec le fait qu'elle pense qu'il se moque d'elle. Lui, il est pas comme ça mais elle, elle le sait pas c'est sûr. Il pince les lèvres, soupirant doucement. « Je me moque pas Yeji... Euh... Si tu veux avoir un cavalier, je me propose ok ? Genre vraiment. En tout bien tout honneur, tu pourras m'abandonner une fois entrée. » Parce que lui, ça le gêne pas d'être tout seul. Le buffet, l'alcool et sûrement qu'il y trouvera son jumeau là bas. Il se gratte la tempe. « Mh... Enfin, je comprends hein. Je suis sûrement pas le mec le plus intéressant au monde. Mais bon, si jamais tu changes d'avis, tu sais où me trouver. Sinon, tu veux aller boire un truc ? Café, thé, bubble tea, smoothie ? » Parce qu'il a bien l'impression qu'elle a besoin de quelque chose d'autre là.

et elle ne sait pas vraiment comment agir, à pas te connaître assez pour réussir à cerner les intentions. avait-elle déjà réussi à le faire ? mordille la lèvre sans trop savoir comment se positionner, les gestes nerveux qui font leurs apparitions quand les mains s'agitent dans tous les sens. c'est.. gentil mais j'ai pas de raison d'y aller de toute façon le bal qui la faisait tant rêver n'était plus qu'une désillusion à laquelle elle ne voulait pas participer. je.. non, non, ça n'a rien à voir avec toi à secouer la tête subitement, effarée qu'elle ait pu lui faire penser quelque chose de la sorte. oh, jamais elle aurait osé yeji. dire qu'il était pas intéressant, dire quoi que ce soit de négatif en général. je voulais juste rentrer chez moi et elle se tortille dans tous les sens la gamine, à pas trop comprendre d'où sortait cette conversation. je peux avoir un câlin ? je crois que j'ai juste besoin d'un câlin d'affection qu'on viendrait pas lui retirer juste après.

Petit poupée fragile, sûrement malmenée ici et là par des gens malintentionnés. Et quand Jiro, l'enfant terrible mais gentil, s'approche à pas de loup vers la demoiselle, il se retrouver à embrasser un mur avec les dents. Il rit, mais c'est nerveux. Nerveux parce qu'il sent bien qu'il touche peut être un point sensible de la gamine. « Ahah ok, c'est pas grave. J'espère juste que tu changeras d'avis. Ils sont sympa les bals à Harvard. » Ce n'est que son sixième. Lui, il y va essentiellement parce qu'il va boire et manger gratuitement. Puis aussi parce qu'il peut essayer de draguer une fille ou deux au passage. « Ah... Je vois... » Qu'il lance alors qu'il comprend qu'il doit la déranger. Aussi, il allait la saluer quand elle émet une étrange requête. Si Jiro est un gamin, qu'il n'est que très rarement sérieux cette fois, il s'enveloppe dans cet habit d'adulte que son père lui réclame trop. « Oui... » Puis, d'instinct, il enroule ses bras autour d'elle. Et la berce doucement contre son torse. La petite poupée délicate. « Tu sais, on se connaît pas beaucoup c'est vrai. Mais si tu veux discuter de ce qu'il ne va pas. Ou d'autre chose. On peut... Mais... Je sais que tu n'as pas à me faire confiance, je vais pas me moquer de toi. J'en tirerai rien. » Parce que lui, c'est pas le garçon qui se moque. Il est trop joyeux, il aime trop les gens. Il aime trop la vie pour la gâcher. Que ce soit la sienne ou celle des autres.

n'importe quoi qui la ferait se sentir mieux ? bien ? juste pour quelques secondes. juste le temps d'encaisser qu'encore une fois, elle avait été embarquée dans une déception bien trop douloureuse. j'en suis partie en pleurant l'an dernier et je viens de me faire larguer avant même d'y mettre les pieds cette année alors le bal, c'était concrètement pas ce qu'elle appellerait "sympa" de son point de vue. et elle soupire, les opales qui se ferment quand les bras se referment autour d'elle. sensation étrange que de partager un instant de la sorte avec un presque inconnu, à juste souffler doucement pour apaiser les peines des derniers jours. d'accord échappe dans un murmure quand elle voudrait juste rester là à ne plus penser. et peut être que le moment dure une éternité, gamine qui a du mal à se défaire du cocon soudain. pourtant, elle finit par se décaler, profonde inspiration, tapote de la pulpe de ses doigts les yeux humides. merci pour les quelques secondes de répit. c'est juste.. y a eu trop de choses trop pour que ça puisse être facilement supporté. l'année qui aura suffit à la broyer à répétition.