Le bel espagnol avait comme toujours raison. Les bonnes choses avaient toujours une fin. La triste vérité s'imposait durement à toi, ce qui t'agaçait encore plus. Tu ne savais tout simplement pas si tu allais le revoir, c'était ça qui te faisait le plus mal. Après tout vous aviez bien réussià vous éviter pendant trois longues années, et si cette fois ça allait être le double? Tu te contentas donc d'hocher la tête devant ses propos, enterrant tes doutes dans un petit coin de ta tête. C'était stupide comme réaction, tu t'en voulais d'agir de la sorte. Optant pour une aptitude plus optimiste, bien décidé à apprécier le peu de temps qui vous restait, tu l'avais tiré sur le ponton. Tu ne savais pas trop pourquoi tu l'avais emmené là, tes pieds connaissaient juste le chemin alors voilà. Contrairement à ce que l'on pouvait penser tu ne t'étais pas tellement aventurer dans le reste du yatch. Tu étais après tout qu'une simple invitée, et ce n'était pas ton genre d'aller fouiller chez les autres. "Non je ne n'en avais pas, j'me suis juste dit qu'avec un peu de chance on allait assister au coucher de soleil ou je sais pas, genre voir des poissons volants, peut-être même un dauphin." dis-tu en haussant les épaules, te contentant de désigner du doigt la grande étendue d'eau au goût salée. Tu t'appuyas contre la rambarde les yeux rivés sur l'océan. "Tu fais quoi après les vacances? Tu vas travailler avec ton père?" demandas-tu par simple curiosité.

Oui tu avais une imagination débordante, toujours prête à dire un truc stupide pour te ridiculiser. Tu étais décidément irrécupérable. Dans un sens c'est ce qui faisait ton charme non?  "Bah oui tu sais les poissons qui ont des petites ailes sur le coté et qui sautent hors de l'eau pour voler." dis-tu un sourire espiègle attaché aux lèvres, le tout en mimant un oiseau battant des ailes avec tes mains. Si avec ça il ne comprenait pas, tu ne pouvais plus grand chose pour lui. Tu en avais déjà vu une fois lorsque tu étais enfant, mais les souvenirs étaient flous. Tu ne savais pas s'il y en avait par ici, mais voilà.
Même si tu arborais une attitude totalement indifférente concernant ses propos, à l'intérieur du sautais de joie. Tu étais contente de te dire que tu le reverrais. Tu l'imaginais déjà foulant les graviers du campus. Même si en toi un petit doute persistait. Effectivement, ça risquerait d'être gênant de se voir tous les jours. "C'est un sacré programme tout cela! Harvard n'est quand même pas à coté de l'Espagne." répondis-tu en lui faisant un petit clin d’œil. Ce n'est toujours pas évident de quitter son pays d'origine pour voir ce qui se trouve à l'extérieur.  "Ow tu sais pas grand chose, j'vais reprendre mes études de dentisterie. Tu sais à quel point j'aime rigoler machiavéliquement devant le patient lorsque j'ai des ustensiles douteux dans la main. En plus on va passer carrément à la pratique, genre pas que deux fois dans la semaine. Cela va être trop cool." Tu étais passionné par ce domaine, on pouvait même te prendre pour une fétichiste des dents, même si ce n'était pas encore le cas. Tu avais aussi volontairement omis un point, ne préférant pas tout de suite lui dévoiler que tu étais déjà dans cette école.  

Même si le jeune espagnol se foutait ouvertement de ta figure, tu savais que ce n’était pas dans le genre péjoratif de la chose. Il était bien trop poli et gentil pour cela. Tu devais surement renforcé cette image de grosse folle qu’il devait déjà avoir à l’esprit. « Merci, j’ai toujours su que j’avais un don dans ce domaine. » dis-tu en t’esclaffant, passant une main dans tes cheveux. N’empêche qu’il avait compris l’allusion.
« Je sais pas, tu sais tu pourrais avoir un appartement à Boston ET un jet privé. » te contentas-tu simplement de dire de manière nonchalante en haussant les épaules. Cela devait presque être de l’argent de poche pour une famille comme la sienne. De plus, les gamins de votre genre avaient l’habitude de voyager, de ne jamais vraiment s’installer nulle part. Cela allait souvent de pair lorsque vous étiez ‘des enfants de’. C’était un mode de vie comme un autre. « Oui c’est assez spécial. Ils ont tellement tout en plus grand, c’est bizarre quand même. Ils doivent souffrir d’un complexe d’infériorité profond. » ajoutas-tu en hochant la tête comme si tout cela était évident. N’empêche que les premiers jours, cela t’avait très fortement déconcerté.
« Sympa ! Dis tout de suite que je défigure mes patients. » Tu avais dit cela avec humour, lui offrant un petit coup de coude amical. Ce n’est pas comme si tu étais complètement nul dans ton domaine. Tu n’étais pas forcément la meilleure, mais pas la pire c’était déjà ça de pris. « De toute façon tu as déjà de belle dents blanches alors je peux rien faire pour toi. » Oui, c’était une des premières choses que tu regardais chez un homme, les dents. Alors que d’autres femmes étaient obnubilées par les abdos, l’alliance sur un doigt, les yeux…toi tu regardais les dents. C’était carrément ton truc.

Tu le regardais avec amusement. Alejandro était un homme intelligent, objectif, qui possédait beaucoup de sagesse. En tout cas plus que toi, ce qui en était drôlement consternant. Pas pour lui hein; plus pour ta petite personne. C'est sur qu'être modeste n'était pas chose aisée lorsqu'on avait comme vous, l'argent qui file entre vos doigts. Vous alliez probablement jamais galéré dans votre vie, ou du moins d'une différente façon. "Tu sais, les stars font bien de petits caprices, alors pourquoi pas toi?". N'empêche que tu avais suffisamment vécu avec lui pour savoir que cela n'allait jamais être le cas. Il était bien trop raisonnable pour cela.
"Mais oui j'ai toujours raison, tu devrais pourtant le savoir." ajoutas-tu en lui faisant un petit clin d'oeil, t'envoyant au passage quelques fleurs. Comme te l'avait souvent répéter ta môman, il fallait savoir se faire des compliments, parce que dans la vie personne ne t'en fera. Tu t'étais donc toujours fié à ses paroles qui sonnaient à tes oreilles étonnamment juste.  
"Oui mais tu l'as pensé teeeeellement fort que c'est arrivé jusqu'à mon esprit tu vois?" Tu avais dit cela avec humour, ponctuant le tout par un sourire. Voilà pourquoi les dents c'étaient important, parce que si elles sont laides et moches on ne sourit plus. Cela te donnait ton l'opportunité de donner le sourire à pleins gens dans le monde, alors même si tu ne sauvais pas de vies ou tu ne savais trop quoi, tu étais tout de même contente de ce que tu faisais. Après tout un sourire réchauffe toujours les coeurs non?
Alejandro n'était pas un espagnol pour rien, comme la réputation de son peuple, il savait parler aux femmes. Il savait les faire sentir importante, et dans ce bas monde, c'était une qualité des plus rares. Une légère teinte rosé apparue sur tes joues. Tu étais après tout pas complètement insensible à ses charmes. "Merci, c'est adorable de ta part."

Voilà vous étiez tous les deux là, à regarder l'océan, à simplement discuter. Il faut dire que votre journée avait été éreintante, riche en émotion.  Après tout, vous aviez crapahuté un peu partout aux alentours du bateau. Tu définissais les heures passé en sa compagnie comme sans prise de tête. C'était l'essence même des vacances. Vous aviez échangé vos idées, vous vous étiez taquiné et le temps avait filé entre vos doigts. Avant même que tu t'en rends compte il était déjà l'heure de partir pour le bel espagnol. Ton coeur se serra, les au revoir n'étaient jamais ton truc, dégoulinant trop d'amour, de niaiserie. Tu n'étais clairement pas le genre de fille à se mettre à pleurer comme une madeleine. Au moins ,toi, tu savais que vos chemins allaient bientôt se recroiser. Il finissait toujours par se rencontrer à nouveau, vous fonctionniez comme ça.  Le jeune homme s'apprêtait à te dire quelque chose, mais la fin de ses paroles n'arriva pas jusqu'à tes oreilles, se perdant dans le chuchotement des vagues . Le reste de l'équipage d'Alejandro était venu vous rejoindre, l'attendant apparemment pour partir depuis plusieurs minutes. Ses amis avaient le sourire accroché aux lèvres, semblant être ravi par la tournure des événements. Tu crus même voir quelques têtes familières avec eux. "Bien évidemment Alejandro, promis cette fois-ci je n'attends pas trois ans avant de te donner des nouvelles. Si je passe par là-bas je t'appellerais." répondis-tu avec un petit sourire timide. Tes mots recelaient de promesses non-dites. Maintenant que tu l'avais retrouvé, tu ne voulais simplement plus le lâcher. Tu étais tout simplement nostalgique des moments que vous aviez vécu, aujourd'hui et avant. Tu t'approchas un peu plus de lui, et déposa un tendre baiser sur sa joue. "Rentre bien. Qui sait? On se reverra peut-être plus rapidement que tu le penses"  chuchotas-tu énigmatique, dans le creux de son oreille. Tu te détachas de lui, reprenant une distance respectable entre vous deux. Tu réaccompagnas la petite troupe.