01. Je suis née à Rio de Jainero le 01 janvier 1993, autrement dit, pendant que les feux d'artifice prenaient possession du ciel noir de la nuit pour fêter une nouvelle année, je venais au monde dans les cris stridents de la femme qui m'a mise au monde. Non sans lui déplaire, dès ma naissance, je ne suis même pas allée dans ses bras, mais dans ceux d'une nourrice qui s'est occupée de m'éduquer comme une véritable mère l'aurait fait. Ma niñera, la seule qui compte réellement pour moi. 02. Je n'ai jamais eu de soucis d'argent dans la vie, mes parents faisant partis de la famille royale du Brésil, j'ai toujours eu ce que je souhaitais. Ma mère détestait que je lui fasse des caprices, alors qu'enfant, je ne cherchais que son affection, elle donnait l'ordre à ma niñera de m'autoriser tout ce que je voulais, pourvu que je ne hurle pas et que je ne tape pas une crise. Belle manière de faire taire un enfant en manque d'affection. Aujourd'hui, je ne regrette rien et me dis qu'au final, c'était peut-être mieux comme ça. 03. Mon paternel et ma mère sont de la même trempe, ils se sont rencontrés quand ils étaient jeunes et aspiraient aux mêmes problèmes psychologiques. Parfois quand je les observe, j'ai juste l'impression qu'ils sont fous et que plus rien n'est possible pour eux. 04. Pendant que mes parents essayaient de mettre debout leurs plans machiavéliques, moi, je m'adonnais aux sciences, seul langage qui me paraissait plausible et seule échappatoire que j'avais pu trouver pour échapper à cette famille de barge. C'est comme ça que mon rêve de travailler dans l'astronomie s'intensifia et devint de plus en plus présent. Peut-être qu'un jour, j'allais y parvenir ? Sachant que ma niñera m'apportait son soutien sans faille. 05. C'est à mes seize ans que mon père et ma mère décidèrent de renvoyer ma niñera, estimant que ses services n'étaient plus utiles et qu'il fallait que je prenne du poil de la bête, que je sois plus cinglante, plus comme eux. Ce jour fut probablement le pire de ma vie. Le moment où ma niñera passa le pas de la porte, qu'elle se retourna une dernière fois dans ma direction, les rides aux creux des yeux et son éternel sourire bienveillant. C'est ce jour que j'ai compris que moi aussi, je voulais partir. Que je voulais partir loin de cette famille et que je voulais vivre ma vie comme je l'entendais. 06. Malheureusement, j'ai dû vivre avec mes parents jusqu'à mes dix-neuf ans. Alors pour leur faire plaisir, j'ai écouté et exécuté tout ce qu'ils souhaitaient m'apprendre, pour que je devienne comme eux. Contre mon gré, je suis devenue froide, distante et égoïste, peut-être que ce n'était qu'une carapace. Une carapace utile pour me défaire de l'emprise qu'ils avaient sur moi. 07. C'est lorsque cette fille s'est suicidée que j'ai décidé de partir loin de Rio de Jainero, loin du Brésil et loin de mon histoire. Une pauvre fille que ne demandait que mon approbation, l'approbation d'une princesse au rang de Bragance, une fille qui avait besoin d'aide et que j'avais ignorée. 08. Me rendant compte de mon erreur, j'avais fait mes valises et c'est à l'âge de mes dix-neuf que je me suis enfuie, espérant ne jamais me retourner. J'ai fait le tour du monde, espérant m'imprégner de nouveaux sourires agréables, des souvenirs qui feraient de moi une nouvelle personne. Évitant soigneusement d'évoquer mon nom de famille à qui que ce soit, j'avais enfin l'impression de vivre une vie libre, une vie que j'avais choisie. 09. Mais je ne pouvais pas faire ça toute ma vie, alors j'ai postulé dans plusieurs universités, espérant être prise pour me perfectionner dans mon domaine de prédilection, à savoir l'astronomie. Plusieurs universités qui étaient à des milliers de kilomètres de ma ville et de mon pays natal. Je n'avais pas vu mes parents depuis plusieurs années, et j'en éprouvais une certaine sérénité. 10. Aujourd'hui, je vis ma vie, je danse plusieurs soirs par semaine pour me faire mon propre argent, même si j'ai toujours accès à mes comptes. Je viens d'être admise à Harvard, et je peux enfin être Eleanor, et pas une de Bragance.