Brynn le remerciait, y allant d'une poignée de mots espagnol qui le firent sourire de joie et d'amusement. Joie, parce qu'il a toujours apprécié même cet effort minimal et puis amusement, parce qu'il se rappelle dès lors que l'accent de Brynn est aussi charmant qu'amusant, un peu à l'image du reste de la princesse.

Alejandro y alla d'une question plutôt franche qu'il retournait à la jeune femme en quelque sorte. La question la déstabilisa, assez pour qu'il se demande si elle allait se défiler ou bien répondre. Finalement, Brynn se montra à la fois blagueuse, mais franche. Amusé au départ, quand elle ajouta qu'il aurait pu être un parfait débile, l'Espagnol eut un regard de stupeur, puis se mit à rire. C'est le genre de déclaration que seules Brynn peut faire le plus sérieusement du monde! Heureusement pour lui, la blonde se montrait rassurante: il n'était pas un parfait débile.

-No, no, je la trouve excellente. J'admire toujours autant ton honnêteté.

Parce que chez lui, elle est à degré variable. Disons qu'il est rare qu'Alejandro pense entièrement ce qu'il dit et qu'il dise entièrement ce qu'il pense. Le beau brun aime à se garder une certaine réserve, sauf lors de certains élans passionnés. C'est le paradoxe de l'Espagnol sans doute.

Après quoi, ils parlaient voiture, puisque Brynn abordait le sujet, l'enthousiasme du beau brun fit qu'il se lança sur le sujet, qui rappelait de part et d'autre de beaux souvenirs, c'est certain. Le petit silence qu'il y eut après en disait long sur la nature de ses souvenirs. Autant lancer un autre sujet.

-Une occasion... L'université de Barcelone avait un programme d'échange aux États-Unis, j'avais envie de changer d'air un peu. J'adore l'Espagne, c'est mon pays, mais il y a un certain prestige à étudier aux États-Unis, surtout à Harvard. C'est une preuve de caractère aussi, de prise de risque... Mon grand-père était très fier de moi.

Ce que pense son grand-père de lui a toujours été important pour Alejandro, ça ne date pas d'hier. Quand Brynn demandait s'il avait un GPS, l'Espagnol eut un petit sourire et appuya sur un bouton du tableau de bord et un gps s'affichait alors, le truc dernier cri quoi.

-Alors je t'en pris, donnes moi ton adresse.

Ce qui est bien, c'est qu'elle sera sauvegardée dans le GPS... Pensa-t-il tandis qu'il entrait les coordonnées qu'elle lui donnait. D'ailleurs, il eut à faire un petit détour, parce qu'ils allaient dans la mauvaise direction et que Brynn a comme qui dirait omis de lui dire. Peut-être même qu'elle ne s'en est même pas aperçue!

Ce fut assez distrayant d'entendre Brynn énumérer les raisons, drôles ou non, pour lesquelles elle était sortie avec lui, il y a tout de même une poignée d'année. Derrière cet humour qui était le sien, la princesse cachait mal et finissait même par avouer son malaise à un Alejandro pourtant satisfait et compréhensif comme toujours. Sourire en coin, il l'observa de son regard perspicace et conclut cette pensée, qu'il exprima en paroles:

-Tu veux plutôt dire qu'ils acceptent mal ce qui sort de ta bouche... C'est le prix à payer pour son honnêteté.

Être franc, honnête, ce sont de belles valeurs, mais elles ont un prix et à être honnête, on ne se fait pas que des amis. Brynn concluait de son côté en avouant qu'elle n'a pas un caractère facile. Le jeune homme resta silencieux un petit moment, faisant mine d'être concentré sur sa conduite, il finit quand même par dire, tournant brièvement sa tête vers la princesse:

-La clé, c'est de savoir ce que tu veux, mais toute la difficulté est là.

Encore aujourd'hui, il a parfois du mal à le saisir. Leur rupture par exemple, il sentait qu'elle la désirait, la fin de cette histoire et le jeune homme sentait que c'était ce qu'il y avait à faire aussi, pour eux et pour rester en bon terme, s'éviter des problèmes, seulement, encore aujourd'hui, un doute subsiste dans son esprit: était-ce vraiment ce qu'elle voulait?

Une question qui restera sans réponse et qui n'est pas si importante, puisqu'ils se sont laissés de toute manière. Engagé sur une avenue principale de Cambridge, le jeune homme parlait maintenant de son grand-père. La famille est omniprésente chez Alejandro. Son père est un homme d'affaires plutôt paresseux et sans grande ambition, pour qui la priorité semble plutôt de dépenser à gauche et à droite et d'investir dans des projets douteux. Alejandro n'a pas une très bonne relation avec son père, un être impulsif et impatient. Il préfère sa mère, une femme de tête, engagée dans sa communauté et d'une patience remarquable, mais son mentor, c'est son grand-père.

-Ah... La fierté d'un homme ne doit jamais être prise pour acquise, Brynn. Un revers et elle s'en va. C'est fragile.

Alejandro aime à se la jouer philosophe de temps en temps. Pas trop souvent quand même! Peu après, la voiture fit un petit détour pour se retrouver dans la bonne direction et suivre les indications du GPS. C'était comique de voir la belle blonde à ses côtés s'émerveiller devant la chose et s'inquiéter de sa capacité à suivre une voix qui dit: "tournez à gauche".

-J'essaierai en tout cas. Je peux compter sur ma copilote en cas de soucis?

Pas certain, mais bon! De toute façon, ils s'engageaient déjà sur la rue de la jolie blonde. Dans quelques instants, ils seront face à l'édifice où elle habite et ce sera alors sans doute le moment de se quitter, sauf s'il y a un autre rebondissement!

Quand Alejandro se mettait à réfléchir de cette façon, à voir haute avec des airs de Socrate, la plupart des gens réagissent comme Brynn et il s'en amuse, saisissant assez bien le message: "gardes tes réflexions pour toi, tu nous emmerdes!" Cette pensée le fit bien sourire, mais bon, faut qu'il y ait quelques inconvénients à le côtoyer.

La jolie blonde allait-elle pouvoir l'aider. Elle préférait plutôt avoir les bras vers le ciel, cheveux dans le vent et profiter du moment, typique de la part de Brynn. Quand ils étaient ensemble, face à un bourreau de travail comme lui, qui aime quand même profiter de la vie, il pouvait compter sur la princesse pour réduire son premier trait de caractère et amplifier le second, se dont il ne s'est jamais vraiment plaint. Sourire aux lèvres, il jeta un petit regard vers la blonde, ne pouvant s'empêcher d'imprimer cette image comme une photo dans sa mémoire. Celle d'une Brynn visiblement heureuse.

-Tant pis, je ferai sans.

Lâchait-il avec un sourire qui montrait qu'elle pouvait en profiter. Quelques instants plus tard, la voiture s'arrêtait devant un édifice à appartements. Garé la décapotable n'avait pas été difficile, mais Alejandro n'éteint pas le moteur, il le laisse vrombir un peu, s'attendant à ce que la princesse quitte la voiture et gagne son chez elle. Celle-ci prit le temps de le remercier, plus longuement que ce à quoi il s'attendait, pour être honnête. Elle continuait de parler comme si elle s'en voulait d'être qui elle est, chose qui ne cessait de l'étonner et de le déranger un brin... Parce que Brynn est une fille merveilleuse. Un peu décontenancé, il se montra plus bref:

-Je suis content aussi de t'avoir revu Brynn. Nous aurons sûrement l'occasion de nous revoir.

En se croisant par hasard quelque part par exemple, mais Alejandro ne comptait pas jouer les ex' qui collent non plus... La belle s'approche, pour lui laisser un baiser sur la joue, comme ils en ont l'habitude entre eux, mais seulement, ce baiser fut plus appuyé, plus doux et délicat aussi, qu'un simple baiser d'au revoir. Derrière ses lunettes fumées, le regard de l'Espagnol se troubla un brin. Elle avait le don de semer le doute dans son esprit pourtant si pragmatique. Et ça, c'est une chose qu'il aime moins, se sentir moins en contrôle quoi.

Brynn y alla alors d'une suggestion, teintée d'une hésitation qui se transmit à lui. Les lèvres d'Alejandro se pincèrent. Il regarda devant lui, comme s'il pouvait trouver une réponse sur la voiture d'en face presque, jeta un coup d’œil au cadran avec l'heure, puis attarda son regard sur Brynn. Ce qu'il aimerait lire dans les pensées parfois... D'abord, il éteint le moteur de la voiture.

-Nous parlions d'honnêteté tout à l'heure, tu permets que je sois honnête?

Il disait cela avec une certaine douceur, ou patience, c'est au choix.

-Si j'étais un autre homme, je penserais que tu m'invites pour qu'on remette le couvert, comme on dit, mais que nous en restions là après... mais je te connais assez bien pour en douter, même si je sens bien qu'il se passe... quelque chose. Je me demande juste en ce moment: qu'est-ce que tu veux?

Qu'est-ce qu'elle attend de lui au juste? Qu'ils soient de simples amis, qu'elle lui montre non sans une certaine fierté son joli appartement et le désordre que peut y mettre sa sœur? Ou attend-t-elle autre chose? Parce que par des regards et de simples baisers sur la joue, elle était capable d'entretenir un certain espoir chez le jeune homme qui pouvait vite se révéler être un agacement s'il se révélait n'être qu'un mirage. Alors autant avoir une discussion franche à ce moment-ci, pour qu'après il sache à quoi s'en tenir. Il l'a dit tout à l'heure, la clé, c'est de savoir ce qu'elle veut, mais c'est aussi le plus difficile.

Cette journée était décidément faite de hauts et de bas... Alejandro n'était pas sorti de sa voiture, il avait simplement éteint le moteur en enlevant la clé du contact et il avait décidé, cette fois, de ne pas tergiverser et d'exiger un peu plus de clarté de la part de son ex', qui jouait les agaces disons, ou en tout cas, c'est ainsi qu'il le percevait. Tantôt elle réagissait plutôt mal à un baiser échangé et maintenant, elle le fixait de son regard, déposait des baisers plutôt appuyés sur sa joue, sans oublier tous ces petits discours comme quoi elle avait hâte de le revoir et tout. On ne peut pas souffler le chaud et le froid de cette façon et ne pas espérer se retrouver face à un homme tiède...

La réaction de Brynn ne se fit pas attendre. Elle fit sa princesse capricieuse, qui n'aimait pas que ce soit lui qui dicte les règles pour ainsi dire. Les sourcils d'Alejandro se froncèrent. Cette fois, elle jouait avec sa patience et on ne gagne rien à bouder avec lui. Il remit la clé dans le contact et redémarra sa voiture.

-Bon, si tu le prends de cette façon, je te dis buenas tardes... Fais attention à toi Brynn.

Puis, l'Espagnol regarda droit devant lui, visiblement prêt à décoller de cet endroit et à rentrer chez lui, puisqu'il n'avait plus rien à faire ici. Jouer dans un dialogue de sourd ne l'intéressait guère.