ne pas savoir ce qu'il t'étais arrivé, être victime d'un trou de mémoire, te plongeait dans une angoisse profonde. ne plus rien maitriser à l'instant où tu t'étais sentie incapable de tenir sur tes jambes. la vision qui se troublait et où tu luttais pour trouver péniblement ton téléphone. et plus rien. le néant. souvenir du sang, du sol froid, d'une douleur inexplicablement non localisée mais généralisée. tu t'étais sentie seule, mais jamais tu ne lui en avait tenue rigueur. sa présence n'aurait rien changé à cet incident, à cette perte. — ça n'aurait rien changé que tu sois là.. t'aurais rien pu éviter peut-être qu'il t'aurait rattrapé avant que tu ne rencontres le sol, qu'il t'aurais évité une la lèvre ouverte. mais rien de plus. rien qui aurait pu vous empêcher de finir le cœur meurtri, loin l'un de l'autre. — un peu les deux à vraie dire.. on avait parlé d'avoir des enfants mais on y arrivait pas. la codéine m'a bousillé, les traitements que je prends n'aident pas. et un jour ça a marché, on s'y attendait juste plus.. alors ouais on peut dire que c'était un bébé surprise tu souriais. parler de julian, de son arrivée au monde, ça te rendait heureuse. du baume au cœur, voilà ce que tu avais. ton sourire se figeait et devenait plus crispé. — c'est un peu tôt pour répondre à ça donovan.. tu ne t'étais jamais posée la question de savoir si tu voulais d'autres enfants après julian. avec casey ou quelqu'un d'autre. t'avais déjà galérer à en avoir un, alors un second tu te disais que ce serait un miracle si cela arrivait. — peut être finissais-tu par murmurer en haussant les épaules. — tu serais prêt toi à retenter l'expérience? tu te disais que sa question aurait pu être un test, peut être qu'il n'avait pas envie et qu'il prendrait ses jambes à son cou si tu avais répondu par la positive. la douleur peut être surmontée une fois, mais peut être pas deux.

Je m'étais senti tellement inutile, pendant les semaines qui ont suivi. Parce que tu étais l'amour de ma vie et j'étais incapable de te faire aller mieux. Et puis, à force d'essayer mais de me prendre des murs... j'avais fini par laisser tomber, me concentrant sur moi, sur mon travail. Sur ce qui me faisait penser à autre chose qu'à la douleur qui était omniprésente dans notre appartement. Plus aucune intimité, des déplacements plus fréquents. Je m'en voulais, d'avoir réagi comme ça... mais le passé ne pouvait être changé et j'allais devoir m'y faire, à cette écriture de notre histoire. Chapitre douloureux, pris pour une fin. Mais aujourd'hui, les choses changeaient. Coup de pied dans la fourmilière et c'était pas en compagnie de Casey que tu te retrouvais en cet instant. C'était avec moi. « ça faisait longtemps que vous essayiez ? et que vous étiez ensemble ? » Je voulais pas non plus te mettre mal à l'aise avec mes questions mais je voulais savoir comment t'avais vécu ces cinq dernières années... et visiblement, t'avais le meilleur soutien. Seulement, mon autre question te mettait mal à l'aise et je baissais la tête, soupirant légèrement. « désolé » Mais finalement, ça allait de paire avec ce que je disais. On était pas au même stade de nos vies. T'avais un enfant toi et peut-être qu'il te suffisait. Moi non. Je voulais une descendance avec toi. C'était clair dans ma tête et dans mon coeur. Relevant le visage pour te regarder droit dans les yeux, je finissais par hocher la tête. « ça a toujours été évident... » Et pour moi, c'était toi et pas une autre. Sûrement pour ça que je suis toujours sans enfant. « mais j'comprendrais que toi non » Bien que ça me brise le coeur, c'est toi qui a vécu le traumatisme, toi qui porte l'enfant finalement. Le choix final te revient. La tête se cale contre le canapé, regardant mes doigts dessiner des cercles sur ta cuisse, silencieusement. J'avais abordé ce sujet et peut-être que je le regrettais maintenant.

parler du passé était finalement un exutoire. tu te rendais compte au fur et à mesure que la discussion avançait, que tu n'avais plus autant de peine qu'avant. ce que tu gérais difficilement, c'était sa peine à lui. de le voir dans une profonde souffrance d'avoir tout perdu. c'était différent pour toi, ta vie avait évolué et avoir un bébé t'avais apporté un amour inconditionnel, que t'avais jamais ressenti avant. — on s'est rencontrés dans les mois qui ont suivi notre rupture. à un gala de.. j'sais plus, un truc mondain à la con. tu haussais les épaules. casey t'avais repêché de ton profond mal être, et, encore aujourd'hui, tu ne sais expliquer comment il a réussi. — on a essayé pendant un peu moins d'un an. c'est arrivé quand on a arrêté. le psy m'avait dit que c'était sûrement dû à mes peurs et mon vécu que ça n'avait pas marché, je conscientisais trop la chose.. tu soupirais. tu voyais bien que tout ça n'était pas simple à entendre pour lui mais au moins, il saurait tout. tu ne lui avais jamais rien caché, alors pourquoi commencer. la tête secouée par la négative, les sourcils se fronçaient légèrement. — c'est pas un non. c'est juste.. on verra tu ne veux rien lui promettre car toi même tu ne sais pas ce que tu veux pour l'avenir. — imagine qu'on y arrive pas.. si toi tu veux des enfants, tu resteras pas avec moi la logique des choses voudraient qu'il trouve quelqu'un avec qui ça fonctionnerait rapidement. pas toi et tes problèmes de santé, tes peurs et tes incertitudes.

C'était notre bulle, finalement. Toi et moi ici, dans cette pièce, j'en oublierai presque ton fils qui dort dans la pièce d'à côté. Le pire, c'est que je me faisais du mal tout seul. A parler de cette période, mais à renchérir avec ta vie avec Casey. Votre rencontre, vos tentatives d'avoir un enfant. Ça faisait mal, finalement. Parce que t'as réussi à surpasser tout ça avec quelqu'un d'autre quand j'étais resté bloqué dans une vie qui ne me convenait pas. Tu vois, quand j'te dis que t'es bien plus forte que tu ne l'imagines, c'en était la preuve par A + B. La gorge prise une nouvelle fois par l'émotion, je restais silencieux. Tu me rassurais, m'indiquant que tu ne disais pas non mais plutôt qu'on allait laisser faire le temps. J'comprends, dans le fond. C'était juste compliqué d'assimiler tout ça. Mon regard devenait fuyant, restant fixé sur ces doigts qui glissait sur ton vêtement. Sans forcément changer l'angle de ma tête, je hochais négativement la tête. « si y'a bien une chose que je ne ferai plus jamais, c'est te quitter » que j'disais doucement. J'avais appris la leçon et on ne m'y reprendrait pas. Perdre un enfant c'est une chose, mais te perdre toi, c'en est encore une autre. Un léger soupir avant de repartir dans le silence. Ça commençait à faire beaucoup et il me fallait le temps de digérer, tout simplement.

moment de tendresse qui te faisait un bien inconsidéré. tu te sentais au bon endroit, blotti contre lui, ses doigts caressant ta cuisse. un goût amer d'avoir perdu toutes ces années à ses côtés. mais elles avaient été bénéfiques. pour toi. pour te reconstruire, passer à autre chose. devenir une nouvelle version de toi, avec tes blessures antérieures a porter. mots qui te font sourire. tu ne voulais pas qu'il te lâche. c'était inenvisageable de le perdre à nouveau. — tu crois qu'on peut allier "ne plus se quitter" et "prendre notre temps" ? tu ne voulais pas précipiter les choses et tu voulais que votre reprise de lien se fasse au mieux. après tout, il fallait se rapprivoiser après cinq ans sans se côtoyer. vous aviez changé et c'était indéniable. d'un coup, tu décidais de te rapprocher de lui. tu lui grimpais dessus, te retrouvant assise face à lui, les jambes qui entouraient sa taille, tes bras posés sur ses épaules. — j'ai l'impression d'être dans un monde parallèle et que rien de tout ça n'est vrai.. que je vais me réveiller parce que julian pleure ou qu'une voiture va klaxonner. c'est complètement irréel, tu pourrais te pincer pour te rendre compte que tout ça se produit vraiment.

Ce sentiment désagréable partira sûrement avec le temps. Mais en attendant, fallait juste que je le camoufle, que je le cache pour ne pas que ça gâche les moments qu'on va passer ensemble. Celui là n'est que le premier d'une longue liste et je m'en faisais la promesse. Après tout, je te laisserai plus jamais t'en aller. Toi et moi, c'était pour la vie et je ne laisserai personne nous séparer. « on peut... vivre dans la même ville. et tenter de faire des date ? » C'était une solution qui permettrait de prendre notre temps, tout en ne se quittant plus. A peine avais-je fini de parler que tu t'installais sur moi, tes bras sur les épaules, ton visage proche du mien. Par réflexe, mes mains se calaient sur tes cuisses, remontant à tes fesses puis jusqu'à tes reins. « ton fils pourrait se mettre à pleurer ou une voiture se mettre à klaxonner... je bougerai pas d'ici tant que tu me le demandes pas » Le regard voguant entre tes lèvres et tes yeux, avant de me risquer à t'embrasser. Je préférais ça que ressasser la conversation précédente, qui me torturerait bien assez quand je serai seul.

tu hoches la tête, hausses les épaules. — on peut commencer comme ça.. et l'avenir s'écrira de lui même, si le coeur vous en dit. si les dates se passent bien. étrange de se dire que vous revenez en arrière mais certainement nécessaire pour repartir du bon pieds. tes yeux ne savent plus se détacher de son visage. tu captures les moments, examine la moindre parcelle de son visage. ton index effleure le grain de sa peau, les rides des dernières années apparues. tout comme toi, l'âge s'est invité sur vos corps. pas si vieux, mais plus si jeune. mais toujours la même puissance de sentiments entre vous. — alors quoi ? on attends que ça arrive pour se dire au revoir et à la prochaine ? billes fixées dans les siennes. l'air impassible d'émotions. plus aucune trace de tes larmes, sauf peut être le goût salé imprégné sur tes lèvres.

Il n'y avait pas de mode d'emploi pour reprendre une relation qui s'est interrompue quelques années auparavant, sur de tragiques événements. Alors ouais, peut-être qu'être dans la même ville dans un premier temps, se voir, faire des dates, c'était ce qu'il y avait de mieux à faire. Esquissant donc un sourire à tes mots, je me sentais déjà légèrement mieux. Et en même temps, je me sentais aussi anxieux à l'idée que ça peut ne pas fonctionner. Si ça ne fonctionnait pas avec toi, ça fonctionnerait avec personne. Et j'serai voué à rester célibataire pour le restant de mes jours. « non.. » Un soupir avant de venir glisser mes mains sur ton visage, caressant tes pommettes de mes pouces. « je repars avec toi à new york. en attendant, je bouge pas, je te lâche pas. je peux aller chercher mes affaires et dormir ici, sur le canapé » Pour ne pas aller trop vite.

les traits de ton visage se détente de plus en plus. ton corps aussi se décontracte. lesté d'un poids que tu portais depuis trop longtemps. — t'es prêt à tout quitter? soupire. — fais pas ça.. il faut qu'on trouve un compromis. tu ne te voyais pas lui imposer de quitter sa vie pour toi. il s'était installé, il avait construit pleins de choses et toi tu arrivais pour tout chambouler. tes paupières se ferment quelques instants. tu te rapproches un peu plus de lui, poitrine contre son torse. les doigts qui glissent dans son cuir chevelu. — est-ce qu'on devrait pas en reparler.. un autre jour ? c'était un peu beaucoup comme discussions pour la journée.  

« on a le temps d'en parler, t'en fais pas » Mais contrairement à toi, j'avais beaucoup moins d'attache. Mon boulot pouvait se faire n'importe où et j'avais un siège à New York. Ma mère et ma soeur y étaient, donc c'était pas vraiment une perte que de quitter San Francisco pour la Grosse Pomme. Mais j'allais pas polémiquer maintenant, ça ne servait à rien. Et puis, t'avais pas tort, on enchainait les grosses discussions depuis tout à l'heure, c'était sûrement un peu trop pour nos petits cœurs. Hochant la tête à tes mots, je ne disais rien de plus, calant mon front contre le tien. Profitant de cette proximité nouvelle, je me délectais du moment. L'enregistrant dans mon esprit, dans ce nouveau chapitre de nos vies. Le début de notre renouveau.