Lorsqu’elle est tombée sur l’invitation en début de semaine, perdue dans son courrier, elle ne l’a pas vraiment regardé, ni détaillé le nom, l’endroit, l’évidence était telle qu’elle n’avait pas le cœur à ça. Parce qu’elle n’a le cœur à rien. Depuis quinze jours, ou presque, elle se contente de traîner sa mélancolie et son chagrin. Chose que ses colocataires et amis ont su dénoter, et c’est d’ailleurs ce fait qui a engendré tous les évènements suivants.

La récupération de l’invitation par l’un d’eux, « l’obligation » solennelle d’y participer, même si plusieurs questions eurent été soulevées quant à l’identité de son expéditeur, sauf qu’on ne peut louper une telle soirée, c’est tout ce qu’il en est resté. Bien qu’elle, elle n'en soit pas encore intimement persuadée. Et la recherche d’une robe qui pourrait coller avec ce genre de rassemblement, qui ne nécessiterait pas un budget trop important. Puisque rien ne s’est arrangé, niveau financier. Parfois, elle en a même des envies de faire exploser ses pensées, à s’aliéner de vouloir vivre dans un monde qu’elle ne peut qu’effleurer.

Cependant, lors d’une après-midi, elle a quand même fait le tour des friperies, dépôt-vente, et autres magasins vintages, jusqu’à tomber sur une perle qu’Eloïse a validé. Alors elle a été tentée de lui dire qu’elle n’avait pas assez, qu’elle se devrait d’être raisonnable surtout que le Summer Camp allait rapidement arriver. Simplement au sourire de son amie, elle n’a pas osé. Et la centaine de dollar qu’elle valait, elle les a payés. En se disant qu’elle ferait des heures supplémentaires afin de compenser, à présent que l’année scolaire est terminée.

Puis est donc venu l’instant T, où elle a passé le cuir sur sa peau, lissé ses cheveux, s’est maquillée, a emprunté des escarpins à sa voisine de chambre avant d’aller se faire approuver par James à l’aide d’un « Alors ? » Ce à quoi il a répondu un compliment valant plus que de l’or. Elle a hoché le visage, et sans se douter du reste, elle est partie à l’orée d’être confiante vers son prochain naufrage. Un trajet de uber plus tard, elle s’est retrouvée sur la jetée. A l’arrivée, elle a d’abord laissé ses prunelles voguer sur l’immensité. Particulièrement émerveillée malgré la croisière de l'été dernier. S'en voulant derechef d'y penser, d'encore la rêver. Et elle s'est laissée surprendre au moment de donner son invitation, étonnée qu’on la questionne au niveau de ses relations. « Célibataire. » elle a répondu, écorchée, et c’est d’un bracelet fuchsia qu’elle a été affublée. En se demandant si c’est vraiment une coutume ce type d’amusement, de précision comme si c’était important.

Chemin se faisant, à présent et depuis quelques minutes déjà, elle tente du mieux qu’elle le peut de se fondre dans la masse, de ne pas être gênée, de s’adapter et même de converser. Elle rigole, quand il le faut, perdue au milieu d’un groupe de personnes qu’elle ne connait, et aussi égarée dans son esprit qui ne demande qu’à rentrer. « C’est la première fois qu’on te voit. » Les doigts crispés sur le pied de son verre, elle se perd dans ces faux semblants, dans son manque de manières. « Et tu t’appelles comment, déjà ? » Elle met une seconde à réaliser que c’est à elle que la question est adressée, « Haiwee. » elle prononce, en articulant à l’excès, le ton accentué. Elle a beau lui sourire, elle ne peut s’empêcher de songer qu’elle se devrait de partir avant que le bateau ne se décide à larguer les amarres et se retrouver potentiellement bloquée sans avoir de quoi s’échapper. Mais comme elle a promis, elle lisse sa tenue, de deux doigts replace ses cheveux, et s’intime de tenir au moins une partie de la nuit.

Les secondes s’étiolent à la mesure de la conversation, qu'elle n'écoute que d'une oreille discrète, songeant de plus en plus au fait de ne pas tenir sa promesse. En un soupir pourtant, elle fait de son mieux pour se fondre dedans, pour articuler deux trois mots et ne pas faire tache au milieu de ces gens. Si bien qu’une fois toutes les banalités échangées, elle constate que la discussion prend un nouveau tournant, ravivant de tous l’intérêt. En buvant une gorgée de sa flute, elle écoute encore, quand l’une des filles, portant la même couleur de bracelet, annonce ses nocturnes projets, allumeuse à souhait. « Ce qui est sûr c’est que moi, je ne compte pas rentrer. » Alors oui, même si elle a perdu le fil des évènement, qu'elle ne possède pas de cette soirée les tenants et les aboutissants, elle n’est plus autant naïve qu’avant. Le sous-entendu, elle le comprend. « Et profiter de tout ce que peut offrir cette soirée. » Et même si elle ne se permet pas de juger les appétences et préférences, c’est par la négative, que l’amérindienne secoue la tête. « Je passe mon tour… » mais aux regards qu’elle reçoit, elle s’entend, s'étonne à ajouter un, « pour l’instant. » que le petit groupe accueille en riant. « Je ne dirais pas ça, si j’étais toi. » Car pour l’instant, c’est maintenant. Les mots elle ne les comprend pas, cela dit, elle remarque son léger mouvement doigt. Désignant ce qu’il se passe dans son dos, échine sur laquelle se dépose une paume inconnue, un geste trop amical, pour une Haiwee convaincue que les manies tactiles ne sont pas des actes banals.

Alors sur le côté, armée d’une expression enjouée et polie, elle se décale, accueillant ce nouvel arrivant. Ses yeux balaient son visage, ses vêtements, l’arc de ses lèvres qui se veut séduisant, dans le fond, elle est persuadée qu’il possède ce qu’il faut pour être charmant. Mais il est à l’opposé de celui qu’elle ne peut s’empêcher de désirer, et comme l’Adams se fraie une place dans ses pensées, elle ne voit plus celui qui vient de l’accoster, son esprit brouillant les mots qu’il peut souffler, par le mirage de Sheng, aliénée. « … et j’ai vu que toi et la couleur de ton bracelet dans l’assemblée. » Un battement de cils, elle opine troquant ses songes amoureux contre ceux de l’amitié. Songer à Eloïse qui lui dirait à coup sûr de profiter, même s’il use de drague démodée. Qu’elle se doit de vivre, de ne pas déprimer. Qu’elle est jeune et jolie, que rien ne peut l’arrêter. Qu’elle a le droit de minauder, comme elle s’y essaie, puisqu’elle est libérée. « Tu ne veux pas venir boire un verre avec nous, ma jolie ? » Hésitante une seconde de prime abord, puis se décider, sans se douter qu’il ne désire que présenter son trophée à ses amis amusés. « Haiwee. Et pourquoi pas. » Rapidement, il l’entraîne en la faisant passer en premier, cette main dans le creux de ses reins, une nouvelle fois logée sous prétexte de la guider, elle doit se mordre la langue pour ne pas se faire violente afin de calmer cette proximité. Mais elle n’en fait rien, parce qu’elle talonne, les prunelles braquées sur ses pieds au moment de grimper les escaliers, dans l’espoir de ne pas perdre l’équilibre et tomber. Il se glisse à sa droite, une fois au sommet, il la désigne, dévore, d’un regard qui ne peut que la gêner, déclarant directement à l’intention des autres participants, « Les gars, laissez-moi vous présenter… » Une fille qui ne sait pas ce qu’elle fait, biche égarée.  

Il laisse traîner un suspense non nécessaire qui tend à la faire rougir, Haiwee, elle n’importe pas, de cette manière, en société, on ne l’a jamais présentée. Si peu coutumière des soirées selectes et autres mondanités réservées à la jeunesse dorée. Son regard reste fixé d’ailleurs, sur celui qui l’a invitée, braqué, en une tentative de comprendre le jeu auquel il désire jouer. L’amérindienne ne prend pas encore la peine d’observer ceux auxquels il souhaite tant l’exposer. « Haiwee. » Ses paupières s’abaissent avec légèreté, trahissant le trouble engendré dans ses façons de réactionner. Incapable de nier les perturbations qui résultent de cette possessivité marquée. Néanmoins, elle ne peut contenir un sourire sincère à son intention faute de sa manière de le prononcer, son prénom. Comme si elle était le plus beau des joyaux de cette soirée.

Malgré cela parce qu’elle aspire à savoir se comporter dans cet univers si éloigné du sien, elle relève finalement les prunelles vers le groupe masculin affichant tous un facies heureux ou taquin. Et son habitude aux brimades, l’espace d’une seconde, revient, se voyant prise au piège par un banc de requins aux sourires malins. Elle n’a, cependant, pas le temps de les décompter un à un, parce qu’ils débutent une valse d’identité, donnant pour ainsi dire le tournis à la Haiwee. « Enchanté. Kévin. » Chacun leur tour, ils l’approchent donc, et elle fait preuve de politesse, armée de toute sa délicatesse. Serre la main qui lui est tendue, « Isaac » effectue une révérence minime de la tête, « Andrew Farley, des entreprises… » derechef elle fronce les sourcils, sans entendre pourquoi, le nom de ses entreprises doit être accolé à son baptême, « Ford. » elle s’en pince les lèvres pour ne pas lui préciser qu’elle ignore absolument ce que c’est, elle s’en empêche surtout de rigoler. C’est soudain, combien ça lui paraît ridicule à l’excès. Mais l’envie de rire trépasse, pour une émotion plus vivace. « Et le sauvage là qui ne sait pas boire sans en mettre à coté... » Son attention ranimée vers la dernière silhouette qu’on lui dévoile, elle accuse le choc de ne pas l’avoir remarqué, comme un coup sur sa poitrine, sombre clairement faute de sa stupidité. Le sauvage… « Sheng. C'est Sheng. Ravi de te rencontrer. » Oui, la volonté de plaisanter est totalement avortée. Elle en perd son sourire tout comme sa capacité à respirer. Sur le champ, pétrifiée. Surprise par le froid qui vient la souiller, forçant ses frissons incontrôlés. Elle égare sa confiance quant au cuir qu’elle peut porter. Refroidie et à la fois brûlée par le regard qu’il lui a lancé. De la rencontrer. Elle peine à l’assimiler. C’est simple, elle n’en revient pas qu’il puisse oser. Feindre l’indifférence, l’inexistence. Quand dans le moindre de ses battements de paupières, il y a les flashs de toutes leurs conversations, surtout la dernière. Des images de ce couloir. De son cœur éclaté en morceaux épars. De ce je t’aime balancé en épitaphe de leur histoire.

Alors pour sauvegarder ces apparences qu’il vénère tant, elle déglutit après une inspiration, à la recherche de sa contenance quand elle tente de maitriser les oscillations de son ton. « Sheng, » elle répète en souriant faussement, « pareillement. » Faute de tous les garçons ici présents, c’est bel et bien à lui qu’elle s’adresse, nul doute à avoir sur ce point, forcément. Mentalement elle s’impose le fait que ce sera les deux seuls et uniques mots que de sa part, ce soir, il obtiendra. D’être forte, la colombe se doit. Et parce qu’elle a délaissé sa flute quand elle a accepté de suivre l’un de ses amis, elle s’en revient à celui qui l’a conviée à venir à leurs côtés, car là, tout de suite, elle en aurait besoin d’un, « Et ce verre ? » pour pallier cette arrivée en enfer. Chose qu’il n’avait pas fait depuis leur arrivée, il décroche, enfin, la paume de sa hanche afin d’accéder à ses volontés, réalisant une pirouette durant laquelle la vraie sauvage prend la décision de s’aventurer à leur demander. Ses prunelles allant malgré elle se poser sur le poignet de l’étudiant pour en constater la couleur bleutée. Comme si ça pouvait la surprendre, elle qui a passé plus d’une année à l’affectionner sans réciprocité. « Vous parliez de… ? » désireuse de se mêler, de les relancer, de ne pas s’éprouver comme l’animation de leur début de soirée.   

Malgré la musique ainsi que la bonne humeur ambiante, elle a cette sensation de leur avoir posé une délicate question, parce que chacun semble avoir perdu leur verve, échangeant de regards silencieux. N’empêchant pas la Haiwee troublée de conserver ses airs facticement charmants et curieux. Jusqu’à ce que celui désigné comme un homme primitif ne sachant pas boire reprenne la parole, sèchement… « De travail. » Si bien que ses iris se reposent sur lui, naturellement.

Elle peine à le croire, en arque les sourcils, les mâchoires résolument fermées pour s’en tenir à ses premières pensées. Puisqu’elle est une inconnue, elle n’a aucune raison de lui parler. « Sale journée. » Il poursuit sur sa lancée, et elle approuve, d’un simple mouvement de tête léger. Ca fait quinze jours qu’elles sont sales les siennes, de journées, alors en ce qui concerne la compassion, son tour, il peut le passer. Dans ses veines, elle éprouve la force de sa colère, contre lui, envers elle, cette partie minime qui apprécie de le trouver ici. « Et vous venez souvent à ce genre de soirées ? » Comme s’il ne le savait pas, elle trouve que c’est moche de se comporter de cette manière-là. Plus encore que le vouvoiement, chercher à lui remémorer que leurs univers sont différents. Qu’elle n’a pas sa place dans ce monde de faux semblants. Bien qu’elle ait plutôt l’impression de ne pas s’en sortir si mal pour le moment. Au contraire même, à peine quelques minutes qu’elle est arrivée et elle se retrouve déjà en compagnie d’un groupe d’héritiers. Avec l’envie de lui dire qu’elle aussi, elle sait briller. L’amérindienne et sa crédulité indomptée… « Je suis certain de vous avoir déjà vue quelque part. » Sa langue, elle s’aventure sur son inférieure avant qu’elle ne morde cette dernière. Elle n’apprécie pas cette manière qu’il a de la pointer, de braquer tous les projecteurs sur ses traits, sur les lacunes qu’elle a pu accumuler. Et se moquer d’elle dans la foulée. Même si son regard se fait intrusif pour la jauger, de haut en bas, détaillée. « Publicité peut-être, » elle en exulte un rire, enclin à la nervosité, elle se rend à l’évidence, des deux mots envisagés, il ne saura pas se satisfaire. « Dans les locaux de la WW. » d’un sourire les mots sont accompagnés, elle se force à être mielleuse, pour dissimuler aux autres cette rancune, ses sentiments bafoués.

Cette confiance dont elle vient de faire preuve, elle en est elle-même étonnée, car jamais elle ne se serait pensée capable d’un tel aplomb. Surtout dans le but de répondre à l’une de ses accusations. Elle s’apprête à continuer à parler, animée par une véhémence jamais ressentie auparavant, quand son accompagnant officiel revient se placer à ses côtés, glisse encore une fois ses phalanges contre elle, provoquant ce coup-ci, elle en a une nausée atrocement réelle. « Ce que femme veut… » Elle décline sur lui derechef, les yeux. Alors ses doigts vont s’accrocher au cocktail qu’il lui tend sans aller jusqu’à le porter à sa bouche, cependant. Elle est peut-être naïve sur bien des points, mais faute d’une soirée où elle avait fini par vomir sur le canapé de Dutch, il y a des leçons qu’elle ne peut oublier. Même si elle doute de se faire empoisonner par l’un de ses copains. Enfin... si elle le connaît, lui et ses valeurs, elle ne peut nier, qu’elle n'a jamais vu la jeunesse dorée agir durant ce genre de nuit, et doute de tout a son sujet depuis l'affichage avec Wendy. Par instinct de protection, de survie, des autres, elle se méfie. « Pour vous répondre Sheng, » deux mots Haiwee, c'est ce que tu avais annoncé, garder le contrôle, ne pas plonger, « j’ai été invitée, » comme toutes les personnes ici présentes, pas vrai ? « et c’est ma première fois. » une dont elle te retire presque le droit.     

Plus elle se permet de le contempler, plus elle arrive à lire sur son visage combien il semble contrarié. Il se perd, d’ailleurs, dans une réflexion qu’elle n’explique pas, un silence qui lui glace le sang, lui obstrue la voix. Cette témérité avec laquelle elle est parvenue à lui répondre, elle est en train de lui échapper. Car jamais elle n’aurait pensé que sa seule présence pourrait autant l’agacer. C’est si douloureux de le distinguer après tant de jours passés à ses côtés. A se croire, à lui, intimement connectée. « Et à qui.. doit-on le plaisir de votre présence… » Plus de doute, elle ne pourra pas se murer dans le silence. Et comme il utilise toujours ce même ton, ça sème d’autant plus le trouble dans sa raison. C’est donc à ce point, qu’elle le dérange ?
Et si la première fois elle ne l’avait pas remarqué, ce coup-ci, le coup d’épaule elle ne peut le manquer. Comme quoi, elle n’est pas la seule à dénoter son animosité. Son comportement qui détonne dans la frivolité de cette soirée. « Quoi ? J’aimerais le remercier. » Elle crache un soupir face à sa façon de se justifier, si bien que sur le verre, ses phalanges renforcent leur pression, intensément crispées.

Une fois encore, il se sert de sa flute évidée pour désigner l’amérindienne, de haut en bas, elle cille, bat des paupières plusieurs fois en paraphe de ses mauvaises manières. « Je garde très peu de souvenirs, des visages que je croise là-bas. » Elle en déglutit, et jure que sa salive est devenue aigre. Elle sent le contrôle lui échapper, qu’elle se trouve à l’orée de déboulonner, de lui balancer bien trop de vérités, le mot menteur positionné en premier, quand son acolyte reprend, en plaisantant faussement. « Et pourtant question belles plantes, il s’y connait pour passer tous ses étés dans la jungle. » Ca, c’est une chose qu’elle sait. Que ce soit au sens propre ou au figuré. Elle se fond en un sourire d’apparence, quasiment désolée, pour elle-même et l’homme qui tente de sauver la suite de cette discussion embrouillée. « Je ne dois pas être mémorable dans ce cas. » A cette phrase c’est son cavalier qui se réveille, pour lui sortir des mots qu’elle aurait pu trouver dans toutes les comédies romantiques avec lesquelles elle apprécie parfois combler ses soirées. « Mais dans la foule, ce soir, moi, je n’ai vu que toi. » Renforçant son emprise, cette proximité, son empreinte osant un effleurement en contre-bas, plus appuyé. Il augmente sa nausée, jamais un autre que Sheng ne l’a touchée. Maintenant elle sait, qu’elle n’est pas prête à le supporter.

Alors elle choisit d’arquer ses lèvres, elle joue les mièvres. Croisant une fraction de seconde le regard du blond venu la trouver, avant de rebasculer sur l’homme occupant vraiment ses songes, qu’ils soient endormis ou réveillés, « Je l’ai reçue, » elle hausse les épaules de toute son honnêteté, « l’invitation, je l’ai reçue chez moi, » elle amène son verre à ses lèvres, à peine humidifiées, car elle avorte son désir de gorgée afin de préciser, « anonymement, vous n’avez donc personne à remercier. » Désolée, sauf qu’à défaut de boire, elle tourne sa tête vers la figure de l’homme qu’à présent, elle s’esquinte à supporter. Si elle joue de prime abord d’une crédulité qui n’est plus à démontrer, pour littéralement emmerder l’étudiant qui l’a abimée. Elle approche son visage de l’homme inconnu, allant même jusqu’à poser sur sa joue en une caresse, sa main, sous les regards attentifs de ses copains. Un véritable spectacle dont ils envisagent tous la fin. Elle se fait complice, galvanisée par cette future intimité. C’est l’amorce d’un contact brûlant qu’elle invente, et peut-être que ça ne se fait pas, mais parce qu’elle reste une sauvage, égale à elle-même farouche et indomptée, elle prononce sans baisser le niveau de sa voix. « Enlève tes doigts. » Car Haiwee ne t’appartient pas.