« La longue marche de la honte… C'est digne de Game of Thrones ça ! »

Avaient-ils atteint le Nirvana de cet hôtel de malheur ? Étaient-ils morts en chemin ? Par rapport au standing atroce de ce lieu, s'ils n'étaient plus de ce monde, ceci était ce qu'il y avait de plus proche du Paradis. Un lit de princesse sur une estrade similaire à celle de son appartement trônait au milieu de la pièce. Et il y avait même un jacuzzi !

Comme il était à prévoir depuis qu'elle lui avait annoncé que sa chemise ne serait pas sauve à la fin de la soirée,  le tissu blanc hurla et se découpa presque en deux, laissant un William déséquilibré et une Shane contenant à grande peine son hilarité devant le comique de la situation. A ce rythme, il ne resterait plus beaucoup de tissu à la fin de la soirée pour la recouvrir ! Autant se jeter dans le jacuzzi, au moins elle serait dénudée pour quelque-chose !

Cette pensée qu'elle avait eue pour rire de prime abord lui intimait de la suivre, récompense douce et bien méritée pour leurs mésaventures de la soirée. Il était à estimer que peu de personnes avaient pu tomber sur ce joyau en ce lieu de terreur et de débauche. Peut-être étaient-ils même les seuls à l'avoir découvert. Cette pensée était loin de lui déplaire et la sensation de l'eau chaude lui faisait terriblement envie… Avaient-ils gagné le gros lot en découvrant cet endroit ? Nul ne le savait mais elle avait bien envie d'en profiter, alcoolisée ou non.

« C’est rien, ta chemise en a pâti bien plus que moi ! ». Son regard quitta William, regarda le seau métallique puis se posa à nouveau sur le bain à remous. « Je ne sais pas toi mais moi je meurs d'envie de tester ce jacuzzi ! »

Joignant le geste à la parole, la brunette tourna le dos à William et se retrouva rapidement en sous-vêtements. Ses dessous étaient noirs et élégants et auraient aisément pu passer pour un maillot de bain. Attrapant la bouteille au passage, la jeune femme ne s'attarda pas et plongea rapidement dans le bain à remous afin de se délecter de la sensation de l'eau sur sa peau meurtrie par ses mésaventures. C'était agréable, il fallait bien l'avouer…

« L'eau est bonne, tu devrais essayer… » lança-t-elle à son complice en tapotant la surface du bain bouillonnant...

« J’aurais adoré voir ça ! »

Elle imaginait le fonctionnaire remettre ce qui restait de sa chemise pour en demander une autre en tentant de se justifier sur les causes de ce délabrement. L’alcool aidant, elle avait perdu une grande partie de sa pudeur (oh pas jusqu’à se mettre totalement nue bien sûr), ses sous-vêtements ayant une grande similarité avec un bikini classique. Heureusement qu’elle était fan des soutiens gorges à coque et qu’elle avait évité de mettre un tanga sous sa jupe pour le troquer par un shorty élégant. La dentelle qui les habillait était placée de telle façon à ne rien dévoiler, ce qui était parfait vu les circonstances. Elle réfléchissait déjà ce qu’elle allait bien pouvoir mettre en sortant. Peut-être que son corsage serait à peu près sec ? Elle en doutait fortement. Alors peut-être que sa jupe pourrait peut-être se transformer en robe ? Là encore rien n’était moins sûr. Elle improviserait le moment venu… De toute façon, il ne lui restait pas beaucoup de vêtements pour dissimuler son corps alors autant se glisser dans l’eau chaude. Une soirée et déjà trois fois dans l’eau, à croire qu’elle se transformait en poisson !

William, quant à lui, n’était pas du tout dans le même état d’esprit que la jeune fille. Et probablement pas au même niveau de désinhibition que provoquait son alcoolémie. En cette soirée, l’instinct de Shane la contrôlait plus que son cerveau. Et il réussit à la faire un peu perdre ses moyens l’espace d’un instant en évoquant un monstre sous-marin. Elle essaya de faire bonne figure en essayant de dissimuler le fait qu’il l’avait décontenancée. L’effet fut légèrement différent de celui escompté lorsqu’elle lui répondit :

« Des tentacules ne seraient probablement pas la pire chose qui me serait arrivée ce soir mais effectivement je n’ai pas envie que cette soirée se transforme en hentai ! »

Shane secoua la tête pour effacer cette vision. Non, cela n’avait aucune espèce de probabilité d’arriver dans la réalité. Elle profitait du jacuzzi tandis que son garde du corps était assis au-dessus d’elle. Elle but la bouteille qu’il avait laissée à son attention près d’elle en répondant à son cheers de la même manière, levant la mini-bouteille avant de la vider. Il évoqua alors les amis qu’elle était supposée rejoindre et dont elle avait totalement oublié l’existence au vu des aventures qu’elle avait vécue en cette soirée. Elle se sentait en sécurité auprès de William et n’était pas pressée de lui fausser compagnie pour le moment… Elle éluda un peu d’une vois plus basse, les bras tenants les rebords du jacuzzi pour pouvoir réagir promptement en cas d’évènement inattendu :

« On vient de traverser tout l’hôtel et on ne les a pas croisés, je crois que j’ai un peu abandonné l’idée de tomber sur eux… Tu pensais à quoi ? »

« En rien, en rien ! » répondit-elle en riant. Il ne s’agissait pas de la référence la plus valorisante qu’elle aurait pu donner… En même temps c’était de sa faute à parler de tentacules aussi ! Il sortait des perches mais faisait mine de ne pas comprendre lorsqu’elle les saisissait. Et sa réponse suivante restait dans la même direction… Quelles étaient donc ses intentions ? Faisait-il exprès, était-ce un jeu auquel il s’adonnait ? Ne pas comprendre les règles qui régissaient leur étrange relation était quelque-peu déstabilisant pour la jeune femme. Cette soirée emprise d’adrénaline et de signaux contradictoires aurait été des plus perturbantes pour n’importe qui ? D’ailleurs elle n’arrivait pas à déchiffrer ce qu’elle ressentait. Elle n’avait qu’à mettre tout ça sous la faute de l’alcool et surtout des mélanges de spiritueux. Oui c’était une bonne raison, socialement acceptable qui plus est. Elle n’avait qu’à profiter de la quiétude du bain à remous, ressentir l’effet des vaguelettes sur sa peau dénudée. Oui elle était bien là, probablement pour la première fois de la soirée. Pourtant, elle aurait pu se dire qu’elle aurait dû se méfier de l’eau qui dort, que cet endroit n’était pas sûr… Mais son allure de récompense était si alléchante qu’elle n’avait pas envie de bouger.

Le grand blond s’éloigna un peu plus d’elle pour y allumer la radio. La qualité était loin d’être excellente mais la musique qui s’en échappa était tout de même agréable. Elle aimait beaucoup cette chanson et se prit à fermer les yeux l’espace d’un instant pour savourer ce moment. L’endroit où il voulait finir sa soirée… Oui, il avait raison, cet endroit était véritablement parfait pour y terminer leur soirée si particulière. Et le mousseux qu’il ramena monta le niveau d’encore un cran. Elle était décidément bien ici, dans ce lieu, dans ce moment qui n’appartenait qu’à eux. La lumière tamisée mettait son compagnon en valeur, tout comme son marcel qui laissait apercevoir des muscles qui semblaient bien dessinés mais sans en faire trop. En tout cas c’est ce que disait ses bras et leurs muscles tendus autour de la bouteille. Alors qu’il se mit à tenter d’extraire le bouchon, son acolyte prit à nouveau la parole, mentionnant le ‘pop’ annonciateur de leur nouveau breuvage. « Alors dans ce cas, elle est intégralement pour moi ? » répliqua-t-elle avec un humour non dissimulé. Devait-elle quitter le jacuzzi pour se joindre à lui ou rester encore un peu ? Ne sachant pas qu’elle était la meilleure option, les deux risquant de mettre son compagnon mal à l’aise, elle resta camouflée dans l’eau…

La bouteille s'ouvrit, provoquant un geyser qui laissa un ruisseau sur le sol. Le bouchon avait disparu dans les méandres de la chambre tandis que son acolyte ramena rapidement le goulot à sa bouche pour ne pas en gâcher une goutte. C'était leur dernière bouteille, la dernière chambre, le dernier moment où ils seraient en train de profiter sans être tels qu'ils étaient dans la vie de tous les jours. Et c'était le moment ou jamais d'en profiter. Un homme, une femme, une bouteille, une soirée. Sur le coup rien d'autre n'importait à ses yeux. Elle se sentait bien.

Le grand blond semblait quelque-peu s'être désinhibé. Était-ce le mélange d'alcool qui agissait enfin sur lui ? Ou l'insouciance qui prenait le dessus après leurs multiples mésaventures ? En tout cas l'ouverture du champagne le mit clairement en joie et la demi-bouteille qu'il s'enfila pratiquement d'une traite l'incita à être plus taquin. Le sourire amusé qu'il lui adressa se réverbéra dans ses yeux, le faisait retomber au stade de jeune adulte fêtard et malicieux. Un air qui lui allait vraiment bien, plus avenant, plus joyeux. Comme si les tracas qu'il portait sur ses épaules le quittèrent pour un moment...

« Que je suis telle une demoiselle en détresse ? Que j'ai soif ? Que je suis prête à jouer pour l'avoir ? »

Elle lui adressa un sourire taquin en fixant son regard dans le sien. Sortant à moitié du jacuzzi, le reflet de la faible luminosité faisait ressortir la clarté sur sa peau telle une sirène ou bien Vénus sortie des eaux. Elle était juste belle, mais ça elle avait tendance à l'ignorer et à l'enfouir sous une façade. L'eau ruisselait sur elle tandis qu'elle se rapprochait de William, n’ayant pas quitté le bain à remous, leurs regards se croisant toujours.

« Et si nous négocions ? Que voudrais-tu que je fasse ? Dis-moi tout et je verrais si c'est réalisable… »

Elle se la jouait tentatrice alors qu'elle n'était pas sûre de ce qu'elle faisait. Elle jouait le jeu sans connaître ses propres limites, l'instinct ayant pris possession de son être, de sa voix… Elle n'était pas pleinement elle-même et pourtant si, seulement une Shane plus primale qui ne se souciait pas des conséquences, qui vivait comme si demain n'existait pas. Et elle adorait ça !

Il adorait les jeux… Et en aucune manière il n’avait précisé de quel type d’activité ludique il s’agissait, ce qui signifiait qu’ils étaient peut-être sur la même longueur d’onde au final. La jeune femme ne savait pas si elle avait pensé à cette possibilité lorsqu’elle avait lancé l’idée, mais ce qui était sûr c’est qu’elle avait jeté la canne et que lui avait mordu à l’hameçon.  Peu importait qui avait eu l’idée de départ, dans tous les cas les règles avaient changées et le destin de leur relation aussi. Aucun des deux ne pensait réellement au lendemain, ou plutôt peut-être avaient-ils tendance à mettre dans un coin de leur esprit cette petite voix qui essayait de les dissuader de poursuivre leur petit jeu. Le chat, la souris, leurs rôles s’inversaient sans cesse et se mêlaient sans qu’aucun des deux n’y trouve plus grand-chose à redire. C’était une attraction, une attirance qui les liait, consciemment ou non. Et peut-être que leur état leur ferait probablement oublier toute la soirée ou bien seulement une partie. Cela, ils ne le découvriraient qu’à leur éveil, probablement accompagné d’une bonne migraine. Pour l’heure, il était temps de profiter du temps présent et de cette exquise petite voix qui l’incitait à poursuivre son badinage pas si innocent que ça…

« Un fin négociateur… Il ne me semble pas avoir encore avoir particulièrement vu cette parcelle de toi ». Son regard intensément fixé dans le sien envoyait des braises au sien. C’est alors qu’il enchaîna sur la monnaie d’échange : une pièce de vêtement. Un lourd prix à payer lorsque l’on voyait ce qu’il lui restait désormais… Elle était déjà pratiquement nue dans la baignoire, les seules parcelles de sa peau ayant échappé au regard de son compagnon étant celles dissimulées par le peu d’étoffe d’ébène qu’il lui restait et par les bulles qui éclataient autour d’elle, floutant sa silhouette… Lui portait encore son marcel et son pantalon, foncièrement même s’il avait déjà perdu quelques couches cela n’avait rien à voir avec sa propre situation. Les muscles saillants avaient beau transparaître au travers du tissu blanc, cela n’était pas suffisant pour elle. Si elle enlevait une couche supplémentaire avant lui elle aurait l’impression de ne plus contrôler la partie. Mais à ce stade, la contrôlait-elle encore ? N’était-ce pas plutôt la situation qui la contrôlait ? Elle ne connaissait pas particulièrement cet homme, mais jamais elle n’avait acquis une telle intimité aussi rapidement avec quelqu’un. L’hôtel maléfique les avait envoûtés et si tous deux tenaient parole, ce qu’il se passait au Perkins resterait au Perkins. La résistance qu’ils avaient eue jusqu’à présent était de plus en plus inhibée par le délicieux poison qui sillonnait désormais leurs veines.

« Hmm, ces règles me semblent quelques peu… déséquilibrées » laissa-t-elle échapper de ses lèvres en faisant trainer délibérément l’espace entre le dernier mot. « Disons que cette demi-bouteille ne vaut pas suffisamment… ». Faisant lentement glisser une de ses bretelles le long de son épaule, elle ajouta : « Pourquoi n’y ajouterais-tu pas… ton débardeur ? ». Une requête simple, facile pour lui et qui déterminerait probablement la suite de leur soirée dans une suite de luxe qu’aucun des deux n’aurait pu obtenir dans une autre situation, aux possibilités des plus alléchantes…