Mon cœur battait à cent à l’heure tandis que mes yeux sombres étaient rivés sur l’écran de mon téléphone. Je venais de passer la dernière demi-heure à composer un message qui venait tout juste de s’envoyer et une partie de moi continuait à garder espoir. Mais… C’était ridicule et je le savais. La notification arrivait sur mon écran et je retenais mon souffle un instant comme pour me donner le courage de lire ces trois foutus mots :  *message non transmis.* F*ck. Je ne parvenais pas à retenir la rage qui faisait soudainement flot en moi. Mon téléphone valsa dans la pièce et je n’en avais strictement rien à faire. C’était beaucoup trop à supporter. Je ne pouvais plus tenir. Je n’allais jamais pouvoir tenir. Il fallait retrouver Lukas au plus vite. Mais comment putain ? La police était au courant de sa disparition. Un avis de recherche était paru sur les réseaux sociaux. Naëlle et moi ainsi que d’autres personnes avions fait le tour de Boston cette après-midi pour marcher et demander aux gens s’ils avaient vu quelque chose. Rien n’y faisait. Mio Amore demeurait introuvable et mes messages continuaient de rester non transmis. Un sanglot glissait entre mes lèvres sans que je ne sache le retenir et Côme débarquait dans la chambre m’apportant un verre d’eau. Tendant la main, je l’attrapais en silence avant de glisser les médicaments posés sur ma table de nuit dans ma bouche sans hésitation. Le liquide froid finissait par glisser le long de ma gorge et je fermais les yeux me sentant tellement pitoyable. La disparition de Lukas m’avait obligée à reprendre mon traitement à la lettre et j’en venais même à le complémenter avec des somnifères. D’ailleurs, tellement épuisé de cette journée infernale, de cette rage qui cognait et de cette peur qui me bouffait, j’attrapais bien vite les trois somnifères pour les glisser dans ma bouche. Finissant mon verre d’eau, je me glissais sous les couvertures me blottissant dans les bras de Côme. J’espérais parvenir à dormir quelques heures sans faire le moindre cauchemar. Je n’en pouvais plus de ces réveils en sursaut complètement malade. Fermant les yeux, je régulais lentement ma respiration priant pour rejoindre un rêve ou le néant. Mais, au fond de moi, je savais déjà que je glissais dans le cauchemar qui allait me dévorer.

Mon téléphone vibrait sur ma table de nuit me tirant du sommeil reposant au sein duquel je me trouvais. Sans prendre la peine d’ouvrir un œil tant la fatigue me submergeait, je décrochais l’appareil à l’aveugle le portant rapidement à mon oreille tout en marmonnant une formule de salutation. Était-ce Katalia qui me contactait parce qu’elle avait besoin de ma présence encore une fois ? Était-ce Summer qui avait une quelconque urgence ? Non. Ce n’était pas elles. La voix qui me répondait à l’autre bout du fil me poussa à me redresser soudainement sur mon lit. En quelques secondes à peine, j’étais complètement réveillé et en plein contrôle de toutes mes capacités. Je répondais qu’effectivement c’était Neal Hood de l’autre côté de l’appareil et la voix reprenait bien vite. C’était un agent de la police à l’autre bout du fil. Un agent qui me donnait rendez-vous à une adresse précise me demandant de m’y présenter le plus rapidement possible. Je tentais d’obtenir des réponses. Je tentais de comprendre le pourquoi de cette demande. Est-ce qu’on avait retrouvé Lukas ? Est-ce qu’il allait bien ? Est-ce qu’il y avait un problème ? Est-ce qu’il était en vie ? Toutes mes interrogations demeuraient sans réponse. Il ne pouvait rien me dire au téléphone. Il ne voulait rien me dire au téléphone. Et, malgré moi, je me mettais déjà à imaginer le pire. Je me mettais déjà à imaginer le corps sans vie de ce garçon dont j’étais si follement amoureux. Un sanglot me traversait et je soufflais que j’arrivais rapidement. Attrapant les premières fringues qui me tombaient sous la main, je m’habillais sans faire attention à ma tenue. Je m’en foutais d’avoir l’air mignon ou fashion aujourd’hui. Ça ne comptait absolument pas. Il fallait que j’aille à cette adresse le plus vite possible. La voix du policier se rejouait dans ma tête et quelque chose à l’intérieur de moi me soufflait que je la connaissais déjà cette voix. Ce n’était pas un étranger. Putain, comment cela pouvait-il être possible ? Je n’étais pas proche des forces de l’ordre. Sourcils froncés, je quittais mon appartement en trombe sautant presque sur ma moto en arrivant dans la rue. Casque enfilé, je lançais le moteur et je filais à vive allure dans les rues de Boston. Quarante-cinq minutes… C’était le temps que m’indiquait le GPS pour me rendre à l’endroit indiqué. Quarante-cinq minutes… C’était un temps atrocement long lorsque l’angoisse pulsait vivement dans votre ventre. C’était un temps beaucoup trop insupportable lorsque l’incertitude planait au sein de votre esprit. Quarante-cinq minutes… Je roulais tellement vite que je mis beaucoup moins longtemps que prévu pour arriver à destination. Stoppant ma moto devant le bâtiment, je fronçais encore plus les sourcils. Il n’y avait pas la moindre voiture de police en vue. Il n’y avait pas la moindre ambulance sur place. Est-ce que je m’étais trompé d’adresse ? Mes prunelles se posaient de nouveau sur mon téléphone et le GPS m’indiquait pourtant que je me trouvais au bon endroit. Cet entrepôt était le bon endroit. Glissant le mobile dans ma poche, je fouillais dans mon sac à dos pour en sortir mon flingue que je glissais dans la poche de ma veste. Tout en le serrant dans ma main planquée dans ma poche, je m’avançais. Quelqu’un m’avait appelé pour me donner rendez-vous ici. Flic ou non, je me devais d’aller voir. Je me devais de jeter un œil et de voir si mon petit-ami était dans ces lieux. Je pouvais peut-être le sauver. Pénétrant dans l’entrepôt, mes prunelles se promenaient à droite et à gauche et je soufflais avec hésitation « Il y a quelqu’un… ? » La réponse tombait rapidement avec un raclement de gorge derrière moi qui attirait soudainement mon attention. Me tournant vers le bruit, je ne dégainais pas mon flingue au cas où ce soit vraiment un flic ici. Mais… Non… Ce n’était pas un flic. Rob se tenait là aux côtés de Lukas. Le Rob de mon passé. Le Rob de la Mafia. Le Rob, fils d’Antonio. Un frisson venait parcourir mon échine et je reculais d’un pas sous le choc. Bien vite, mes prunelles venaient se poser sur l’homme que j’aimais et son regard de haine me glaçait le sang. Il semblait s’être rangé d’un côté différent. Il semblait si étranger. C’était comme si la nouvelle de la grossesse de Summer avait fini par tout faire basculer. La goutte d’eau qui venait faire déborder le vase et qui changeait la totalité de la situation. Le choc devait se peindre sur mon visage puisque Rob prenait la parole « Bonjour Neal… Ça fait un bail n’est-ce pas ? Bon comme tu vois ton précieux Lukas est bien en vie. Mais laisse-moi t’expliquer les choses. Ton ‘petit-ami’ en a eu marre de toi. Toi et tes crises. Toi et tes conneries. Toi et ton anormalité. Je te surveillais dans l’ombre. Je vous surveillais dans l’ombre et j’ai fini par m’approcher de Lukas qui m’a avoué vouloir disparaître. Il n’en peut plus de toi et il souhaite recommencer une vie sans toutes ces emmerdes incessantes. C’était bien parti pour. Cependant, tu t’obstines beaucoup trop à le chercher et tu risques de nous foutre dans la merde. Alors, voilà. Il est là face à toi. Il va bien. Tu dois juste te faire à l’idée qu’il ne veut plus de toi. Je vais vous laisser quelques minutes pour discuter. » Rob se tournait vers Lukas lui murmurant quelque chose. Est-ce qu’il était en train de lui dire qu’il l’attendait ? Attendez… Est-ce que Rob venait de poser ses lèvres sur celles de mon copain ? Non… Non, j’avais mal vu. Cela ne pouvait pas être possible. En revanche, je voyais bien le flingue que Rob glissait dans la poche de Mio Amore. Mais, Lukas ne pourrait pas s’en servir n’est-ce pas ? Ce n’était pas son genre d’utiliser des armes à feu. Je n’eus pas le temps de me poser plus de questions puisque Rob passait à côté de moi avec un sourire sadique tout en marmonnant un adieu. Lorsque la porte claqua violemment derrière lui, mes prunelles tombaient dans celles de Lukas. Je peinais à le reconnaître. Je peinais à croire à cette réalité. M’avançant d’un pas, je bredouillais « Je… Tu… Ce… Est-ce que c’est vrai ce qu’il a dit… ? » J’avais besoin de savoir. Je voulais l’entendre de sa bouche. Cela ne pouvait pas être vrai. Lukas était peut-être en danger… Peut-être qu’il était menacé. Mais, dans ce cas, où se trouvait la menace ? Étais-je réellement la menace de sa vie ?

Cauchemar. Cauchemar. Cauchemar. C’était ce que je vivais depuis des jours maintenant. Des jours sans la moindre nouvelle de l’homme qui faisait tellement battre mon cœur. Des jours sans savoir où se trouvait ce garçon que j’avais osé choisir quelques semaines plus tôt pour tenter une histoire à ses côtés. Ce garçon avec qui j’avais réellement envie de faire un bout de chemin… Voir peut-être même la totalité du chemin si la vie nous y conduisait. Bordel. Cela faisait des jours que Lukas était introuvable et injoignable. Je n’avais pas la moindre piste. Il n’y avait rien. Personne n’avait rien vu. Personne n’avait rien entendu. Personne ne possédait de savoir. C’était l’Enfer absolu. Suite à chaque foutue seconde qui s’écoulait sans la présence de mon copain à mes côtés, le cauchemar se peignait lentement, mais sûrement dans ma vraie vie. Tout me bouffait. Tout me heurtait. Tout me déstabilisait. Tout me foutait en l’air un peu trop sûrement. Mes médicaments n’étaient même plus suffisants pour m’aider à passer outre cette vague trop haute. Ils m’aidaient à rester à la surface. Ils m’aidaient à tenter de nager pour tenir le coup. Mais, pour combien de temps encore ? Je sentais déjà l’eau s’infiltrer trop souvent à l’intérieur de ma bouche. Je me sentais faiblir jour après jour. L’épuisement pointait le bout de son nez et ça… Ça c’était la faute aux cauchemars qui peuplaient mes nuits comme si peupler mes journées n’était pas suffisant pour eux. Foutue existence. Dès que j’osais fermer les yeux, les affreuses images venaient se jouer dans mon esprit. Toujours horribles, elles semblaient si réelles que je me réveillais sans trop savoir où se trouvait la réalité et où se trouvait le cauchemar. Les barrières étaient beaucoup trop instables. Mon état était tellement trop pitoyable. Je ne savais plus réfléchir. J’étais juste là à subir. Ce soir, je fermais les yeux me préparant déjà au tremblement de terre qui allait s’abattre sur moi lorsque j’allais tenter de me reposer. Malgré les médicaments avalés, je savais déjà que j’allais finir écorché une nouvelle fois. Et, je n’avais pas tort. Blotti dans les bras de Côme qui supportait mon état depuis le début, je me mettais déjà à ronchonner et à sangloter tandis que les images se jouaient à l’intérieur de mon esprit. Ces images de l’horreur. Ces images qui faisaient si peur tant elles semblaient être réelles. Ces images qui m’emportaient droit dans la tombe.

Installé sur ma moto, je m’étais précipité à cette adresse que l’on venait de me souffler au téléphone. Je me fichais de la vitesse à laquelle je roulais ou de la signalisation qui se trouvait sur mon passage. Je me fichais des amendes qui pourraient arriver et des risques pour ma sécurité. Ouais, je me foutais de tout. Je désirais simplement arriver au plus vite sur les lieux. Le stress dévorait mon ventre tandis que les milliers de scénarios se jouaient vivement à l’intérieur de mon esprit. Le policier n’avait rien voulu me dire au téléphone. Rien de rien. Pas la moindre information. Pas la moindre indication. Je n’avais même pas réussi à savoir si Mio Amore était en vie ou pas alors je ne pouvais m’empêcher de présager le pire. Après tout, si on ne me disait rien sur l’état de mon petit-ami, cela ne pouvait signifier qu’une chose : son état était catastrophique. Et, putain, je n’étais pas prêt pour cette réalité là. Je n’étais clairement pas en mesure de faire face à une telle situation après des jours passés à garder espoir en le cherchant dans les rues de Boston. Non. Cela ne pouvait pas être possible. J’accélérais encore priant tous les Dieux pour que Lukas soit en vie et que je puisse l’embrasser très vite. Je le voulais tellement. J’en avais si follement besoin. J’arrivais finalement devant cet entrepôt sans trop savoir à quoi m’attendre. Est-ce que ça allait être la folie ? Est-ce qu’il allait y avoir trop de monde et trop de bruits ? Je n’en savais rien. Enfin, tout ce que je savais était que je ne m’étais clairement pas attendu à la situation qui se déroulait sous mes yeux. Oh non, je ne m’étais pas attendu à ça. La police n’était pas là. Les ambulances ne se trouvaient pas sur place. Le silence cognait partout autour de moi. Le néant semblait m’engloutir. Le vide semblait m’entourer encore plus. C’était violent… Presque aussi violent que tout ce qui résonnait en moi. Sur le coup, je devais bien vous avouer que j’étais tenté d’attraper mon téléphone pour rappeler le policier et voir où j’avais fait une erreur. Néanmoins, au fond de moi, je savais que je n’avais pas commis de faute. J’étais au bon endroit et je devais aller voir. Alors, je m’empressais de rejoindre l’entrepôt et là… Le cauchemar s’intensifia. Il devenait peut-être même pire que de faire face au corps sans vie de Lukas parce que, là, face à moi, Rob se trouvait aux côtés de Lukas. Rob d’Italie… Rob de la Mafia. Le frisson courrait le long de ma peau. Le choc me poussait à reculer d’un pas alors que mes prunelles cherchaient Lukas. Il était bien là. Debout. Pas blessé. Il était bien là. Empli de haine. Si différent. Presque aussitôt, le choc se peignait sur mon visage laissant alors Rob prendre la parole pour tenter de m’expliquer ce qu’il en était de la situation. Les mots qu’il soufflait ne me plaisaient guère. Ils me heurtaient si violemment laissant de vives cicatrices se dessiner sur mon cœur qui se mettait à saigner. Putain, non, je ne voulais pas croire aux mots qu’il prononçait. Je ne pouvais pas y croire. Aussi, lorsque la porte claqua derrière Rob me laissant en tête à tête avec un Lukas armé, je m’approchais d’un pas timide en cherchant à savoir si ce qu’il avait dit était vrai. Mio Amore s’approchait vers moi et j’avais le fol espoir qu’il me dise que tout ce que Rob avait soufflé était faux. J’avais l’espoir qu’il me fasse comprendre qu’il était menacé et qu’il fallait que je le sauve. Cependant, rien de tout cela n’arrivait. Non. Mon petit-ami venait répondre que c’était en parti vrai oui, mais que je connaissais Rob et qu’il racontait bien ce qu’il voulait. Je tressaillais soudainement en entendant Mio Amore m’appeler Neal me soufflant que c’était terminé et que je devais arrêter de le chercher. Mon cœur se craquelait. Mon souffle se coupait. Et, malgré moi, je soufflais ce « Neal… » qui sonnait beaucoup trop mal. Ce ‘Neal’ qu’il me donnait si rarement préférant les doux surnoms habituels. Ce ‘Neal’ que je n’appréciais guère. Les larmes se formaient dans mes prunelles tandis que j’osais avancer d’un nouveau pas. Quitte à avoir le cœur déchiré autant tenter le tout pour le tout et me faire vraiment mal. Gardant les yeux rivés dans ceux de ce garçon que j’aimais, je finissais par murmurer « Je… En partie… ? Qu’est-ce qui n’est pas vrai alors ? » Oui, il fallait que Mio Amore m’éclaire sur ce qui n’était pas vrai dans tous les propos prononcés par Rob parce que tout ce qu’il avait soufflé me semblait maintenant trop vrai. Tout se mettait en place à l’intérieur de mon esprit et ça semblait si réel que ça en faisait mal. Tellement mal. Je ne voyais pas où pouvait se trouver les mensonges. Je ne comprenais plus rien à toute cette histoire. J’étais si perdu et je… Oh bordel, je ne pouvais même pas embrasser mon copain parce qu’il… Il n’était plus mon copain ? Mes sourcils se fronçaient et je baissais les yeux un quart de seconde comme tentant de remettre de l’ordre dans mes pensées. Relevant les yeux sur Lukas, je marmonnais alors comme un gamin qui ne comprenait rien « Et je… Tu… Terminé ? Entre toi et moi ? No… Notre Neakas…? Je… Tu… T’es en train de rompre avec moi ? » La question tombait. Elle franchissait difficilement mes lèvres parce que je savais déjà que je ne voulais guère entendre la réponse qu’il aurait à me donner. Je ne voulais pas entendre cette négation qui planait déjà sur moi. Sur nous. Comment tout cela pouvait-il être arrivé ? J’avais choisi Lukas. Je l’avais choisi lui pour mon futur. J’étais prêt à faire tellement pour lui. J’étais prêt à faire tant d’efforts pour lui offrir la relation parfaite et exclusive qu’il méritait tant. Alors, comment notre histoire pouvait autant tourner au drame ? Incapable de me retenir, je demandais soudainement « Est-ce que ce… C’est à cause de Summer ? Je… Pourquoi tu as disparu comme ça Amore ? Pourquoi t’es pas venu me voir… ? Me parler… ? » Ouais, pourquoi n’avait-il pas agit comme ça ? Mio Amore tentait toujours de me pousser à le rejoindre et à lui faire face. Il voulait toujours nous donner l’occasion de régler les choses l’un en face de l’autre. Alors, pourquoi avait-il prit la fuite comme ça ? Je tentais vraiment de comprendre cette histoire qui semblait beaucoup trop folle. Elle semblait tellement irréelle que j’avais presque envie de me pincer de peur d’être coincé dans un affreux cauchemar. Je m’approchais de nouveau de Lukas détestant cette distance entre nous. J’avais trop besoin de le retrouver. J’avais tant besoin de le toucher. Je m’arrêtais soudainement à quelques centimètres de lui. Et, là, face à lui, je plantais mon regard dans le sien tandis que je levais la main pour caresser sa joue. Mon pouce passait avec lenteur sur les lèvres de Mio Amore que je désirais tant et dont j’avais tellement rêvé ces derniers jours. Et, si proche de lui, je murmurais « Ce… Ce ne peut pas être vrai… Tu… T’es en danger… ? » C’était la seule explication logique à cette histoire beaucoup trop folle. Mio Amore était en danger. Il était menacé et je devais le sauver. L’embarquer sur ma moto loin de cet Enfer. C’était ça n’est-ce pas ? Je voulais tellement y croire parce que l’autre hypothèse de cette histoire piétinait mon cœur au point de me laisser pour mort.

Ma respiration s’affolait suivant un rythme beaucoup trop anormal pour une personne censée dormir. Mon cœur battait un peu trop fort à l’intérieur de ma poitrine. Il s’accélérait au fil des secondes qui s’écoulaient et qui me plongeaient un peu plus dans un Enfer dont je ne saurais pas sortir avant le coup d’éclat. Parce que ouais c’était ça mes cauchemars. Je me faisais happer si aisément et je finissais toujours par me faire prendre au piège. J’étais sans cesse incapable de m’évader avant de subir la véritable horreur. J’étais coincé dans ces affreuses images jusqu’au coup de trop la majorité du temps. Parfois je parvenais à en sortir avant, mais c’était trop rare et ça demandait l’implication d’une autre personne. Je ne parvenais jamais à m’échapper seul de ce dédale infernal. Les rares fois où j’avais pu éviter le supplice étaient lorsque Côme prenait les choses en main pour me tirer violemment du sommeil et m’empêcher de glisser trop loin. Néanmoins, là ce soir, je sentais que j’étais parti pour glisser beaucoup trop loin. Je sentais que l’Enfer allait s’abattre sur moi jusqu’au coup de grâce. Personne ne parviendrait à me tirer loin du noir avant que je ne subisse ce que je devais subir. De toute manière, j’étais sûr que ce soir Côme allait un peu trop bien dormir. Cela faisait des jours qu’il ne dormait pas par ma faute à tel point que je savais que j’allais prendre sur moi – même inconsciemment – pour ne pas le troubler dans son repos. Le cauchemar se déroulait dans ma tête peignant les horribles images d’une réalité que je ne pourrais guère supporter. Une réalité qui, pourtant, avait toutes les possibilités d’arriver. Une réalité qui était en train de me foutre un peu plus en l’air. Une réalité qui allait provoquer un réveil si douloureux dès que le coup fatal serait arrivé.

Cela faisait des jours que j’attendais impatiemment d’entendre mon téléphone sonner. Cela faisait des jours que j’attendais qu’on me demande de venir à un endroit précis parce que l’enquête se mettait enfin à avancer. Cela faisait des jours que j’attendais cet instant libérateur où je pourrais enfin retrouver mon petit-ami en bonne santé physiquement au moins. Ouais putain, cela faisait des jours que j’attendais cet instant où je pourrais l’embrasser de nouveau et le prendre dans mes bras. Des jours que j’attendais cet instant magique où je pourrais me sentir revivre à nouveau. Néanmoins, à présent que je me retrouvais face à cet entrepôt, j’en venais à regretter l’appel reçu. J’avais l’impression de plonger droit au sein d’un cauchemar un peu trop fort qui allait me fracasser la gueule. J’avais l’impression de tomber au fond d’un trou sans pouvoir en sortir. La situation n’était absolument pas normale. Sur les lieux des retrouvailles, les voitures de police et les ambulances auraient dû se multiplier. Là, il n’y avait rien. Rien que ma moto et un silence un peu trop fort. Mais, comme un gosse incapable de faire demi-tour, je pénétrais dans cet entrepôt et je plongeais un peu plus dans un cauchemar tellement puissant. Je faisais soudainement face à mon passé lorsque mes prunelles se posaient sur Rob. C’était ce passé que j’avais si souvent fui. C’était ce passé qui avait su me retrouver. C’était ce passé qui était en train de me charcuter. Et, putain, c’en était si terrifiant. Malheureusement, ce n’était pas le pire dans toute cette histoire. Oh non… Le pire était la présence de Mio Amore aux côtés de ce garçon que je détestais tant et qui avait ruiné ma vie de bien des manières. Ce garçon du passé qui allait au final ruiner ma vie du futur. Lukas était vivant et je savais que j’aurai dû me réjouir de cette situation. Néanmoins, je n’y parvenais pas. Pas alors qu’il me regardait avec autant de haine. Pas alors qu’il semblait parvenir à lacérer mon cœur même si loin de moi. Les mots de Rob venaient me détruire un peu plus et je me retrouvais enfin en tête à tête avec ce garçon que j’aimais tant et pour qui j’étais prêt à tellement de sacrifices. Je me retrouvais en tête à tête avec Mio Amore et quelque chose en moi me soufflait qu’il s’agissait du dernier moment. Notre dernier moment. L’ultime Neakas. M’approchant d’un pas timide, je le questionnais sur la vérité des propos de Rob avec le fol espoir qu’il conteste tout. Mais, ce n’était pas ce qu’il faisait. Rob avait dit vrai. Lukas m’appelait Neal venant meurtrir un peu plus mon cœur déjà trop en lambeaux. Difficilement, les larmes aux yeux, je tentais de savoir ce qui n’était pas vrai parce que j’étais soudainement trop perdu. Mio Amore prenait la parole en secouant la tête et en m’offrant uniquement ce qui était vrai. Il était en vie, ouais ça je constatais bien. Ils nous surveillaient et l’avaient approchés… Ouais, ça aussi je pouvais aisément le croire. Tout comme je pouvais croire que j’allais les foutre dans la merde à un peu trop fouiller. Mais le reste, je ne pouvais pas y croire. Je ne pouvais pas croire que mon petit-ami avait envie de disparaître loin de moi. Je ne pouvais pas croire qu’il allait bien. Alors, secouant négativement la tête, je marmonnais un « Non… » incessant comme refusant cette réalité qu’il peignait devant moi. Cette réalité que je voulais contester sur le champ en allant quérir les lèvres de mon copain. Mais… Je ne pouvais pas parce que ce n’était plus mon copain. Sourcils froncés, je posais la question quand bien même je savais que je n’étais pas prêt à entendre la réponse négative qui risquait de tomber et de me faire trop mal. Lukas hochait la tête les larmes aux yeux. Oui, il était en train de rompre avec moi. Oui, notre Neakas se terminait là dans cet entrepôt pourri avec ce passé qui avait resurgit. Je détestais ça. Soudainement, je sursautais de peur en entendant la voix de Mio Amore me dire de l’accepter. C’était comme un ordre un peu trop violent. C’était comme une supplique tellement trop déchirante. Et, comme un gamin qui ne savait pas se contrôler et qui ne pouvait pas accepter ce choix, je marmonnais « Je… J’peux pas… » Non, putain, Lukas. Je ne pouvais pas accepter que tout se termine comme ça. Je ne pouvais pas faire une croix sur notre histoire que j’avais choisi. Je ne pouvais pas effacer ces moments et aller de l’avant sans lui. Je ne pouvais pas vivre sans sa présence à mes côtés. Non, c’était beaucoup trop compliqué. Alors, incapable de me retenir, je tentais de comprendre ce qui avait déclenché ça. Je tentais de savoir pourquoi cette fois je n’avais pas eu le droit de le voir avant. Pourquoi je n’avais pas eu le droit à un face à face alors qu’il les prônait toujours pour tenter de faire fonctionner notre Neakas si parfaitement imparfait. Pourquoi ne pas nous avoir laissé une autre chance encore une fois ? Pourquoi avoir fait ça ? M’approchant du jeune homme, je m’arrêtais à quelques centimètres de lui plantant mon regard dans le sien. La larme glissait sur sa joue tandis que je levais la main pour venir caresser sa joue. De mon autre main, je laissais mon pouce venir caresser avec lenteur les lèvres désirées. Et là, Lukas me disait de m’en aller. Il me disait d’emmener Summer avec moi et d’élever mon enfant. Il me disait de le laisser partir. Je secouais négativement la tête refusant totalement cette réalité qu’il tentait de m’imposer. Je secouais négativement la tête comme un gosse en plein caprice qui ne céderait pas même devant les pires menaces. Je secouais négativement la tête parce que, merde, ce n’était pas ça que je voulais. Je voulais ma vie avec Lukas comme je l’avais choisi lorsque l’on m’avait imposé un choix. Je ne pouvais pas partir loin sans lui. Et je ne pouvais guère croire que c’était ce que mon copain – mon ex-copain ? – avait envie. Alors, j’en venais à lui demander si le danger planait sur lui. Y avait-il une menace que je ne voyais pas ? Mio Amore soufflait qu’il m’aimait et je me sentais tressaillir sous les mots. Ces mots que j’avais tant attendus. Ces mots qui n’allaient pourtant pas avec la situation. Ces mots que je voulais entendre toute ma vie pourtant. Lukas me suppliait de nouveau de partir loin avec Summer. Les larmes coulaient si violemment sur les joues de l’homme que j’aimais que je ne pouvais pas accepter cette situation. Je m’apprêtais à lui dire que je l’aimais et que je ne pouvais pas l’abandonner. Je m’apprêtais à le supplier de rentrer avec moi. Je m’apprêtais à lui prouver que notre vie ensemble pouvait fonctionner. Je m’apprêtais à l’embrasser lorsque soudainement Lukas sortait l’arme de sa poche. Une arme entre nous. Une arme pointée sur moi. Mes prunelles s’arrêtaient un instant sur ce flingue alors qu’il me suppliait de partir. Secouant négativement la tête, je marmonnais « Non… Non… Non… Je… J’peux pas partir… Tu… T’peux pas avoir envie de disparaître Amore… Ce… Tu m’aimes tu le dis toi-même alors je… Tu… C’pas possible que ce soit la fin… Pas là… Pas comme ça… Non… Non… Non… » Oh bordel non, je ne pouvais pas croire à tout cela. Il ne pouvait pas dire qu’il m’aimait pour ensuite se retourner ainsi contre moi et me pousser à déguerpir. Il ne pouvait pas prétendre vouloir disparaître alors que les sentiments étaient toujours là. Nous pouvions nous en sortir plus forts. Ensemble. Abaissant mes mains tremblantes, je venais les poser sur celles de mon copain. Je venais déposer mes mains sur celles qui tenaient ce flingue pointé sur moi. Ce foutu flingue que j’approchais un peu plus de moi. J’approchais l’arme de mon cœur tout en soufflant « Si… Si tu veux vraiment disparaître… Si… Si tu veux vraiment que je parte, tu… T’vas devoir appuyer sur cette gâchette Mio Amore… » Ouais. C’était le seul moyen de mettre fin à tout ça. C’était le seul moyen de me pousser à l’abandon parce que sinon jamais je ne laisserais Lukas s’éloigner. Pas alors qu’il était l’homme de ma vie et que je le savais. Fermant les yeux, je laissais les larmes couler sur mes joues et j’attendais. J’attendais de sentir l’impact réel d’une balle… Ça ne pourrait jamais faire aussi mal que l’impact des mots que mon ex-copain avait eu pour moi. Ça ne pourrait jamais faire aussi mal que cette perte qui me foutait déjà au plus profond de l'Enfer.

J’avais croisé son regard rempli de haine à mon arrivée. Le genre de regard à faire froid dans le dos. Le genre de regard qui vous poussait à tout remettre en question un peu trop soudainement parce que ça semblait un peu trop vrai et tellement trop violent. Cependant, à présent que nous étions seuls dans cet entrepôt silencieux, la haine semblait avoir déserté les traits de mon copain. Alors, je me mettais à croire qu’elle n’était pas vraiment à mon attention. Je me mettais à penser que ce n’était qu’un rôle qu’il jouait parce que le danger planait sur lui. Sur nous. Je me mettais à penser qu’il y avait une explication logique derrière toute cette histoire si folle. Néanmoins, les mots tombaient bien trop vite entre nous. La fin de notre histoire se dessinait lentement et je ne voulais pas y croire. Non. Je ne pouvais pas y croire. Le tableau qui se peignait sous mon regard était beaucoup trop déplaisant. Je ne voulais pas le voir. Je ne pouvais guère l’encaisser. Je désirais que tout ça s’arrêter. Je voulais trouver le bouton pause. Je désirais trouver le bouton pour revenir en arrière et changer la donne. Les choses ne pouvaient pas se dérouler de cette manière. Ce n’était pas possible. Non. Je ne pouvais guère accepter que ce soit la fin de notre Neakas. Je ne pourrais jamais l’accepter. Cela faisait beaucoup trop mal. Je m’étais tellement battu pour Lukas. Je m’étais tellement abandonné dans notre Neakas. Ce n’était pas possible que tout me saute au visage maintenant alors que je commençais tout juste une nouvelle vie aux côtés de mon copain. Juste lui et moi. Simplement nous deux. Exclusifs et heureux. Je m’approchais de cet homme qui faisait pulser mon cœur et je laissais mes doigts s’échouer sur sa joue et ses lèvres comme pour tenter de le mettre en confiance. Je voulais qu’il me parle. Je voulais qu’il me confie d’où venait le danger parce que ce n’était pas possible autrement. Tout était faux. Il ne pouvait pas vouloir notre fin. Il ne pouvait pas vouloir disparaître. Pourtant, Mio Amore ne prononçait pas les mots que j’attendais. Bien au contraire. Il me disait de partir avec Summer pour élever mon enfant. C’était comme s’il désirait que je fasse réellement ma vie sans sa présence. Mais putain, non, je le refusais. Je ne pouvais pas me résoudre à agir de cette manière. Je ne pouvais guère accepter une vie sans ce garçon qui avait su me faire chavirer. Je ne pouvais pas accepter de me construire une nouvelle existence sans sa présence parce que, putain, je m’étais mis à m’imaginer des années aux côtés du sexy musicien. Lukas confiait d’ailleurs qu’il m’aimait encore alors je ne comprenais rien. Pourquoi ne pas m’aimer jusqu’à la mort ? Pourquoi ne pas continuer ensemble des années encore ? Est-ce que c’était vraiment juste cette histoire avec Summer qui l’avait foutu en l’air à ce point ? La culpabilité venait tordre mon ventre. L’horreur venait se creuser dans ma tête. Mio Amore me suppliait de partir en pleurant, mais moi… Moi j’étais juste prêt à le supplier de venir avec moi. C’était simple. Il n’avait qu’à me dire oui et attraper ma main. Il n’avait qu’à accepter de tenter une nouvelle fois avec moi. Ce ne serait pas aisé. Notre Neakas n’avait jamais été aisé. Mais, ce serait nous. Ensemble. Plus forts que tout. J’étais prêt à laisser mes lèvres s’échouer sur les siennes pour tenter de le convaincre de lâcher prise face au lavage de cerveau qu’il avait peut-être subi. Néanmoins, avant que je ne puisse faire quoi que ce soit, l’arme se pointait entre nous. Mon petit-ami sortait ce flingue pour le pointer sur moi comme si ça allait me pousser à agir comme il le voulait tant. Il le sortait comme si ça allait me pousser à lui obéir aveuglément. Je refusais. Je ne voulais pas de cette fin là. Je ne voulais pas disparaître et ne plus jamais le revoir. Alors, lentement, mes mains venaient se poser sur celles de mon copain qui tremblaient en tenant le flingue. Je me rapprochais de l’arme l’approchant lentement de mon cœur avant de souffler quelques mots. Des mots tellement vrais. Des mots tellement forts. Tant que je serai vivant, je ne laisserai pas Lukas disparaître du tableau de mon existence. Oh non… Il était l’homme de ma vie. Je ne pouvais pas continuer de peindre ma toile s’il n’y était plus. Les larmes glissaient à une vitesse folle sur mes joues et je fermais les yeux dans l’attente de l’impact libérateur. J’attendais cette balle qui me conduirait loin de cet Enfer trop grand. Ça ne venait pas. Pas tout de suite non. Je sentais Mio Amore secouer la tête. Et, soudainement, ses lèvres venaient s’abattre sur les miennes. Le baiser était doux et salé de nos larmes. Le baiser était lent comme pour tenter de retarder un peu plus l’instant fatidique. Le baiser était unique comme pour laisser une trace un peu trop indélébile sur moi. Sur lui. Sur nous. J’aurai aimé pouvoir me réjouir de ce baiser, mais je ne pouvais pas. Pas alors qu’il avait ce goût de dernière fois. L’arme se baissait et j’ouvrais les yeux un peu trop perdu. Lukas soufflait qu’il m’aimait pour toujours et à jamais et je voulais ouvrir la bouche pour le supplier de venir avec moi alors. Mais, sa main libre me stoppait venant caresser ma peau et me pousser à fermer les yeux comme pour me préparer à l’après. Prêt à mourir parce que je n’étais pas prêt à vivre sans lui. Tic, tac. Tic, tac. Tic, tac. Le son se déclenchait. Violent. Intense. Destructeur. Néanmoins, la douleur ne venait pas me percutait et j’ouvrais trop rapidement les yeux pour voir l’impact fatal. Un impact qui ne se dirigeait pas vers moi. Un impact qui se dirigeait vers Lukas. Il avait retourné l’arme contre lui et son corps tombait au sol. Le rouge carmin tapissait le sol de l’entrepôt et je me laissais tomber au sol pour rejoindre le corps de ce garçon pour qui j’aurai pu donner ma vie. Je gémissais suite à cette douleur qui me percutait de partout. Mon cœur venait de faire un saut dont il ne se relèverait plus jamais. Les larmes brouillaient ma vue de cette vision que je ne voulais pas voir. Je ne voulais plus voir ça. Je ne voulais pas voir ce corps sans vie impacté par une balle. Non. Je voulais garder les beaux souvenirs. Ceux de deux gamins qui jouaient insouciants de tout. Ceux de deux adultes qui s’aimaient envers et contre tout. Ceux de notre Neakas. Un conte d’amour beaucoup trop intense et si noir.

« NOOOOOOOOOOOOOOOOOOON » Le hurlement franchissait mes lèvres de façon trop incontrôlable tandis que je me redressais soudainement dans mon lit à bout de souffle. Le souffle me manquait à tel point que j’avais l’impression d’être en train de m’étouffer. Mon cœur battait la chamade à tel point qu’il me faisait mal. Tout me faisait mal d’ailleurs. Beaucoup trop mal. Les yeux à peine ouverts, je cherchais un repère autour de moi m’attendant presque à me retrouver dans cet entrepôt pour découvrir le corps sans vie de cet homme que j’aimais tellement. Les yeux à peine ouverts, je peinais à me raccrocher à la réalité et à découvrir ma chambre. Le corps sans vie de Mio Amore se dessinait une nouvelle fois à l’intérieur de mon esprit me poussant à repousser soudainement les couvertures du lit pour me rendre en courant dans la salle de bain. L’image était beaucoup trop horrible. L’horreur était tellement trop grande. Je me laissais tomber devant les toilettes venant rendre mon léger repas du jour. Les larmes striaient mes joues. Elles coulaient à flot beaucoup trop incontrôlables. L’angoisse bouffait mon ventre si violemment que j’avais envie de supplier pour que tout s’arrête. N’étais-je pas déjà en train de le faire ? N’étais-je pas en train de baragouiner des supplications pour que tout prenne fin ? L’horreur me dévorait tout entier. Elle dévorait ma tête avec  ces images horribles. Elle dévorait mon cœur avec cette solitude si pesante. J’étais bel et bien réveillé à présent. Je le savais. Je le sentais. Néanmoins, l’horreur ne s’arrêtait pas. Elle ne s’arrêtait jamais de toute manière. Elle se prolongeait incessamment à l’intérieur de mon existence. M’appuyant sur le sol, je tentais de redresser mon corps si tremblant. Mes prunelles croisèrent le regard inquiet de Côme à l’entrée de la salle de bain. Il n’osait pas approcher de peur de la réaction que ça pourrait provoquer et je lui en était reconnaissant parce que, putain, je n’étais pas en état de supporter un contact là tout de suite. Tirant la chasse, je me dirigeais difficilement vers le lavabo pour l’ouvrir et me rincer la bouche. Mes mains tremblaient si violemment que je mettais de l’eau dans presque toute la pièce tandis que je tentais de me rincer le visage de cette chaleur étouffante qui me rendait fou. Relevant le regard, je croisais alors mon reflet. Le reflet de ce gosse un peu trop malade. Les crises s’intensifiaient. Les cauchemars devenaient ingérables. L’horreur était en train de me rendre dingue. Beaucoup trop dingue. Plus rien n’allait. Et, au fond de moi, je savais. Je savais que je n’allais pas tenir très longtemps. Je faisais des efforts pour me concentrer sur Lukas. Je faisais des efforts pour garder le contrôle. Mais, putain, une fois qu’il serait à mes côtés en vie, je risquais juste de m’effondrer et de ne plus jamais pouvoir sortir de ce trou noir. Je risquais de sombrer sans plus savoir me relever et c’était tellement effrayant. Glissant ma langue sur mes lèvres, je me tournais à peine vers Côme en babillant une adresse de ma voix enrouée. L’adresse de cet entrepôt. L’adresse qui avait cogné dans mon cauchemar. L’adresse à laquelle je devais me rendre sur le champ. Il fallait que j’aille vérifier moi-même. Il fallait que j’aille voir si tout n’était qu’une invention de mon esprit. Ouais, il fallait que je sache. Il fallait que je sois sûr que mon copain n’était pas là-bas. Parce que si jamais il s’y trouvait, je savais déjà que ma fin arriverait. Le souffle court, le cœur cognant trop fort, le corps tremblant, je m'habillais en vitesse avant de suivre Côme pour nous rendre à cette adresse. Cette adresse où il n'y avait rien. Rien qu'une forêt déserte. Rien que des images d'horreurs qui viendraient se jouer encore et toujours dans ma tête. Rien qu'un scénario qui me faisait si peur. Un scénario inventé par ma tête qui semblait pourtant si vrai. Un scénario qui me rendait un peu trop malade. Un cauchemar qui ne faisait que me confirmer que ma vie sans Lukas n’était pas envisageable. Non, elle ne l’étais plus depuis des mois déjà.