Ma réaction était violente. Elle me dépassait. Je ne savais pas prendre le dessus sur elle. Les mots glissaient sans que je ne parvienne à les retenir. Gamin qui avait besoin de l’exprimer. Gosse qui avait besoin de se faire comprendre. Mon mari ne rétorquait pas. Le silence s’instaurait quelques secondes avant que la question n’échappe à l’amoureux. Cette question à laquelle je n’apportais qu’une réponse sans doute trop inutile. J’étais perdu. J’étais fichu. ELLE me poussait dans une direction qui ne me plaisait pas tandis que mon amoureux ne semblait pas réellement me comprendre à ce sujet. Son soupir me poussait à fermer les yeux. Il lâchait ma main et ça venait piétiner mon cœur. Le contact se perdait sur mon visage et ça me donnait une sensation de froid intense. Les mots glissaient à propos de ce monde que j’avais construit et de cette famille qui m’aimait et avait besoin de moi. Je le savais tout ça putain. Pourtant, je ne pouvais m’empêcher de secouer doucement la tête de façon négative. Murmurant un « Ce n’est pas assez… », je savais que mes propos pouvaient être blessants. Mais, putain, ils étaient réels pourtant et j’avais l’espoir que Mio Amore le comprenne. Après tout, s’il m’aimait pour ma totalité, il pourrait le comprendre non ? J’avais toujours baigné dans un monde dangereux et je ne pouvais pas ne plus le faire. J’avais presque toujours baigné dans un monde où ma soumission était reine et j’en avais bien trop besoin. Cette vie de mafieux venait combler un trou dans ma poitrine. Mes prunelles suivaient l’amoureux qui s’éloignait pour s’installer à la fenêtre fumer une cigarette. Les propos tombaient entre nous. Le prénom de Rob était jeté au point de m’en faire frissonner. C’était à mon tour de soupirer. Peut-être que je devais saisir l’opportunité donnée. Peut-être que ce serait mieux que je parte dès ce soir, que je prenne cette décision pour nous deux. Pourtant, je venais marmonner un « Veux pas partir… » empli de sincérité avant de me laisser tomber au sol. Je m’asseyais jouant nerveusement avec mes doigts avant de rajouter « T’es pas censé être en danger. Je… Personne n’est censé savoir ce que je fais. Et je ne supporte pas d’avoir commis une faute au point où ça te retombe dessus… » Je me haïssais d’avoir laissé passer un indice. Je me détestais d’avoir trop ouvert ma bouche. Gamin mafieux qui aurait dû garder le mur. Gosse qui aurait dû mieux bosser. Passant ma main dans mes cheveux, je finissais par reprendre « Je… Tu n’auras rien à faire face à ce type. Tu ne seras jamais tout seul à gérer. Jamais. » Il en était hors de question. Je n’allais pas abandonner mon mari à son sort. Je n’allais pas lui demande quoi que ce soit. J’étais responsable de cette histoire. J’allais gérer les conséquences. Quitte à devoir tuer ce mec.

Tu n’es pas assez bien pour lui Neal. Tu lui avoues toi-même que votre vie n’est pas assez. Tu dois le quitter. Il mérite mieux que ce que tu es. ELLE cognait fort dans la tête. ELLE hurlait ces mots sans laisser la place à d’autres pensées. ELLE me faisait mal. Mais, putain, ELLE disait bien trop vrai. Non ? Je venais de murmurer que notre vie n’était pas assez. Je venais d’avouer que cette vie avec un mari parfait, une fille magnifique, une jolie maison et des boulots que j’adorais n’était pas suffisant pour moi. Ce n’était pas assez non. Il manquait cette étincelle qui permettait de garder le contrôle sur les démons de l’être. Il manquait ces habitudes qui permettaient de ne pas dérailler autant qu’avant. Il manquait quelque chose pour combler des besoins que l’amoureux ne savait pas combler. Depuis que j’avais repris le boulot pour la Mafia, mon existence semblait avoir soudainement basculée. Les oublis étaient moins fréquents, moins oppressants. Ils arrivaient encore bien sûr, mais ce n’était pas comme avant que je bosse pour Rob. Avec lui, avec sa domination et son cadre si bien dessiné, je me sentais comme si la pièce manquante était là me donnant plus de contrôle et m’empêchant de subir ces oublis. Je ne pouvais pas abandonner ce monde Mafieux. Mais, je ne voulais pas quitter ce monde que j’avais construit avec ma famille à moi. Rien qu’à moi. L’aveu glissait avant que je ne me laisse tomber au sol jouant nerveusement avec mes doigts. L’amoureux s’était tourné de nouveau vers moi et j’hochais doucement la tête à ses propos parfaitement conscient qu’il disait la vérité. Les erreurs et les disputes arrivaient. Le danger courrait après mon mari autant qu’il courrait après moi. Mais étais-je responsable ? ELLE hurlait oui. Moi, je ne savais plus. Dans tous les cas, je n’allais pas abandonner mon mari face au danger. Ni face à ce type, ni face à tout ce qui pouvait arriver dans la futur. Un nouveau hochement de tête répondait à l’amoureux qui s’approchait pour s’asseoir derrière moi. Je me détendais aussitôt à son contact. Je me laissais aller. Son nez dans mon cou, je fermais les yeux profitant pleinement de cette proximité agréable. Les mots tombaient. Je mordillais ma lèvre. J’hésitais. Le soupir m’échappait et je finissais par répondre « Ce type semble être hors de contrôle Amore… Je… Je pense qu’il cherchera à un moment ou un autre à s’en prendre physiquement à toi… » La réalité tombait entre nous. Elle me poussait à me tendre. Mon ventre se tordait. Je déglutissais difficilement avant de souffler « Je… Je vais demander à Rob qu’il mette quelqu’un pour ta protection quand je ne peux pas être là… » J’hochais doucement la tête. Je ne pouvais pas être tout le temps avec mon mari, mais je pouvais faire en sorte qu’il ne soit jamais seul. Ça me semblait être une bonne idée.

L’être se détendait lorsque l’amoureux s’installait derrière moi malgré tous les propos qui venaient de passer entre nous. Ces propos qui avaient sans doute blessé bien plus que Mio Amore ne le laissait voir. J’avais soufflé qu’il n’était pas assez, que notre vie n’était pas assez. Je m’en voulais pour ça. Néanmoins, je m’étais montré sincère afin qu’il comprenne que je ne comptais guère abandonner ma vie de mafieux. Ni aujourd’hui. Ni demain. Ni dans plusieurs années. Je ne comptais pas non plus abandonner l’homme que j’aimais et j’espérais qu’il en avait conscience. Je me laissais aller au contact avec mon mari. Ça apportait une paix sereine aussi soudaine qu’agréable. Il n’allait pas me quitter même après cet événement et ce danger qui venait assombrir son existence. Notre existence. Parce que, merde, c’était lui et moi contre ce danger, contre ce mec. Je ne comptais pas abandonner mon mari face à ce type qui voulait tout détruire. Ce type n’était qu’une nouvelle pièce sur l’échiquier de notre vie. Une pièce qui se plaçait dans l’équipe adverse et qui semblait prête à abattre n’importe quel coup pour remporter cette foutue partie. Je ne pouvais guère contrôler cette pièce. Néanmoins, il était hors de question que je laisse cet étranger gagner. Je le refuser. Et, pour éviter sa victoire, Mio Amore devait prendre conscience de la situation et du danger de ce type totalement hors de contrôle. Ce type pouvait s’en prendre physiquement à l’homme que j’aimais et je le soufflais. La réalité tombait me poussant à déglutir difficilement. Ça ne me plaisait pas de l’avouer, mais il devait le savoir. La proposition de l’amoureux tombait entre nous me poussant à secouer négativement la tête. Je n’étais pas d’accord. Les ordres ne tardaient pas à passer « Hors de question. Tu ne lui parles pas. Tu ne l’approches pas. Je ne pense pas que quoi que ce soit puisse le calmer. » Non, je ne le pensais pas. Je n’avais pas trouvé la faille en tout cas. Pas encore. Aussi je venais lancer la proposition qui me permettrait d’être plus serein. Je voulais demander une protection à Rob quand je ne pouvais pas être aux côtés de mon amoureux. Néanmoins, Mio Amore le refusait instantanément. Le refus semblait non négociable et je grimaçais aussitôt. Les explications tombaient me faisant soupirer. Son front contre ma tête ne parvenait pas à me calmer. Les autres mots glissaient entre les lèvres de mon amoureux et je rétorquais presque aussitôt « Aaron n’est plus là. Côme n’fait pas parti de cette histoire. Je… F*ck Amore… Quand je ne suis pas là, je ne veux pas que tu sois seul. Il faut quelqu’un à ta protection. » Et ça aussi, c’était non négociable. Il fallait quelqu’un pour veiller sur mon mari quand je ne pouvais pas le faire. Hormis Rob, je ne voyais personne d’autre qui pouvait nous fournir une personne qualifiée pour cette mission. Ou peut-être que Bear avait quelqu’un… Merde, non, je ne voulais pas entraîner quelqu’un d’autre là-dedans. Demander à Rob était la seule solution viable à mes yeux.

Malgré mes propos acérés concernant ma réalité, notre réalité, cela ne semblait guère être la priorité de notre discussion pour ce soir. Ce n’était pas le sujet qui demeurait au bord des lèvres. Il ne revenait pas. Il s’effaçait des paroles prononcées à haute voix. Et, je ne savais pas comment le prendre. Est-ce que ça voulait dire quelque chose de le taire de cette manière ? Est-ce que nous en reparlerions plus tard ? Est-ce que ça avait juste brisé quelque chose ? Putain, je n’en savais rien. Enfin… Si. J’étais persuadé que ça avait marqué au fer rouge. J’étais certain que ça avait provoqué un tremblement de terre qui risquait de me revenir sur la tronche un jour ou l’autre. Ouais, je le savais. Néanmoins, pour le moment, le plus important était ce mec dangereux qui avait tout déclenché. Ce mec qui m’avait poussé à avouer le danger à mon amoureux. Ce mec qui avait ainsi provoqué la discussion de ce soir et ce foutu tremblement dévastateur. Ce mec voulait me faire souffrir et, pour se faire, il désirait s’en prendre à mon mari. Il souhaitait me heurter en s’en prenant à l’homme que j’aimais le plus sur cette Terre. Et, bordel, rien ne semblait être en mesure de l’arrêter dans cette mission qu’il s’était fixée. Ça me déplaisait. Follement. Grandement. D’autant plus que je n’avais pas trouvé la faille qui me permettrait de jouer dans la même cours que lui. Rob ne m’avait donné aucune information sur ce mec. Rien. Le néant. Il fallait que je me débrouille seul pour mener mon enquête. Je savais que ce mec avait un ex et une famille. Est-ce que cela suffisait pour jouer contre lui ? Peut-être ouais. Je n’avais qu’à trouver l’identité de ces personnes pour abattre les cartes de mon jeu. En tout cas, je refusais de mêler mon amoureux dans le combat en direct. C’est pourquoi lorsque sa proposition d’échanger avec notre attaquant tombait, je refusais aussitôt. Je ne lui laissais pas le moyen de discuter. Il en était juste hors de question. Mio Amore ne s’approcherait pas de cet homme capable du pire. Jamais. Mon mari ne rétorquait pas et ça me rassurait parce que je n’avais aucune envie de me mettre en colère de nouveau. J’orientais la situation vers un autre cheminement proposant une protection de la part de Rob à l’homme que j’aimais. Et, bim, je me prenais le retour en plein visage. L’amoureux refusait. Ça me déplaisait. Il fallait que quelqu’un veille sur lui quand je ne le pouvais pas. C’était indispensable. Je l’écoutais exposer son point de vue. Je ne relevais pas lorsqu’il parlait des sentiments que j’avais pour Rob. Ce n’était pas le sujet. Je me concentrais sur ce qu’il soufflait. Ce point de vue avec lequel j’étais d’accord sans l’être réellement. Je n’avais pas de contact avec Aaron comme j’en avais avec Rob. Est-ce qu’Aaron me tiendrait au courant dans la seconde s’il arrivait quelque chose ? Je n’en étais pas certain. Je grimaçais à cette réalité. Et la voix de l’amoureux continuait de lancer trop de mots. Ça me donnait mal au crâne. Toute cette foutue situation me donnait mal au crâne. Passant mes mains dans mes cheveux, je soupirais un long moment avant de me lever. Je m’éloignais de l’amoureux marchant de long en large dans la chambre. L’esprit tournait à toute vitesse pour trouver la solution. Et, lentement, je finissais par exposer la situation « Je veux que tu contactes Aaron… Que tu vois s’il a quelqu’un qui peut te protéger… Pas type garde du corps collé à toi, tu as raison ce serait trop suspect… Mais, quelqu’un qui te garde sous surveillance à distance quand je ne suis pas avec toi… Ainsi tu ne changes pas tes habitudes et Rob n’est pas impliqué… » C’était bien comme solution non ? M’arrêtant soudainement, je plantais mes prunelles dans celles de mon amoureux avant de reprendre « Je ne dis plus rien à Côme Amore… Si tu veux l’informer pour qu’il soit encore plus protecteur envers Aurore, tu le peux… Moi, je ne lui dirai rien… Je ne lui demanderai rien… » Il en était hors de question. Côme et moi ce n’était plus comme avant. Côme était contre Rob et, dans un sens, ça revenait à être contre moi également.

Le changement se faisait sans que je n’ai réellement la main dessus. À force de parler du danger qui planait sur l’homme que j’aimais plus que tout, je m’étais mis à glisser dans ce rôle que j’occupais si bien. Je m’étais transformé passant du mari aimant au mafieux réfléchi. Ça s’était fait si facilement. Cela faisait plusieurs semaines que je m’en étais rendu compte. Ça faisait plusieurs semaines que j’avais bien remarqué à quel point il m’était devenu trop facile de passer d’un statut à celui du mafieux. Ça se faisait en une respiration, en un claquement de doigt. En revanche, il devenait difficile de passer du mafieux à un autre rôle. C’était comme si être ce mafieux était ce qui me correspondait le mieux et ce que je désirais tant conserver. La conversation avec mon mari à propos de ce mec dangereux qui désirait me faire souffrir à travers lui me poussait de plus en plus à glisser dans ce rôle de mafieux. Ce rôle d’homme de Rob. Ce rôle que j’aimais bien. Marchant de long en large dans la chambre suite aux propos échangés, je sentais mon cerveau tourner bien trop vite comme avant. Comme quand j’étais toujours en Italie. Les scénarios se dessinaient dans ma tête. Les issues se dévoilaient dans mon esprit. Je n’étais plus que ce mafieux en quête du meilleur plan. Je n’étais plus que ce mafieux aux veines qui bouillaient de colère et d’envie de violence. Je finissais par souffler les demandes à mon amoureux. Ces demandes sonnaient comme des ordres. Ces propos semblaient ne pas avoir leur place entre nous. Pas de cette manière en tout cas. Et, pourtant, en mode automatique du mafieux, je ne pouvais pas faire autrement que de les balancer ainsi. Je ne savais pas faire autrement. Je m’arrêtais soudainement fixant l’amoureux qui était silencieux. Il ne rétorquait pas à mes ordres et j’en profitais pour aborder vaguement le sujet de Côme et de son absence désirée de mon côté. Mio Amore finissait par me dire qu’il allait voir avec Aaron et j’hochais simplement la tête. C’était réglé. Il n’y avait plus rien à dire. Je m’apprêtais à quitter la chambre pour aller me glisser sous la douche avec l’espoir de chasser toute cette tension qui me bouffait douloureusement. Cependant, Mio Amore attrapait ma main et je ne me dérobais pas du contact. Je suivais sagement. Je m’asseyais face à cet homme que j’aimais et qui laissait tomber les reproches. Yeux dans les yeux, je ne pouvais m’empêcher de grimacer face à ce qui venait d’être dit parce que, merde, je n’avais juste pas contrôlé. Je n’avais pas su compartimenter les choses. Marmonnant un « Désolé… », je venais de nouveau hocher la tête aux propos de mon mari. J’étais d’accord avec tout ça. D’accord pour que Aaron envoie quelqu’un et que je sois en relation avec. D’accord pour que Aaron soit au concert. Il n’y avait rien de plus à en dire. La discussion pouvait se clore maintenant. Ou pas… Je me tendais soudainement lorsque mon amoureux voulait me demander quelque chose et je l’invitais silencieusement à le faire. Il soufflait alors ces mots bien trop dérangeants. Il soufflait cette demande qui me poussait à serrer les dents pour ne pas éclater. Ça me déplaisait beaucoup trop. Il était en train de réduire à néant la seule faille que je pouvais exploiter. Pouvais-je aller à l’encontre de sa demande ? Le mafieux en moi hurlait oui tandis que le mari soufflait un non indiscutable. Je soupirais. Mâchoire serrée, je finissais par souffler « J’peux rien promettre… » Non, je ne pouvais pas lui promettre de respecter cette demande. Lâchant la main de mon mari, je glissais ma main dans mes cheveux avant de reprendre « C’est la seule faille que je vois Amore. La seule faille que je peux exploiter. Je peux te promettre de ne pas leur faire de mal, mais je ne peux pas te promettre de ne pas toucher à sa famille ou à son ex. Pas si c’est ma seule arme contre lui. Pas si c’est mon seul moyen de négocier ta sécurité. » Ma langue glissait sur mes lèvres avec lenteur. J’haussais doucement les épaules comme pour m’excuser de ne pas pouvoir répondre positivement à sa demande. Je baissais les yeux comme si je me sentais un peu trop coupable. Mari qui se sentait ainsi. Mafieux qui ne ressentais pas ça et qui était juste conscient que ce n’était jamais fairplay dans ce monde.