Il est vrai que sur internet, c'est tellement plus facile de parler de ses émotions. On a un écran pour nous protéger, mais si elle m'avait repoussée, le mal aurait été tout aussi douloureux... Sauf que ça n'a pas été le cas. Plutôt, la belle blonde m'a demandée qu'on se voit, histoire de remettre les choses en ordre. Ça fais plusieurs mois maintenant qu'on s'est revu pour la première fois à Harvard et bien qu'on se soit vu quelques fois entre temps, il y avait toujours ce mystère qui planait... ce petit manque de confiance que je ressentais à chaque fois que je la voyais. Pourtant, je suis une meuf assez confiante, toujours certaine de plaire. Mais elle... elle me déstabilise. Toujours. Et même si j'aimerais aimer ça... je déteste, ça m'énerve. J'attends qu'elle débarque à mon appartement... il était vide, mes colocs n'étaient pas là. Je n'invite que très rarement des filles qui me plaisent ici, je garde généralement mes affaires pour les potes ou la famille. J'trouve que c'est trop... personnelle, j'aime pas partager ma vie. Mais Serah, j'ai toujours voulu me rapprocher d'elle, dès le premier baiser.

Finalement, j'entends cogner et mon coeur manque un battement. J'ai choisi de porter des vêtements civiles, rien de plus plat. Je ne savais pas vraiment comment m'habiller en fait... je veux lui plaire, mais je ne veux pas qu'elle pense que c'est rien que pour la duper. Bref, je lui ouvre la porte, toute souriante. Hey. Lui dis-je, en me tassant sur le côté.

Je n’ai pas particulièrement été surprise de tomber sur ton profil alors que je swipais sur Tinder. Ni lorsqu’on a eu un match toutes les deux d’ailleurs. Pour moi, il était clair qu’il y avait un truc entre nous. Quoi exactement? C’était difficile à dire. Mais, clairement, ni toi ni moi n’avions oublié notre rencontre des années plus tôt. Ce qui m’a surprise, c’est plutôt quand tu m’as admis ne pas t’attacher à qui que ce soit à cause de moi. N’ayant jamais été amoureuse de qui que ce soit dans ma vie, je craignais toujours les sentiments d’autrui et tu n’étais qu’un exemple de plus. Pourtant, contrairement à mon habitude, je ne fuyais pas cette fois. Au contraire, j’avais même envie de te voir. J’avais besoin de savoir ce qui se passait réellement entre nous. De le voir de mes propres yeux. Alors je me rends rapidement chez toi, consciente que si tes colocataires étaient présents, il y aurait un sacré malaise –j’ai baisé plus de la moitié d’entre eux. Devant ta porte, je me secoue un peu, me disant que tout ira bien, qu’il n’y a pas de raison pour qu’on soit mal à l’aise toutes les deux. J’affiche mon plus beau sourire et toque. Lorsque tu m’ouvres, malgré ta tenue carrément décontracté, j’peux pas m’empêcher de te trouver belle. « Hey. » J’entre histoire de ne pas laisser la porte ouverte trop longtemps avec le froid qu’on subit et referme derrière moi. « Hey! » Je regarde rapidement la pièce d’un mouvement circulaire des yeux et reporte mon attention sur toi. « C’est joli ici, carrément mieux que ma chambre. » Je ris doucement.

On ne peut pas dire que je suis amoureuse. Après tout, dans les faits, toi et moi on ne se connait pas vraiment. Mais je connais l'image que je me fais de toi depuis des années et je sais que je me décevrais trop de laisser passer cette opportunité qu'on m'a donné d'apprendre à te connaître pour ce que tu es. Mais concernant l'amour, je n'ai jamais été pressé de toute façon... le célibat me va bien, je vois qui je veux quand je veux et advienne que pourra !

La belle cogne à la porte et après un grand souffle, je lui ouvre pour l'accueillir à l'intérieur. Elle me salut à son tour, regarde la pièce avant d'y entrer. Ah plus spacieux surtout ! Je ris un peu et referme la porte derrière elle avant de m'écarter un peu de l'entrée pour la laisser respirer. Je met mes mains sur mes reins, poussant un peu ma poitrine vers l'avant. C'est inconscient, je vous promet, je fais toujours ça quand je suis en mode drague. Alors, t'as pas trop eue de mal à trouver l'adresse ? Tu veux boire quelque chose ? J'ai du café, espresso, du jus, des sodas ou de l'eau... sinon on peut y aller plus fort et se servir des Bloody ceasar.

« Ah plus spacieux surtout ! » J’hoche la tête en riant un peu avec toi. C’est vrai, définitivement plus grand. Et, ayant toujours grandit dans une maison énorme, j’avoue que j’ai eu du mal les premiers temps en chambre à la Mather House. À force, j’y ai étrangement prit goût, mais il m’arrive aussi de rêver d’avoir mon propre appartement. Qui sait, peut-être bientôt. « Alors, t'as pas trop eue de mal à trouver l'adresse ? Tu veux boire quelque chose ? J'ai du café, espresso, du jus, des sodas ou de l'eau... sinon on peut y aller plus fort et se servir des Bloody ceasar. » Je lève les mains en riant. « Une question à la fois steplait! » Je ris de plus belle et commence déjà par retirer mon manteau et le déposer sur la patère à l’entrée. « J’ai pas eu de mal avec l’adresse comme j’ai pris un Uber pour venir et j’aimerais bien à boire oui, un Bloody pourquoi pas! Tu veux de l’aide pour les préparer? » J’aime bien faire des cocktails, c’pour ça. Puis, avec un peu d’alcool dans le corps, tout devient plus intéressant!

Je lui lance un paquet de question, alors qu'elle vient tout juste d'entrer chez moi. Mais bon, c'est comme ça, j'suis un peu nerveuse j'avoue... je ne sais vraiment pas comment imaginer la suite de notre soirée ensemble, puis on peut mêler tout ça au fait que je n'invite pas souvent des gens chez moi. Oui pardon, j'suis pas habituée de recevoir. Je rigole un peu avant de passer ma main dans mes cheveux, puis je dépose mes mains sur mes hanches en croisant les jambes. Putain, je me sens stresser de plus en plus, j'sais pas c'qui s'passe avec moi. Elle s'explique finalement et me propose de son aide pour faire les cocktails. Je peux me débrouiller t'inquiète, mais j'dis pas non à de la compagnie ! Lui dis-je en souriant, avant de marcher vers la cuisine. J'ouvre le réfrigérateur pour en sortir le Clamato, les sauces, puis le congélateur pour la vodka et le placard pour le sel de céleri. Alors... tu disais que ça te faisais plaisir, le petit message ? Voilà. Finalement, j'attaque avec le sourire. De toute façon, bientôt j'aurai un bon verre d'alcool à m'enfiler et tout mes soucis seront loin, loin, loin. Je commence à préparer les bloody ceasar en attendant sa réponse.

« Oui pardon, j'suis pas habituée de recevoir. » J’aurais pu le deviner, mais je ne relève pas. À quoi bon te faire sentir mal alors que t’es visiblement déjà très nerveuse? En réalité, pour une fois, j’suis contente de ne pas l’être moi aussi. La dernière fois qu’on s’est retrouvé dans une situation pareille, l’ambiance était tellement awkward que t’as fuis ma chambre en un rien de temps. Là, on est sur ton territoire alors relaxe, tout ira bien. Puis, avec un peu d’alcool, ce sera encore mieux, non? « Je peux me débrouiller t'inquiète, mais j'dis pas non à de la compagnie ! » Je souris et te suis jusqu’à la cuisine où je me hisse sur le comptoir, m’asseyant sans gêne à côté du bout de comptoir où tu t’es installé pour préparer nos verres. Je profite de ce moment où tu es occupé pour te détailler de la tête aux pieds, ne pouvant que remarquer, une fois de plus, à quel point t’es canon. « Alors... tu disais que ça te faisais plaisir, le petit message ? » Je sursaute pratiquement en entendant la question et penche un peu la tête sur le côté, jouant avec la chaine à mon cou avec un pendentif où il est écrit "petite". « Oui.. d’une manière, j’ai trouvé ça mignon.. » Je souris et me mordille la lèvre.

C'est plutôt terrible à quel point elle m'intimide. Je n'en reviens pas. Lorsqu'elle est dans les parages, je ne me reconnais plus, j'ai même carrément l'impression d'être spectatrice de mon propre malaise. Bref, je l'invite à m'accompagner à la cuisine pendant que je prépare nos deux cocktails, puis soudainement une poussée de courage m'est venue et je lui pose la question qui nous amène directement au coeur du sujet. D'une façon assez adorable, elle m'annonce qu'elle a bien appréciée ouais... qu'elle a trouvé ça "mignon". Ce mot-là, j'peux pas l'entendre, pas comme ça. J'suis pas mignonne ou du moins, j'veux pas l'être. Elle se mordille la lèvre et je ne peux m'empêcher de repenser au soir de notre rencontre... Et si j'ai pas envie que tu trouves ça rien que "mignon" ? Il se passe quoi ? Lui dis-je, avant de laisser mes yeux tomber à nouveau sur ses lèvres. Cette fois-ci, je les admire plus longtemps... et volontairement, je ne suis pas subtile du tout en me mordant la lèvre à mon tour.

Je te regarde en me mordillant la lèvre, geste sans grande subtilité, mais j’en ai marre de faire dans la subtilité avec toi en fait. « Et si j'ai pas envie que tu trouves ça rien que "mignon" ? Il se passe quoi ? » Apparemment, toi aussi. Mon sourire s’agrandit un peu plus et j’humecte mes lèvres, lentement, consciente que tu les regardes. « Ça peut s’arranger j’imagine.. » Mes deux mains sur le bord du comptoir, je me penche un peu vers l’avant, vers toi, ne te quittant jamais des yeux. Plus j’approche et plus j’ai l’impression de pouvoir palper l’électricité dans l’air entre nous. Je rêve pas alors? Toi aussi t’en a envie, pas vrai? Dis-moi Marzia, tu y penses depuis la première fois où on s’est vu? Parce que moi, j’arrive pas à penser à autre chose. C’est facile pour moi d’avoir qui je veux et quand je veux. Moi toi, tu sembles toujours hors de ma portée. C’est bon et ça m’embête un peu –beaucoup. Mon regard alterne entre le tiens et tes lèvres et, lorsque je suis suffisamment proche, je lâche le comptoir d’une main et attrape ton menton entre mon pouce et mon index pour t’attirer vers moi. Je ne t’embrasse pas tout de suite, faisant durer le plaisir j’imagine, effleurant seulement tes lèvres des miennes, surveillant ta réaction.

C'est comme si le gros morceau a été craché et maintenant, je peux moindrement redevenir moi-même. Je suis frustrée, je l'avoue, qu'elle me considère comme une fille "mignonne"... elle a sans doute remarqué que lorsqu'elle est là, je perds la face et le malaise se fait présent très vite. Pour une fois, je me sens moindrement en contrôle même si je ne me voile pas la face... la gêne peut revenir n'importe quand, surtout si elle me rejette. Sauf que c'pas le cas. Serah me dit que ça peut s'arranger et son regard sur moi en dit très long. Elle vient m'enfermer entre elle et le comptoir et je fixe ses lèvres qu'elle humecte suggestivement. Ce moment entre nous me rappelle aussitôt notre deuxième baiser, celui qu'on a eu dans la salle de bain... La tension était tellement haute qu'on pourrait la couper avec des ciseaux. Serah a eu mon premier baiser avec une fille, mais elle n'a pas été la dernière et depuis le temps... j'ai appris beaucoup de choses.

Elle se rapproche, mais ses lèvres ne touche pas les miennes... ou en tout cas, pas complètement. C'est fou, rien que la frôler me rappelait un paquet de souvenir et ces souvenirs, m'allument aussi bien qu'un briquet et de l'essence. Au bout de l'attente, sa main délicate se pose sur ma joue et un frisson parcourt le long de mon échine. Un sourire apparait sur mes lèvres, je ne l'embrasse pas non-plus... parce que je connais son petit jeu, oh putain ouais... je l'ai joué souvent avec d'autres. D'ailleurs, c'est moi qui l'ait inventé. Tu ne vas pas m'embrasser, hein ? Lui demandai-je, purement innocemment.

Tu restes là, face à moi avec le nécessaire pour préparer nos verres sur le comptoir devant toi. Tu ne bronches pas lorsque je me penche vers toi, ni lorsque ma main touche ta peau, mes doigts t’attrapant par le menton pour t’approcher encore plus. Nos lèvres s’effleurent sans vraiment se toucher, je guette ta réaction et je vois ce sourire qui étire finalement tes lèvres. « Tu ne vas pas m'embrasser, hein ? » Je relève les yeux sur toi, probablement trop près pour te regarder comme ça, mais je m’en fiche. « Non.. » J’en meurs d’envie, mais je veux pas être la première à céder. Mauvaise idée? Nah. Quelque chose me dit que c’est exactement le genre de jeu auquel tu aimes jouer, je me trompe? J’crois pas pourtant. « Et toi? » Je fais l’innocente, mais il n’y a personne d’innocent ici, pas vrai?