Bien que sauvages, nos rapports sont toujours autant ponctués d'une affection impressionnante. Elle a beau me griffer, me mordre, faire le vampire, on se dit de belles choses, toujours, et depuis nos débuts. J'apprécie vraiment cette tendresse entre nous, couplée avec cette rudesse. C'est ce qui fait que notre relation est plus que parfaite, telle qu'elle est. « Tu es la personne la plus innocente au monde, un peu comme mon père avant qu'il se fasse descendre par les flics. » Je lui souriais, amusée par la situation. C'était marrant de la voir courir dans toute la pièce pour échapper à mon attaque de sauce. Quand je l'ai enfin eue, et qu'elle me posait cette question, je collais mon corps au sien, encore une fois. « En effet, tu me donnes faim. Mais faut que je surveille la nourriture... » lui dis-je en attrapant son visage avec mes doigts, pour déposer un léger baiser sur ses lèvres, et je m'éloignais d'elle, pour reprendre la préparation de la recette, en jetant un regard en coin à la jolie brune.

Je ne m'attendais pas à ce qu'elle me compare avec son père, aussi naturellement, sans une pointe de tristesse à l'idée d'en parler. Alors que moi, je n'ose pas parler du mien, même s'il est vivant mais qu'il ne veut plus entendre parler de moi, même si je gère bien ma vie. Le pire, c'est qu'elle s'amusait de ça. Je pense qu'elle cache un profond mal-être derrière son sourire, mais c'est pas le problème. « Euh, ouais, si tu veux. » Je ne savais pas quoi dire, en vérité. C'était vraiment trop bizarre d'être comparée à un mec mort depuis limite vingt ans. Puis elle m'embrassait doucement, sans que je m'y attende. Elle me complimentait, aussi. Je me sentais vraiment bien à cet instant précis, et je la laissais filer cuisiner, tout en la regardant, un large sourire aux lèvres. Sans un mot.

Parler de mon père mort n'a jamais été un sujet triste pour moi. Il a fait ce qu'il pensait mieux pour ma mère et moi, et au moins, on a jamais eu de problèmes avec les gens avec qui il trainait, ou avec qui il avait des problèmes. Je le vois comme un héros à sa façon, même si cela impliquait une vie sans paternel. Il aurait pu crever autrement, et moins dignement, comme avec une seringue dans le bras, ou un truc tout aussi joyeux. « Mais t'es plus sexy que mon père. Du moins, à mon goût. Parce que j'tiens pas mal de lui. » Je voyais bien qu'elle était abasourdie par ce que j'avais dit, donc je rattrapais le truc, pour éviter de bloquer la soirée. Quand je m'occupais de la nourriture, je la voyais me regarder, avec ses yeux de biche et son sourire. « Tu vas baver, arrête de me dévorer des yeux comme ça. » dis-je en riant. J'adorais ça, en vérité.

Quand elle me disait qu'elle tenait pas mal de son père, un léger rire venait casser mon étonnement. « Il devait être super canon, pour un homme. Vu la bombe que t'es. » Sérieux, cette fille, elle est trop bonne. Je pourrais passer ma vie entière à la mater. Déjà, rien que ses yeux, c'est comme voir la mer pour la première fois. Une fois que t'es dedans, t'as plus envie d'en sortir. Ensuite, sa bouche pulpeuse dans laquelle t'as envie de croquer, comme dans un putain de sandwich après une sale cuite. Et son corps, j'y tartinerai bien du nutella tous les matins. Je sortais de mes pensées quand elle captait que j'étais à deux doigts de baver. « T'avais qu'à être moche. C'est de ta faute ! » Je venais me placer derrière elle, puis je lui faisais un câlin, déposant un petit bisou dans son dos.

Je n'avais aucun souvenir de lui. J'ai simplement quelques photos qui traînent à Providence, chez ma mère, et les choses qu'elle me disait de lui. Comme quoi j'avais le même regard, les mêmes mimiques parfois, et le même sourire. Ca fait beaucoup, c'est vrai, mais s'il était encore en vie, il n'aurait pas pu contester sa paternité. « Et le mélange avec ma mère, ça donne ça. » dis-je en faisant la fière. Un peu comme les meufs dans Thirteen. Quand elle est venue contre moi, je me sentais bien, aimée. Ca faisait du bien, et je ne pouvais pas m'empêcher de sourire. « Tu surveilles les pâtes, s'te plait ? La sauce, c'est presque prêt. Et j'adore quand tu fais ça. » dis-je en tournant ma tête au maximum vers elle, avant d'attraper sa main pour y déposer mes lèvres.