Je sentais une pointe de tristesse dans sa façon de parler, mais son sourire savait bien trahir toutes ses blessures. Elle a toujours eu cette capacité à cacher ses maux derrière son sourire, et c'est certainement grâce à ça qu'elle s'en tire si bien dans ses études de psychologie. La psychologie positive. Cacher sa douleur derrière des sourires, des rires, des éclats de joie, pour dissimuler ses cicatrices encore ouvertes. Qui ne l'a jamais fait ? Je déposais mes lèvres délicatement sur les siennes, pour lui prouver qu'elle aura toujours une place importante dans ma vie, quelque soit l'avenir. On ne sait jamais, après tout. Elle pourrait trouver une nouvelle personne pour partager sa vie, l'épouser et finir sa vie avec, et inversement. Mais elle restera la première. Je lui souriais à nouveau, pour lui laisser libre court à ses envies.

Jaimie restait silencieuse, elle se contentait de sourire et de m'embrasser doucement. Elle sentait quelque chose que j'essayais de cacher tant bien que mal, mais ne posait pas de questions. J'étais sauvée. Qu'elle est belle, mon italienne, avec ses yeux bleus dans lesquels j'adore me noyer, sa peau douce et tatouée, son sourire qui fait fondre. Je venais à mon tour l'embrasser, plus longtemps, sautillant pour accrocher mes jambes à ses hanches, me laissant porter par elle, et par mon envie de lui appartenir, au moins ce soir. Me souvenir ce que ça fait, d'être à elle. Je lui laissais tout le pouvoir, toute ma personne. Pardon les voisins, mais avec elle, je ne réponds plus de rien, et c'est pas ma faute.

Elle se maintenait à moi, ses jambes accrochées autour de moi, ses bras également. Ses lèvres dévoraient les miennes, dans une envie qui semblait la consumer comme jamais. Il y avait bien longtemps qu'elle ne se montrait pas ainsi envers moi. C'était comme si elle voulait à nouveau se donner à moi, complètement, émotionnellement, sentimentalement, sensuellement, physiquement. Une mise à nue entière, dans un baiser, dans des gestes, sans un mot. Comme si les phrases gâchaient une magie qui naissait en elle et qu'elle préférait tout taire. Je promenais nos corps à travers la pièce, jusqu'au premier lit qui passait, pour nous poser, sans quitter ses lèvres un seul instant. J'étais dans cette phase euphorique, qui laisse toutes ses pensées loin, pour profiter de ce qu'il se tramait.

Mon corps entier pouvait me trahir sur mes envies. Je voulais plus d'une nuit, mais je me contentais de l'avoir. Elle mène la danse, nous balade dans la chambre étudiante que j'occupe, et nos baisers se trouvent toujours plus fougueux. Elle m'allonge sur un lit, mais je n'ai aucune idée duquel. Elle n'agit pas plus, comme si elle voulait que je prenne les choses en mains. Je venais embrasser son cou, caresser ses hanches du bout des doigts, provoquant des frissons chez elle comme d'habitude. J'arrivais à peine à murmurer « Tu me rends folle, Jaimie... » avant de perdre tout contrôle de moi-même. Je n'en pouvais plus, je la voulais, entière.

Les choses prenaient de l'ampleur. Nos corps se liaient, brûlaient de désir, d'envie, de plaisir. Chaque caresse, chaque baiser, devenait une arme de séduction massive, jusqu'à l'explosion finale. Nos corps étendus, couverts de sueur, marquaient la fin du premier round. Je l'avais rendue folle, encore plus qu'elle n'osait l'imaginer. Allongée, dénudée, je regardais Emilia, à moitié endormie par l'explosion de sensations, puis je me rendais compte que j'aimais bien ces petits moments. J'esquissais un sourire, avant de me lever du lit pour aller pisser un coup. Laissant la porte des toilettes ouvertes, je lui demandais « T'as faim ? J'vais commencer la carbo. » Je sortais des commodités après les règles d'hygiène rudimentaires et je sortais tout ce qu'il fallait pour cuisiner. « Tu m'allumes une clope, s'te plait ? » demandais-je alors. Cigarette after sex comme on dit.

Bordel. Je suis toute retournée. Je ne sais plus où se trouvent ma gauche et ma droite, ni comment je m'appelle, où j'habite. J'ai du mal à tenir éveillée après ce qu'on vient de faire, et pourtant, je lutte, pour regarder ses yeux, les courbes de son corps. Le lit est défait, mes cheveux sont en bordel, et je la contemple, jusqu'à qu'elle quitte le lit. Je la regarde partir nue, et j'apprécie le spectacle. Quand elle me demande si j'ai faim, je ne peux pas m'empêcher de rire. « Je sais que t'as toujours faim de moi, mon coeur, tu devrais pas te cacher. » En effet, j'avais la dalle. Alors quand j'ai vu qu'elle allait vraiment préparer à bouffer, j'étais la plus heureuse. En plus, elles sont trop bonnes ses pâtes. Je lui allumais sa clope et venais lui emmener. « Fous pas de la cendre dedans, hein. Sinon je vais t'en vouloir à mort ! J'ai trop faim. »

Elle a eu ce qu'elle voulait, et maintenant, elle taquine. Ca m'amuse de voir qu'elle est plus détendue, je préfère cette situation, plutôt qu'une embrouille de merde ou un questionnement perpétuel, qui provoque l'enfermement, la rupture de la communication et tout le reste. « C'est vrai, j'adore te croquer. T'as plutôt bon goût, bébé. » A chaque fois qu'on couche ensemble, on se donne des petits noms affectifs comme "mon coeur", "mon amour" et autres trucs du genre. Ca nous donne l'impression d'être un couple normal, alors qu'on est pas un couple du tout. Chacun son délire, nous, on a la liberté de faire ce qu'on veut, quand on veut. Et putain, j'adore ces libertés. « Tu crois que je sais pas faire attention à ma clope et à ma sauce ? Tu te souviens quand on s'est battues avec la sauce des bolognaises il y a trois ans ? T'en avais partout. Bah là, ça serait avec la carbo, si tu me cherches ! » dis-je en riant, avant de tremper mon doigt dans le pot de crème et lui en mettre sur le nez, après avoir récupéré ma clope.

J'adore quand elle me complimente, quand elle a des petites attentions envers moi. C'était comme si j'étais réellement plus que sa meilleure amie, et ça me fait me sentir bien. Je sens dans sa façon de faire qu'elle ne me voit pas comme la fille à qui elle écarte les cuisses une fois de temps en temps. « T'es plutôt bonne, toi aussi. » Je lui adressais un large sourire, super heureuse de ce qu'il s'était passé entre nous juste avant. Puis elle est sexy, quand elle cuisine nue. Elle me rappelait la bataille de sauce tomate, avant de m'en mettre sur le bout du nez, cette garce. Pour me venger, je trempais aussi mon doigt dans la crème pour lui en mettre sur la bouche. « Tu viens de déclarer la guerre ! » dis-je alors en riant, m'enfuyant où je pouvais.

Plus je regardais Emilia, plus je me posais des questions. Est-ce qu'il serait possible qu'un jour, elle et moi, on puisse renouer des liens amoureux, comme avant ? Où est-ce que cette amitié prendrait trop de place, au point qu'avec l'habitude, on termine sur des tromperies ? Je ne préférais pas me questionner trop profondément. « Je sais que je suis bonne, j'ai vu la marque que tu as fait dans mon cou. » répondis-je alors en riant, en pointant mon doigt sur le suçon qui se trouvait à droite de mon cou. La bataille de sauce avait commencée, c'était officiel. Quand elle m'en foutait sur les lèvres, je lui courait après dans la chambre, le pot à la main, jusqu'à que je parvienne à la coincer dans un coin. Premièrement, je l'embrassais pour me débarrasser de la sauce, et deuxièmement, je glissais mes doigts à l'intérieur du contenant, et je tartinais son bas ventre, avec un sourire amusé et sadique à la fois. « Tu veux être la viande de la carbonara ? » Je riais comme une enfant. L'enfant que je n'ai jamais été.

Pendant qu'on faisait l'amour, je me suis légèrement emportée sur elle. Entre les griffures et le suçon énorme qu'elle a dans le cou, autant dire que j'ai un peu marqué mon territoire. Comme ça, au moins, je suis sûre qu'elle pourra pas trouver une autre fille dans les trois jours à suivre. Je suis super maligne, des fois. Quand elle me faisait remarquer qu'elle l'avait vu, j'éclatais de rire. « Pourquoi tu m'accuses ? Je suis innocente, moi ! » Bien sûr, Emy. C'est la porte qui lui a fait cette trace, on y croit très fort. Elle me courait après, avec son pot de crème fraîche à la main, et elle m'a eue entre le lit et le mur. J'étais dans la merde, du coup. Mais bon, comme elle m'a embrassée, même si c'était pour me refourguer sa crème, j'étais contente. Jusqu'à qu'elle me tartine comme un toast de Nutella sur le bas ventre. « Vas-y t'abuuuuuses ! T'as faim que tu me vois comme de la viande ? » Je riais, bloquée face à elle, qui était trop mignonne comme ça.