Mon père, Michael Kenneth Miller, natif de Los Angeles, a rencontré ma mère Aylina Catalina Garcia, native de Barcelone, à l’université d’Harvard, lors de leur deuxième année d’étude. Entre eux, ça a été le coup de foudre, dès le premier regard. Tant et si bien, que chacun faisait tout pour croiser l’autre, dès qu’il en avait l’occasion et aussitôt leur premier baiser échangé, ils ne se sont plus jamais quittés. Huit ans plus tard, une fois diplômés d’Harvard, les deux amoureux ont décidé de s’unir devant leurs familles respectives pour le meilleur et pour le pire et quelques semaines après leur nuit de noces, maman a eu le plaisir d’apprendre à mon père qu’elle était enceinte. Toutefois, ce n’est que lorsqu’elle était enceinte de quatre mois, que nos parents avaient décidé d’annoncer la merveilleuse nouvelle à leurs familles, en annonçant par la même occasion que ce premier enfant serait un garçon. Voilà donc, comment cinq mois plus tard, un petit Mike a vu le jour. Brun comme mon père, il avait toutefois hérité du regard bleu ciel de notre mère. Autant dire qu’il allait en faire craquer des jeunes filles, quand il serait plus grand. Enfin, ça c’est ce que mes grands-parents n’arrêtaient pas de dire à papa et maman, à chaque fois qu’ils voyaient Mike. Quatre ans et demi plus tard, en juin 1991 plus précisément, c’est de nouveau avec une joie immense que maman a annoncé à notre père qu’il allait de nouveau être papa. Tout comme pour Mike, ils ont préféré attendre que maman soit enceinte de quatre mois et demi, avant d’annoncer à toute la famille, ainsi qu’à mon frère aîné, qu’ils allaient avoir une petite fille quelques mois plus tard. Et voilà, comment moi, Mackenzie Aylina Miller, je suis venue au monde le 6 février 1992, dans la grande ville de Boston, à 4h00 du matin.

Mon grand frère et moi nous avons toujours été très proches l’un de l’autre et ce depuis que nous étions enfants, malgré nos cinq ans de différence. Quand il a été en âge d’aller seul à l’école, c’est lui qui m’emmenait à l’école, plus ma nounou. J’aimais bien ces moment-là. Puis, petit à petit, en grandissant, j’ai eu petit à petit un peu plus de mal à supporter la présence de mon frère aîné. Notamment à l’âge de l’adolescence. Alors que je pouvais moi aussi aller seule au collège, ce dernier trouvait toujours un moyen pour se trouver sur mon chemin et ceci, soi-disant par hasard. Si la première fois je l’ai cru, au bout d’une semaine, j’ai fini par me rendre compte qu’en réalité ce dernier me suivait toujours de loin et surveillait tous mes faits et gestes. Me sentant alors trahie après avoir constaté cela, j’avais décidé de ne plus adresser la parole à Mike. Oui enfin, rassurez-vous, j’ai beau être très rancunière vis-à-vis des personnes qui me font du mal ou font souffrir mes proches, quand il s’agit de mon frère ou de mes parents, je ne le suis pas du tout. Voilà comment après une journée à peine, j’avais changé d’avis et recommencé à parler à mon frère aîné. Toutefois, qu’il n’aille pas croire que je lui avais pardonné, parce que c’était loin d’être le cas. Il savait très bien que je ne le laisserai pas recommencer à m’espionner comme il l’avait fait auparavant, sans rien dire à nos parents. Non, il n’avait pas peur de nos parents, moi non plus d’ailleurs, mais il les respectait tellement, qu’il ne voulait rien faire pour les décevoir.  

En septembre 2005, lors de mon entrée en quatrième, mon frère a fait son entrée à l’université d’Harvard et petit à petit, nous nous sommes un peu éloignés l’un de l’autre. Et pour cause, à contrario de son meilleur ami, ce dernier avait décidé de vivre pleinement sa vie d’étudiant et c’est la raison pour laquelle il avait décidé de vivre sur le campus et de ne rentrer à la maison que pour les vacances scolaires. Bien sûr, au départ je lui en ai un peu voulu de me tenir à l’écart de sa vie et de s’être éloigné de moi comme ça, du jour au lendemain, mais en grandissant, j’ai fini par comprendre qu’il avait besoin, tout comme moi, de prendre son indépendance et dès lors nos rapports se sont améliorés. Ce dernier menait sa vie à Cambridge et venait nous voir de temps en temps, cependant il n’oubliait jamais dans ces moment-là ou alors au téléphone, de me demander si j’avais rencontré quelqu’un. Ce à quoi, je lui répondais toujours que cela ne le regardait pas, histoire qu’il comprenne qu’il n’avait pas son mot à dire s’il s’avérait que ça pourrait être le cas. Après tout, lui, il faisait bien ce qu’il voulait avec les filles, alors pourquoi moi je devrai lui donner tous les détails de mes relations avec les mecs ? Jamais je ne me serai permise de lui demander s’il avait une copine, à chaque fois qu’il était de retour de chez nous, alors pourquoi, sous prétexte qu’il était mon frère aîné se permettait-il de le faire ? C’est lors de ma deuxième année de lycée que j’ai rencontré ce jeune homme qui a été mon premier amour. Notre histoire a commencé un mois après ma rentrée en première, puis elle s’est terminée lors de notre dernier mois de terminale. Ce n’est pas une histoire d’infidélité qui nous a séparée, mais un choix d’université différent. Alors que j’avais choisi d’intégrer Harvard, lui il avait choisi d’intégrer une université londonienne, la très célèbre université de Saint Andrews, université dans laquelle, sa mère avait autrefois étudiée elle-même, avant de trouver la mort dans un tragique accident de voiture, avant même d’obtenir son diplôme en droit. Bien sûr que nous avons souffert de cette rupture tous les deux, cependant on savait d’avance qu’avec nos choix d’université, notre histoire d’amour aurait forcément une fin un jour et c’est pourquoi, après avoir obtenu nos lettres d’admission, nous avons pris la décision de rompre d’un commun accord.  

C’est à dix-huit ans que j’ai fait mon entrée à Harvard et alors même que j’étais en première année, mon frère lui, en était à sixième année. Nous étions alors en 2010 et jamais nous n’avions pensé, lui comme moi, que sa dernière année universitaire serait aussi sa dernière année de vie. Et oui, trois ans plus tard, alors même que j’étais en quatrième année de théâtre et lui en neuvième année de médecine, ce dernier a perdu la vie lors des attentats à la bombe qui eurent lieu à l’université. Ce jour-là, j’étais en cours de théâtre et mis à part les quelques murs qui se sont effondrés suite aux explosions des bombes, aucun d’entre nous n’avait été blessé gravement, contrairement à d’autres étudiants qui eux, se trouvaient ailleurs sur le campus. Mike lui, se trouvait sur le parking de l’université quand les bombes ont explosées et malheureusement, contrairement à moi, ce dernier n’est pas sorti vivant de cet attentat à la bombe. Vous vous doutiez bien qu’après ce drame, il m’a fallu quelques mois pour remettre de ce drame, cependant, même si je n’avais plus trop la tête à étudier, j’ai tenu à continuer d’aller à l’université, pour ne pas rester seule chez moi, avec mes parents et m’enfoncer dans une déprime de laquelle je risquais de ne plus sortir. Evidemment que mon frère me manquait et que je regrettais énormément que cette bombe ne m’ait pas prise moi aussi, mais je devais me rendre à l’évidence, j’étais encore en vie et mes parents n’auraient sans doute pas supportés que leurs deux enfants soient morts lors de cet attentat. Puis petit à petit, au fil des mois, nous avons réussi à nous reconstruire peu à peu et même si d’autres drames ont eu lieu au sein de l’université, mon envie d’étudier et d’être diplômée d’Harvard tout comme mes parents l’avaient été avant moi n’avait pas disparu. Voilà pourquoi malgré tout cela, j’avais décidé de rester étudiante de cette université, malgré le fait que mes parents m’aient demandé à plusieurs reprises, notamment après les prises d’otages qui ont eu lieu au sein d’Harvard, de changer d’université, tellement ils avaient peur de me perdre moi aussi.

Aujourd’hui, j'ai vingt-cinq ans et je suis étudiante en septième année de théâtre et de langue étrangère. Bien que mes parents craignent toujours pour ma vie, à chaque fois que je me trouve à Harvard, ils ont décidé de me faire confiance et de prendre sur eux. Enfin, je pense que le fait que je revienne souvent à la maison et que je ne vive pas au sein du campus, ça les a aussi beaucoup aider à accepter ma décision de rester étudiante dans cette université qu’ils avaient tant aimé autrefois. Côté cœur, je suis célibataire et même s’il m’arrive parfois d’envier mes amies, je vis très bien mon célibat pour le moment. Si l’amour doit entrer de nouveau un jour dans ma vie, il viendra, je lui fais confiance et je ne le rejetterai certainement pas. En attendant, je vis au jour le jour, sans me prendre la tête, car je sais que la vie est trop courte et je sais aussi que Mike n’aurait certainement pas apprécié que j’abandonne tout à cause de sa soudaine disparition.