Je suis née un soir de printemps à San Diego, dans une famille aisée qui avait tout pour satisfaire une petite fille comme moi. Mon père, un mexicain au sang chaud, était un célèbre journaliste et il s'absentait souvent, du coup, je restais le plus souvent en compagnie de ma mère. Nous avions créé un lien très fort. Je la prenais comme mon modèle, à me maquiller très tôt, à essayer ses vêtements et à faire semblant de défiler devant un public. Ma mère, grecque de naissance, était un ancien mannequin mais quand elle est tombée enceinte de moi, elle a abandonné sa carrière pour s'occuper de moi. J'appréciais toujours ce geste, car je savais ô combien elle aimait sa passion. J'avais tout pour être heureuse dans ce monde de luxe, je me prenais pour la petite princesse innocente, car au fond je pouvais devenir la vilaine sorcière.

Dès que j'ai commencé l'école, j'ai commencé aussi à faire ma loi, à diriger tout, je faisais ma petite capricieuse qui donnait des ordres. J'avais mon petit groupe d'amies, habillées comme moi, coiffées comme moi, bref j'aimais bien être clonée et être mise en avant. Souvent on dit que les petites pestes méchantes cachent en réalité une souffrance, et bien c'était le cas avec moi. Ma mère m'avait dit qu'il fallait que je me batte, que personne ne pouvait m'atteindre. Une fois avoir eu l'âge pour entrer à l'université, suivant le chemin universitaire de mon père, je n'ai pas hésité à m'inscrire dans l'université de San Diego. Tout se passait bien, la vie au campus était une nouvelle bouffée d'oxygène. Mais le jour le plus triste de ma vie, c'était le jour de la mort de ma mère. Je n'avais pas cours le jour où ça s'est passé, j'étais dans l'appartement d'une amie, en train de lui mettre du vernis pour la préparer pour son rencard. Quand soudain, tout est allé si vite. Des gens hurlaient dans la rue, tout le monde s'agitait. On était en panique totale. Je ne sais plus trop comment ça s'est passé, mais je pense que je me suis évanouie car j'avais trop les boules. En me réveillant, j'ai appris que ma mère avait été assassinée alors qu'on lui tentait de lui voler son sac.

C'était ma mère, ma maman qui venait de perdre la vie pour une raison absurde. Elle n'avait rien fait, elle ne méritait pas cela. Depuis cet accident, je me renferme comme une coquille dès qu'on essaye de s'approcher de moi. Je venais de perdre ma mère. Il ne restait plus que mon père avec qui je m'éloignais au fur et à mesure du temps. Il était tout le temps à droite et à gauche pour son travail. Je me dis que ce n'est juste qu'une question de temps avant de le perdre aussi. A 19 ans, j'en ai eu ras le bol. J'ai dû devenir une femme toute seule, une femme forte et autonome. J'ai abandonné mes études de compta que je n'aimais pas et j'ai été rejoindre des amis à Cambridge. Cambridge que j'aime tant, j'ai tout de suite été charmée. Tellement, au point de vouloir faire ma vie ici et d'essayer l'examen d'entrée à Harvard. Comme un vrai compte de fée! Avec ce changement de vie complet, je sais maintenant que plus rien de peut m'atteindre, que quoi que je fasse, ma mère est fière de moi. J'espère que mon père le sera aussi, quand il se rappellera qu'il a une fille.