« Enlève tes coudes de sur la tables mon ange. Tiens-toi droite et mange proprement. » Elle me sourit et m’effleure du bout des doigts ma joue gauche avant de s’attarder sur la servante qui déposait les plats su la table. C’était tous les jours le même rituel, les mêmes règles à appliquer pour être et devenir une jeune femme irréprochable. Je respectais les mœurs qu’on m’imposait et les réceptions, les galas de charité à répétition. J’étais sage, un vrai petit ange et mon visage ne pouvait pas me trahir. Seulement à l’intérieur je me préparais à exploser. J’étais une vraie cocotte minute qui prête à ébullition et bientôt on ne pourrait plus m’empêcher d’être différente, d’être ce que je ne suis pas.

« Thémis, je ne te reconnais plus ! Mince, tu as tout ce que tu veux, tout et tu te sens obligée à sortir ! Mais regarde ton état ! Ils t’ont forcée à faire quelque chose ? Dis le moi chérie ! » Je me revois la regarder avec un air de désolation, elle m’exaspère. « Maman, dis un putain de gros mot, lâche toi ! » J’enlève ma robe moulante et courte très courte même en la défiant du regard. J’ai 15 ans, je pue l’alcool à plein nez, dans ma tête je suis une vraie rebelle. Je faisais le mur pour retrouver mes amis et je sortais, j’avais peur de rien. J’étais assez grande pour mon âge et bien formée alors en boîte de nuit c’était un détail pour que le vigile me laisse rentrer. J’avais besoin de ça pour me sentir vivre, pour m’échapper de ces petites robes en col-claudine et de cette école hors de prix.

Ma mère et mon père se tiennent à mes côtés l’air horrifié dans cette chambre d’hôpital toute blanche. Je transpire, j’hurle, j’ai peur. Elle se tient près de moi, tout près et elle pleure alors que moi je souffre le martyre. J’ai apprit que j’étais enceinte au septième mois, un déni de grossesse. Le fœtus est mort en moi, dans mon ventre et ils allaient me l’enlever. Je les revois m’emmener au bloc, une piqure dans mon bras puis plus rien. J’ai passé quelques jours à l’hôpital après l’opération, puis je suis rentrée chez mes parents. Je ne parlais plus étant complètement choquée par ce qui m’étais arrivé. J’achetais du shit, et buvais en cachette dans ma chambre pour essayer d’oublier qu’à 15 ans je m’étais faite engrossée sans m’en rendre compte et que mon bébé était mort, en moi.

Mes parents m’ont envoyé en clinique psy, J’ai vu un psychologue qui m’a ensuite inclut dans un groupe de parole et ça a été ma descente aux enfers. Je l’ai tout de suite remarqué au milieu de tous ces adolescents boutonneux, il était tellement … captivant. J’ai retrouvé la parole grâce à lui, il a réussit à me faire sortir de cette bulle infernale qui commençait à me rendre folle. Il venait dans ma chambre le soir en douce, on fumait des joints et on s’enfilait une bouteille d’alcool. En un mois on était devenu Laurel et Hardy voir Bonnie & Clyde. Aucun remord à voler les autres patients à coucher ensemble sur le bureau des médecins, rien ne nous retenait. Mes parents ont vite prit connaissance des faits et m’ont retirée immédiatement de la clinique et nous avons déménagé. Je n’avais aucune idée de comment le joindre, ne connaissais ni son nom de famille ou son adresse alors j’ai écrit pendant plusieurs mois à la clinique sans aucune réponse.

Mes parents et moi devions déménagés à Stanford, ils ont donc avancé la date histoire de m’éloigner de cette ville qu’ils considéraient comme nuisible à ma santé. Je me suis renfermée sur moi-même les premières années et finalement je me suis habituée à cette nouvelle vie. J’ai passé 4 ans à l’université de Stanford où j’étais concentrée à fond sur mes études et n’ai plus retouché une seule fois à un verre d’alcool ou à un joint. Mais après avoir validé ma quatrième année j’ai décidé de partir à Harvard où j’ai été reçue haut la main. J’avais besoin de m’épanouir sans mes parents et commencer une nouvelle vie. Je suis donc à Harvard depuis un an maintenant, j’entre à présent en sixième année d’histoire et d’archéologie.