Ici les jours passent et se ressemblent. Je suis passée du camping en Arizona à l'hôpital de Cambridge alors c'est assez logique que tout me paraisse ennuyeux, fade, sans parfum, sans goût ici... Tout n'aide pas à faire passer les jours plus vite il n'y a pas à dire. Heureusement depuis quelques jours les amis sont rentrés et le Summer Camp est terminé mais quand même, cette chambre blanche, très blanche, trop blanche va surement me faire devenir folle si je dois encore y passer plus d'un mois. Et oui nous sommes le deux septembre et je dois accoucher seulement le vingt sept octobre normalement, il y a encore du temps ! Trooop de temps. Les visites défilent, les infirmières aussi et je me demande quand Priape va pouvoir passer aujourd'hui. J'allais faire une petite sieste pour faire passer le temps lorsque la porte s'ouvrit et une blouse d'infirmière entra. Chevelure rousse de feu, ma cousine était là. Qu'est ce qu'elle faisait là ? Bonne question que je ne tardais pas de lui poser. « Tu t'es trompée de chambre ou bien ? » Ou bien elle essaye de venir me tuer ? Enfin elle sait bien que Priape ne lui pardonnera jamais hein ? Je ne prends pas peur mais je commence un peu à m'inquiéter, je suis pas sûre qu'elle fasse son job aussi bien si elle a à le faire sur moi alors ça m'inquiète.

Pourquoi les fiches de chacun des patients ne contiennent pas les différends avec les médecins ? Je n'en sais rien mais ça aurait surement évité cette situation. Evité de devoir me poser la question si je suis assez folle pour faire confiance à ma chère cousine qui me déteste ou pas. Même si la question ne se pose bien sûr pas, je sais qu'elle est compétente. « Toi et moi on est pas ridicules à ce point. » Oui c'est ma réponse. Ca veut dire qu'elle peut rester, qu'elle peut faire son métier, sur moi. C'est bizarre comme situation, c'est inédit et ça ne se reproduira surement plus parce que Zoïa regardera surement le nom du patient avant d'entrer la prochaine fois, mais c'est ainsi alors faisons vite. Ou profitons pour lui envoyer quelques piques mais pas sur le sujet habituel. « Je suis que t'es incompétente émotionnellement pour tout sentiment familial ou ce genre de chose, mais tu ne l'es pas dans ton métier alors fais ce que tu as à faire. » Vérifier des constantes, poser les questions de base, ce genre de chose, même moi je savais le faire alors que je n'allais rentrer qu'en cinquième année dès que le petit bouchon dans mon ventre me le permettrait. « Depuis quand t'es de ce côté là ? » Pédia, maternité, obstétrique, gynécologie, enfin ce genre de chose quoi. Je ne sais même pas dans quoi elle veut se spécialiser en fait, c'est pour dire les rapports de famille qu'on a, les rapports tout court.

« Tu devrais retourner travailler avec les morts alors. » Cette phrase est sortie de ma bouche de manière tout à fait incontrôlée. En effet, quand j'ai vu que c'était elle qui allait me soigner, j'avais décidé de prendre sur moi mais ça n'avait pas duré très longtemps. Je savais la laisser faire son métier même sur moi, mais je ne pouvais pas m'empêcher de la piquer parce qu'elle le faisait aussi à chaque fois que je ne le faisais pas, et elle faisait d'autres choses... Je n'étais pas forcément là pour tout voir, tout savoir, tout entendre mais quand même, les murs ont des oreilles et les gens savent répéter ce qu'ils voient ou entendent. « J'ai des contractions tout le temps... Plus ou moins fortes mais j'en ai toujours un peu... Mon stage ici n'est pas près de s'achever contrairement au tien, c'est pas juste mon camp de vacance. » Mais ça elle ne le saurait jamais parce que les enfants et tout, elle était incapable d'en avoir. Comment une femme aussi froide qu'elle pourrait un jour donner la vie ? C'était juste impossible. Je n'arrivais même pas à imaginer ma cousine maman, même dans mes rêves les plus fous. « Je suis ici jusqu'à la fin de ma grossesse si tu ne le savais pas, Jude a dû l'indiquer dans mon dossier à moins qu'il n'ait pas pu avant de partir en Afrique. » Oui après tout il m'avait prise alors qu'il n'était pas en service alors peut être qu'il ne l'avait pas noté, mais tous les gens habitués du service l'avait bien compris. Elle s'était peut être différent comme elle n'avait l'habitude que des morts. « T'es ravie de savoir que je suis coincée là et Priape libre comme l'air hein ? » Et voilà que je recommence, je ne peux pas m'en empêcher et encore moins avec les hormones.

« D'une ce n'est pas mon cher Jude... » Même si je l'aurais bien pris pour dieu quand il m'a aidé parce que sinon Mila sera déjà née et j'aurais tué tout le monde dans cet hôpital. « De deux, il a peut être sauvé la vie de mon bébé en faisant tout pour qu'elle reste encore au chaud alors qu'il n'était pas en service et qu'il avait d'autres choses à penser, donc je ne lui en veux pas de ne pas l'avoir marqué. » Eh oh la rouquine, t'sais que j'ai un coeur quand ça ne te concerne pas toi et tes rancoeurs du passé ou toi et la merde que tu as envie de foutre de partout où tu passes près de moi actuellement ? Parce que je suis peut être l'idiote qui provoque, mais l'idiote provoque par les mots une autre idiote qui n'a pas assez de jugeote et de limite pour stopper des agissements puérils et malsains. Qui dira le contraire du fait que draguer le mec de sa cousine est malsain ? Roxanna ne s'y amuserait jamais. « Si je suis là à rester au calme c'est bien parce que la maman que je suis veux que son bébé naisse dans le plus de jours possibles... Je pensais que c'était logique... Je pensais aussi logique que tout le bordel autour de ma grossesse joue sur celle ci mais ça doit être mon trop grand coeur qui me joue des tours. » J'ai baissé d'un ton, j'ai même changé de ton, je ne sais pas lequel j'ai pris mais il est plus doux et ouvert à la discussion, est ce que pour une fois on pourrait avoir une conversation comme des adultes responsables ? « Oui je permets, je t'ai dit, fait ce que tu as à faire, je veux que mon bébé soit en bonne santé même si à la fin je devrais admettre que ça sera un peu grâce à toi. » Voilà, si c'est pas un petit signe que la paix n'est pas quelque chose que je ne peux pas du tout envisager, je ne sais pas faire mieux.

Je suis fatiguée de faire la guerre à Zoïa, elle est fatiguée de mes attaques, mais est ce qu'on a sérieusement envie de changer les choses ? Il faut croire que dans le fond on doit l'avoir cette envie, ça serait bien, ça améliorerait nos rapports, on serait plus des cousines normales, mais ce n'est pas le cas, il n'y a rien de normal entre nous, dommage, heureusement que j'ai Roxanna pour compenser ce côté famille que Zoïa est incapable d'offrir. J'acquiesce à tout ce qu'elle dit jusqu'à sentir ses mains sur mon ventre et le bébé lui donne un coup de pied, je rigole et quand elle fait une réflexion je cesse de suite. Et là, c'est peut être moi qui ait attaqué non ? « Pour une fois que j'avais rien dit... » Voilà la rousse, comprend que même si je suis souvent à l'origine des attaques, tu n'es pas toute blanche non plus. « Attends. Tu dis elle parce que c'est marqué dans mon dossier ou parce que je suis convaincue que c'est une fille ? » Non parce qu'avec la crise de Priape lors de l'échographie, je n'ai pas su le sexe de mon deuxième bébé même si je veux absolument une petite fille, il ne faut pas me demander pourquoi... « Priape voulait pas savoir... » Si au cas où c'est marqué dans le dossier et qu'elle a fait une boulette plutôt qu'une inattention, il faut juste qu'elle sache que Priape ne veut pas savoir. Mais moi non plus parce que je ne saurais pas lui cacher d'être super contente d'avoir une nouvelle fille. Elle n'a pas l'air décidée à répondre, elle veut juste s'enfuir, prendre la porte le plus vite possible. « Même quand j'attaque pas tu veux prendre la fuite, on aura donc jamais une vraie discussion pour mettre les choses à plat et se comporter en adultes ? »