Alejandro serra des dents quelque peu quand il entendit Angel remettre en doute l'existence même de cette fête qui a pourtant bel et bien eu lieu.

-Non, ce n'était pas une blague. Tate y était, à cette fête organisée par Zakhar. Nemo y était, un tas de monde y était et ils ont tous porté un toast à ma défaite. Je trouve presque dommage de ne pas y avoir été invité.

Ajoutait-il avec sarcasme. Alejandro n'hésita pas ensuite à encourager son camarade à faire comme lui et peut-être Tate, à savoir, quitter la maison Eliot pour en rejoindre une autre, d'autant plus qu'Angel reconnait ne pas être traité avec égard. Il parle même d'être un paria. Sauf qu'il entrevoyait l'idée d'être un simple étudiant.

-Oh, crois-moi, la vie de student n'a rien d'emballant. Pas de maison, pas d'événement, vraiment, c'est le néant. Ce serait marrant chez les Winthrop et puis, d'après ce que je sais, c'est une maison relativement tranquille. Là-bas, personne n'est traité en paria. C'est une bande de mecs qui veulent juste s'amuser.

Dans une maison, on fait des rencontre, on fait parti d'un cercle, il y a des événements organisés et tout. Chez les étudiants hors des maisons, il n'y a rien de tout cela et ce ne sont pas les clubs qui pallient.

Après, ils parlèrent filles, sujet incontournable quand on à affaire à deux séducteurs comme eux, car Alejandro autant qu'Angel arrive à ses fins. Ce qui était amusant, c'est que l'Espagnol avait maintenant une Italienne dans sa mire. Sourire en coin, il ne dit pas plus de détails sur Elena. Un gentleman doit garder certaines info pour lui!

-Encore cette histoire avec la Française? Écoutes, toi et moi, on a déjà trompé et on s'est fait trompé aussi, ça fait partie du jeu en quelque sorte. Mais dans ce monde, il faut une équipière à tout le moins. Une femme vers qui on peut se tourner quand les choses iront mal. Surtout quand la famille n'est pas une option... Si Beezus est déjà ton équipière, celle vers qui tu te tournes, alors il n'y a qu'un pas à franchir pour être en couple. M'enfin, c'est que mon opinion.

Quand la complicité y est, c'est déjà beaucoup. L'amour, lui, peut se construire au fil du temps. Chose certaine, mine de rien, ils en avaient fait du chemin tous les deux, depuis l'Europe jusqu'à ici, depuis le collège jusqu'à l'université. Ils sont jeunes, beaux, brillants et riches. Leur situation est plutôt enviable, même si un des deux a séjourné en prison. On appellera cela un détour.

-Je pense qu'il la voit, à travers toi. C'est mon côté catholique qui le veut.

Dans la voiture, Angel et Alejandro discutaient de cette maison qu'ils avaient vu au sommet, puis entamer un rapide déclin. Le beau brun dirait quand même que sous la direction de Tate, la maison s'est redressée un peu, mais on ne peut pas demander à un homme seul de faire des miracles.

-Si, la roue tourne et parfois, elle te roule dessus.

Alejandro avait un peu l'impression que cela avait été son cas. On avait visiblement fait savoir que ce serait bon débarras s'il quittait la maison. Pour l'Espagnol, son appartenance à la Eliot appartient au passé, mais pour Angel, rien n'est certain.

-Je peux peut-être te donner le conseil que mon grand-père m'a donné un jour... N'oublies jamais ce que tu es. Le reste du monde ne l'oubliera pas. Portes le comme une armure et cela ne pourra jamais t'atteindre.

Parce que quoiqu'il fasse, pas mal de monde vont continuer de le traiter en paria. Deux ou trois tournants sur la route plus tard, ils parlaient de filles, sujet plutôt récurrent. Angel et Alejandro n'en sont pas du tout au même point. Son ami a un enfant, mais est incapable de s'engager dans une relation sérieuse. Alejandro semble être à l'opposé du spectre.

-Je préfère le terme "romantique", mais tu n'as pas tord. J'espère toujours trouver ma future épouse ici à Harvard.

Il y a plusieurs bonnes candidates de prestige. Comme ils étaient sur des chemins peu fréquentés maintenant, l'Espagnol faisait passer sa voiture sport à la vitesse supérieure. Entendre Angel regretter son père faisait un peu bizarre, quand on sait se dont il a été accusé.

-C'est horrible, mais tu as la santé, tu es riche et tu étudies à Harvard. Il y a pire comme situation. Les orphelins en Syrie par exemple...

Alejandro pouvait sembler moralisateur, mais toute cette phrase était dite avec la légèreté d'une blague, comme pour détendre l'atmosphère, surtout quand il mentionne les orphelins de Syrie, il était clairement ironique. Parce que chaque tragédie est individuelle.

Angel avait beau être surpris et un brin scandalisé, c'était tout de même la vérité et cela avait suffi à Alejandro comme raison pour quitter sa maison. Il ne pense pas avoir fait de trahison ou d'acte de lâcheté en l'abandonnant de la sorte. Au fond, c'est elle qui l'a abandonné et trahi. Angel de son côté luttait avec sa réputation si on peut dire. Disons qu'un ex-taulard au sein de "l'élite" harvardienne, cela peut faire des vagues. Fidèle à sa réputation, son ami comptait faire quelque chose de... fracassant?

-Qu'est-ce que tu as en tête?

Mis à part culbuter toutes les jolies filles de Harvard bien sûr... On aurait cru que la paternité le calmerait à ce niveau. Quoique en matière d'aventures, amoureuses ou pas, Alejandro est sans doute mal placé pour critiquer, romantique ou non. D'ailleurs, il rigolait lorsque son ami se corrigeait. C'est meilleur comme thème! Puis, sur le fait de trouver sa femme ici, le beau brun argumentait un brin.

-Le couple Clinton, le couple Obama, ils se sont tous formés à Harvard. Où trouverais-je une femme brillante, belle, avec ce qu'il faut de bonne lignée? Certainement pas à un défilé de mode, crois-moi.

Ceci dit, c'est vrai que c'est ambitieux et sans doute idéaliste. Sur le père d'Angel, Alejandro avait tenté la piste de l'humour, mais sans grand succès, puisque l'Italien renchérissait en disant qu'il aurait préféré voir son père en vie. Du coup, le beau brun se contentait d'hocher de la tête cette fois et de passer la voiture à la vitesse supérieure. Autant en profiter non? Sinon à quoi sert un bolide comme celui-ci?

La raison première pourquoi Alejandro avait revu son vieux camarade, c'était pour avoir des nouvelles de la Eliot House, mais finalement, il en avait aussi beaucoup de Angel, qui semblait presque d'humeur confidente et de son côté, l'Espagnol parlait volontiers, il avait toujours été bavard de toute façon, sur un sujet qui lui plait c'est à dire. Quand Angel parlait de faire chier le monde, Alejandro se mit à rire. Il retrouvait bien là son camarade d'antan, très permissif.

-Je suis certain que tu vas trouver, tu as toujours était doué dans ce domaine.

Sur le mariage et l'occasion de trouver la "bonne" femme à Harvard, mentalité élitiste certes, Angel et Alejandro n'étaient pas tout à fait d'accord, mais cette divergence ne datait pas d'hier. Il lâchait donc un petit "je sais", avant de laisser Angel enchaîner. Quand son ami parlait de se taper des tops modèles, l'Espagnol eut un fin sourire.

-Ah, mais je compte prendre le mariage très au sérieux. Mais où est donc passé ta foi mon vieil ami?

Comme si le mariage avait quoique ce soit à voir avec la foi. De toute façon, c'était dit avec humour. Quelques secondes plus tard, Alejandro garait sa voiture aux abords d'un champ, avec une clôture pour des vaches et tout et tout. L'Espagnol posait alors une question pour la moins... étonnante?

-Sais-tu te servir d'un pistolet?

Gare à ceux qui se mettent Angel à dos, Alejandro pourrait en témoigner. Quand il décide de jouer les emmerdeurs, c'est un jeu auquel il est très doué et Angel lui-même le reconnaissait, ce qui eut de quoi faire légèrement rire Alejandro. Les deux camarades avaient des avis divergents, non seulement sur le mariage, les femmes, mais la religion aussi. Angel, dont le prénom prêterait à penser qu'il est un croyant à tout le moins, disait avoir perdu sa foi "il y a longtemps". Tant de scepticisme? Toujours sur un ton plutôt amusé, Alejandro poursuivait:

-Tu dois me croire stupide d'aller à la messe tous les dimanches et de vouloir me marier.

De toute façon, pour un Ortega digne de ce nom, c'est la voie à adopter. Son père ne cache pas son mépris de l'église, mais pour autant, il joue les catholiques. Alejandro est un peu plus sincère dans sa démarche, il voit tout cela comme une sorte d'équilibre de vie à avoir. On ne pourra jamais sortir Dieu du cœur des hommes.

C'est à ce moment qu'Alejandro eut une petite idée, en apercevant les clôtures, le côté campagne et tout, loin du monde. Il arrête la voiture et demande alors à un Angel, qui ne cache pas son étonnement, s'il sait se servir d'un pistolet. Ce n'était pas le cas et Alejandro pouffe de rire à ce qu'il ajoute.

-C'est l'ex-taulard qui me dit cela? Hey, on est aux USA, aux pays des cowboys. À quoi bon si on ne sait pas se servir d'une arme? Viens, je vais te montrer.

Alejandro ouvrait alors le compartiment entre les deux sièges et en sortait un caisson en métal. Une fois dehors, il l'installait sur le capot et ouvrait le caisson, dévoilant un colt semblable à celui de Rick dans Walking Dead, une vraie arme de cowboy quoi. Le jeune homme s'affairait à charger l'arme, quand il demanda:

-Tu veux que je te montre? Sinon, je peux te faire une petite démonstration. C'est plutôt grisant je trouve. J'ai acheté ce truc au WalMart, tu imagines?