La soirée Vésuvius, c’est bien, mais quand on est en léger froid avec son petit ami et président de la maison organisatrice de l’événement et qu’en plus, on ne peut pas boire, disons que la soirée est plutôt longue. Je décidai donc de m’en aller pour retourner à notre chambre, espérant pouvoir y être tranquille un moment pour réfléchir. Passant par le salon extérieur, je m’arrêtai un moment pour contempler les étoiles avant de rentrer.

Après avoir fait mon discours officiel, j’avais bu pas mal de bière tout en passant du bon temps avec mes amis, mais aucun signe de Torrey à l’horizon. Du moins, j’avais tout fait pour l’éviter. Je sais, ce n’est pas correct, mais la pilule avait encore du mal à passer. Pendant cette soirée, je voulais oublier tout ça ou du moins, les rangers dans un coin de ma tête et ne pas penser. D’ailleurs les mecs étaient briffés, on ne me parlait pas de grossesse ou de femme enceinte ce soir. Plus la soirée passait et plus je me libérais. Pourtant, en fin de soirée, alors que tout le monde regagnait leur chambre ou qu’ils trainaient dans la cuisine à la recherche d’un truc à manger, je m’asseyais dans le salon extérieur. Mon corps lourd tombait mollement sur la banquette. Gobelet remplis de bière à la main, je buvais tout en observant le remous des vagues au loin. J’étais comme hypnotisé par se mouvement, comme s’il m’apportait du réconfort. C’est ainsi, que Torrey s’immisçait dans mes pensées. Je pensais avoir halluciné, mais c’était bien elle que je venais de voir passer devant moi. Soit elle ne m’avait pas vu, soit elle m’évitait. Posant ma bière au sol, je me levais rapidement pour lui bloquer l’accès au porte. « Bah alors chéri on s’amuse pas » Ce n’était pas vraiment une question, mais plus une infirmation. Ne croyez pas que j’étais ivre comme un groin. Je n’avais pas énormément bu et j’avais toute ma tête. Seulement, j’entrais dans une phase de déni. Vous savez, comme ceux qui se font larguer. Lui bloquant la porte, je posais mes mains sur ses hanches.

Lorsque je me retournai enfin pour entrer dans la maison, une silhouette s’élevait devant la porte, une silhouette que j’avais évitée bien malgré moi depuis quelques jours. « Bah alors chérie on s’amuse pas » Il avait bu à coup sûr, d’ailleurs, je me demandais à quel point. Ses paroles étaient vagues, comme si elles ne faisaient pas vraiment de sens à mes oreilles. Je restai de marbre, je répondant même pas à cette pseudo question. Je le dévisageai seulement pendant un long moment alors qu’il posait les mains sur mes hanches. Mon cœur se serra dans ma poitrine, pourquoi est-ce qu’il faisait ça? « Qu’est-ce que tu veux Wyatt…? » Ma voix était toute petite et mon cœur tout autant. J’avais mal depuis notre conversation à l’hôpital et ne savais pas vraiment plus quoi faire même après avoir parlé à mes amis. Les bras ballants le long de mon corps, je le regardai simplement en tentant de contenir mes émotions.

Mes mains sur ses hanches, je plongeais mes yeux dans le siens. Je ne savais pas ce que je faisais, mais son contact m’avait juste manqué. Oué, je ne voulais pas penser à…notre enfant et alors ? Est-ce que j’étais obligé de me préoccuper de ça ce soir ?  « Qu’est-ce que tu veux Wyatt…? » Le regard qu’elle me lançait aurait pu me blesser dans d’autre circonstance, mais ce soir, sa réaction eu seulement le don de m’arracher un sourire narquois. « Quoi ? Je suis devenu si repoussant que ça ? » C’est vrai quoi, j’avais la sensation d’être le pire des monstres. Elle aussi m’avait évité durant toute cette soirée. A croire que j’avais la gale et que c’était contagieux. Malgré tout ce qui se passait, je l’aimais et même si je l’avais détesté durant un bref instant, je ne voulais pas pour autant que l’on se sépare. Je lui demandais juste d'avorter pour notre bien.

Wyatt sourit à ma question, apparemment, il ne comptait pas se laisser démonter aussi facilement. « Quoi ? Je suis devenu si repoussant que ça ? » J’haussai les sourcils, quoi? Non, pourquoi est-ce qu’il disait un truc pareil? Définitivement, soit il était trop saoul, soit il faisait comme si de rien était et comme si je n’avais pas déjà une toute petite bosse au ventre. J’optai pour la deuxième option en voyant qu’une lueur brillait au fond de ses yeux. S’il avait été saoul, il aurait eu l’air pas mal plus comateux que ça. « Non.. tu es toujours aussi attirant. » J’esquissai un sourire, incertaine quant à l’attitude à adopter. J’avais envie d’être heureuse et de profiter de ce moment avec lui, mais je ne pouvais tout bonnement pas faire abstraction de ma grossesse et de nos pensées divergentes.

« Non.. tu es toujours aussi attirant. » Voilà qui était mieux. « C’est mieux » Son faible sourire, suffisait à m’encourager. Tel un chasseur, je me rapprochais d’elle doucement, réunissant nos deux corps. Je remontais ma main jusqu’à son visage et replaçait une de ses mèches rebelles derrière l’oreille. « Tu m’as éviter toute la soirée » J’étais mal placé pour lui faire ce reproche, car moi aussi, je l’avais soigneusement évité. Seulement, je n’allais certainement pas l’admettre. C’était à elle de répondre de ses actes, car si elle m’aimait vraiment, elle serait venue vers moi. Devant moi, j’avais une Torrey que je ne connaissais pas. Au lieu d’être la fonceuse que je connaissais, elle était hésitante voir timide. Je laissais redescendre ma main, frôlant son bras nu au passage. Pouvoir la toucher aussi facilement me semblait être tout nouveau comme si je ne l’avais pas fait depuis une éternité. A chaque fois que l’on s’éloignait loin de l’autre, ne serait que quelques jours, j’avais l’impression d’être en manque de quelque chose. Cette fille me rendait complètement dingue et je ne pouvais tout bonnement pas me passer de sa présence.

« C’est mieux » Je ne relevai pas, me disant en moi-même qu’il était inconcevable de toute manière que je ne le trouve plus attirant. C’est lui qui avait laissé sous-entendre que nous ne serions plus ensemble dans le futur, pas moi. Il y avait longtemps que j’avais décidé de terminer mes jours avec lui. « Tu m’as évité toute la soirée » Oh vraiment? Non parce que j’avais plutôt eu l’impression qu’il faisait exactement la même chose. Et puis, je ne lui en voulais pas particulièrement, j’avais en effet tenté de l’éviter au possible moi aussi. Ses doigts effleurèrent mon bras et je frissonnais. À quand remontait la dernière fois où nos corps avaient été si proche? Il me semblait que c’était une éternité. Même si ça ne devait faire que quelques jours. Il m’avait manqué, je ne pouvais pas le nier. « Mmh… Pardon. » Murmurai-je finalement, mon regard se perdant lentement dans le siens. J’avais envie de l’étreindre, mais n’osais pas. Je ne savais tout bonnement plus comment agir avec lui. Nous allions avoir un enfant tous les deux et il n’en voulait même pas. Quel message est-ce que ça renvoyait?!

« Mmh… Pardon. » Décidément, je n’étais pas habitué à cette Torrey là. « Tu t’excuse maintenant ? » D’un mouvement, je portais Torrey comme une princesse. Elle était un tout petit chouilla plus lourd, à moins que je me fasse des films, parce que j’étais au courant de ce qui se passait. Au courant, qu’elle était enceinte de mon enfant. En pensant à cela, mes muscles se contractèrent,  manquant de faire tomber la jeune femme. Elle était vraiment enceinte, ce n’était pas un stupide rêve. Reprenant constance, je la déposais sur la banquette, à l’endroit même où je m’étais retrouvé un peu plus tôt. Reprenant mon verre de bière, je m’allongeais à moitié sur l’autre partie de la banquette. Tôt ou tard, je devrais parler de ça avec elle et on ne pouvait pas passer notre week-end à s’éviter. « Tu as réfléchis ? » Adieu la phase de dénie, bonjour la réalité mordante.  J’avais conscience qu’en lui posant cette question, je risquais une seconde dispute, mais j’avais l’audace de croire qu’en terrain inconnu, cela pouvait se passer mieux. D’un geste nerveux, je faisais tourner mon gobelet de bière dans les mains, appréhendant sa réponse.

« Tu t’excuse maintenant ? » Il semblait surpris. Il avait des raisons de l’être. Je n’avais pas l’habitude d’être aussi docile. Ou plutôt, je n’en avais plus l’habitude. À une époque, j’étais plutôt du genre à fermer ma gueule et à encaisser, cachant une tonne de chose à mon entourage –comme le fait que j’étais veuve. Maintenant, je vivais pleinement avec moi-même… jusqu’au début de cette semaine lorsque j’avais appris que j’étais à nouveau enceinte. Wyatt me porta soudainement comme une princesse et je poussai un léger cri étouffé lorsque mes pieds quittèrent le sol. Pourquoi est-ce qu’il faisait ça? Il me reposa sur une chaise longue où j’allongeai les jambes, soudainement mal à l’aise. Ainsi installé, mon ventre semblait poindre au milieu de mon corps comme une petite montagne en pleine plaines. Je posai instinctivement les mains dessus. « Tu as réfléchis ? » Je tournai lentement la tête vers lui alors qu’il s’était allongé près de moi. Je déglutis en le regardant, silencieuse. Alors voilà, la réalité l’avait à nouveau frappé? Ou alors il avait voulu m’amadouer? « Un peu.. et toi? » Que dire de plus? C’était la stricte vérité.

Ses mains sur son ventre en signe de protection et son regard contraint. Mon dieu, tout allait vraiment trop vite. Etait-ce un geste instinctif ? A la voir faire, elle avait déjà lié une relation avec cette petite chose dans son ventre. Je prenais une énième gorgée de bière, détournant mon regard de cette petite bosse. « Un peu.. et toi? » Je relevais les yeux vers elle. Est-ce que j’avais réfléchie ? A vrai dire, je ne m’étais pas vraiment posé la question, acceptant les commentaires de mes amis suite à cette annonce. « Pas vraiment » Pourtant, j’allais devoir sérieusement me la poser cette question. Il nous restait moins de deux semaines pour décider de ce qu’on allait faire. Prenant mon courage à deux mains, je décidais de me livrer en premier. Fin’, façon de parler. « Je veux toujours que tu avortes, mais je ne sais pas…Quelque chose cloche… » Quelque chose dont je n’avais aucune idée. Pourtant, je voulais qu’elle avorte, mais il y avait eu une sorte de déclic en moi et je ne saurais dire quoi.