Un sms, ou l'art de me retourner l'estomac. J'avais déjà entendu parler de cette maladie qui commençait à attaquer les étudiants, j'avais entendu parler à la radio d'une première vague de malades retenus en quarantaine, de symptômes inquiétants... Et voilà que j'avais reçu ce putain de sms. Ma meilleure amie, en quarantaine. Ma moitié, de l'autre côté d'une vitre. Vitre que j'arpentais comme une folle actuellement, alors que j'avais débarqué en trombe à l'hôpital en courant au second étage, comme on m'avait indiqué dans le sms. Puis, je voyais une brune, sa corpulence, son visage, de ce que je pouvais en apercevoir, mais elle avait le dos à demi tourné, ne me voyait pas. « Apple ? » Me risquais-je à demander, appuyant une main sur la vitre. J'avais besoin de la voir, qu'elle me dise qu'elle allait bien.. Que tout irait bien.

Me voilà en quarantaine à mon tour. Et moi, j’étais venue à l’hôpital pour proposer mon aide en tant que bénévole… J’l’avais bien dans l’cul maintenant. J’étais assise sur mon lit, les mains appuyé sur mes genoux, le regard dans le vide. Je n’avais pas envie de sympathiser avec les autres malades… pour le moment. J’étais beaucoup trop perdue dans mes pensées… Beaucoup trop inquiète à propos de tout ce qui se passe dans ma vie. Comment irait Coraleen ? Andy et moi étions coincés ici, mon père aussi, ma sœur aussi, tout se reposait entre les mains de Roxanna, Alejandro ou ma mère.

- Apple ? Pendant une seconde, je n’étais pas certaine. C’était assez bruyant ici, dans le sens que pleins de gens parlent entre eux pour tuer le temps… J’aurais peut-être halluciné, ou peut-être que c’était ma sœur qui m’adressait la parole. Je tournais la tête pour regarder la vitrine et y aperçu ma meilleure amie, coincé de l’autre côté de la paroi. Je me levai aussitôt et me dirigeai vers celle-ci a pas rapide, le sourire aux lèvres. Roxanna Je posais ma main sur la sienne, contente de la voir… même si j’étais triste d’être que de l’autre côté.

Toute cette situation me dépassait... Nous dépassait, et plus ça allait, plus j'avais peur. Je pensais à Coraleen, dont les deux parents étaient hospitalisés.. Que se passerait-il si ça devait nous toucher, Jude et moi ? Aaron avait besoin de nous, il était aussi malade, bien qu'atteint d'autre chose, et Aylin... Elle n'avait même pas un an. Mais là, ce qui me préoccupait le plus, c'était Apple, qui tourna la tête et m'adressa un sourire, se dirigeant à pas rapide vers moi. Je lui rendais son sourire, faible, les traits déformés par l'inquiétude. Roxanna Elle posa sa main par dessus la mienne, et je bougeais à peine mes doigts, essayant de façon idiote, mais automatique, d'atteindre sa main avec la mienne. J'avais mal au coeur. « Comment tu te sens ...? » Commençais-je d'une voix hésitante, avant d'ajouter en regardant autour de nous : « Les médecins ont dit quelque chose ? Je comprend rien à tout ça... »

J’aurais voulu lui prendre la main, sentir la chaleur de celle-ci plutôt que le froid de la vitrine… Je me mordais la lèvre en regardant ma meilleure amie. Je pouvais aisément reconnaître les traits d’inquiétude sur son visage, je la connaissais par cœur. Comment tu te sens ...? Comment je me sentais… ? Je regardais ma robe l’hôpital en soupirant. Fatiguée... surtout. J'ai hâte d'entrer à la maison déjà. Je ne voulais pas lui parler de l’état des autres patients. Ils me donnaient mal à la tête à parler aussi fort. Pourquoi parlaient-ils aussi fort ? Les médecins ont dit quelque chose ? Je ne comprends rien à tout ça... J’haussais les épaules. J'faisais du bénévolat puis j'ai commencé à me sentir mal... un médecin m'a envoyé ici avec les autres, il n'a pas pu m'expliquer vraiment. J’sais juste que la grippe atteint plus en plus de gens. Tu devrais pas être ici, des gens contagieux y'en a partout... tu pourrais tomber malade.

J'allais devenir folle, à la regarder derrière cette vitre, sérieusement.. On pouvait pas, je sais pas, enfiler une combinaison, un masque, qui nous permette ne serait-ce que de les prendre dans nos bras ? Ça relevait de la torture pure et dure. Apple baissa les yeux sur sa tenue d'hôpital alors que je lui demandais comment elle se sentait. Fatiguée... surtout. J'ai hâte d'entrer à la maison déjà. Je regardais autour de moi, cherchant un médecin. « J'suis sûre que c'est rien, et qu'ils vont vite te laisser rentrer. » Et pour le coup, je ne savais pas si j'essayais de la convaincre elle, ou moi-même. Je lui demandais alors si les médecins s'étaient un tant soit peu expliqués. J'faisais du bénévolat puis j'ai commencé à me sentir mal... un médecin m'a envoyé ici avec les autres, il n'a pas pu m'expliquer vraiment. Je fronçais les sourcils, resserrant légèrement mes doigts, ayant envie de serrer mon poing. Ils n'étaient même pas foutus d'expliquer ce qui se passait ? Putain! Tu devrais pas être ici, des gens contagieux y'en a partout... tu pourrais tomber malade. Je secouais la tête, incrédule, faisant un rire nerveux. « Tu croyais sincèrement que j'allais te laisser seule en quarantaine sans venir te voir ? Nan Apple.. J'vais devoir te répéter combien de fois que j'serais toujours là? » De toutes façons, s'ils avaient bien mis en place les visites et cette foutue vitre, c'est qu'il n'y avait pas de risques. Je me mordais l'intérieur de la joue, fronçant les sourcils. « Allez.. ils vont vite te laisser sortir, et ce soir j'ferais à manger, et on regardera une série télé, et.. » Je m'arrêtais. Ouais, c'était grillé que j'avais peur. J'affirmais, plus sérieuse « Ça va aller. »

- J'suis sûre que c'est rien, et qu'ils vont vite te laisser rentrer. C’est vite dit… Je venais juste d’entrer. Certes c’était une grippe, un truc anodin probablement… mais pas si anodin que ça s’il nous foutait en quarantaine. Je lui expliquais alors ce que je savais, avant qu’elle me lance : Tu croyais sincèrement que j'allais te laisser seule en quarantaine sans venir te voir ? Nan Apple... J'vais devoir te répéter combien de fois que j'serais toujours là ? Elle serait toujours là… Je souriais, contente de l’entendre dire mais perdit rapidement mon sourire en réfléchissant… Aaron était à l’hôpital et elle ne m’avait rien dit, Jude me l’a dit. Je n’ai pas pu être là pour elle, moi. Allez... ils vont vite te laisser sortir, et ce soir j'ferais à manger, et on regardera une série télé, et... Je fronçais les sourcils, j’avais direct compris qu’elle avait peur que je ne rentre pas à la maison. Non mais… je n’étais pas mourrante. J’allais revenir à la maison, juste pas maintenant. Ça va aller. Je baissais la tête. Même si je rentre à la maison... Rien ne sera comme avant. Je pris une grande inspiration et posais ma main sur mon ventre. J’savais pas comment j’allais faire pour lui en parler… pour lui dire que je savais pour Aaron, mais aussi pour lui dire à propos de Romane et du bébé que je porte dans mon ventre.

Mes nerfs allaient finir par me lâcher, sérieusement. Les problèmes s'enchaînaient, et moi qui avais prié pour que 2014 annonce de meilleures choses... Tout restait compliqué, et voilà que plus les jours passaient, plus je retrouvais mes proches à l'hôpital. J'allais finir par développer une allergie. J'essayais tant bien que mal de rester optimiste face à cette quarantaine dont on ne comprenait rien, mais Apple baissa la tête. Même si je rentre à la maison... Rien ne sera comme avant. Je la dévisageais, ne comprenant pas, laissant ma main glisser contre la vitre jusqu'à ce qu'elle retombe grossièrement le long de mon corps. « Rien ne sera comme avant ..? » Répétais-je d'abord, absolument pas sure de bien avoir compris ce qu'elle venait de me dire. « ... Pourquoi tu dis ça ? » Demandais-je finalement, n'arrivant pas à trouver moi-même des explications logiques à ce qu'elle venait de me dire, ni même à l'air grave qu'elle abordait.

Non, plus rien ne serait comme avant. Parce que mine de rien, j’attendais peut-être un deuxième bébé… Sois de mon meilleur ami, sois de l’homme que j’aime qui ne veut plus rien savoir de moi. Mais aussi parce que j’avais l’impression de failer dans mon rôle de meilleure amie et que je ne savais pas comment je pourrais me pardonner. Je pris une grande inspiration. Rien ne sera comme avant...? Je hochai la tête et baissais la main aussi, ainsi que le regard. ... Pourquoi tu dis ça ? Par où commencer ? J'suis au courant pour Aaron Autant lui dire maintenant, avant que je n’en trouve plus le courage. Je levai finalement les yeux vers Roxanna, un peu honteuse. J’avais la gorge serré et les maux de tête revenaient très vite.

Je cherchais une quelconque raison plausible à ce qu'elle me disait, mais rien, le néant, j'attendais juste des explications, alors qu'Apple baissait la tête, comme si elle avait honte. Je fronçais d'avantage les sourcils, attendant qu'enfin, elle ouvre la bouche à nouveau : J'suis au courant pour Aaron J'écarquillais un peu les yeux, retenant ma respiration. Je n'avais parlé à personne de l'hospitalisation d'Aaron, tout simplement parce que ce n'était pas mon genre d'aller vers les autres, d'appeler pour dire "Hey, sinon mon fils va peut-être mourir, et toi ça va ?", mais je m'en voulais immédiatement en sachant qu'Apple l'avait appris.. Et pas par moi. « ... Qui te l'a dit ..? » Demandais-je après quelques secondes de silence, lèvres pincées, baissant les yeux à mon tour. Oui, Aaron était là, dans une chambre, quelque part. « J'suis désolée que tu l'ai pas appris par moi. » Murmurais-je enfin, regardant le sol avec un intérêt tel qu'on aurait presque dit qu'il y avait vraiment quelque chose à voir.

Est-ce que j’étais déçu de l’avoir appris par quelqu’un d’autre… ? Certainement. Mais Roxanna ne me disait plus ce qui se passait dans sa vie à moins que je fasse du forcing… Je m’y étais plutôt habitué, faut dire. Ce qui me rendait vraiment triste et honteuse, c’est que même en le sachant je n’ai pas bougé le petit doigt. J’aurais pu lui dire plus tôt que je le savais et faire quelque chose pour elle mais… non. J’en avais pas eu la force, égoïstement parlant. J’avais un peu eu peur de m’ajouter des soucis à la pile. ... Qui te l'a dit ..? Je baissais les yeux de nouveau. Jude. Oui mon ex meilleur ami et son ex, me l’avait dit après que je lui ai fait la gueule parce qu’il avait failli se foutre en l’air. J'suis désolée que tu l'ai pas appris par moi. Je riais nerveusement… elle ne comprenait donc toujours pas. Et c’est bien ce qui rendait les choses encore plus compliqué. Et j'suis désolée de ne pas avoir été là pour toi même en le sachant... Je pris une grande inspiration, en sentant mes larmes me monter aux yeux. Maintenant il est clairement trop tard pour te prendre dans mes bras quoi... J’haussais les épaules. Je n’osais même plus la regarder, tellement j’avais peur de sa réaction. Puis je me mordis la lèvre inférieure.