Est-ce qu'il était possible que mon subconscient réalise certaines choses que je n'étais pas en mesure de comprendre à cause de ma façon de fuir tout ce qui pouvait ressembler de près ou de loin à une relation de couple ? Est-ce que je pouvais réellement être aveugle à ce point, au point d'avancer dans ma relation avec Alex depuis le mois de Septembre, les yeux et l'esprit fermés ? Notre attirance physique s'était-elle réellement transformée en quelque chose de plus fort, pendant que j'avais les yeux clos ? Je crois que c'était ce qu'il essayait de me faire comprendre, ce que j'avais essayé de décrypter pendant cette semaine où je m'étais isolée à l'Ouest du pays. J'avais fait chou blanc avec mes cogitations ces derniers jours, ça ne m'avait menée nulle part et j'avais l'impression que c'était parce qu'il fallait que ce soit une personne extérieure qui me les explique. C'était pour ça que j'avais appelé Rox hier, pour qu'elle m'explique le bordel dans ma tête, c'était aussi pour ça que j'avais eu besoin d'avoir une conversation de vive voix avec Alex. Je ne savais pas trop où tout ça allait me mener, mais je sentais que ça n'allait pas tarder à partir en vrille. La boule dans ma gorge grossissait et plus ça allait, plus mon souffle devenait court. Je continuai de fixer mes mains, mais je voyais bien dans ma vision périphérique que sa posture était plus défaitiste qu'avant.« T'as raison, on se connait peu. C'est vrai que j'sais pas pour la petite zone derrière ton oreille qui te fait perdre tous tes moyens, je sais pas non plus que tu es fragile derrière cette carapace que tu t'es forgée. Je sais encore moins que tu ne veux pas être vulnérable et que tu évites toute sorte d'engagement avec les gens. Ok, tu veux pas faire rentrer les gens dans ta vie, t'es méfiante, mais... » Il se leva alors je relevai enfin la tête, plongeant mon regard dans le sien pour la première fois depuis un long moment. Putain, c'était pas bon. Ne pars pas, ne pars pas .. « Mais rien. T'as raison alors autant tout skiper pour arriver tout de suite à la fin. Comme ça nos chemins se séparent, et t'auras plus à te soucier de moi ou de c'que je peux ressentir pour toi. » Paniquée à l'idée qu'il puisse s'en aller, je pris brusquement sa main dans la mienne puis je me redressai pour me mettre debout face à lui. Mes yeux commençaient à me brûler et mes articulations rechignèrent d'avoir été dans la même position depuis trop de temps, mais je ne pouvais pas le laisser m'échapper. « J'ai peur .. » commençai-je en fixant nos mains, quasi incapable d'aller plus loin. « J'ai peur de te faire plus de mal qu'autre chose .. J'y connais rien, j'réagis mal à l'inconnu et j'ai l'habitude de fuir dès qu'un problème se pose. J'ai le caractère le plus merdique qui soit, surtout quand j'comprends rien à ce qu'il se passe dans ma tête. Comme là .. J'ai peur que si on se met ensemble, j'passe mon temps à t'faire du mal sans même m'en rendre compte .. » dis-je en serrant mes doigts autour des siens. J'avais aussi peur que lui, m'en fasse. Mais ça, c'était une autre histoire.  

Si j'étais effrayé ? J'étais carrément mort de trouille à l'idée de la perdre. En l'espace de quelques mois, notre relation a tellement évolué que ça pouvait nous faire perdre la tête. Je m'étais attaché à elle comme je m'étais jamais attaché à personne... sauf quelques exceptions, mais c'est pas le moment de parler du passé. Là, j'avais clairement envie de lui faire comprendre que malgré tout, c'était elle que je voulais. Je la connaissais un minimum et j'avais envie d'en savoir plus... et même lui partager des choses sur moi, sur mon passé. Elle était devenue ma bouffée d'oxygène, malgré elle. Elle... Je la voulais, je ne pouvais rien dire de plus. Elle me rendait aussi bien que me foutait mal quand elle était en compagnie d'autres mecs. Mais c'était comme ça que ça marchait, la loi des sentiments. On va forcément finir par se faire souffrir à un moment donné... si on ne fait pas attention. Mais après, il ne faut pas oublier les bons moments qu'on a passé ensemble, les bons moments qui font oublier tout le reste. Forcément. Et j'avais envie d'en partager encore plus avec elle, en ayant la certitude que c'est sincère et pas du fake - même si j'ai jamais pensé ça d'elle. Alors ouais, je m'étais renfermé sur moi-même et je lui avais dit de quoi contredire ne serait-ce qu'un peu ses propos avant de lui donner ce qu'elle voulait. Elle n'avait pas envie, alors j'allais pas insister. Et je lui avais dit ça tout en la regardant, mon regard dans le sien... Bordel que ça faisait mal. Mais bon, j'allais partir et la laisser tranquille. "J'ai peur .." m'avouait-elle après avoir attrapé ma main et s'être redressée pour être face à moi. Je déglutissais, la regardant pendant qu'elle fixait nos mains. "J'ai peur de te faire plus de mal qu'autre chose .. J'y connais rien, j'réagis mal à l'inconnu et j'ai l'habitude de fuir dès qu'un problème se pose. J'ai le caractère le plus merdique qui soit, surtout quand j'comprends rien à ce qu'il se passe dans ma tête. Comme là .. J'ai peur que si on se met ensemble, j'passe mon temps à t'faire du mal sans même m'en rendre compte .." Mon coeur battait la chamade, me rendant compte qu'elle partageait - ou presque - ce que je ressentais. Sentant sa main se resserrer, j'en faisais de même en me rapprochant encore plus de son corps. "J'm'en fiche de tout ça... J'suis pas plus avancé que toi en relations de ce genre. Tout c'que je sais, c'est que j'veux le package entier, j'te veux toi et pas une pâle version revisitée. J't'accepte comme tu es... Parce que toi, tu m'acceptes comme je suis." Je me mordais la lèvre inférieure avant de continuer. "Je flippe, énormément... Mais j'sens que ça vaut le coup d'essayer. Puis... J'suis un grand garçon, je saurais m'en remettre... Tout c'que j'veux, c'est te rendre heureuse." J'attrapais sa main de libre, et je la plaquais contre mon torse après l'avoir immiscée dans ma veste. Elle pouvait sentir mon coeur battre la chamade à ce moment précis.

Quand il s'était levé de ce banc, emportant avec lui tout espoir d'une amélioration entre nous deux, j'avais eu mal au cœur. Réellement mal. En fait, je n'avais même pas eu mal qu'au cœur, ça m'avait pris des pieds à la tête, une douleur lancinante qui se répandait dans chaque recoin. C'était .. putain de bizarre comme sensation, pas franchement agréable aussi mais au moins, elle m'avait fait réagir. En moins de temps qu'il n'en fallait pour le dire, j'étais plantée sur mes deux pieds, le retenant par la main pour l'empêcher de partir. Je n'aurais jamais cru, jamais, qu'un jour je serais celle qui tenterait de retenir un homme, le supplier en un regard de ne pas s'enfuir, de ne pas laisser tomber. En faisant ça, j'imagine que j'essayais de le convaincre que je n'étais pas à jeter entièrement, qu'il y avait bien quelque chose qui pompait la boue visqueuse dans mes veines et qui essayait de remplir l'une de ses fonctions : me faire paraître plus humaine. Je n'aimais pas cette faiblesse et je sentais qu'une partie de moi se battait corps et âme pour rester aussi froide et robotique. Mais il y avait cette autre part, celle qui, tétanisée à l'idée qu'Alex s'éloigne, avait envie de se battre en retour un peu. Je vidais alors mes craintes, les déposant entre ses mains pour qu'il en fasse ce qu'il voulait. En réponse à ce pas en avant, je le sentis resserrer ses mains sur les miennes et me rapprocher au maximum de son corps. « J'm'en fiche de tout ça... J'suis pas plus avancé que toi en relations de ce genre. Tout c'que je sais, c'est que j'veux le package entier, j'te veux toi et pas une pâle version revisitée. J't'accepte comme tu es... Parce que toi, tu m'acceptes comme je suis. » Je relevai alors le regard vers lui, comprenant un petite parcelle de son point de vue. Parce qu'il avait raison ; il y avait certaines choses que je n'approuvais pas chez lui, comme le fait qu'il continue à se droguer par exemple. Mais malgré ça, malgré ces choses qui me faisaient froncer les sourcils, ça me paraissait impossible de ne pas l'accepter comme il était. « Je flippe, énormément... Mais j'sens que ça vaut le coup d'essayer. Puis... J'suis un grand garçon, je saurais m'en remettre... Tout c'que j'veux, c'est te rendre heureuse. » Il monta ma main le long de son torse et la déposa tout contre son cœur, ce qui me laissa hébétée un moment, fixant nos mains intensément. Son rythme cardiaque ressemblait au mien, est-ce qu'il avait aussi peur que moi ? Je recourbai mes doigts contre sa poitrine et je me laissai aller en avant, déposant mon front contre son torse. « J'veux te rendre heureux aussi .. j'suis juste pas sûre d'en avoir les capacités. » Je décalai mon visage et posai mon oreille contre son cœur, écoutant les battements un instant. « T'es sûr qu'on peut fonctionner ? » J'avais envie qu'il me dise oui, qu'il me rassure. Je ne savais pas s'il était en mesure de le faire, mais j'en avais besoin.

Je n'arrivais pas à discerner ce qu'elle voulait, et ça me faisait peur. J'avais peur qu'elle me rejette alors que je commençais à éprouver quelque chose pour elle. Le genre de sentiment qu'on ne peut pas nier bien longtemps. Et vu son état actuel, je me doutais bien qu'elle ne voulait rien de tout ça, donc ça ne servait à rien que je reste dans les parages. Je devais me faire une raison, tout oublier et repartir à zéro. Reprendre le batifolage où il en était et basta. Sauf que ce n'était pas ce que je voulais, je la voulais elle et ça m'faisait mal de voir à quel point elle pouvait douter de ce que je lui disais. Oui, j'étais certain de la vouloir... Alors quand je sentais sa main prendre la mienne pour m'empêcher de partir, c'était un soulagement. Elle m'avouait avoir peur et c'était ce que je ressentais aussi, surtout que j'avais eu une mauvaise surprise en début d'année en tombant amoureux d'une fille dont j'aurais du m'éloigner le plus possible. Une Eliot évidemment. J'avais eu du mal à m'en remettre mais j'étais de nouveau sur pied, et maintenant c'était d'elle que je commençais à m'éprendre. Je tentais alors de la réconforter du mieux possible et je crois bien que c'était en train de marcher. Et pour lui faire comprendre mes dires, j'attrapais sa main que je positionnais sur mon torse, au niveau de mon coeur, afin qu'elle sente d'elle même à quel point il battait fort. Sa main se refermait et finalement, c'était son front qu'elle venait positionner contre mon torse. "J'veux te rendre heureux aussi .. j'suis juste pas sûre d'en avoir les capacités." Je soupirais silencieusement, ne voulant pas entendre ça. Pour moi, c'était la seule qui arrivait à m'faire revivre et j'en avais clairement besoin. Elle ne devait pas douter ne serait-ce un instant qu'elle n'avait pas les capacités. Tournant la tête, elle posait son oreille afin d'écouter mes battements de coeur, toujours aussi rapides et réguliers. "T'es sûr qu'on peut fonctionner ?" J'enroulais doucement mes bras autour d'elle, appréciant de l'avoir à mes côtés avant de lui répondre en toute honnêteté. "On fonctionne bien pour l'instant... Non ? Y'a juste des petits trucs à adapter mais... mais ouais, j'pense ça peut le faire." Je me pinçais les lèvres, regardant face à moi tout en réfléchissant à ce que je pouvais lui dire de plus pour la rassurer. "T'sais... depuis fin août, j'me suis jamais senti aussi vivant.. et c'est grâce à toi." Ma vie avait pris une toute autre dimension, et c'était grâce à elle.