Quelques messages échangés plus tôt dans la journée et voilà que je me retrouvais au Lord Hobo avec Maze pour fêter son potentiel nouveau job. Potentiel oui, mais nous étions d'accord l'un comme l'autre pour dire que c'était du tout cuit et comme toute occasion était bonne pour faire la fête... De mon côté, j'avais besoin de ça. Besoin de me sortir l'évènement de la veille, ne sachant toujours pas réellement si tout était inventé de toute pièce par mon cerveau bancal ou si j'avais réellement croisé le sosie de Charlie dans cet ascenseur. L'évènement m'avais tellement remué que je n'en avais parlé à personne, craignant de passer pour un fou, ou encore de trouver la pitié dans le regard de mes amis. Maze était, depuis longtemps, l'un de mes meilleurs refuge. Une amie dont je ne pouvais me passer. Ni d'elle ni de ses bras, sauf quand son coeur était pris, la respectant trop pour briser son bonheur. Voilà un moment déjà que nous étions arrivés, enchaînant les rires et les verres. « Allez, on se fait les shooters ? » lançai-je, déjà bien dans l'ambiance, essayant de l'entraîner dans ma connerie.

Depuis plusieurs mois déjà, je tentais de supporter l’ouragan qui frappait ma vie. Il portait un nom que je détestais au plus haut point : Karma. Je gardais cette idée en tête que le vent récolte la tempête, pourtant je cherchais encore les causes à effets. Ce soir, au milieu d’un brouhaha, des basses ou des verres qui me rendaient presque groggy, perdue dans la mélodie de nos rires, j’atteignais l’œil du cyclone. J’entrais dans une pause, où le soleil pointait enfin le bout de son nez. Mon regard rivé dans le tien, l’étincelle s’allumait pour laisser les braises s’enflammer à ta proposition. •— J’ai jamais entendu une proposition aussi alléchante, quoi que… Si des dizaines, des vingtaines peut-être, mais sur l’instant présent, on parlait le même langage. On l’avait toujours fait, depuis aussi longtemps qu’on s’était lié d’amitié. Des personnes qui étaient importantes pour moi, tu faisais partie de ceux en tête de liste. Je me penchais légèrement sur la table pour m’approcher de toi, te tendant la main. •— Mais tu promets d’essayer de m’appeler 27 rfois pour que je me réveille ? Si dans ma vie privée plus rien n’était sain, je savais que pour m’en sortir, il me fallait tenir une certaine rigueur dans le travail. Surtout si j’en avais deux à assumer. Je te souriais, levant déjà ma main libre pour appeler un serveur et commander un plateau de shooters.

L'ambiance était à la fois exacerbée et ralentie, douce plénitude nourrie par les verres d'alcool qui s'enchainaient et le sourire de Maze qui ne cessait plus de briller à chacune des conneries qui sortaient de ma bouche. J'adorais la voir ainsi, regard pétillant d'ivresse et gestes gauches, quand ce n'était pas son rire qui jouait la douce mélodie de la joie à mes oreilles. Même dans cet état, j'avais conscience des regards qui se tournaient vers nous, vers elle. Maze c'était un peu un golden ticket aux yeux des hommes, le genre de fille à la beauté naturelle et fatale, au visage de poupée et aux courbes enivrantes. Ravageuse, sans même en avoir une seconde conscience, tant la beauté brute transpirait de tous ses pores. Ajoutez à ça la complicité de deux amis et nous voilà au cœur de l'attention malgré nous, attisant convoitise et jalousie à la fois sans même s'en rendre compte. « Vingt-sept ? Pourquoi vingt-sept ? » buggais-je, sourire aux lèvres et mimique d'incompréhension sur le visage. « Vendu ! » m'exclamai-je en claquant la main qu'elle me tendait, avant d'ajouter « Si j'arrive à émerger » l'air innocent. Le barman apportait les verres, les remplissant déjà de vodka caramel. « Celui qui finit sa série en premier donne un gage à l'autre. Cap ? » lançai-je, d'humeur joueuse.

Il ne m’en fallait pas moins que ta présence et quelques verres pour sortir d’une réalité que je fuyais. J’allais mal. J’avais mal. Pourtant, je me devais de continuer à avancer. Simeon n’était pas mon seul problème, mais il était certainement le plus douloureux à gérer actuellement. Le vide qu’il avait laissé derrière lui, me faisait sombrer dans une routine malsaine, mais nécessaire. Nécessaire pour reprendre goût à la vie, pour combler chaque parcelle de mon esprit, d’autres choses que lui. Ce soir, mes prunelles accrochées aux tiennes, tu étais le seul à naviguer dans mon esprit. Les mots avaient peu d’importance quand il nous suffisait d’un regard pour se comprendre. — La vraie question, c’est pourquoi pas ? Trois ou vingt-sept ça change quoi ? Puis mon sourire s’intensifiait quand tu validais ma demande, avant de perdre en intensité quand tu envisageais des difficultés à te réveiller. — Chaque problème en son temps, pas besoin de penser à demain. Je balayais l’air d’un mouvement de main, préférant me consacrer au moment présent. Le plateau de shooters devant nous, on les alignait à part égal devant nous. — CAP ! Que je criais un peu fort, m’enfonçant davantage sur mon siège, en voyant les personnes autour de nous se retourner. — 3… 2… 1, GOOOO. Verre en main, on enchaînait vitesse grand v l’intégralité des verres devant nous.

Je riais en entendant sa réponse tant ça n’avait aucun sens, et c’est certainement c’est qui me plaisait là à cet instant. Cette simplicité qui semblait se loger dans tout ce que Maze touchait du regard, cette joie qu’elle parvenait à créer en moi, enfouissant mes démons dans un coin de mon être l’espace d’un instant. Non clairement avec ce que j’étais en train de m’enfiler, j’étais pas certain de pouvoir la réveiller le lendemain. Mais était-ce vraiment important ? Pourquoi est-ce qu’il fallait qu’on se lève demain d’ailleurs, qui avait décrété ça ? « Voilà la parole de la sagesse » acquiesçai-je avec un air faussement sérieux, la connerie habitant tout mon être. On nous apportait les shooters et immédiatement l’envie de jouer me prenait, avide de challenge. « YES ! » m’exclamai-je sur le même ton, avant de me marrer en voyant les gens se retourner vers nous. Sourire aux lèvres je leur faisais un signe en guise de mea culpa, pourtant pas instant désolé de la situation. Comme un gamin je me préparais au décompte de la brune, attendant son feu vert eeet GO ! J’enchainais les shooter à la vitesse de l’éclair, enjaillé par la brûlure de l’alcool dans ma gorge sans pour autant m’arrêter une seconde. Min de rien, je ne sous estimais pas l’adversaire en face. Je reposais mon dernier verre sur la table dans un claquement sec, redressant mon visage victorieux vers elle en constatant que je l’avais gagnée. « POPOPOOOOO ! » m’exclamai-je tout content, tambourinant la table de mes mains. J’aurais limite pu faire une petite danse de la joie. Satisfait, je me délectais à prendre un air pensif, réfléchissant au gage que j’allais lui donner. « Alors alooors… » commençai-je, sourire malicieux aux lèvres. « Ok, ton gage c’est… de me surprendre » dis-je, la taquinant d’un haussement de sourcils.

L’ambiance, légère me permettait d’oublier. Tu avais toujours eu ce talent pour rendre les choses plus simples. Ou peut-être qu’à tes côtés, je me sentais invincible. La force des relations humaines résidait dans les liens indéfectibles qu’on tissait. Et toi et moi, on formait une sacrée équipe, de débauche en l’occurrence. Mais bien d’autres termes nous qualifiaient. Faisant un revers de la main, je priais intérieurement pour ne pas accumuler plus de retard au garage. Je souriais à tes mots, ce n’était pourtant pas comme ça que toi, tu me décrivais en règle générale. Nos rires et nos cries attiraient les regards, mais si j’aimais être discrète, l’alcool me rendait plus je m’en foutiste. Les shooters face à nous, je commençais le décompte, avant d’attraper le premier et d’espérer finir le dernier avant toi. Mais j’entendais ta voix victorieuse, quand je m’apprêtais à porter le dernier à mes lèvres. Je le buvais pour la forme, bien que les précédents me suffissent certainement. — Ce n’est pas juste, tu gagnes TOU-JOURS à ce jeu ! Me renfrognant, je te fixais, un rictus scotché aux lèvres, parce que je ne pouvais pas t’en vouloir de gagner. Je me redressais pendant ta réflexion. — Mh… te surprendre ? Je me redressais complètement, poussant les verres d’un côté de la table et grimper sur la table, complètement pompette, pour commencer à chanter Let it go, d’une voix enjouée. Est-ce qu’un concert privé, pas si privé, te surprenait ? Je terminais la musique, qui allait parfaitement avec mon état d’esprit actuel, non sans me tromper, ou manquer de tomber à plusieurs reprises. Mais au moins, je me sentais plus légère. — Wow, ça fait un bien fou ! Est-ce que tu valides mon gage ? Papillonnant du regard en me réinstallant face à toi.

Oui j'avais envie de m'amuser, oui je ne voulais pas me prendre la tête. L'aura de Maze était réparatrice, euphorique même, bien que ma consommation excessive d'alcool n'y soit pas pour rien non plus dans l'histoire. Mon humeur joueuse prenait le dessus, et j'attendais impatiemment qu'elle me surprenne, puisqu'il s'agissait du gage que je venais de lui lancer. Je n'eu pas à attendre longtemps puisque d'un coup, elle repoussait tous les verres dans un coin de la table pour grimper dessus, et se mettre à chanter let it go à tue tête. J'éclatais de rire, plié en deux sur ma chaise, gravant chaque fausse note et chaque raté dans ma mémoire. C'était magique, elle était magique. Je finissais même par lever les bras et les agiter d'un côté et de l'autre au rythme de la chanson, accompagné des gens aux tables voisines qui semblaient se marrer autant que moi. « Je valide complètement » dis-je avec un grand sourire quand elle revint se poser face à moi, faisant papillonner ses yeux de biches. Elle était drôle et en plus, terriblement canon. « Comme j'suis joueur, je te laisse m'en donner un aussi. Cap ou pas cap » lançai-je avec un petit air malicieux.

J’avais attiré l’attention d’une bonne partie des personnes présentes dans la salle, quand pourtant, je n’en désirais qu’une. C’était ton attention que je cherchais et j’aimais la sensation de ton regard qui s’accrochait à ma silhouette, sauf peut-être les fois où tu les fermais pour rire de la situation. Mais tu me portais vers le haut, tu l’avais toujours fait et tu me prouvais encore une fois que rien ne pourrait changer ça. Je me réinstallais essoufflée, mais soulagée. L’expérience avait été libératrice, mais je ne perdais pas mon objectif de vue. — Si j’avais une bucket list, je pourrais certainement cocher une case. Que je murmurais amusée. Et je m’étonnais moi-même de l’envie d’en faire une dès que j’aurais un stylo en main. Je souriais à ta proposition, réfléchissant un instant, afin de trouver une idée qui pourrait être fun. Je n’avais pas nécessairement envie de te sortir de ta zone de confort, mais je voulais continuer à rendre, cette soirée, amusante. Et ton sourire plaqué sur tes lèvres, pour moi, il valait de l’or. — Alors, cap ou pas cap, de ne pouvoir ni parler, ni bouger, ni réagir pendant les deux prochaines minutes ? Je me redressais déjà, m’approchant de toi, les yeux pétillants. J’adorais déjà ce jeu.

Elle me faisait tellement rire cette fille. J'adorais découvrir les multiples facettes de sa personnalité en permanence, découvrant à chaque fois combien elle pouvait réussir à me surprendre. D'accord c'était ce que je lui avais demandé, mais je m'étais attendu à tout sauf à ça. Voilà qu'elle avait des idées de bucketlist maintenant. « J'peux te donner quelques idées si tu veux » lançai-je, plein d'idées machiavéliques en tête. Ou pas. Maze inspirait bien trop de choses positives pour que je puisse l'entraîner dans mes vices et mes démons. Cherchant à prolonger le jeu, je la laissais me lancer un défi à son tour, un cap ou pas cap improvisé. Mon regard entier prêt à dévorer le sien tant je la trouvais envoûtante là. J'entre ouvrais les lèvres en entendant sa réponse, surpris une nouvelle fois. Ok, ça allait être dur. Vraiment. Surtout dans cet état d'ébriété déjà un peu avancé. Je soufflais un coup, comme pour me préparer mentalement, ignorant son visage de poupée qui ne me lâchait plus. « Cap ! » lançai-je une fois prêt à endurer la suite, concentré. Car clairement, je savais qu'elle allait tout mettre en oeuvre pour me faire flancher.