Des moments perdus, voilà ce qu'on était peut-être en train de vivre. C'était pas commun que de revoir une victime et de chercher à créer un lien. C'était pourtant ce qu'on était en train de faire. Il y a onze jours, t'étais dans mon commissariat, à porter plainte contre le mec qui t'as fait subir mille et un sévices, sous couvert d'une relation amoureux. Abusif et violent, il avait sûrement du ébranler pas mal de choses en toi. Je sais que c'est pas simple de se reconstruire après ça, les études en psychologie avaient pas mal aidé à appréhender ce genre de choses. Mais il était hors de question de fair ressortir la victime en toi ce soir. J'étais juste Kaze, tu étais juste Anastasia. « exact » J'avais oublié, mais ça me revenait. Comme toutes les informations que tu avais donné pour déposer ta plainte. J'étais au courant d'une bonne partie de ta vie, quand toi tu savais rien de la mienne. Et j'aidais pas, puisque je ne laissais rien paraitre. « mh » Pas sûr de vouloir vraiment en parler. Mais en même temps, tu es celle qui m'a empêché de faire le pire. « j'suis un ancien alcoolique. qui se bat contre ses démons tous les jours. en ce moment plus que d'habitude » Je t'épargne les détails sordides d'un mariage brisé par le viol et le suicide.

les pieds qui foulent le sol à une allure de tortue. de toute façon, ton état te permet pas de courir un marathon. en quelques mois seulement, t'as perdu un genou, des côtes et une épaule alors qu'avant ça, tu ratais pas une occasion de pouvoir faire du sport. plaisir reporté. la cigarette entre les doigts de la main qui est libre de vaquer à ses occupations, ton autre bras toujours dans l'écharpe qui maintien ton épaule. interloquée par sa réponse, t'as un petit moment d'arrêt, mais tu ne montres pas pour autant la surprise. tu accueilles à son tour ses mots. peut être que vous vous êtes bien trouvé finalement. t'aurais pas cru que c'était un ancien alcoolique. c'est pas écrit sur son front. mais maintenant, tes doutes sont fondés. — j'suis dépendante aux opïodes lâches-tu de la plus simple des manières. aucune honte à lui avouer ta faiblesse. — enfin, j'étais c'est comme si tu compatissais avec son état d'âme que de faire tes aveux à ton tour. tu prends une grande respiration avant de te lancer à nouveau pour parler. — c'est à chier la dépendance. j'comprend même pas comment le corps en arrive à plus pouvoir s'passer de merdes pareilles pensive. t'envahis à nouveau ton corps de fumée toxique. ce que tu venais de dire ne te faisait même pas écho avec la cigarette. c'était pas un truc dont tu dépendais, tu pouvais passer des jours sans en fumer, que t'étais pas en manque.

Peut-être un peu trop abrupte, j'en sais trop rien. Pas sûr qu'un officier de police doive vraiment parler de ses faiblesses aux personnes qu'il a pu côtoyer dans le cadre d'une affaire. Seulement, pas le choix que de le dire. J'avais pas envie de mentir. C'était bien trop important pour moi de ne pas rentrer dans ces boutiques que la vérité devait sortir. Fallait que tu m'empêches, même si je supplie. En sortir avait été extrêmement difficile. Je sais que si je replonge aujourd'hui, je suis pas certain de pouvoir me relever. « j'ai pas cherché à comprendre non plus. j'suis pas très fan de biologie » que j'disais, haussant les épaules de façon nonchalante, tout en continuant de m'intoxiquer à la nicotine. Le pas est lent, la confidence est presque muette, mais dans notre bulle, on se comprend. « toi aussi tu cherches toute sorte d'occupation, pour pas sombrer de nouveau ? » Question simple et pourtant si compliquée à la fois. Rien ne remplacera une addiction. Tout ce qu'on peut faire, c'est donner énormément d'informations au cerveau pour qu'il en oublie cette dépendance.

ton regard se porte droit devant vous. à aucun moment, tu te permets de le regarder. ça pourrait être gênant que tu réagisses à ses aveux. t'essayes un maximum de se mettre à sa place et.. c'est assez facile finalement. tu sais ce que c'est que d'être dépendante à quelque chose. tu l'as expérimenté. sans le vouloir. malgré toi. t'as découvert que t'étais faillible à ce niveau. tu repensais à quand t'étais stone et tu te souviens du côté sympa que ça avait. anesthésiant. mais tu te souviens aussi des mauvais côtés, et ça, ça t'fait dire que c'est des produits de merde. — y'a pas si longtemps, j'en repris c'est pas des confessions sur l'oreiller mais ça y ressemble. — j'ai fais un badtrip, c'était pas pire qu'être en manque, mais ça m'donne plus envie de recommencer. la sensation que ta cage thoracique était remplie d'eau et que tu te noyais, des frissons partout dans le corps qui donnait l'impression que t'avais des milliards d'insectes sur toi.. des hallucinations bien trop angoissantes, qui font que t'es presque sûre de pas retoucher un cachet de codéine avant un moment. — le problème de l'alcool c'est qu'à part avoir un bon mal de crâne le lendemain... y'a rien qui comme un badtrip, peut t'traumatiser que tu finis par dire, compatissante de sa situation. elle était extrêmement déprimante ta réflexion. t'étais entrain de lui dire qu'il était pas sorti de l'auberge et que combattre ses démons seraient plus dur que les tiens.

Marcher d'un pas lent, dans n'importe quelle direction tant qu'elle me dirige loin de toute tentation. Tu étais aussi accro, avec ce besoin de te défaire de ce besoin d'en avoir dans ton organisme. Et je me demandais si t'étais comme moi, à avoir besoin d'avoir le cerveau occupé pour pas penser à ça. Visiblement non, puisque tu avais craqué récemment. Une légère analyse de la situation me demandait si c'était pas à cause de ce qui s'était passé avec ton compagnon. « ah ouais. pas idéal en effet » Aucun jugement de valeur ou quoi. Mais il est vrai que les bad trip sont du genre dissuasif pour le coup. Et c'était pas plus mal que ça te donne pas envie d'en reprendre. Dernière taffe aspirée sur la cigarette avant qu'elle ne se meure, et je ne pouvais qu'être d'accord avec toi sur l'alcool. « sauf peut-être tuer quelqu'un par accident... ou blesser de façon irréversible un proche. je sais pas » J'y avais déjà pensé. Si j'avais déjà blessé, sans le vouloir, quelqu'un pendant la période la plus sombre de ma vie. Clope terminée, je me stoppais à une poubelle pour l'éteindre et jeter le mégot.

vos ombres plaquées sur le béton à cause des réverbères orangés qui éclaire la rue. tu traines un peu des pieds pour faire durer le moment. est-ce que tu aurais trouvé la personne parfaite pour passer la soirée? probable. quelqu'un de plus triste, de plus déprimé. quelqu'un qui a des raisons tout aussi valable que toi d'être dans un mauvais mood. quelqu'un qui te prouvera que d'être dans cet état n'a rien de glorieux et qui te redonnera assez d'énergie pour te tirer de ce mood. et sans l'omettre, tirer cette personne dans un meilleur mood aussi.  — et si on pensait pas au pire ? vous faire du mal en penser au pire était clairement pas la solution pour aller mieux. peut être qu'il avait blessé des gens. peut être qu'il s'était mis un nombre incalculable de personne à dos. mais l'important, c'était pas ça.  — le positif dans l'histoire, c'est que t'as pas céder qu'il est parti avec toi et qu'il a résisté. preuve de grande force, à tes yeux. dernière latte tirée sur ta cigarette, avant d'aller l'écraser à ton tour sur le rebord d'une poubelle et d'y jeter le mégot. — est-ce que ça te dirait d'aller au foodverse? t'arrivais depuis pas si longtemps à remanger normalement, et rien qu'à y penser, manger des plats de tous les pays te faisait envie.

Les événements dramatiques derniers, où Maze a été touchée. L'anniversaire de la mort de Riley. C'était bien trop pour un seul homme. Et moi, j'avais pas forcément les épaules pour. Lutter contre une addiction qui nous fait nous sentir bien le temps de quelques heures, quand rien ne va autour de nous, c'était compliqué. Pas impossible, mais vraiment compliqué. Seulement, tu étais arrivée pour me tirer de cet enfer et j'étais de toute évidence parti pour ne pas céder. Pas ce soir en tout cas. « mh » C'est vrai, je suis d'accord avec cette version. J'ai pas cédé parce qu'on a marché, pensé à autre chose. Tu m'as sauvé d'une descente aux enfers, sans qu'on ne se connaisse vraiment. A ton tour, à côté de moi autour de la poubelle, tu te débarrassais du cadavre de cette cigarette consommée, une idée derrière la tête. « j'connais pas » Plutôt du genre routinier, je me contentais des plats que je connaissais. Souvent de la bouffe chinoise, récupérée au coin de la rue en bas de chez moi. « j'te suis » Pas très bavard, mais l'idéal serait de s'éloigner au plus de tout ce qui pouvait me faire penser à ma femme ou à l'alcool.

y'a pas si longtemps, tu te comparais à un chat: ayant neuf vies. t'avais complètement raison. t'en avais déjà perdues au moins trois; tes reins, travis, le concert. si tu suis ce raisonnement, il t'en reste six, et vu comme t'es malchanceuse, vaudrait mieux pas que son problème d'alcoolisme devienne un jour le tien. tu perdrais ton foie, par exemple. en attendant, ton estomac crie famine. t'es outrée qu'il connaisse pas le foodverse.— c'est l'endroit le plus cooool de boston, tu peux pas rater ça ! beaucoup plus d'engouement dans ta voix. l'idée de faire découvrir cet endroit te ravi. t'attrapes même sans main, sans te questionner pour savoir si ça se fait ou pas. arrivée devant le paradis de la bouffe, t'as le visage illuminé, le sourire qui étire tes lèvres. — j'te propose qu'on prenne plusieurs petits plats, à différents stands et qu'on partage? ta main lâche la sienne. tu te transformes en enfant dans un magasin de jouet. t'espères surtout qu'il va accepter ta proposition.

J'étais pas le mec le plus ouvert, le plus souriant, ou le plus avenant. Pourtant, je l'étais fut un temps. J'étais le gendre parfait, à qui tout souriait. Que ce soit les études, l'amour, la famille. Mais maintenant, il ne me restait plus que la famille. Changement drastique de vie quand j'ai postulé à l'école de police. Heureusement, j'avais ma famille comme constante, qui me permettait de garder contenance quand plus rien n'allait. Et puis toi, qui débarquait pour ébranler tout sur ma soirée. « fais moi découvrir alors » Je ne demandais pas que ça, mais il était évident que si je refusais, j'allais me récolter un regard noir. Et voilà que tu m'attrapais la main pour me tirer vers ce paradis gastronomique, semblerait-il. J'attendais seulement de le voir pour y croire. Puis tu changeais totalement d'attitude une fois arrivés sur place. Yeux pétillants, sourire aux lèvres. Sans aucun doute, un de tes endroits préférés. Je hoche la tête à ta proposition, tout en cherchant de balayer le lieu du regard pour voir ce qui pourrait être intéressant. « si tu veux. mais eh... ça marche comment ? » C'était pas le genre de resto que j'avais l'habitude de fréquenter, pour sûr.

tu t'es métamorphosée; de la fille triste à la fille rayonnante. c'est toi ça, la véritable anastasia. celle qui brille de bonne humeur. celle qui s'émerveille des moindres plaisirs. celle qui aime la vie et ce qu'elle offre à chaque instant. main dans la main, prête à guider l'âme perdue de kaze. — c'est pas compliqué et te voilà à lui expliquer le dédale — on peut prendre à manger aux stands qu'on veut et puis après, s'installer où y'a de la place dis-tu en pointant les différents endroits où l'on peut s'installer. ce soir, avec de la chance, il n'y avait pas grand monde. les queues aux stands n'étaient pas hallucinantes et il y avait pleins de tables vides. — j'adore manger libanais et indien que tu lances, attrapant à nouveau sa main pour le tirer dans une des allées de nourriture. — t'as déjà mangé albanais? tu sais qu'il y a un stand ici, qui fait la nourriture du pays natal de ta mère. t'espères qu'il soit un peu aventureux et prêt à goûter.