tw : deuil, décès, drogue

La balançoire s’est arrêtée au milieu de sa course. Plus personne n’entend le cliquetis métallique des chaînes, ni les rires qui vous échappaient. Le siège de bois est suspendu, la gravité désemparée face à l’absurde. Comme si le désespoir avait pris forme. Morte. Tu penses à elle dont le prénom résonne désormais comme un glas pénétrant tes entrailles. Retentissement toujours plus insupportable, vibration de souvenirs dont tu es le seul possesseur. Chaque jour, chaque minute, chaque seconde. Tu marches vers une finalité absente, ectoplasme exsangue dont le hurlement ne parvient pas à franchir le seuil de tes lèvres. Un étranger dans la sa ville natale, ces rues hostiles et tant de visages anonymes se pressant dans l’écœurante joyeuseté hivernale, et le sien souriant dans l’immensité du vide. Tu ressasses cette image hantée dans ce parc qui se souvient de vous et des longues heures que vous avez passé à vous apprivoiser dans ses bras. Morte. Elle est morte. Comment accepter l’atroce réalité ? Comment supporter que le temps emporte sa figure et sa voix ? Que bientôt les détails s’effaceront pour ne laisser que le néant d’un bienheureux passé ? Tu rejoues la même boucle incessante, espérant capturer dans ton esprit vivace les fragments de votre relation. Pauvres miettes, vulgaires éclats de verre coincé à l’intérieur de ta chair. Aujourd’hui, aucune artificielle substance pour te soustraire à la vérité. Ton thérapeute répète qu’il est important de poursuivre son existence ordinaire malgré le drame, puisque son départ brutal n’est pas ta mise à mort. Menteur. Tu pourrais crier tout ce qui est mort en toi ce jour-là, combien il est impossible de décrire l’exactitude de cette perte tant elle est vertigineuse. Combien il te semble ridicule de soutenir le regard de Wendy ou même de la contacter. Parce qu’elle était là, parce qu’elle a assisté à la chute. Elle était venue, chez toi, superbe. Sa bouche brûlante souriante de toute sa cruauté, ses griffes prêtes à te déchirer. Un soupire t’échappe et tu observes le petit groupe de Adams rassemblé dans ce parc. Tu attends patiemment les consignes. De toutes les missions de la récolte de fonds, celle-ci semble la plus propice à honorer. Tes lèvres miment un sourire. « J’vais avec Théo. » Tu hausses un sourcil interrogateur en t’approchant. Sheng. Vous vous êtes déjà croisés par le passé et tu n’ignores pas sa proximité avec Haiwee. Et surtout avec Wendy. « Ça te dit un Saint Bernard ? Y’a un bulldog deux maisons plus loin, on fait une pierre deux coups ? » Tu observes la liste des noms et hoche la tête. « Bonne idée. Tu es à l’aise avec les chiens ? »