De retour sur Boston, c'est étrange pour moi de me retrouver ici. Je réalise que cette ville devient peu à peu ma maison, que j'y prends certains repères. Je m'y sens bien malgré la solitude, quelques personnes qui me donnent envie de m'accrocher. J'ai pris ce temps pour réfléchir. Pour m'autoriser oui, à vivre ma propre vie. Ne plus me sentir coupable de mon passé et encore moins responsables des fantômes qui viennent hanter mes songes. Jared a pu vivre sa vie d'enfant pendant cette semaine, ça m'a fait tellement de bien de le voir insouciant, de ne penser qu'aux jeux avec ses copains et de profiter de la plage et du soleil. Je crois que moi-même je suis apaisée. Le visage moins fermé, ce teint légèrement hâlé parce que je bronze pas tant, faut pas déconner, et cette lueur dans les orbes qui vient dire que pour moi tout a changé. Il est trop tard pour reculer, je dois avancer. J'ai commencé à parler au petit pendant nos vacances, profitant de moments privilégiés tous les deux, je tiens à ce qu'il sache, que ça changera rien entre nous, que je resterai toujours cette présence bienveillante pour lui. Ouais, je réalise mon fantasme d'être la marraine la bonne fée pour quelqu'un et ce sera lui. On rentre à l'appartement et t'y es pas au départ. Rentrant de Californie quelques temps après nous. Jared te fait une fête digne de ce nom et je souris simplement heureuse de vous voir retrouver, même si je sais que pour toi ça reste toujours compliqué. Je peux pas porter ça. C'est ton chemin, pas le mien. J'attends quelques heures pour te demander qu'on se rejoigne tous les deux au calme, profitant que le petit soit au jardin d'enfants. Je ne suis pas particulièrement anxieuse à cette idée. Posée, décidée, persuadée d'agir au mieux pour moi et donc finalement pour toi aussi. La lumière est vive malgré le froid, et la rivière coule paisiblement, accompagnant les badauds, les histoires aussi superficielles que profondes. C'est une meute anonyme qui nous pare, me donnant finalement l'impression qu'on est seuls. Toi pris dans tes désirs de revanche et moi dans bien d'autres choses. Je tourne mon regard vers le tien, sourit doucement, et annonce. « Je voulais te parler Dwayne, j'ai réfléchir pendant mon séjour au soleil et je pense que t'avais bien d'autres choses à faire pour ta part, tu m'en parleras si tu veux mais je te forcerai pas à la faire. » Mes mains viennent se joindre entre elles et un instant mon regard se perd dans les cieux. C'est comme si je cherchais un peu Tanwen des yeux, je la sens présente et en même temps déjà si lointaine. Je me détache, parce que je le dois. C'est la meilleure solution pour nous tous. « Je vais quitter l'appartement, chercher mon propre logement. Je le fais pas par colère, je le fais pas pour que tu te fâches ou que tu me retiennes. » Peut-être que oui, j'ai pu chercher ton attention, un besoin de savoir que t'es là pour moi, que tu tiens à moi. Mais j'ai réalisé que finalement peu importe. On a besoin de tracer nos propres routes. Que ça ne me détruise plus et que ça ne te freine plus. « Je t'aime Dwayne, je t'aime sincèrement. Je t'aimais avant Tanwen et je t'aimerais sans doute après. Mais je ne peux plus m'abîmer à t'aimer, à prendre une place qui n'est pas la mienne et à espérer que ce simulacre donne quelque chose. Je dois vivre pour moi et plus me sentir coupable de le faire. Alors, j'ai besoin d'avoir mon propre espace. Je veux continuer à pouvoir être ton amie et à être présente pour Jared, alors si t'es d'accord, je chercherai pas loin de chez nous. Et si besoin, je pourrais demander aussi un changement d'affectation. Parce que ça sera peut-être pas évident pour nous, ce lien hiérarchique. Je veux plus que tu vires un mec parce que j'ai une aventure avec ou que je tape une crise parce que t'en regardes une autre. C'est pas ton cas pour l'instant mais, ça le sera un jour. » Et je veux pas de ça entre nous, je veux qu'on tienne. Pour Jared, pour Tan' aussi. Je pourrais jamais t'avoir comme je le veux, alors on doit trouver les solutions pour ne pas tout détruire. Et moi en premier en passant.

On avance, chacun à notre façon. J'peux comprendre ce besoin de changer d'air, de prendre tes distances pour mieux revenir. Honnêtement, j'ai même cru qu'tu reviendrais pas. J'ai imaginé que tu puisses avoir envie d'un nouveau départ; loin de tout, loin de moi et de la noirceur que j'transporte. Aujourd'hui, j'ai simplement pris conscience que tu t'protèges, qu'on vient d'mettre une limite entre nos âmes, et nos corps. Pour le mieux. J'ai pas la prétention de t'apporter l'bonheur, ni même du positif. C'est pas ma nature, et j'suis simplement fidèle à moi-même. C'était frustrant d'voir nos lignes emmêlées; sachant pourtant qu'nos chemins sont foutrement différents. Le passage en Californie m'a pas fait d'bien, c'était plutôt du genre, à retourner l'couteau dans la plaie. Douloureux. Pas mal de nostalgie, et toujours plus de colère.

Retrouver Jared m'a fait du bien, même le plus grand qui puisse exister. En retrouvant son ancienne chambre, celle qu'on avait construite de nos mains, j'ai réalisé à quel point la paternité m'est importante. Mon fils, c'est ma vie. J'pourrais devenir le plus grand connard qui ait jamais existé, si ça pouvait lui permettre d'être heureux. J'serais capable de tout, pour sa petite bouille. C'est mon fils, et c'est ma bataille. A moi d'lutter. T'as pas à prendre les armes, c'est pas ta quête. Ca l'a jamais été. J'ai compris, désormais, qu'tu dois penser à ton bonheur, à c'que tu désires. Pour avancer, dans la direction de ton choix. Sans chercher à m'porter, encore moins à m'supporter. Tout ça, c'est simplement terminé. On s'faisait du mal, on s'déchirait à longueur de journée. Alors finalement, notre petit conversation du jour, n'est pas si surprenante à mes yeux. J'suis plus calme, clairement moins nerveux; serein à l'idée qu'tu fasses les choses de ton côté. Ca changera rien pour Jared, il sait qu'tu restes pas loin, que tu seras toujours présente pour lui. Ce qui est valable pour nous, ne l'est pas forcément dans son cas.

Bonnet couvrant mes mèches blondes, j'utilise le froid comme une excuse imaginaire, pour justifier la clope que j'place entre mes lèvres. J'imagine déjà l'regard revolver d'Abso', ça m'fait sourire à chaque fois que j'en grille une. Alors j'attends; patient, attentif surtout, qu'tu me dises les choses, comme tu les ressens. Je m'attends plus ou moins à la suite, j'suis prêt. " Entendu, j'comprends. " mon visage s'incline brièvement, avant que je n'expire la fumée, lui laissant le droit d'aller rejoindre les cieux. A vrai dire, j'sais pas quoi rajouter à tout ça. Ta réflexion est censée, prise avec le temps, et j'suis d'accord avec ça. C'est mieux pour toi, et pour moi. " C'est une bonne base pour l'avenir. Je pourrais jamais t'apporter c'que tu veux, alors c'est le mieux. Il est temps qu'tu penses à toi. " j'ai pas l'intention de m'étaler, ou d'partir sur de longs discours. C'est pas mon style, tout simplement. Mais j'suis lucide; dans l'état actuel des choses, on conserve notre relation, et nos routes respectives. Sans doute c'qu'on aurait dû faire depuis un bail, mais mieux vaut tard que jamais. Telle est notre limite, et j'ai pas d'problème avec ça. C'est un sourire que je t'adresse; parce que j'suis content, clairement, de t'épargner le reste, et mon côté obscur. Si j'plonge, c'est seul, et très bien comme ça.  

C'est difficile pour moi de te faire part de cette décision. C'est renoncer à quelque chose et c'est ne pas écouter mon cœur mais ma raison. Mon cœur me malmène, il m'a conduit la plupart du temps sur la mauvaise voie, sur les fils insidieux de la destruction. Je sais que tu m'apporteras pas du positif. Surtout pas avec ce fantôme commun. Mais te faire part de cette décision, c'est enterrer un peu plus de notre passé, c'est me passer de toi aussi, de ces nuits où on a été proches, où on se passait de mots, des moments plus légers de complicité, de jeux avec le gosse, de blagues. C'était pas que noir. Mais j'ai pas été suffisamment lumineuse pour t'éclairer. Tu t'enfonces dans les noirceurs et j'assiste au spectacle. Je suis pas suffisante, je dois être lucide pour pas me noyer moi aussi. C'est difficile, une épreuve de t'avouer mes sentiments, de les laisser sortir là au dehors, cœur battant en dehors des côtes, et paupières brûlées de ces aveux. Le mur qui me fait face est plus raide encore. T'abandonnes. Tu te dis sans doute que c'est mieux pour moi. Que je serai plus heureuse sans toi. Tu te trompes, mais qu'est ce que je peux faire contre ça ? Je veux pas revivre ce rejet, ma fierté mise à mal quand tu m'as dit que je serai pas convenable pour toi, que je suis trop libre, pas assez elle. Je me revois en sous-vêtements dans ton bureau et juste ça me fait mal. En silence, mes poings se ferment sur eux, la morsure de mes ongles sur mes paumes, c'est tout ce que je veux sentir. Souffle qui s'inspire dans une trachée dévastée, j'inspire tes relents de tabac, souhaitant silencieusement m'empoisonner moi aussi au passage. Ainsi soit-il. Le temps décidera du reste. Mais je peux pas continuer à m'écorcher à tes remparts. Je suis pas assez solide et j'en ai pas le courage. La dernière fois que je l'ai eu, je me suis retrouvée au trou. Alors, c'est le réflexe de survie qui parle. « Si tu le dis. Je vais essayer. » J'ouvre de nouveau les yeux. Je pense au gamin. A tout le reste. Au boulot aussi. « Et pour le changement d'affectation, t'en penses quoi ? » Je veux savoir comment t'envisages les choses de ce côté.

J'ai réagis comme un connard, j'en ai conscience. T'as ouvert ton coeur, et j'suis simplement resté indifférent. Du moins, en apparence. C'est toujours complexe de lire entre mes lignes; preuve étant que t'y arrives pas. Plus. Mais j'suis comme ça et j'ai pas l'intention d'passer pour l'gentil; c'est pas mon histoire, pas ma voie. Je deviendrais pas ce type souriant, chargé des plus belles lumières. J'suis pas le gars qui apportera le positif dans ta vie, c'est une certitude. J'ai toujours été incapable de faire briller les autres, et je m'y suis fait. Tel un mur, je reste inatteignable; et qu'on m'apprécie ou pas, j'en ai rien à faire. J'veux pas être blessé, plus que je n'le suis déjà.

J'garde ce souvenir en tête, aussi puissant que triste dans sa finalité; d'une nuit qu'on a failli partager. Et j'regrette pas d'avoir dit non. Nos moments de proximité n'étaient pas des erreurs, mais il faut une limite. T'es accrochée à la mémoire de Tanwen et ça changera probablement jamais. J'refuse de m'accrocher à toi, par besoin d'me souvenir d'elle. Je t'apprécie Ludo, déjà plus qu'il ne l'faut. Mais j'peux pas donner plus. On s'complète sur bon nombre de points, c'est vrai; mais on est opposés sur le reste. T'as besoin d'aller de l'avant. C'est pas encore mon cas. Trace ta route, fais ton ch'min. J'ai encore des choses à régler d'mon côté, et j'y peux rien. " J'pourrais jamais donner, faire plus que ça. Je veux l'meilleur pour toi, alors je n'peux être que d'accord avec tes paroles. " il y a des mots que j'sais même plus prononcer. Il y a des mots qui brûlent ma gorge, quand j'y pense. Mais j'suis incapable d'aller plus loin. Soit tu apprends à lire mon silence, soit tu passes ton chemin. J'ai pas d'entre deux. " J'suis capable de bosser avec toi. Mais si t'estimes que l'mieux pour ton bien-être, c'est de bouger.. Alors j'appuierai moi-même ta demande de transfert. " de mon côté, c'est limpide. Je saurais être professionnel en caserne, si tu décides de rester. J'irais pas crier au scandale si tu vois quelqu'un; après tout, c'est ta vie et ton bonheur. Quelle que soit ta direction, t'auras mon soutien.  

T'es pas le plus expressif. J'ai l'habitude de tes traits taciturnes, de tes yeux qui expriment ce que ta voix ne dira jamais. Mais là, tout de suite, ça me fait un peu mal. Je dois me séparer, me protéger, tout en sachant que quelque part, je vais jamais vraiment te lâcher. Mais je dois pas me laisser entraîner dans tes noirceurs. Je suis faite pour la lumière, je suis faite pour briller. Je peux pas avoir passé tous ces mois à l'ombre et me laisser flétrir, alors le challenge sera difficile de concilier les deux. Mais je me dis qu'en semant quelques distances pour moi nécessaires, on arrivera peut-être à maintenir ce drôle d'alliage, à rendre la démarche un peu moins bancale et surtout plus naturelle. « Très bien. » Je comprends pas vraiment, parce que moi je me battrai comme une furie pour les personnes que j'aime. Toi tu lâches tout simplement, ou alors deuxième explication, tu ne m'aimes pas vraiment. Et dans ce cas, faut que je pense à moi avant tout. Le temps parlera le reste. Et je suis mon intuition avant tout. « Je vais me laisser quelques mois de réflexion, voir déjà ce que ça donne avec le fait qu'on vive plus ensemble. Et je te tiendrai au courant dès que j'ai une piste de logement. Je pense qu'on peut bosser ensemble en bonne intelligence mais tu dois me promettre de ne plus intervenir dans mes histoires. » Je t'observe de côté. Ouais t'as joué ton rôle de chef avec Denzel mais on sait pertinemment que t'as dépassé les limites. Le professionnel avait bon dos. Je compte pas avoir une histoire de nouveau au boulot, mais sait-on jamais.

Tu sais, j'ai toujours été coincé entre deux feux. Le chaud, et l'froid. Le feu et la glace. L'ombre et la lumière. J'ai grandi ainsi, entre les sourires innocents d'ma mère, et la distance de mon père. Rien de vraiment équilibré. Avec le recul, j'me dis que mon comportement n'est qu'un reflet d'mes premières années d'vie. J'suis devenu à cette image, dépourvu d'nuances, simplement noir et blanc. Et, qu'on s'le dise, plutôt noir en ce moment. J'peux pas m'ouvrir, malgré ton petit discours. J'peux pas prononcer ces mêmes mots, j'peux pas faire cette démarche avec toi. Alors oui, protège toi. Monte tes remparts et reste à l'abri. De moi. J'suis peut-être nécessaire à ta vie, mais j'suis tout aussi nocif, dans l'fond. Un lien toxique, qui aurait pu t'faire chuter. Sans l'vouloir. Mais j'contrôle pas l'ampleur du phénomène, et mes ombres sont voraces. C'est pas une question d'amour Ludo. En dehors de Tan', j'ai jamais été un grand sentimental. C'est juste le mieux pour toi. J'vais pas chercher plus loin. " Très bien. " j'en prends une d'ces inspirations, profonde, avant d'contenir l'expiration en un long souffle, presque tranquille. " C'est promis. J'dirais rien, tu as ma parole. " j'espère quand même - et mon regard en coin l'prouve - qu'tu comptes pas remettre ça en caserne. J'veux pas de comparaison avec mes expériences perso', et surtout pas avec Tanwen. J'veux simplement éviter qu'ça se reproduise. " La discrétion Ludo. C'est l'mot d'ordre. " et j'en tire un sourire amusé, plus léger, avant d'secouer la tête et d'lâcher un soupir, faussement désespéré. Tant qu'tu te fais pas choper, tout ira bien. C'est ça, le secret.

Et quand mes sentiments débordent, c'est l'indifférence que tu prônes. Qu'est-ce que j'espérais ? Que tu m'en dévoiles un peu plus. Que tu viennes me dire que tu tiens à moi. Que oui quelque part tu m'aimes après toutes ces années, tous ces moments en pointillés. Mais il n'en est rien et je ne peux que constater cette amère réalité. Je ne peux pas rester là et attendre que tu daignes me regarder. Je vaux la peine et si tu ne peux pas le voir, tant pis, je dois me résigner. Ce n'est pas avec plaisir que j'accueille ton indifférence, mais j'essaie de ne plus en être trop blessée. Je me suis trompée voilà tout. « Ok. » léger sourire que j'amorce en regardant le fil de l'eau. Je rebondirai pas sur la dernière remarque parce que t'as été loin d'être discret par le passé et que t'avais rien à faire dans ce couloir, mais je tiens pas à raviver un feu qui nous a suffisamment cramé. « Et alors, la Californie ? » Je tiens pas à rester dans mes drames, je veux savoir comment tu as avancé là bas. Ce qui s'est passé, ce que tu as ressenti et à quoi je dois me préparer pour la suite. Parce que tout ça n'augure rien de bon. « Tu veux marcher ? » Corps qui a besoin d'être en mouvement, le regard pouvant s'accrocher à autre chose que l'ignorance de tes orbes, à ces murailles qui t'entoure. Oublier pour mieux m'évader dans le mouvement. Et finalement, avancer.

Tu vois, c'est pour ça qu'on m'surnomme facilement "connard de service"; parce que j'suis prédisposé à m'faire détester. J'montre rarement mon affection, même quand l'attache est profonde, comme entre nous. J'ai trop pris l'habitude, d'perdre les gens qui comptent, ceux à qui j'ai osé dire "je t'aime". Alors non, compte pas sur moi pour rentrer dans ce cercle, dans c'genre de déclarations plus intimes. Mes sentiments resteront silencieux, et tant pis si ça fait d'moi un vieux con. Protège toi de moi Ludo, t'as raison; ça pourra pas t'faire plus de mal. La Californie ? J'ai pas spécialement envie d'en parler; tu devrais rester en dehors de ça. Aborder l'sujet, c'est mettre de l'huile sur le feu. " De nouvelles pistes, plus personnelles. J'travaille encore dessus. C'était pas un plaisir d'y retourner. Albus va m'aider pour la suite. " c'est encore flou, mais la vengeance prend forme. J'tiens pas à t'faire exploser au passage, alors j'vais au plus simple. C'était tout sauf génial; seulement nécessaire à l'avancée. " Allons vers le fleuve. " prends ça comme un oui, même si l'air reste tendu entre nous. Le corps s'relève, opales pointant vers le cours d'eau, vers ces anonymes qui ont eu la même idée. " La tempête s'approche, tu sais. Et j'veux pas qu'tu fasses partie des victimes. " l'orage gronde au loin; quelque chose me dit qu'ce sera de pire en pire, au fil du temps. Et j'refuse de te perdre, toi aussi. T'as assez souffert Ludo, tu mérites qu'on t'fiche la paix.

Tu voudras pas m'en dire plus. Parce que tu prépares une vengeance redoutable. Tu n'hésiteras pas à te salir les mains si il le faut et t'as cette idée que je suis en porcelaine ou je ne sais quoi. T'oublies que ma jeunesse s'est formée à l'abri des barreaux. Mais c'est ton histoire, du moins, tu t'en persuades et je peux rien contre ça. Je vais pas m'écorcher davantage les phalanges à essayer de te rejoindre. Parce que je pense que je dois préserver ce qui était le plus précieux pour elle, à savoir son fils. Et que si tu t'y perds, je dois tenir bon, au moins pour lui. Rassurée tout de même que tu sois épaulé par Albus. « Je sais que tu veux que je reste en dehors de ça, mais si tu as besoin, je suis là ok ? » Et tu le sais, que je viendrai pas poser de questions si il y avait besoin de faire quelque chose. J'acquiesce, alors qu'on se met en route vers le fleuve. Je me sens apaisée, les choses sont moins difficiles que je l'aurais cru. J'ai l'impression de me détacher mais que c'est pour le meilleur. Tu poursuis ta route et moi la mienne, tu t'y perdras sans doute et moi je peux rien faire d'autre que de rester là. Je pourrais fuir aussi, mais je le fais pas. « Je le sais oui. » Je sais pressentir ce genre de choses. « Je suis bien trop coriace pour ça. » Les poings d'un petit ami, les attaques d'autres prisonnières, sans parler de nos jours d'exercice, j'ai dû me battre pour vivre, et ce depuis des années, alors la tempête, crois-moi, je suis prête à l'affronter. Je suis de celles qui dansent sous l'orage pas de celles qui le craignent. « Viens. » dis-je avec un léger sourire, billes armées d'une folie fugace de celles capables de révéler mes conneries les plus juvéniles. Mes phalanges attrapent les tiennes et je reste sourde à tes protestations, parce que je refuse qu'on affronte la suite comme un fardeau, faut profiter au contraire. Mes pas se pressent, jusqu'à courir légèrement, me marrant au passage en voyant ta gueule. « allez Cap', montre que t'en as encore un peu dans les poumons. » A force de t'empoisonner de poison et de fumée, tu m'étonnes. Il y a des petites barques là pour les touristes, avec des mamies et des gosses, on va carrément pas avec le paysage mais. « Deux tickets s'il vous plaît. » Grand sourire alors que le mec me tape la discut' et que t'as l'air effaré, tu le sais pas, mais j'aime particulièrement ces moments. Je prends place dans le petit bateau en prenant les rames et en te fixant du regard « Monte Rashford. » Tu me dois bien ça, on est une équipe non ?

J'veux pas que t'y sois mêlée, pour une raison évidente. J'te compterais pas parmi les victimes de c'fumier. Ce serait de trop. Si quelqu'un doit en crever, finir en taule ou je n'sais où, c'est moi. Depuis Tanwen, j'ai presque accepté l'idée d'tourner le dos à la lumière. J'accepte qu'la fin ne soit pas heureuse, que j'en réchappe pas. Un simple hochement d'tête, parce que j'ai conscience que t'es là, que j'peux te demander et qu'tu viendras sans poser d'questions. Sauf que.. Non. Juste non. Albus reste mon allié pour c'genre de choses, et te tenir à l'écart, c'est pour le mieux. Pour ton casier judiciaire, sait-on jamais. Pour Jared, aussi. " C'est pas faux. " t'es une vraie battante, t'es toujours revenue des enfers. T'es une badass, comme ils disent dans les films. Mais il suffit d'une fois, pas vrai ? Un écart, une faute d'inattention. Tanwen en a payé l'prix fort. J'préfère te tenir en sécurité, surtout par rapport à ce taré. " Ludo, putain ! " et j'proteste, tout en sachant que c'est déjà trop tard. Ai-je l'air du type qu'on pousse à courir, comme ça, dans la rue ? Non. Tu fais chier, à m'lancer comme un défi de tenir le rythme " la ferme, Spinelli " une réponse entre deux foulées; et j'avoue, l'goudron bousille clairement mes poumons. Mais j'ai l'expérience et l'entrainement; deux valeurs que j'compte pas perdre de sitôt. En revanche, l'histoire d'la barque, non, j'avais pas vu venir. " Noo.. " tu peux voir que j'tire la gueule, et j'suis certain que le vendeur aussi, l'a remarqué. J'tente de le dissuader en lui faisant les gros yeux, mais t'es trop bornée pour ça. Merde, tu vas m'faire croire qu'on va monter dans une barque et faire un tour sur l'eau ? Fuck, j'ai d'autres chats à fouetter. " Tu fais chier, mais tu l'sais déjà, mmh ? " je monte malgré moi, m'empresse de tirer une clope du paquet. J'te laisse ramer, faut pas pousser. Mais ça va, mon côté grincheux va rapidement disparaître, j'vois que ça t'fait plaisir, alors on va en profiter. Sérieusement. " J'peux te parler d'un truc ? C'est sérieux, et rien à voir avec le pyro'.. " tu serais la première à qui j'parle de cette idée, folle sans doute. Mais bon, faut croire qu'une partie d'moi cherche encore des façons de s'accrocher.