SASHA OSBORNE ► tia jonsson

enfant sauvage a vu le jour le 18 juillet 2003 dans le même bled où elle a vécu toute sa vie, à melbourne.

le patronyme osborne résonne à son oreille comme l’écho d’une famille dysfonctionnelle dont elle était le bouc émissaire. comprenez-moi, putain. encore aujourd’hui elle traîne ça comme un boulet au pied, sept lettres qui la renvoie à sa misère humaine. et pour ce qui est de son blase, on l’appelle sasha ou on l’appelle pas.

n’ayant connu que le pays d’en-dessous pour refuge, elle est naturellement australienne.

les origines australiennes de son père peignent son identité tandis que le ricain maternel fardent ses traits.

bisexuelle non assumée pour une société craintive, elle succombe aux âmes tourmentées, peut loucher sur la fatalité pernicieuse des courbes féminines tout en se satisfaisant des enivrants baisers de la gente masculine. mais jusqu’ici c’est toujours aux mêmes têtes de cons qu’elle s’est abandonnée.

elle a la beauté des femmes inaccessibles, du genre qui ont l’air de sortir d’un tableau de la renaissance et dont la délicatesse se perpétue dans les vies qu’elles ont vécues, son cœur est pourtant malhabile, incapable de construire quoi que ce soit depuis trop longtemps car l’amour lui joue des tours. et ce cœur meurtri lui hurle les souvenirs d'une autre vie. disloqué, incompris, rejeté encore et encore jusqu’à c’que les morceaux ne tiennent plus ensembles. avant le summer break, elle a réalisé ses sentiments pour son meilleur ami de toujours après s’être faite trompée une énième fois par un boug qui n’avait d’yeux que pour son tableau de chasse. mais une fois de plus elle a tout gâché, et maintenant, elle est toute seule.

à elle qui pensait qu’elle arriverait à tout gâcher avant même d’avoir la chance d’en arriver là, sasha va préparer un bachelor en anglais ces quatre prochaines années dans une des meilleures écoles au monde. ironie du sort, elle a gardé cette information secrète à son meilleur ami pour lui faire la surprise à la rentrée. qui lui dit qu’il voudrait qu’elle disparaisse de sa vie ?

elle a fréquenté les enfants les plus riches de l’état du victoria, s’est accomodée de leur mode de vie en michtonnant un max, mais la fraude est finie et dans son cas elle est irrévocablement boursière.

un bon indicateur de richesse serait qu’elle prenait deux heures matin et soir à faire le trajet de l’école à son mobil home. le concept de l’argent pour sasha est superflu. elle n’en connaît pas la valeur et pourtant elle devrait, elle qui allait voler la bouteille de gaz de la voisine à la demande de sa mère. issue de la classe moyenne, sasha avait l’habitude de se faire vanner pour porter le même manteau chaque hiver.

sans emploi, mais elle rêverait de se lancer dans la lecture de chartes astrologiques et de tests de personnalité et de se faire des sous avec. parce qu’entre nous, son porte-monnaie crie au désespoir.

la adams house a su attirer son attention sur le papier, à voir ce que ça donne en vrai.

comment osborne a pu t-elle finir à harvard ? en voilà une drôle de question pour sasha, l’enfant qui ne savait pas rêver. qui à la question “où vous voyez-vous dans dix ans”, répétait “tout sauf ici”. dont la seule ambition était de se barrer de chez elle, d’oublier que la famille était un pilier de la socialisation humaine, quitte à finir une bonne fois pour toute à la rue. seul son professeur d’anglais a vu un potentiel en elle alors qu’elle n’était qu’au collège. il la faisait participer à des concours d’écriture auxquels personne n’assistait, l’encourageait à partager sa créativité et à viser haut. puis darcy a pris le relai au lycée, et même si pendant tout ce temps elle ne s’est jamais convaincue qu’elle pouvait briller, elle a fini par décrocher une place à harvard. récolte de lettres de motivation - la plupart venant de ses profs d’anglais antécédents, participation assidue à des clubs de débat et d’expression, essai sur le syndrôme de dépersonnalisation et sa relation avec la perception psychologique, liant le tout aux mecanismes de self-expression de sa génération : son profil, aussi décousu et imprécis soit-il, a séduit le jury. faut croire que les miracles existent.

(langue corrosive) sasha elle est tout d’abord éloquente, que ce soit dans ses paroles ou dans sa plume, elle sait appliquer créativité et rationalité à ce qu’elle conte pour un rendu brillant. elle soutire un certain charisme de cet art qu’elle pratique, celui de la rhétorique, mais avant tout elle en devient persuasive.
cette ingéniosité fait d'elle une manipulatrice malgré elle, alliant son pragmatisme à sa ruse pour ne vous donner aucun autre choix que de lui donner raison. le pire dans tout ça, c’est qu’elle ne réalise même pas qu’elle (mal)mène les gens en sa direction, qu'elle les fait rentrer dans ce jeu qu’elle ignore avoir crée. c’est ainsi qu’elle consume tout ce qui l’entoure, car sa présence suffit à entraîner les bons comme les mauvais dans le chaos.

(boule de haine) parce que sasha, c’est aussi cette âme fuyante, lâche et impulsive, qui agit en réaction à des émotions qu’elle contrôle pas, qui adopte des mécanismes d’adaptation malsains et qui se cherche des excuses pour avoir foutu la merde chez les autres. elle peut pas s’en empêcher, de fourrer tous ses sentiments refoulés dans ce myocarde assombri par son esprit pernicieux, et elle attend que ça explose.
ses vices ne sont que le reflet de sa pauvre estime de soi, de son envie de se réveiller dans le corps de quelqu’un d’autre, n’importe lequel sauf le sien, car on peine à la comprendre et pour être honnête, elle se comprend pas elle-même. sa misère immense, si visible soit-elle est déchirante. ça se ressent dans ses écrits, ce nihilisme couvert d’un sarcasme excessif, presque étouffant, alors qu’elle peint sans cesse la critique d’un monde où elle s’est jamais sentie membre. dans sa tête, c’est elle vs les autres car c’est ainsi qu’on l’a toujours traitée.

(corps et âme) certains jugeraient sasha indépendante et à juste titre, parce qu’elle a une aversion pour les figures d’autorité et ne supporte pas ne pas avoir le contrôle, d’autant plus que sa solitude lui a appris à se démerder sans l’aide de quiconque. pourtant elle a cherché partout une main tendue, prête à la rattraper et à la conforter, mais ses efforts ont été vains puisque le trou béant dans sa poitrine ne s’est jamais comblé.
sasha a d’ailleurs plus que jamais peur de s’attacher, car elle se sait obsessionnelle et ça l’a rendue malheureuse. la drogue, les hommes, ce cirque ne suffit plus à noyer cette angoisse grandissante. alors elle renie tout ce qui est sensation l’ayant saisie jusqu’à l’âme. sasha aime, donc elle détruit.

qu’on lui a répété toute sa vie. alors elle a fini par y croire.
si sasha s'est toujours sentie incomprise à la maison, elle a développé son obsession pour l'astrologie et les tests de personnalité à partir de cette solitude et de son désespoir de recevoir la même attention qu'elle accordait aux gens tout le temps. c'est devenu sa façon d’exprimer son affection, son véritable love language. dans le fond, elle espérait juste que quelqu'un lui rende la pareille. l’analyse, essaie de la comprendre, soi fasciné par son esprit et lui accorde de l’importance. ou peut-être qu’elle cherchait juste un psy pour lui expliquer ce qui tournait pas rond chez elle.
sasha s’est sans cesse sentie en décalage avec les autres, et pas seulement parce qu’elle était la seule à venir de la classe moyenne dans les établissements qu’elle fréquentait, mais parce qu’elle ressentait ce profond mal-être que les gosses de son âge n’étaient pas sensés ressentir. à être trop consciente de tout, tout le temps, à voir le mal dans les choses dont les filles de son âge jouissent, elle a toujours été perçue comme quelqu’un de profondément désagréable.
elle a alors grandi en cavalier seul, au bahut comme à la maison, moquée par les esprits simples et entourée par des parents qui avaient lâché l’éponge avant même qu’elle vienne au monde, exaspérés à la simple idée de son existence. puis y a eu darcy. il a changé sa vie, le cours de son histoire, pour autant c’est pas une histoire pour aujourd’hui. ce serait rajouter une couche sur ce charnier de peine, de honte.

puis en grandissant, sasha s’est mise à attirer les regards et à enchaîner les petits copains. entre autres parce que de fausses rumeurs sur sa vie sexuelle avaient été colportées à son sujet, mais au moins ça lui a conféré cette validation dont elle se languissait. aussi triste soit-il elle se complaisait dans ce rôle qu’on avait crée de toute pièce pour elle, car c’était tellement plus simple de se conformer à l’idée qu’on se faisait de sa personne plutôt que d’essayer d’exister. le pire, c’est qu’elle s’est convaincue qu’elle avait aimé chacun des garçons avait qui elle était sortie. qui aime bien châtit bien, dit-on. plus ça faisait mal, plus ça devait être de l’amour. et ceux qui comprenaient pas, qui dénonçaient la toxicité de ses relations, elle les ignorait.
avec du recul elle sait qu’elle se voilait la face, mais sasha était très douée pour dissimuler les choses, les cacher, les éviter. alors elle continuait, blessait des gens sur sa route et prétendait que sa vie lui plaisait.

entre fiction et réalité, sasha s’est perdue à mi-chemin, abandonnant des fractions de son âme à chaque fois qu’elle souffrait pour un mec qui abusait d’elle.
écrire, c’est ce qui la retenait d’abandonner complètement son intégrité. ça la ramenait à tout ce qui faisait d’elle une personne, une femme, un cerveau, un esprit, destiné à plus qu’à vivre à travers des relations superficielles et artificielles. ça lui permettait d’aller loin, loin de l’écho répétitif de ses échecs. et parfois, même, ça lui donnait envie de changer pour le meilleur.
c’est qu’à la fin du lycée qu’elle a retenu la leçon, après qu’un énième connard ait commis une infidélité. la fois de trop, car elle l’avait beaucoup aimé, comme elle avait beaucoup aimé les autres, mais alors qu’une chance s’offrait à elle de repartir de zéro, de s’envoler en amérique avec son meilleur ami (il n’était pas au courant), elle n’avait plus la force de continuer ce jeu de rôle.
le chemin de la rédemption fut court pour sasha, qui n’a attendu que quelques heures pour tout gâcher à nouveau. cette fois-ci, avec la personne qui compte le plus à ses yeux. car en mettant un terme au bal des cons, sasha a lentement réalisé que le seul individu l’ayant traitée avec honneur et respect, lui ayant montré qu’il y avait plus à la vie que des relations vides de sens, c’était darcy. et ça l’a frappée, à quel point elle ressentait de l’amour pour lui. c’était pas nouveau, oh non, c’était enfoui en elle comme un secret qu’elle emporterait jusqu’à sa tombe, car l'idée de le laisser sortir, de montrer ses cartes, effrayait sasha à mort.
mais ce soir-là, elle l’a fait, et le temps d’une nuit tout est devenu silencieux, et beau, et tout semblait de nouveau en ordre. comme si c’était écrit.

dans les jours qui suivirent le monde était revenu dans un état de chaos. une fois de plus, elle avait tout gâché. elle l’avait trahi, elle avait agi égoïstement en lui demandant d’oublier sa copine tandis qu’elle noyait sa peine dans ses draps, et lui, contraint par ses sentiments, avait une fois plus accepté de l’aider. et maintenant qu’il en avait payé le prix, il lui avait fait comprendre qu’il n’en pouvait plus d’elle. le message était bien reçu.
de là, sasha s’est isolée tout l’été et a sombré dans l’addiction. en plus des clopes et de l’alcool qu’elle consommait fréquemment, elle a eu recours au lsd pour planer au-delà de sa souffrance, pour tenter d’oublier le fait que depuis le début, c’est elle le problème.
c’était clairement de trop tout ça, ça l’a foutue en vrac alors qu’elle devait s’envoler pour rejoindre harvard, alors qu’elle avait enfin un bel avenir à portée de main, au lieu de ça elle s’est rendue indifférente à tout ce qui se manifestait dans son écosystème.
puis il y a eu cette lueur d’espoir qui persistait, cette promesse enfouie d’une renaissance spirituelle qui la poussait à aller au bout des choses, tumeur émotionnelle qui s'était pavée dans son système. darcy avait cru en elle, l’avait poussée à rêver grand, à viser haut, à s’offrir une vie convenable, meilleure que celle qu’elle avait toujours mené, et elle lui devait bien ça. au moment où il avait le plus besoin de s’en éloigner, cette fois-ci c’est sasha qui allait le rattraper, de la plus surprenante des façons. elle savait pertinemment qu’il voudrait pas voir sa gueule, qu’il serait enragé de la savoir ici, à harvard, comme un cadeau empoisonné, mais dans son cas elle venait tout juste de réaliser qu’elle ne pouvait pas tenir le coup s’il ne faisait plus partie de sa vie. quitte à l’achever, autant que ce soit lui qui tire en dernier.

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@"Sasha Osborne” » <i>(anglais)</i>

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<span class="pris">TIA JONSSON</span> <span class="inv"></span> @"Sasha Osborne"