tw // (hohenspoon) tell me it'll be alright

l’attente était à la fois éternelle et brève. à peine eut-il le temps de la sentir s’enfuir vers la salle de bain, s’enfermant, que la porte fut tout aussitôt réouverte, signe de fin. l’automatisme le fit avancer dans la pièce, jaugeant du coin de l’œil l’objet maître du jour, innocemment posé sur le rebord du lavabo. innocemment, comme s’il n’avait pas le putain de pouvoir de faire basculer la vie de n’importe quel satané humain stupide. comme si une vie ne dépendait pas d’un ou deux minables bâtons, innocemment dépeint sur ça. à l’approche de l’objet, miles sentait son cran enfin s’éveiller. puis quand elle lui tendit le malheureux ustensile, il faillit flancher. le passé lui avait doté d’une expérience assez signifiante pour qu’il saisisse de suite le symbole. hell, no. hell, fucking no. « c’est 100% fiable ce truc ? » voix plus rugueuse qu’attendue, il observait l’objet en main d’un mauvais œil. l’encre bleue jubilait devant ses nerfs définitivement plus du tout détachés - bien au contraire. « refais en un autre » ce n’était pas une question ni une proposition. l’ordre était implacable, glissé entre ses dents serrés par une anxiété en plein éveil.

Incapable de regarder le verdict final en face, je préfère t'en laisser la charge. Quand mon regard scrute ton visage, y voit toute l’assurance s'évaporer, mon propre visage se décompose. Ta première réplique annonce la couleur et je m'empresse d'attraper ta main pour observer à mon tour le logo affiché. La fin du monde, ni plus, ni moins. La tête se vide de son sang, une sensation de chaud/froid parcourt l'échine. Le malaise pointe le bout de son nez d'un instant à l'autre. Toi qui pensait que je ne pouvais pas être plus blanche que d'ordinaire, admire-donc le spectacle. Quelle. Vie. De. Merde. Je suis paralysée par la peur, les mains tremblantes viennent sur le visage comme pour me prouver que je suis toujours en vie. "Je n'en ai pas d'autres" que je réponds tout aussi sèchement. La pression monte petit à petit... jusqu'à l'explosion. La main attrape le test et l'envoie valser avec colère à l'autre bout de la pièce tout en hurlant un "Putain" à réveiller l’immeuble. Je préfère fuir de la salle de bain, partir loin de ce... malheur qui est en train de nous tomber dessus pour effectuer les cent pas dans ma chambre, les larmes commençant déjà à couler le long des joues.

tiraillé entre laisser l’irritation prendre le dessus, au risque de briser sa seconde main ou laisser échapper ce rire amer coincé au travers de la gorge. positif. c’était grotesque, une vaste blague. les questions qui se bousculent, évidemment, accompagné de l’agitation. adieu le quelconque sang-froid dont il a fait preuve jusqu’ici. son côté apathique face aux nouvelles, face à elle prenait le dessus. marla n’était pas plus glorieuse, soudainement paralysée puis aussitôt vivace, projetant violemment l’origine de leur malheur à l’autre bout de la pièce. le temps que miles intègre son juron, sa réaction, elle s’était aussi volatilisée dans sa chambre. la statue qu’il était avait assisté au spectacle d’un regard lointain, regard vide. tiraillé entre la violence et le mépris envers soi-même. de longues secondes lui firent nécessaire avant qu’il ne laisse une face prendre contrôle : la violence. et le pauvre miroir face à lui, dans lequel ses traits accablés se reflétait, prit un coup. un bon gros coup, son bandage amortissant partiellement. putain de merde ! les éclats de verre s’éparpillèrent sur le lavabo tandis que miles tourna les talons, rejoignant la blonde dans tous ses états, dans sa chambre. « tu devrais tout de même faire une prise de sang » qu’il enchaîna aussitôt, sans répit, à la porte de la pièce, l’observant s’agiter. une partie de lui doutait encore de la fiabilité de ces engins. « et si c’est réellement avéré, ça doit faire quoi.. trois semaines ou un mois ? il n’est pas encore trop tard » toujours cette intonation antipathique, loin d’être réconfortante pour la blonde en larmes, mais réaliste. vu sa réaction, marcher sur des œufs ne leur ferait perdre que du temps.

(tw : pregnancy, mention d’avortement)

L'excès de colère par d'un coup et le test de grossesse finit sa course à l'autre bout de la salle de bain. C'était la pire chose qui pouvait arriver et pour de nombreuses raisons. Je fuis pour ne pas affronter la réalité en face, viens trouver refuge dans ma chambre, cocon censé être apaisant. Nerveusement, je m'active à faire les cent pas, secouée par les émotions qui me traversent. Je sursaute quand j'entends ce que je pense être le miroir se briser sous ta foudre. Un peu plus ou un peu moins, peu importe. Ça aura au moins de don de calmer les larmes, laissant place à la stupeur. Les pupilles écarquillées t’accueillent quand tu viens jusqu'au pas de la porte. Ta froideur légendaire s'est installée entre nous, dans notre relation où l'on avait réussi à trouver un équilibre apaisant. T'annonce la suite des événements sans détour : une prise de sang et un avortement dans la foulée. À croire qu'il n'y a même plus de place pour la discussion alors que c'était justement ce qui nous permettait de faire la balance jusqu'ici. Le calme plat, la silence qui s'installe et mes yeux ahuris qui t'observent encore. "Alors, ça y est ?" que je souffle enfin en me redressant pour te "faire face" - ou simplement ne plus ressembler à la gamine chétive. La bouche reste malgré tout résistante : "Est-ce que j'ai foutu en l'air notre relation ?". Mets de côté les événements, puisque de toute façon, on ne peut rien y faire dans l'immédiat.

la colère n’était décidément plus le sentiment qu’il maîtrisait au mieux, demandez à sa main droite. lui qui aimait se targuer de son masque impénétrable dans les situations de crise, perdait avec évidence son titre de maître. entre hier puis aujourd’hui; sa rage avait pointé le bout de son nez plus fréquemment que ces six derniers mois. une bombe à retardement, c’est ce qu’il était. et marla en faisait les frais, indirectement. la situation primait malheureusement sur le reste à cet instant; pour lui, pour elle, surtout pour elle et sa situation. vu sa réaction, la logique voulait qu’ils soient sur la même longueur d’ondes. sauf qu’elle se redressa, marla, lui fit face et l’ébahit en deux simples questions. « tu- quoi ? non » réponse instantanée face à un questionnement déroutant. la confusion pouvait sans aucun doute d’ailleurs se lire à travers ses sourcils froncés, ses iris enflammés dirigés sur le visage rougi de la blonde. « je suis tout autant responsable que toi de.. ça » et de son point de vue, il était même principalement le fautif. il était énervé oui, mais majoritairement contre lui-même, d’avoir été si stupide. « attends, de tout ce merdier, ce dont t’as le plus peur c’est de foutre en l’air notre relation, qu’on a, soit dit en passant, pas encore officiellement définie ? pas de peut-être voir ton avenir gâché ou- ou juste de voir ta vie changer ou d’autres interrogations de ce genre quand on vient d’apprendre qu’on porte un foutu gosse dans le ventre ? » abasourdi, confus, déconcerté et tous les synonymes inimaginables; c’était miles actuellement.

Dans l'incompréhension, je réussissais le miracle de te calmer. Détourner ton attention pour qu'elle se pose sur un autre sujet. Évidemment, je le vivais tout aussi mal que toi, indéniablement choquée par cette nouvelle que je pensais, n'allait jamais m'arriver. À croire que tu voulais t'accaparer certaines de mes premières fois, on se serait pourtant bien passé de celle-ci. En toute logique, nous étions sur la même longueur d'onde, mais c'était sans compter sur ma façon de penser qui différait de la tienne. Je comprenais le trouble que cela pouvait semer et pourtant, il y avait tout un cheminement derrière. "Dans le fond, on ne peut rien y faire... Là tout de suite." Je n'allais pas pouvoir remédier à notre situation dans l'immédiat. Ça allait même très certainement prendre du temps. "Je te l'ai dit Miles... Tu es très important pour moi. Et là, c'est une situation dans laquelle nous sommes tous les deux, alors oui, j'ai peur quand tu remets de la distance, parce que là, j'ai jamais eu autant besoin de toi que maintenant..." J'allais avoir besoin d'un soutien. Et quitte à penser au pire, autant essayer de se rattacher à l'unique lueur qui nous reste à cet instant.

ils ne pouvaient rien faire ? faux, miles listait mentalement toutes les actions qu’ils pouvaient déjà entamer, à commencer par le rachat d’un autre foutu test. mais sentant son irritation s’accroître en parallèle avec la détresse de marla, il préféra ravaler sa langue et lâcher un long soupir. un tantinet toujours subjugué par les préoccupations de la blonde. « je ne mets aucune distance marla, j’ai juste énoncé des faits et poussé une solution qui te soulagerait au vu ta réaction ! » elle était bien celle qui a amorcé les réactions de colère et de détresse, non ? pourquoi elle semblait lui reprocher d’agir de la même sorte ? « tu m’excuseras de ne pas sauter au plafond à la nouvelle quand rien mais absolument rien ne nous conditionne à avoir un gamin maintenant ! » emphasis sur le ‘rien’. leur relation tout juste naissante, loin d’être qualifiée de relation officielle encore, son statut d’étudiante, ses projets de carrière, leurs projets, et ô, le fait qu’il venait tout peine de perdre sa gamine ? « qu’est-ce que tu veux que je te dise exactement ? évidemment que quoi qu’il arrive, on est dans la même merde. je suis déjà familier avec la situation marla, caprice en était la preuve, j’assumerais jusqu’au bout si besoin; là, n’est pas la question. » et le fait qu’elle questionne ce fondement de son caractère accentuait légèrement son irritation, inutile de le cacher. même s’il n’était absolument pas prêt, ce doute le contrariait plus que de raison. « je ne mets juste aucune distance, je réagis simplement en fonction de la situation et ce qui en dégage, à savoir la panique et détresse des deux côtés.  »

C'est le bordel dans la tête, dans les émotions et dans le corps même, apparemment. C'est comme une immense bataille dans mes pensées, avec un milliard de choses qui se bousculent et essaient de sortir en premier. C'est confus, c'est incohérent et en vérité, je crois que je ne réalise pas totalement ce qui est en train de nous arriver. Même si la colère a explosé, maintenant que l'objet du malheur a été pulvérisé à l'autre bout de la pièce et que j'ai littéralement fuis à un autre endroit de l'appartement, c'était comme une sorte de déni qui s'installait. Je me rattache donc à des choses qui peuvent paraitre insignifiantes vis à vis de la situation que l'on traverse et je le réalise avec tes propos. Ce sont ces derniers qui me ramène sur terre. Rien ne nous conditionne à avoir un gamin. J'ai beau te regarder, je me perds dans le vide. "Non. Non. Je ne remets pas en cause..." les mots se meurent. Je savais que tu n'allais pas m'abandonner, je le savais très bien. C'était surtout cette froideur avec laquelle tu me répondais par moment, quand bien même elle découlait de notre situation, elle ne me rappelait pas des très bons souvenirs. "Je sais Miles, je suis désolée." Un long soupir m'échappait et je passais mes mains sur mon visage, épuisée par les émotions qui m'avaient traversé. "Je suis terrifiée. Je ne sais pas quoi faire. Je ne sais pas comment... Je... J'ai juste super peur." Peur de la façon dont ça va changer notre vie, peu importe ce qui se passera. Peur d'aller avorter. Peur de nous perdre. Peur de me perdre, parce que je savais de quoi j'étais capable. "Je vais... aller à la pharmacie du coin acheter un nouveau test, j'en ai pour 5-10 minutes, tu devrais nettoyer les morceaux de miroir en attendant... Je reviens." Un peu d'air, c'est ce dont j'avais besoin pour faire le vide dans ma tête. 

en moins de vingt-quatre heures, miles venait d’accumuler davantage de stress et d’anxiété que ces deux derniers mois. son corps se manifestait par une perte de contrôle excessive, son esprit fabulait, avec ces voix d’arrière plan silencieuses et paradoxalement trop bruyantes. l’épisode aubrey ne semblait pas avoir été suffisante pour le ratio de drames mensuel. l’épuisement déjà à son paroxysme pour ce début d’année, il s’irrita si aisément face à une marla en détresse et perdition. une fois son sac à moitié vidé, il dût s’octroyer trois grands souffles, yeux clos et s’apaiser, mis à mal devant les excuses confus de la blonde. quand il daigna enfin lever les yeux sur elle et son contenance anéantie, une de ces petites fameuses voix lui rappela vivement que c’était une situation inédite pour elle.   « non.. reste ici » ignorant avec aisance la mention de cette salle de bain saccagée, il s’avance lentement vers elle non sans un autre soupir et s’être essuyé les yeux. « je préfère pas te laisser vagabonder toute seule dans cet état » bien que son visage était encore fermée, un brin dans sa voix accueillait une nouvelle tonalité d’empathie. « on ira ensemble juste après » et l’attira instantanément dans ses bras, nichant sa chevelure blonde dans son cou. sa main blessée, enroulée dans ce bandage maintenant rougeâtre, lui fit de l’œil mais il porta son attention sur marla, et uniquement sur elle.

Sortir. Fuir la situation encore un peu plus. Prendre l'air en espérant que le brouillard présent dans la tête finisse par disparaitre. J'en avais besoin, d'échapper à la situation et l'atmosphère étouffante qui régnait dans la pièce. Et peut-être que ça te fera du bien à toi, de te retrouver seul quelques minutes pour remettre de l'ordre. C'est pourtant le contraire que tu me proposes une fois que tes yeux se pose sur ma silhouette anéantie. Tête à faire peur, corps épuisé et des pensées parfois sombres qui peuvent faire chambouler le reste en moins de temps qu'il ne le faut. Clairement, me laisser seule dans les prochains jours ne sera surement pas la solution la plus adaptée, quand bien même je puisse vouloir le contraire. Je t'observe avancer, retrouvant petit à petit le Miles des dernières semaines. Le prochain test de grossesse attendra, juste le temps pour toi de venir encercler mon corps faiblard. Aussitôt, ma tête vient trouver refuge dans ton cou, respirant ton odeur à plein poumon. Mes bras se resserrent un peu plus fort autour de ta taille et nous restons ainsi pendant quelques minutes réconfortantes. "Tu vas me laisser soigner ta main." Ne crois pas que j'ai oublié, que je n'ai pas observé. On profitera du saut à la pharmacie pour acheter ce dont nous avions besoin.