Inspire. Expire.

Les yeux clos, assise en tailleur au milieu de la chambre, je tente de calmer le rythme de mes battements cardiaques. Une nouvelle façon de faire pour essayer de réduire l'anxiété qui me ronge depuis bon nombre de semaines désormais.

L'échange de sms avait été difficile, tu sais. Parce que je me sentais terriblement mal ces derniers temps et que rien ne semblait être en mesure de me consoler. J'avais la sensation de revenir vers toi "à défaut", comme pour combler le manque que Miles était en train de creuser. C'était horrible de penser de cette manière, ayant l'amère impression d'être un monstre qui répète ses erreurs encore et toujours. Et quand bien même tu affirmais être déjà trop à terre pour te faire piétiner, je crois que tu sous-estimais mon pouvoir de destruction. Ne crois pas que je n'avais pas observé ton attachement qui s'était développé "plus que je ne l'imaginais". Je n'étais pas stupide, ni naïve. J'arrivais à voir ce qui se jouait sur ma vie et ces derniers temps, j'avais pris assez de recule pour analyser un minimum la situation. En clair, c'était la merde. Entre mon blocage qui m'empêchait de me projeter et ma solitude qui me faisait prendre des décisions dont je n'étais pas certaine... Il était évident que des larmes allaient couler à un moment donné. Les miennes, très certainement, quand j'aurais tout perdu.

Inspire. Expire. Soupir.

Ce n'était qu'une journée entre amis. Rien de plus. No big deal. On ne me demandait pas de me livrer complètement. On ne me demandait pas de jouer ma vie, de faire des promesses. Juste un moment à expliquer la création de l'univers, la différence entre chaque étoile, leur formation ; visite guidée dans un musée. La simple démonstration de mon admiration pour mes études et rien de plus, non ? La sonnerie fait naitre la panique en une fraction de seconde. Putain, Marla. Reprends-toi. Inspire, expire. Encore et encore. Jusqu'à ce que le masque soit parfait sur le visage. Jusqu'à ce que tu arrives à donne cette impression : je vais mieux, mine de rien. Sourire timide quand la porte s'ouvre, je te laisse entrer pour refermer derrière toi. " J'espère que t'es prêt pour te farcir le crane pendant des heures... " pouffe de rire en me dirigeant en direction du salon. Nouvelle façon de faire : éluder les conversations trop sérieuses, surtout celles qui ont déjà eu lieu.

@Kaiden Winston

@Marla Witherspoon | J’avais aucune idée de ce qui m’attendait finalement aujourd’hui. On avait convenu de se voir, on avait envie de passer du temps ensemble, mais avec tous les mots déjà échangés, je ne savais pas où on en était. Surtout parce que tu aimais toujours ton ex, tu avais cette attache particulière envers lui et votre histoire et je pouvais le comprendre. Je l’avais aussi avec Reyna, par tout ce qu’elle m’a aidé à surmonter. Je me rendais compte avec le temps que les gens pouvaient nous marquer de façon plus ou moins forte, et elle avait fait fort. Toi aussi d’une certaine manière, puisque je ne cessais de revenir vers toi, qu’importe ce qui pouvait se passer. J’essayais d’être présent, d’être une épaule sur laquelle tu pouvais te reposer. Cette légitimité que je ne pense pas avoir malgré les quelques semaines où on s’est largement fréquenté. Ma voiture se stoppe devant l’immeuble de ton appartement et je reste installé quelques instants, appréhendant un peu tout ce qui pourrait se passer aujourd’hui. Peut-être que je me fais des idées, on ne sera que deux amis, ne mettant pas à plat cette conversation échangée sur l’appli si connue. Puis finalement je me décidais à aller te rejoindre. Donc je montais et mon doigt s’écrasait sur la sonnette. Ton visage apparaissait alors quand la porte s’ouvrait et le sourire se dessinait sur mon visage. Je pénétrais dans les lieux, tu refermais derrière moi. « Je suis surtout prêt à te voir fascinée » que je disais en glissant mes mains dans mes poches alors que je te suivais dans le salon. « Tu es prête ? On part maintenant ou tu voulais… discuter avant ? » que j’osais ainsi demander, presque timide.

Large sourire en ouvrant la porte. Masque parfait pour dissimuler l'inquiétude, faire croire que tout va bien dans le meilleur des mondes. Mais aussi, sourire sincère. J'étais contente de te voir tu sais, bien que j'avais la sensation que mes intentions n'étaient pas les plus honnêtes envers toi. « Je suis surtout prêt à te voir fascinée » Ça oui. Tu allais avoir le droit aux yeux pétillants et à l'excitation. Mes études, c'était clairement le domaine qui me faisait oublier tout le reste. Filer dans les constellations pour s'échapper de la réalité. Au moins, je m'accrochais à notre sortie en direction du musée d'histoire naturelle pour mettre de côté les sms. Avais-je le droit de faire ça seulement ? Je n'allais pas pouvoir me défiler indéfiniment. Et à ton regard insistant, je comprenais que ce n'était pas le moment de se dégonfler, c'était trop tard. Au moins, la conversation avait été entamé et bien que je ne sois pas à l'aise à l'idée de la continuer maintenant que tu pénétrais dans l'appartement, je crois qu'on allait pas y échapper. « Tu es prête ? On part maintenant ou tu voulais… discuter avant ? » Un soupir, une pause pour la réflexion et je me tourne pour te faire face. " Je t'apprécie beaucoup Kai " Et peut-être qu'il est là le problème depuis quelques semaines. " Tu as été - et j'espère que tu resteras - d'une aide précieuse. Tu m'as véritablement aidé à me faire me sentir mieux. " Mais. Tu l'attends, n'est-ce pas ? " Mais... " La tête se penche délicatement en t'observant. " Je ne peux pas me résoudre à te faire du mal. " Quand bien même tu me répètes que tu es assez grand pour prendre les décisions et savoir ce dont tu as envie me concernant. " Ça fait des semaines que je vogue dans un entre deux, que je réfléchis et que j'essaie de me demander ce que je dois faire pour aller mieux, passer à autre chose. Et même si j'ai envie de me réfugier dans tes bras, de t'embrasser, je ne le fais pas malgré les occasions. " Et j'ai essayé de m'en persuader que c'était ce dont j'avais envie et besoin, mais à chaque fois, je me retiens de passer le cap. Avec toi, comme avec d'autres. Ça aurait pu être Hades aussi. " J'ai besoin de temps et d'un ami pour le moment. Tout le temps que Miles sera dans ma vie, dans mes pensées, je ne peux pas faire comme si de rien n'était. " Tout le temps qu'il sera là, il n'y aura pas la place pour un autre homme. " Et je préfère t'avoir à mes côtés, t'avoir en ami plutôt que de te perdre. ". Tu vas encore dire que je réfléchis trop, mais au moins, je ne te fais pas de mauvaise surprise et je suis sincère.

@Marla Witherspoon | Dans le fond, je savais pertinemment que c'était voué à l'échec, toi et moi. Dès le début, les dés étaient jetés. Deux âmes brisées qui se retrouvent dans une même pièce, dans une même chambre. Si les choses semblaient bien se passer, si les choses se faisaient naturellement, il n'empêche que nous étions tous deux éreintés par la vie elle-même. Des coups durs à encaisser, des bagages à se trimballer. C'était difficile la plupart du temps et s'occuper de l'autre reviendrait à se laisser tomber soi-même. Alors oui, je le savais qu'on avait aucun avenir. Mais je m'étais laissé embarquer dans cette idée folle où tu voulais finalement bien tenter un truc avec moi. Va savoir pourquoi, quand j'étais le premier à repousser toute idée d'intimité sentimentale avec qui que ce soit. Ma question, elle ne te forçait pas la main, au contraire. Tu aurais très bien pu éclipser tout ça facilement, choisissant d'aller au musée directement. Mais tu finis par déballer ton sac, chose que j'aurais peut-être préféré que tu ne fasses pas tout de suite. Mes mains gigotent dans mes poches, avant que l'une d'elle n'en sorte pour aller se réfugier dans ma nuque. « Ca change pas de la dernière conversation "sérieuse" qu'on a eu la dernière fois » que je disais d'un rire nerveux, presque de façon inaudible. « Je comprends, t'en fais pas » Enfin j'essaye de comprendre. C'est pas comme si t'envoyais des signaux clairs depuis le temps. Un coup c'est oui, un coup c'est non. Un coup tu veux coucher avec moi, un coup tu veux juste rester amie. Pas facile de tenir le rythme, et possible que je devrais tenter de passer réellement à autre chose, ne pas t'attendre et chercher quelqu'un qui saura réellement panser les blessures toujours ouvertes que je me traine depuis quelques mois maintenant. « J'suis désolé... » finissais-je alors par dire, alors que ma main regagnait la poche de mon jeans. « De pas réussir à t'aider plus que ça » L'histoire de ma vie. Cet altruisme, qui pourtant semblait être plus haut que la norme, n'était jamais suffisant pour mes proches. Vivre un rejet de plus, c'était pas ce que je voulais, mais je devrais à présent m'y habituer. Possible que ça deviendra mon quotidien à force.

« Ça change pas de la dernière conversation "sérieuse" qu'on a eu la dernière fois » Tu vois, t'es déçu. Il ne se passe rien de sérieux encore, ça fait des semaines que je te crie de voir ailleurs pour te protéger et t'es quand même déçu. C'était bien pour ça que je te disais que j'allais très certainement te briser. « Je comprends, t'en fais pas » Et aussitôt, à t'observer, à t'entendre, je suis rongée par la culpabilité. J'ai la sensation d'être la pire personne. Indécise, oui. Surtout ces derniers mois. Difficile. Mais pourtant, j'avais jamais été aussi sincère et transparente. Avec toi, avec Maverick. Je ne cachais pas ce que je ressentais et c'était là le problème. J'admets que l'indécision pouvait brouiller les pistes, mais physiquement, il n'y avait plus rien depuis des semaines déjà. Mis à par quelques messages où je te disais avant besoin de plus - et ils étaient sincères - je ne t'avais rien promis. « J'suis désolé... » Je soupirais, mon corps se ramollissant avant de se déplacer pour m'approcher de toi. " Non, ne dis pas ça. " - « De pas réussir à t'aider plus que ça » La tête se secoue de gauche à droite. Tu n'imagines pas le poids de tes mots sur ma conscience. " Kai, personne ne peut rien si ce n'est moi. " J'étais seule maitresse de ma vie, de mes décisions, de mes envies. Un nouveau soupir se fait entendre alors que j'essaie de trouver les mots exacts. " Je l'ai pensé, quand j'ai dit que j'avais envie de câlin. Quand j'ai dit que j'étais capable d'avoir des sentiments pour toi. J'étais sincère quand j'ai dit tout ce que j'ai dit par sms et... Je sais très bien que j'file le tournis, mais... Je suis perdue. Je le suis réellement. J'ai besoin de temps pour me reconstruire, pour prendre le contrôle. J'ai besoin de temps pour me soigner et... et pour accepter tout ce qu'il se passe. " J'étais sincère, trop peut-être. Parce que je déployais toujours le fil de mes pensées sur le moment. " Ça n'a rien à voir avec toi. Toi t'es parfait. " Tu m'as juste rencontré au mauvais moment si tu voulais réellement t'engager dans une relation sérieuse.

@Marla Witherspoon | En fait, c’était ça le truc, je savais pas trop sur quel pied danser avec toi. Si je devais espérer qu’un truc se passe ou si c’était clairement mort. Et si je devais m’écouter, c’était mort ouais. Seulement, j’étais incapable de te laisser partir. Incapable de retourner sur les réseaux sociaux pour trouver quelqu’un qui saurait combler ce manque présent en moi. Bien sûr que je me sens seul, que je veux retrouver cette sensation de plénitude que j’ai ressenti tout l’été en compagnie de Reyna. Avec toi, j’ai pu frôler cette sensation, me laissant alors penser que ça pourrait se reproduire de nouveau. Mais c’était clairement un espoir mal placé. On le savait dès le début finalement. Et j’avais cette impression de faire tout de travers aussi, c’était assez désagréable. Mais bon, on s’y fait. C’est devenu mon quotidien après tout. Je soupirais à mon tour à tes mots avant de me reculer, de secouer la tête. Ce mot, je ne le supportais pas, vraiment pas, quand il était qualificatif de ma personne. « Dis pas ça, c’est pas vrai » Poing qui se serre dans cette petite poche, éviter de te montrer ces blessures béantes qui n’ont jamais réussi à se refermer. « Je t’ai dit, je comprends, t’en fais pas. Je suis dans la même situation de toute façon » A penser à une autre, à ne pas savoir si je veux m’engager ou savoir si je suis prêt pour ça. Cette année a été bien trop chaotique pour que je puisse avoir une idée de ce que je veux et de ce que je désire. Lèvres qui se pincent avant de souffler un coup. « Amis ? » Je tendais ma main, après m’être de nouveau remis à ma place initiale, pour le conclure d’une poignée de main.

« Dis pas ça, c’est pas vrai » Tu me connaissais assez têtue pour savoir que je pensais par moi-même, peu importe que tu sois d'accord avec ce que j'avais à dire. En apprenant à te connaitre au fil des jours, j'arrivais à déceler des choses que toi tu ne voyais pas de ta propre personne. Tes qualités, par exemple. Une petite voix s'animait dans ma tête, la part d'ange très certainement, pour me dire que je passais à côté de la sureté en mettant fin à l’ambiguïté au sein de notre relation. Mais, comment pourrais-je m'engager dans une relation qui de toute évidence te fera du mal ? J'pouvais pas me résoudre à reproduire les mêmes erreurs. Miles était omniprésent dans mes pensées, laissant peu d'espace pour d'autres. « Je t’ai dit, je comprends, t’en fais pas. Je suis dans la même situation de toute façon » Bien sûr, tu sais exactement où je veux en venir. Tu connais cette situation, te trouvant dans la même. À la différence que toi, tu semblais capable de passer à autre chose quand moi, je n'étais même pas certaine d'en avoir envie. Ta main finie par se tendre dans ma direction et je l'attrape sans trop réfléchir aux conséquences. « Amis ? » Électrisée par le contact, ma poigne se resserre pour t'attirer dans ma direction, l'instant suivant, je me réfugie dans tes bras sans t'en demander la permission. " Amis. ".

@Marla Witherspoon | Peu de choses différaient entre toi et moi. La principale étant que nos anciennes relations, bien que présentes dans nos têtes et dans nos cœurs, se sont terminées différemment. Si ton ex était toujours dans les parages, la mienne était à des milliers de kilomètres, après m’avoir fait comprendre à plusieurs reprises que je ne serai jamais l’homme qu’il lui faut. Qu’elle avait beau m’aimer, je n’étais juste pas suffisant. Jamais, finalement. Je n’étais jamais suffisant pour qui que ce soit. Ma mère, les filles. Mon père même qui a pris la fuite quand j’étais en bas-âge. Alors bien sûr, ça crée des sentiments d’insécurité, et c’était bien pour cette raison que je ne voulais pas m’engager dans quoi que ce soit, avec qui que ce soit. J’aurais pu l’envisager avec toi, ça s’était fait naturellement. Mais t’avais raison de mettre de l’eau gelée sur tout ça, de tout stopper avant que ça s’embrase de plus belle. Je n’étais fait pour personne, pas même toi. Alors venait ainsi naturellement cette conclusion qu’on admettait tous les deux. Amis. Une étreinte pour sceller tout ça, sans forcément me demander mon avis, mais je te la rends avec plaisir. Lèvres qui se posent sur le côté de ton crâne, avant de partir dans des occupations diverses, pour cesser de penser à cette occasion avortée.