Les yeux fermés, assis sur ce balcon, je me sentais tellement ridicule à me comporter de cette manière avec mon sexy musicien. Il en faisait tellement pour moi tout le temps et moi, comme un con, je venais remettre sur le tapis un sujet dangereux qui nous avait déjà écorché par le passé. Comme un pauvre petit abruti, je me mettais à babiller sans même faire attention à la blessure que je pouvais infliger une nouvelle fois. J’avouais à Lukas que j’avais toujours tant peur qu’il se mette en colère après moi si jamais je décidais de rester dans le silence lorsqu’il m’interrogeait. Je lui avouais que j’étais tellement effrayé qu’il se vexe si jamais je préférais lui demander d’attendre quelques semaines avant d’obtenir une réponse. Je lui confiais que je préférais toujours babiller tout ce qui pouvait me passer par la tête afin de me sortir de l’impasse d’une interrogation à laquelle je n’étais pas prêt à apporter des réponses. Je préférais répondre des propos qui ne sonnaient pas trop faux et qui visaient à moitié juste. Je balançais ces mensonges qui n’en étaient pas réellement. Ces mensonges qui se contentaient d’effacer la dangereuse vérité qui pourrait me coûter la présence de Lukas à l’intérieur de ma vie. Je balançais ces mensonges plus douloureux que la vérité parce que je n’étais pas encore prêt à totalement me livrer à mon sexy musicien. Je ne pouvais pas m’offrir en entier. Je ne pouvais pas tout lui donner. Non. Je me planquais encore derrière une légère façade. Je ne lui offrais qu’une partie des réponses parfois. Et, putain, je me sentais tellement ridicule à plonger dans ces espèces de mensonges simplement pour ouvrir la bouche face à lui. La voix du jeune homme cognait de nouveau à mes oreilles alors qu’il m’avouait que je le blessais dans mes mensonges puisqu’il avait l’impression que je n’avais pas confiance en lui ou il ne savait pas. Outch. La flèche empoisonnée et douloureuse me heurtait de plein fouet parce que, merde, je lui faisais confiance. Tellement plus qu’à n’importe qui. Je ne voulais pas qu’il se mette à douter de ça. Lukas continuait disant que je paniquais avec un espoir, il espérait que je comprenais qu’il marchait à l’envers de ce que je pensais. Comment ça ? Qu’est-ce que ça voulait dire ? Mes sourcils se fronçaient tandis que j’essayais de décoder la phrase. Je tentais réellement de comprendre où se trouvait ma faute, mais j’avais tellement de mal à la voir. Je ne faisais rien de mal. Je ne mentais jamais totalement. Je me contentais de balancer des parts de vérités sans doute insuffisantes. Je me contentais d’omettre ce qui pouvait me causer du tord. Un soupir passait la barrière de mes lèvres tandis que je babillais soudainement « J’ai confiance en toi Amore… » Je devais le dire. Il devait l’entendre. Il devait le savoir. Il devait le comprendre. Au moins ce soir. J’avais confiance en lui. Réellement. Totalement ? Putain, ça je n’en savais rien. C’était trop me demander de faire totalement confiance à quelqu’un. C’était trop intense et exclusif pour moi. C’était juste trop pour le moment. Je n’étais pas prêt. Et, finalement, je reprenais la parole pour souffler « Si j’te faisais pas confiance, je ne m’ouvrirais pas autant à toi t’sais… Je… Ce… C’juste qu’il y a des trucs que j’suis pas prêt à dire… Pas encore et j’veux pas que tu crois que je le ferai jamais quand j’évite la question… J’le ferai le moment venu… Et, dans l’attente du moment venu, je… J’te donne une partie des réponses… Des mensonges qui n’en sont pas réellement… » Ouais, c’était ça. Ce n’était jamais de véritables mensonges. C’était des réponses qui pouvaient être vraies. C’était une partie des réponses. La partie non immergée que tout le monde pouvait deviner.

J’apportais un nouveau sujet à la discussion comme si j’espérais retarder le moment où je devrais ouvrir réellement la bouche. C’était comme si je cherchais à repousser cet instant où moi je devrais me confier. C’était comme si j’essayais de le faire parler avant de m’y mettre à mon tour. Casser ses armures avant d’accepter d’abaisser les miennes. Je babillais à propos de ce corps à corps que nous avions partagé sur la plage quelques heures plus tôt. Pourquoi est-ce que je faisais ça ? Pourquoi est-ce que je cherchais à le mettre en avant alors qu’il s’agissait d’un sujet important que nous aurions peut-être mieux fait d’aborder en face à face ? J’aurais tellement aimé pouvoir étudier son visage et ses réactions face à mes mots. Mais non, comme un idiot, il fallait que j’en parle sur le champs tant cela préoccupait mon esprit. Ça tournait encore et encore à l’intérieur de ma tête. Je me souvenais parfaitement de cet instant que nous avions partagé sur la plage. Ok… Il me manquait certainement quelques détails. Néanmoins, je possédais le plus important de ce corps à corps. Je me souvenais parfaitement des moindres sensations que j’avais éprouvés. Si je fermais les yeux, j’étais persuadé que je pouvais tout retrouver. Et, damn, je me souvenais surtout d’à quel point j’avais aimé que mon sexy musicien me possède. J’avais tant aimé être à lui et je voulais être à lui de nouveau. J’en ressentais le besoin. Violent. Réel. Prenant. Cependant, il fallait que j’en parle parce que ça cognait étrangement dans ma tête comme si mon avis sur le sujet n’était pas partagé… Comme si quelque chose clochait dans cette histoire. Aussi, j’en parlais et mon sexy musicien m’avouait qu’il regrettait avoir couché avec moi ce matin. Il le disait de but en blanc. Ça cognait dans ma tête. Je ne l’inventais pas. Ce n’était que la stricte vérité. Le sanglot passait alors entre mes lèvres sans que je ne sois capable de le contrôler. Merde… je ne pensais pas que Lukas puisse penser une telle chose… Ou peut-être que je le savais et que c’était ce qui m’avait poussé à l’interroger. Il regrettait parce qu’il avait imagé que cela aurait pu se faire bien cette fois. Et, malgré moi, malgré tout, ça ouvrait une blessure douloureuse dans mon être. C’était comme s’il regrettait nos corps à corps. Nos premiers corps à corps. Ils n’avaient jamais été parfait. Néanmoins, ils avaient toujours été intenses et essentiels. Ils nous avaient toujours ressemblé dans le fond. Ils n’avaient été que le reflet réel de notre relation. Je babillais rapidement pour lui dire que je parvenais à comprendre son point de vue. Peut-être s’était-il imaginé des premières fois plus romantique, plus lente… Ou je n’en savais rien. Quelque chose de moins impulsif sans doute. Je lui confiais néanmoins que j’avais aimé cet instant et il l’avait aimé aussi. Oh putain, j’aurai aimé me réjouir de ces mots, mais je ne le pouvais pas. Je ne pouvais pas parce qu’il s’excusait et ce n’était pas ce que je voulais entendre. Je ne voulais pas des ces fucking excuses alors que je ne regrettais rien. Mais non, il babillait pour me dire qu’il s’en voulait. Et je ne savais plus quoi dire. Je ne voulais plus rien dire. Ça faisait trop mal. Je préférais rester dans le silence. Je préférais garder mes souvenirs agréables et me dire qu’il avait aimé… Même si je savais qu’en vérité, il regrettait plus fort qu’il n’avait aimé.

Finalement, la véritable raison qui m’avait poussé à accepter cet appel pointait le bout de son nez. La véritable raison débarquait dans notre conversation un peu trop naturellement, un peu trop aisément pour un être comme moi. Moi qui aimait tant rester silencieux. Moi qui n’aimait pas m’étaler. Là, j’acceptais de me livrer et putain c’était une énorme preuve de confiance. Je me mettais à babiller mon histoire levant alors le voile sur mon passé. Ce voile qui lui permettrait sans doute de comprendre beaucoup plus de choses. Je ne dévoilais pas tout bien évidemment. Je ne confiais pas que mon père avait tué ma mère sous mes yeux parce que je ne savais pas si j’étais encore prêt à dévoiler une telle information. Cette information n’était connue que de la mafia. Et, putain, c’était une phrase qui n’avait jamais quitté mes lèvres. Je n’avais jamais dit à haute voix ces mots et je n’étais pas capable de le faire là tout de suite. Il y avait déjà tellement. Je ne dévoilais pas non plus le meurtre que j’avais commis. Non, je ne parlais pas du fait que j’avais tué Antonio de sang froid et que j’avais aimé le faire. Je ne pouvais pas. Je ne voulais pas devenir un meurtrier aux yeux de mon sexy musicien. Je ne pouvais pas lui faire peur. Je ne pouvais pas laisser glisser cette information sans l’avoir face à moi pour le rassurer… Pour voir comment il prendrait une telle nouvelle. Je contais tout le reste allant de mon passé cauchemardesque avec un père violent à l’utilisation qu’avait eu la mafia de mon corps. Durant toute l’histoire, je me concentrais sur la respiration de Lukas afin de ne pas repartir en crise violente. Je me concentrais pour ne pas glisser dans un tourbillon douloureux de souvenirs. Et je lui avouais tout ça. Toutes ces choses qui le poussait à me parler de courage. Un courage que je ne parvenais pas à reconnaître parce qu’à mes yeux, je n’avais été qu’une victime qui avait appris à survivre. Une victime qui acceptait son sort sans avoir le courage de parler ou d’agir. Une victime qui subissait sans jamais se rebeller comme si j’avais accepter que ma vie soit comme ça. Il parlait de la cicatrice au-dessus de mon cœur et un sanglot m’échappait à ce souvenir douloureux. Ce jour où j’étais prêt à mourir… Peut-être que je lui conterais en détail un jour. Peut-être que je lui avouerais à quel point j’étais prêt à abandonner la vie ce jour-là. Mon sexy musicien répétait encore une fois que j’étais courageux et je préférais ne pas répondre à une telle affirmation parce que je ne voulais pas me perdre dans un débat qui aurait pu durer des heures. Lukas finissait par me demander comment je me sentais et je marmonnais que je ne savais pas ce qui était la stricte vérité. J’avais du mal à savoir. Je me contentais de siffler interrogativement trois qualificatifs qui pouvaient correspondre à la situation. J’étais fatigué. J’étais soulagé. J’étais angoissé. Et il me disait que c’était possible. Lorsque ce garçon que j’aimais tellement me confiait que rien n’avait changé malgré ces révélations, mon cœur se calmait lentement. Réellement. Ça allait mieux. Je me sentais mieux. Le silence s’installait et je l’appréciais. Je me contentais de l’écouter respirer à l’autre bout du fil et ça faisait tellement de bien. Je calais ma respiration sur la sienne et ça me calmait si aisément. Soudainement, il m’interpellait avec ce surnom. Toujours le même. Ce surnom qui poussait mon cœur à pulser plus fort. Il me disait que je devrais aller me reposer et j’étouffais un bâillement presque aussitôt comme s’il parvenait à m’hypnotiser et à me faire tomber de fatigue en étant à l’autre bout du fil. Il allait rentrer. Il m’aimait. Et il me disait encore une fois d’aller me reposer. Je me relevais du sol sur lequel je m’étais échoué jetant un regard dans la chambre où Nixon se se trouvait toujours. Lentement, je murmurais « Je… Ouais… J’vais aller me reposer… Dormir un peu ouais… » J’étais crevé et dormir me ferait sans doute du bien avant d’affronter la deuxième vague parce que Lukas savait maintenant. Et, dans quelques heures, dans quelques minutes, Nixon serait mis au courant aussi. J’allais le faire. Je voulais le faire. Je désirais qu’il sache lui aussi parce que je l’aimais autant que Lukas. À moitié endormi, je maronnais alors « Rentre-bien… Je… On s’voit plus tard... » Ouais plus tard. On aurait l’occasion de se voir, de se reparler. On aurait l’occasion de passer encore du temps ensemble et je pourrais réellement voir si rien n’avait changé. Murmurant un « Je t’aime », je finissais par décoller le téléphone de mon oreille pour appuyer sur le bouton rouge. Et, je me faufilais à l’intérieur de la chambre trouvant rapidement refusant dans les bras de Nixon, me calant contre lui et fermant les yeux. Je me plongeais dans le silence pour le moment ne réalisant pas encore tout ce que je venais de faire, tout ce que je me préparais encore à faire.