J’adorais la façon qu’elle avait de rire de mes bêtises, le pire c’est que ça n’était pas drôle du tout, mais j’avais envie de rire avec elle, comme des collégiennes qui ne savaient même pas pourquoi elles riaient.  On garderait en mémoire ces étoiles aux noms farfelus, je crois même que je n’utiliserais plus le nom de la grande ours dorénavant.

Sans ajouter quoi que ce soit, je profitais seulement du spectacle, avec un petit pincement au cœur. Pourquoi je ressentais ce genre de chose ? ça n’était pas la première fois que je faisais rire une fille. Je soupirais en gardant le silence jusqu’à ce que Kaélia vienne exposer son idée de garder à jamais cette étoile sur nous.

- Kaélia …

Pendant un instant je restais interdite, à la regarder d’une façon à la fois tendre et perdue. Est-ce qu’elle voulait vraiment qu’on ait un tatouage en commun ? Je n’ai jamais réfléchi à l’éventualité d’un tatouage, je ne sais pas si j’en serais capable. Chacune de ces idées venaient se battre dans ma tête pendant que je cherchais à les mettre en ordre.

- Je ne sais pas quoi dire, c’est inattendu, mais je crois que ça me plairait.  

Elle serait mon premier tatouage ? Peut-être le seul, mais je crois que j’en serais capable pour elle. Je m’étais remise près du bord pour m’accouder, une main sur mon bras qui exultait ces pensées que je n’arrivais pas à rendre tangibles. J’adorais me souvenir de cette soirée toujours et je crois qu’après ce soir je ne pourrai plus l’oublier.

- Je n’ai jamais eu de tatouage, ça me fait un peu peur je crois. Tu serais avec moi pour le faire ?

Moi qui avait toujours monter une carapace dorée autour de mon image de fille parfaite, est ce que je resterai parfaite avec un tatouage ? Kaélia était tatouée, et pour moi elle restait divinement parfaite. C’était sur ces pensées que la lumière de la piscine venait à s’éteindre coupant court à mes tergiversations.

Est-ce que notre soirée allait s’achever ainsi ? J’avais encore trop de questions en moi pour en rester là. Mon amie blonde avait l’air plus en forme que jamais, ce qui me redonnait un peu de vigueur. Finalement je revenais vers elle à la nage pour continuer de la regarder. Si on ne distinguait plus que les formes de nos corps mélangée entre l’eau et le manteau de la nuit claire, je ne cessais pas de m’enivrer de sa silhouette.

- Tu la mettrais où notre étoile ?

Cette histoire de tatouage me rendait fébrile. J’essayais de me rendre compte de l’importance à donner à cette idée, et ça serait certainement l’une des choses les plus folles que j’aurais faites ces temps-ci. Est-ce que c’était une façon pour Kaélia de marquer son territoire ? Des fois j’avais du mal à comprendre ce qu’elle voulait.

Il y a encore une dizaine de minutes elle parlait de me présenter à son père comme n’importe qu’elle copine qu’elle y emmènerait, et maintenant j’avais l’impression qu’elle voulait donner à notre amitié un rang spécial. J’en avais envie aussi, et si elle penchait ses yeux malgré l’obscurité dans les miens, elle pourrait y voir ce désir de lui plaire.

- On prendra rendez-vous ensemble alors.

Il n’était pas question que je le fasse sans elle, j’ai trop d’apriori sur les tatouages pour me laisser guider par une pulsion. Kaélia était la seule qui pourrait me donner assez de courage pour la suivre dans cette folie romanesque. Une fois que le tatouage sera là, j’imagine que je l’adorerai, mais je continuerai à avoir des doutes jusqu’à là.

- On essayera même de faire ça rapidement, ça va me hanter sinon.

J’aurais pu lui demander si un tatouage ferait de moi une geek, mais je crois que je connaissais déjà sa réponse, et je n’avais pas envie de fâcher mon amie. Je la laisserais être geek pour nous deux, en essayant d’arrêter de toujours tout remmener à ça. Profitant encore un peu de ces derniers instant dans l’eau plus isolée que jamais par la nuit qui nous enveloppait un peu plus à chaque seconde.

Une question continuait à me tarauder, c’était l’endroit de ce tatouage. Je ne pourrais pas l’exposer sur ma peau à la vue de tous, et la réponse de la blonde me comblait. En réalité j’avais eu exactement la même idée sans oser le lui avouer directement, c’était juste l’emplacement parfait pour ça.

- Sous le sein, si tu veux, ça serais parfait, enfin … sous le téton … je voudrais que ça reste près de mon cœur, juste pour nous, sans que ça dépasse du soutiens gorge.

A ce moment-là je me rendais compte que je n’y connaissais rien en tatouage. Est-ce que la poitrine était un endroit où l’on pouvait se faire tatouer ? Plus j’y pensais et plus j’en avais envie, ça avait quelque chose à la fois d’érotique et de romantique, sans que ça ne devienne ostentatoire. Je profitais de son étreinte tout en continuant de nager, posant ma tête contre son épaule, et je venais prendre sa main pour la guider, le bout de ses doigts par-dessous mon maillot, sur le sein gauche, à l’endroit où j’imaginais ce souvenir éternel.

- Juste ici, tu crois que c’est possible ?

On garderait toute les deux un souvenir de cette soirée qui pourtant n’avait pas commencée sur les chapeaux de roue. C’était comme si la soirée n’avait commencée qu’à partir du moment où je m’étais retrouvée avec mon amie. Lorsqu’elle me parlait d’immortaliser notre amitié à l’aide d’un tatouage, je n’hésitais qu’un instant.

- Bien sur que je suis partante !

A sa question je répondais avec enthousiasme, sans réaliser encore l’implication de cet engagement. Dévouer une partie de mon corps à quelqu’un, je n’avais encore jamais fait ça pour personne, et si c’était un grand pas dans la vie de Minna Schäfer, je n’étais pas certaine de savoir en garder le contrôle si parfait qui me siée tant.

J’aurais aimé qu’on fasse ça ensemble, elle et moi, et à son idée de faire ça sous son sein, je répondais par la mienne, peut-être plus audacieuse. Est-ce que c’était mal de vouloir emprisonner ce tatouage et de ne le garder que pour nous, bien au chaud contre mon sein ? J’écoutais l’avis de Kaélia en rougissant un peu à sa vision qu’elle avait de mon avenir.

- Je ne sais pas si je voudrais des enfants. Je ne suis pas certaine de faire une bonne mère, et puis … la grossesse, tout ça, je suis pas sûre que ça me plairait.

Mettre mon corps à mal pour qu’un autre prenne vie, c’était pourtant le cycle naturel des choses, mais je n’étais pas prête à m’y résoudre. Est-ce qu’un jour je trouverais un riche entrepreneur qui ferait de moi son épouse ? Et alors ça ferait de moi une femme insipide qui n’aurait plus d’autre aspiration que de devenir la mère de ses enfants à lui ?

Je plissais les yeux quand j’attrapais la main de Kaélia pour venir la placer sur mon sein. J’avais besoin de la sentir contre moi, je voulais m’évader sous la chaleur de ses doigts. Quand elle venait caresser mon téton, je frémissais, continuant de l’écouter me dire que ça n’était pas la meilleure des idées pour un tatouage.

- Pas au milieu, j’aurais voulu, sur la partie basse de mon sein, ici, tu vois ?

En faisant descendre les doigts de la blonde un peu plus bas, je lui montrais à quel niveau j’envisageais mon tatouage. Juste avant que ne se termine la poitrine. Je venais poser mes doigts sur les siens, contre ma poitrine, et je caressais la main de Kaélia en remontant doucement contre son poignet.

- Tu aimerais avoir des enfants dis-moi ?

Je posais la question d’une façon mélancolique, sans vraiment savoir si j’avais envie qu’elle me réponde oui, ou non. C’était une conversation tellement plus sérieuse que toutes celles qu’on avait pu avoir jusqu’avant que ça me faisait un peu peur. Je continuais de descendre mes doigts jusqu’au niveau de son coude, et remontait ma main vers son épaule en me rapprochant d’elle pour caresser une nouvelle fois son tatouage.