« Ouais tu parles... » Cracha furieusement Capucine alors que la fourchette raclait contre l'assiette. Si Isaiha essayait de la calmer, ça ne fonctionnait pas cette fois. Elle voulait vraiment que leurs retrouvailles soient parfaites. Elle avait été assez pénible et odieuse avec cette histoire de voyage d'une soirée alors qu'ils étaient en vacances en amoureux. Et Capucine le savait parfaitement et elle voulait se faire pardonner. Elle souhaitait tellement être la petite-amie parfaite. Celle qui ne faisait pas le moindre faux pas et qui comblait son petit-ami. Isaiha était beaucoup trop gentil avec elle. Elle avait complètement merdé le repas et se mordit la lèvre pour ne pas se mettre à pleurer. Elle se sentait tellement pathétique. Elle ne comprenait pas comment elle avait pu rater sa recette qu'elle avait minutieusement suivi. Vraiment, elle ne comprenait pas. Dans sa famille, le femmes -et les hommes- cuisinaient bien. Voire correctement. Mais ce n'était pas immangeable comme ce que pouvait faire Capucine. La brune aurait aimé faire quelque chose de correcte. Sa mère était vraiment une super cuisinière et elle arrivait à concilier la médecine et la cuisine. Soupirant légèrement, Capucine passa un coup de fil à la pizzeria, commandant deux pizzas, dont la calzone sans champignons pour Isaiha. La brune raccrocha et leva les yeux vers Isaiha qui tentait désespérément de garder un semblant de romantisme pour cette soirée. Et puis, il n'avait pas tort du tout. Capucine avait tout gâché, du moins dans sa tête. La jeune anglaise baissa les yeux, se mordant la lèvre. Elle reposa brutalement le téléphone sur le socle. « Franchement. Je comprends pas pourquoi tu restes avec moi. Je suis nulle en tout. Je prends pas assez soin de toi, je sais pas cuisiner. Non pire, j'arrive même à rendre la bouffe totalement immangeable ; Mon chien mange la merde des autres chiens mais refusent carrément de manger mes lasagnes ! Je suis pénible, bordélique. Je te fais des scènes, je suis jalouse et possessive. Je comprends pas ce que tu me trouves... Je suis même pas foutue de faire un dîner romantique par moi même ! Mon père a raison, je ne serais jamais bonne à marier !! » Lacha t-elle avec colère en gesticulant partout, oscillant entre le salon, la salle à manger et la cuisine. Pour finir, elle se jeter dans le canapé, à plat ventre, allumant la télé. « Je suis juste bonne à ouvrir des cadavres et à commander des pizzas... » Chouina t-elle en marmonnant avant d'attraper une cigarette et de la coller entre ses lèvres. Capucine remonta le plaid sur elle, se cachant totalement. Ou presque, ses pieds dépassaient encore du canapé, reposant sur l'accoudoir.

La cigarette coincée entre ses lèvres finit par atterrir dans le cendrier. Capucine fit une moue boudeuse et ronchonna comme un enfant à qui on venait de lui retirer sa tétine. Plus d'alcool, ça elle l'avait promis à Isaiha. Mais concernant la cigarette, ça la détendait et Capucine en avait bien besoin en ce moment. Soupirant mollement, la brune haussa les épaules alors que son amoureux lui demandait si elle avait terminé de râler. Capucine n'avait jamais fini de râler. C'était Capucine. Puis la couverture la dévoila et Capucine se recroquevilla sur elle même en couinant. « J'ai froid ! » La brune posa son regard sur Isaiha, l'observant. Il était tellement adorable quand il essayait de la rassurer comme ça. Plus elle l'observait, plus elle l'écoutait et plus elle se disait que jamais elle ne pourrait trouver un aussi bon parti que Isaiha Buchanan. Même si clairement, elle lui en voulait un tout petit peu d'avoir été aussi loin sans elle pendant leurs vacances. Mais ça, elle se gardera de le lui redire. Isaiha ne la complimentait pas. Enfin si, mais de manière bien étrange. La brune aurait préféré entendre qu'elle était parfaite mais visiblement, c'était la manière de Isaiha de lui dire qu'elle l'était. La brune l'observa rougir alors qu'il parlait clairement de sexe et sourit légèrement. Mais son sourire s'effaça bien rapidement. « Ouais, en gros je suis juste bonne à te vider les couilles et à te faire des fellations... » Bougonna t-elle en se rallumant une cigarette. « Laisse moi fumer, je suis au bout de ma vie... » Ajouta la brune. Capucine ne baissait que très rarement les bras, du moins dans ce qu'elle savait faire. Mais là, elle ne comprenait pas vraiment ce qui avait pu clocher dans sa recette. Capucine avait bien vu dans quelle genre d'ambiance Isaiha avait été élevé. Les femmes étaient de parfaites maîtresses de maison, de parfaites mères. L'homme commandait et la femme obéissait, silencieuse. Quoi que la mère de Isaiha avait son caractère tout de même. La jeune femme avait été assez dépassée par un monde qui se trouvait à des années lumières du sien. Ils s'aimaient mais ils étaient si différents. Capucine avait eu le soutien de certaines femmes de la famille de Isaiha, notamment sa mère, sa grand-mère. Concernant les hommes, elle ne savait pas trop. Enfin, était ce important pour le peu qu'elle les reverra ? En vérité, elle voulait surtout que Isaiha soit parfaitement heureux et là, elle ne le rendait pas heureux. Elle ne serait jamais capable de lui cuisiner les petits plats de son enfance. Même si Isaiha clamait qu'il s'en fichait maintenant, qu'est ce que ça donnerait sur le long terme ? La jeune femme l'observa puis finit par se redresser. « Finalement on va manger une pizza... Isaiha, j'ai peur de ne jamais être la femme parfaite pour toi. Quand je vois mes parents, les tiens, je me dis que je ne serais jamais un dixième de tout ça. Je suis peut être trop indépendante pour toi non ? » Capucine fit une petite moue boudeuse, soupirant légèrement. Elle ne savait plus du tout ce qui était bien ou non. « Mais tu m'aimes quand même ? Même si je suis une nullité en cuisine et que je ne sais même pas faire de la pâté pour chien ? » Elle avait bien tenté de faire de la pâté maison pour Rags. Son chien avait été malade.

« Il ne s'est rien passé durant ton absence... » Non, il ne s'était rien passé en dehors du fait que Capucine avait eu très peur de le perdre, qu'il trouve une autre fille, mille fois mieux qu'elle. Aux yeux de Capucine, ce n'était pas très dur d'être mieux qu'elle. Isaiha ne se rendait pas compte que la brune n'avait absolument pas confiance en elle et qu'elle essayait de tout mettre en œuvre pour le combler, pour le garder près d'elle. Capucine s'emmitoufla dans la couverture, se blottissant contre le torse de son amoureux. La chaleur qu'il dégageait lui fait énormément de bien. Elle ferma les yeux, humant son odeur, appréciant de le sentir de nouveau contre elle. C'était terrible de se mettre la pression de cette manière pour pas grand chose. Mais Capucine savait combien l'amour pouvait être fragile et que rien n'était jamais acquis. Il fallait toujours se battre pour conserver l'amour de l'être aimé. Isaiha était un homme formidable, toujours à essayer de la rassurer, à lui montrer quand elle abusait. Il avait ce don inné pour la faire rire même quand c'était malgré lui. Un sourire se dessina sur son visage alors qu'elle l'écoutait. Isaiha construisait peu à peu une bulle autour d'eux, une bulle qui la faisait se sentir en sécurité. La brune redressa son visage et observa celui de son amoureux. Sa main se posa sur son menton, lui caressant doucement du pouce. Il était celui qui savait presque tout d'elle, il la connaissait. Il savait quand ça n'allait pas juste en la regardant, il savait la combler en la serrant contre lui. Capucine se sentait toujours petite et vulnérable contre lui et elle adorait ça. Elle aimait l'imagine de l'homme fort et puissant qu'il dégageait. La brune faisait de son mieux pour que Isaiha n'ait pas tout à faire. Elle prenait les factures en charge et s'occupait des rendez vous médicaux que ce soit pour eux ou pour les animaux. Concernant les plantes, elle avait cessé de s'en occuper pour éviter de voir le dépit se peindre sur le visage de son amoureux alors qu'elle en avait fait mourir une énième. Si son emploi du temps le lui permettait, elle allait faire les courses sans lui et essayait de faire un peu de ménage. Capucine faisait vraiment de son mieux pour Isaiha, pour eux, pour leur couple. « Excuse moi chéri... Je voulais vraiment te faire plaisir tu sais... ? Je voulais être une femme pour une fois... Mais je crois que je suis condamnée à rester une demi-femme. L'autre moitié n'a pas encore été identifiée... » Lança t-elle avec amusement avant de l'embrasser avec amour. « Je t'aime Isaiha. Je t'aime vraiment de tout mon petit cœur... » La brune lui offrit un sourire tendre et sincère alors que la sonnette retentit, faisant aboyer Rags. Capucine se redressa, le visage illuminé. « Pizzas ! » Elle se leva d'un bond, allant chercher son portefeuille avant d'aller ouvrir, poussant Rags qui manqua de l'écraser contre la porte. « Rags, sors de là bordel !! » Elle paya puis attrapa les pizzas avant de fermer la porte, levant les boites pour éviter que le chien n'y mette sa truffe. « Tu veux regarder un film pendant qu'on mange ? »

La brune observait Isaiha avec douceur, un moue boudeuse sur le visage. Non, pour elle, elle n'était pas une femme. Et d'ailleurs, elle se demandait comment Isaiha faisait pour la supporter par moment. La jeune femme fit une petite songeuse avant de sourire, fermant les yeux en se collant contre son amoureux. Il avait toujours des paroles pleines de sagesse et elle était fière de l'avoir dans sa vie. Comment il arrivait à la supporter alors qu'elle pouvait être très pénible quand elle le voulait. Enfin, Capucine n'avait jamais eu confiance en elle. Jamais. Pour elle, elle était toujours trop petite, trop plate, trop mince, trop grosse, trop garçon, trop inintéressante. Elle l'avait déjà dit à Isaiha -et elle se ferait engueuler si elle remettait ça sur le tapis- mais pour elle, le jeune homme devrait être avec une fille plus féminine. Une fille quoi. Lui disait que Capucine lui convenait et elle, elle le trouvait carrément aveugle. Mais elle était heureuse de l'avoir. D'avoir un homme comme lui dans sa vie. Alors qu'ils étaient dans un moment câlin, le livreur décida de pointer le bout de son nez, faisant bondir Capucine du canapé. Elle avait faim quand même. La jeune femme ne mit pas longtemps à revenir, venant poser les boites sur la table basse. Elle apporta des couteaux et des boissons avant de fouiller la bibliothèque de films -qui étaient tous à elle en passant, au grand désarrois de son père. Elle en attrapa un et le mit en route. « On regarde Des hommes et des dieux. Si tu n'arrives pas à suivre les sous-titres, dis le moi. » C'était une des films français préférés de Capucine. Elle le trouvait poignant. La brune vint se coller contre Isaiha, lui donnant sa boite en riant doucement. « Méfie toi que ce ne soit pas moi qui t'en mette dans les cheveux ! » S'amusa t-elle. Elle préférait largement quand l'atmosphère était plus détendue entre eux. Elle espérait que Isaiha ne lui tiendrait jamais rigueur de son comportement.

The End