Mallory ne répondit même pas à son bonne nuit, se contentant de pleurer silencieusement contre son oreiller pendant deux bonnes heures, pensant que Declan s’était rendormi même s’il ne l’avait pas rejointe : il devait toujours être allongé par terre et fatalement, dans le noir, elle prit la couverture pour mieux le couvrir avec douceur, embrassant sa joue sans voir s’il dormait ou pas avant de s’emparer de son harmonica dans son sac ainsi que de l’immense plateau pour se rendre sur le balcon et en jouer quelques minutes. « Tu vois bébé, Maman elle sait jouer d’un instrument ! Balèze, hein ? Bon ça fait longtemps que j’en ai pas joué alors je suis un peu rouillée, mais je compte m’y remettre, ça me manque. Je sais que je suis pas raisonnable et que je devrais dormir mais j’y arrive pas. C’est dommage que tu puisses pas me conseiller quelque chose pour arrêter de faire n’importe quoi… mais tu sais mon ange, j’ai trop hâte de pouvoir bisouiller tes adorables petits pieds potelés ! » fit-elle avec émotion en essuyant ses larmes pour se venger sur les fruits exotiques.

Je ne dormais pas. Je n’y arrivais pas car c’est idiot mais dans ma famille, on avait pour habitude de ne pas s’endormir fâchés. Nous savions à quel point nos existences ne tenaient par moment qu’à un fil et nous ne voulions pas que le dernier souvenir que nous ayons de l’autre, soit celui d’une dispute. Cela faisait déjà plusieurs semaines que je n’arrêtais pas de me dire que je me couchais fâché avec ma mère. Cela me blessait mais je continuais à tenir par la force de ma colère. Or, ma colère envers Mallory avait fondu comme neige au soleil depuis longtemps alors qu’est-ce qui me retenait ? Aucune idée. Je ne fis pas non plus le moindre geste quand elle me couvrit et m’embrassa, restant de marbre pour mieux suivre sa silhouette qui sortait sur le balcon. Au bout d’un moment, je me relevais pour m’approcher d’elle, la laissant parler à notre enfant. « S’il a la solution, je veux bien la connaitre également pour mon propre cas. J’ignorais que tu jouais de l’harmonica »brisais-je le silence, adossé à la chambranle de la baie vitrée.

Mallory sursauta violemment en entendant la voix de Declan s’élever dans l’atmosphère, manquant de lui faire lâcher son bol de fruits exotiques. « Ça dépend ce que tu as envie de faire contre, il n’a pas réponse à tout » avoua-t-elle en haussant les épaules, reposant son bol au sol pour éviter de faire des conneries afin de serrer son harmonica entre ses doigts. « J’en joue depuis que je suis petite » lui expliqua-t-elle sans pour autant le regarder, ne sachant toujours pas quelle attitude adopter à vrai dire. « Tu devrais aller dormir, la place est chaude dans le lit, après tout tu as bien donné pendant deux jours. »

« Je me disais bien qu’attendre la solution miracle d’un fœtus était perdu d’avance »haussais-je les épaules ne la quittant pas des yeux, ne sachant pas mieux qu’elle ce qu’il convenait de faire. « T’es douée » la complimentais-je avant de quitter le balcon pour mieux revenir et déposer la couverture sur ses épaules. « Les nuits sont fraiches, tu ferais mieux de te couvrir. Je n’ai pas sommeil, je pense que je vais aller faire un peu de boxe histoire de me fatiguer. Tu devrais dormir, ce n’est pas bon pour toi de rester éveillée »soupirais-je avant de me pencher vers elle et de déposer un baiser sur le sommet de son crâne.

« Merci » ajouta-t-elle avec timidité avant d’être étonnée qu’il dépose une couverture contre ses épaules. Ce fut probablement le geste qui la poussa à se relever pour mieux planter son regard dans le sien. « Je n’arrive pas à dormir et je ne risque pas d’arriver à dormir parce qu’on est comme deux cons à se tirer la tronche ! Je suis fatiguée… tu es si fier que ça que tu vas préférer aller t’épuiser avec de la boxe plutôt que de parler avec moi ? Je me suis excusée à maintes reprises je pense, non ? Je n’ai pas mérité le pilori parce que j’ai commis une bourde, ou alors on est vraiment à un point de non retour et je ne suis pas sûre qu’il reste grand-chose de notre couple ! » fit-elle avant de l’inciter à rentrer à l’intérieur de la chambre pour refermer la porte fenêtre. « Qu’est-ce que tu veux que je fasse ? Que je reste ? Que je parte ? »

« Tu as tendance à oublier quelque chose de primordiale chez moi Mallory : je n’oublie rien. Toutes les blagues que l’on me fait, toutes les humiliations que l’on me fait subir que ce soit pour déconner ou me blesser restent gravées dans ma tête. Je n’avais juste pas envie de me souvenir d’une des tiennes » murmurais-je avant de me passer une main dans les cheveux. « Je ne dis pas cela pour te culpabiliser car sûrement aurais-je rigolé si je n’étais pas ainsi. Au départ, je rigolais bien volontiers même mais petit à petit, toutes les petites conneries de ce genre ont fini par devenir blessantes car la formule : on pardonne et on oublie tout, je ne peux pas l’appliquer. Ta blague était de mauvais goût et tu ne mérites pas non plus que je m’éternise… Sache que je ne suis même plus en colère contre toi. J’ai été vexé et blessé mais je m’en suis remis comme à chaque fois » haussais-je les épaules. « Le problème, c’est que je suis aussi peu doué que toi pour gérer l’après mais ce n’est pas pour ça que notre histoire va se terminer. Je ne vais pas rompre parce que je vais aller calmer mes nerfs contre un sac de sable, tu le sais non ? »lui demandais-je en douceur avant de la pousser vers le lit. « Retourne te coucher bébé » lui dis-je tout en commençant à enlever mon débardeur signe évident que je ne comptais pas partir.

« Tu as peut-être cette mémoire Declan mais je n’ai jamais prétendu être parfaite. Je vais même te donner un scoop : celle que tu voudrais bien épouser est blindée de défauts. » Mallory s’assit sur le lit docilement en soupirant, se blottissant dans la couverture qu’il avait mise sur ses épaules car là, à l’heure actuelle, il s’agissait de la seule chose qui lui fournissait de la chaleur. « Ce n’est pas que je ne suis pas douée pour gérer l’après Declan, c’est que tu as repoussé chacune de mes tentatives, grosse nuance. Normalement, quand on a pardonné, on fait un câlin et là je ne te parle pas de ce que tu sais mais bien de tendresse, on embrasse, on rassure. Mais si tu préfères aller taper un sac de sable, qu’y puis-je ? Je sais juste que je n’ai pas envie de me coucher et que dans cinq minutes c’est moi qui vais aller courir parce que toute cette histoire me stresse. »

« Nouveau scoop, je suis pas plus parfait que toi » rectifiais-je avant de l’écouter. La tendresse et moi, ça faisait deux, je n’y pouvais rien. Elle m’avait appris à aimer les câlins mais en donner, c’était encore un peu plus compliqué surtout en de pareilles situations. Je me massais la nuque avant de venir m’asseoir à côté d’elle pour mieux l’attirer sur mes genoux et lui offrir un petit câlin. « J’ai commencé à me dessaper ce n’est pas pour aller boxer en mode naturiste » lui signifiais-je en douceur avant de déposer un baiser sur sa joue. « Si je t’ai repoussé c’est pour une bonne raison. Lorsque je suis en colère, j’ai tendance à être violent et dans ces moment-là, je préfère m’isoler pour me calmer voire à passer ma colère en frappant un objet inanimé. Les câlins, les moments de tendresse, ce n’est pas naturel chez moi. Tu m’as appris beaucoup mais il me reste encore du chemin à rattraper et tu ne m’as pas vendu du rêve avec cette histoire de gâterie. Je me demande ce qui m’a le plus énervé : ta blague ou cette histoire de gâterie »marmonnais-je.

Mallory ne savait pas si elle devait partir du principe qu’il s’agissait d’une grande victoire ou plutôt redouter le pire mais quoi qu’il en soit, elle se trouvait sur les genoux de Declan, et il venait de lui offrir un faible câlin ainsi qu’un baiser contre sa joue. « Je t’ai pas vendue du rêve… mais je t’offrais pas juste une gâterie ça me faisait juste chier de me disputer avec toi pour ça et je ne savais pas quoi faire ou dire. Crois moi, je risque pas de recommencer ou même de te refaire des avances de sitôt. » Il oubliait un peu trop vite qu’elle n’avait aucune expérience en matière de vie sexuelle et qu’un choc pareil risquait de la marquer longtemps. « T’es vraiment qu’un empoté de la vie ma parole. Quand je te parle d’un câlin c’est un vrai, un pur, un dur, un tatoué ! » fit-elle avant de l’entourer passionnément de ses bras, frottant son dos avec tendresse. « Ça c’est un vrai câlin » fit-elle en descendant de ses genoux pour mieux s’allonger docilement. Il faisait un effort elle en faisait un, à savoir de le câliner et de se recoucher docilement.

« A ta décharge, le commun des mortels aiment les réconciliations sur le canapé. Je crois que je dois être le seul gars à des kilomètres à la ronde à ne pas les apprécier. C’est juste que ça me donne une sale image dans la tête » soupirais-je car je prenais conscience que si plus tôt dans la soirée, Mallory avait fait un effort pour se décoincer, je venais ni plus ni moins de la rebloquer et pour longtemps. Génial ! « J’aime tes câlins… » avouais-en profitant de cette étreinte avant de me relever pour terminer de me déshabiller et me glisser à mon tour dans le lit, l’attirant dans mes bras pour un « vrai » câlin comme elle venait de me faire la démonstration. « Essaie de dormir ok ? Demain je serais toujours là et je t’aimerai toujours autant »