tw ✧ None

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Some of them want to use you
Some of them want to get used by you

I'm gonna fight 'em all
A seven nation army couldn't hold me back

S’il y a une chose incompatible avec la vie, c’est bien le statu quo. L’immobilisme. Le sur place. Aussi épuisant que cela puisse paraître, l’essence même de l’évolution, de l’existence, reposait sur cette notion de mouvance. Toujours droit devant, aussi vite que possible, pour éviter que le temps nous rattrape et nous dévore.

Les affaires de Bennett n’échappaient pas à cette règle universelle. Et même si tout tournait plutôt bien depuis ses plus récentes manigances, il ne savait qu’il ne pourrait jamais se reposer sur ses lauriers.

Toujours à l’affût de nouvelles opportunités, donc, il flairait du côté du marché de l’art depuis un certain moment. Jusqu’à ce qu’enfin, une porte s’ouvre à lui. Malheureusement, son âme cartésienne ne parvenait absolument pas à naviguer les mystérieux courants de ce domaine. Il devait soit trouver une façon de prendre un cours accéléré en appréciation de l’art moderne, soit trouver quelqu’un qui puisse l’accompagner dans l’établissement de ce nouveau partenariat d’affaire.

À la recherche d’inspiration, il s’était installé en solitaire dans l’exposition sur Frank Bowling au musée des beaux-arts de Boston, peu fréquentée par ce vendredi soir. Jusqu’à ce qu’elle n’apparaisse. Comme un cadeau du ciel.

Il observa discrètement plusieurs minutes cette jeune femme dans la fleur de l’âge qui choisissait de passer sa soirée dans un musée plutôt que de vivre des émotions forts avec ses potes. Pourrait-elle être la réponse qu’il espérait ?

Ça serait véritablement trop beau.

S’il y avait une chose qu’il avait appris, c’était le fait que celui qui ne tente rien n’obtient rien. Après une grande respiration visant à lui redonner le courage, il se leva du petit fauteuil et se dirigea aux côtés de la jeune femme quelques instants avant de pousser un soupir.

« Aidez-moi, je vous en prie… »

Il continuait de fixer l’œuvre exposée devant eux.

« J’ai beau essaer, je n’arrive tout simplement pas à comprendre ce que je regarde… »

Il espérait que sa grande candeur, absolument franche, saurait efficacement briser la glace.

« Je sais que l’art, c’est quelque chose de personnel, mais j’ai vraiment l’impression de manquer quelque chose.»

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Some of them want to use you
Some of them want to get used by you

I'm gonna fight 'em all
A seven nation army couldn't hold me back

Avec une grande générosité, l’inconnue accepta son appel à l’aide avec patience… et pédagogie. En cette ère où tout le monde était surchargé et où chaque instant comptait, il en était très reconnaissant. Même s’il se savait en voie de profiter de cette générosité…

« Ce que je vois ? »

Il marqua une courte pause durant laquelle il parcourut de haut en bas la toile qui s’offrait devant ses yeux, intitulée ‘False Start’.

« Une… série de couleur ? Qui me rappelle Bob Marley ? C’est beau, c’est chaleureux. Je ne comprends pas pourquoi il y a l’Afrique et cette répétition de visage. Je veux dire, oui, je comprends que des gens à la peau noire habitent l’Afrique, mais…. Et il y un genre d’oeil dans ce coin-là ? »

Il indiqua le coin en bas à droite de l’œuvre.

« Je trouve ça beau. Je ne sais pas exactement pourquoi.»

Il se tourna vers son interlocutrice, délaissant momentanément l’intégration autobiographique de la géopolitique post-coloniale qui se tenait devant eux.

«Je ne suis pas certain de comprendre pourquoi celle-ci se retrouve dans un musée, par exemple, et incite des gens comme vous, et comme moi, à payer un billet pour venir les voir. Versus je ne sais pas combien de toiles qui doivent être peinte ne serait-ce qu’à Boston, chaque année. Et qui m’évoquerait probablement la même impression un peu flou et un peu vague de beauté. »

À nouveau, il se replongea dans l’exploration de cet univers qui, définitivement, n’était pas fait pour lui. Et il poussa un soupir.

«C’est vraiment embêtant… »

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«Wow, » répondit-il tout simplement après les explications fournies par la jeune inconnue. Son instinct ne l’avait pas trompé : elle connaissait définitivement ce dont elle parlait. Non seulement ça, mais elle savait comment le lui communiquer clairement.

«Mais où étiez-vous durant mon high school, où mes profs d’arts s’entêtaient à m’expliquer les différences entre les tons et à me lancer une série de noms de peintres célèbres. »

Il prit un moment pour regarder à nouveau la toile sous un jour nouveau, pressentant un sens qui lui échappait avant. Comme si elle prenait une nouvelle importance.

«Vous semblez vraiment dans votre élément. Je vous en prie, dites-moi que vous n’êtes pas la curatrice du musée et que je passe pour un gros idiot »

Sourire un peu désolé aux lèvres, il poursuivit.

«Si je peux me permettre de vous importuner encore un moment… comment vous savez tout ça ? Comment en arrivez-vous à figurer les intentions de l’auteur et à positionner tout ça dans un contexte historique, politique ou culturel ? Est-ce que l’artiste comment constamment son travail, pour laisser des traces et s’assurer que ce soit bien interprété ? Ou bien s’il faut posséder une culture générale encyclopédique pour comprendre ce qu’il peut bien vouloir dire ? »