Quand j’ai réalisé, je ne sais pas pourquoi c’est à lui que j’ai pensé. Certaines se poseraient probablement plus de questions, analyseraient la situation, à savoir le comment du pourquoi, lorsque j’ai besoin de quelque chose, il se place maintenant en première position des personnes auxquelles je peux penser. Il faut croire que ça s’est fait au fil des mois, et que de toutes les façons, je n’ai absolument pas le temps pour les interrogations.

Alors quand je m’extirpe de la voiture conduite par mon chauffeur, je regarde directement la montre qui trône à mon poignet, dans le but de voir si le timing que je lui ai donné sera respecté. Emmitouflée dans de la fausse fourrure, je m’avance vers la devanture. Le centre commercial décoré aux couleurs classiques des fêtes de fin d’année, j’en roule des yeux, mal à l’aise face à ce déballage, Noël, chez moi, signifiant le plus souvent naufrage. Sa silhouette, je n’ai besoin que d’une minute pour la reconnaitre, et laisser le son de mes talons résonner sur les pavés quand je me décide à l’approcher.

Je le jauge, ô pas trop longuement, juste assez pour me dire qu'il peut presque être charmant, avant de lui exposer les éléments. « Je vais passer une semaine chez mes parents. » Le couple Miller – Witter s’apprête à célébrer son bal de Noël, divertissement vomitif annuel. D’ailleurs ça me fait penser, que ça lui irait bien, le rôle de cavalier. Et bien qu’il s’en contrefout de mes vacances à venir, je le sais, mais il faut bien la commencer quelque part, mon explication, « Je n'ai pas de cadeau pour ma mère. » Mes prunelles se braquant dans les siennes, profondément, armé d’un sourire putassier, le défiant, « Et c’est un fait notoire, » gigolo déguisé, inutile de le nier, même si tu préfères les païennes sans papier, « tu t’y connais en mégères friquées. » Quoi que, le visage incliné, je reviens sur mes mots, « Enfin… Tu pratiques encore ? » Certes, ce ne sont pas mes affaires, mais l’emmerder, j’adore.

A la vue de son sourire je ne peux pas douter de la teneur de ses pensées, il jubile, et pas de doute, cette semaine chez eux, c’est d’autant plus qu’elle me tend. « Des vacances. » Il semblerait, mais je me porte garante de lui rappeler que ce n’est pas parce que le chat n’est pas là qu’il faut danser.
De toutes les façons, rien ne sert de tergiverser pour le moment sur ce sujet, je préfère – et de beaucoup – me concentrer sur le pourquoi il est ici, une minime bride d’envie de passer du temps avec lui, mais surtout le fait qu’il m’aide à trouver ce que ma génitrice pourrait apprécier. Et le plaisir de voir sa mine se décomposer lorsque je mets sur le tapis ses anciennes préférences, sa vie intime et ses déviances. « C’est amusant que tu en parles. » Amusant, Sheng, vraiment ? Il me semble que tu devrais réviser tes arguments. « Justement, tu n’as qu’à lui demander. » Tout de suite, c’est viscéral comme ça me fait grimacer, à nouveau, je réprime un haut le cœur, véritable nausée.

Les mâchoires serrées quand il paraphe son idée, « La fille et la mère. » ma réaction, elle ne se fait pas attendre, c’est avec toute l’honnêteté qui sommeille en moi que je m’entends lui cracher, « Arrête, tu vas me faire gerber. » Et pourtant, je suis du genre ouverte niveau sexualité. Mais les délires incestueux, pour moi, c’est très peu. « Cela dit, » et je me mets en marche dans l’espoir qu’il m’emboite le pas, parce que les boutiques, il faut bien qu’on les rejoigne, car ce n’est pas en commérant qu’on avancera, « si tu as envie de rencontrer en bonne et due forme ta future belle-maman pour les fêtes. » Je pense à cette réception pour Noël, forcément, signant mes paroles, « Avant de refuser, » un sourire à son intention esquissé, mauvais, « explique-moi comment elle s’est retrouvée dans une campagne de publicité ? » Je n’ai jamais supporté, que dans mon dos, on essaie de me flouer. Sheng sait pourtant, que je suis des plus douées, afin de me venger. Mais il n’a pas le temps de me répondre que nous passons l’entrée de Channel, je me fais angélique parce que connue afin de lui glisser, enjouée à souhait, « Et t’as liste de cadeaux, à toi, elle est terminée ? » une parfaite petite poupée.

Elle m’insupporte, sa fausse indifférence, le mielleux de son expression qui teinte son arrogance, « Elle rend plutôt bien. » J’en laisse claquer ma langue sur mon palais, en un bruit sec, sourd et mauvais. Préférant, et de loin, détourner le regard de cette ridicule affiche sur laquelle, elle apparaît. Son sourire d’ingénue, c’est de plus en plus qu’il me donne l’envie de gerber.

Alors une fois que l’on traverse l’entrée de la boutique Channel, je balaie, dans le seul but de sauvegarder les apparences, ce fameux sujet. Je saurais assurément la remettre sur le tapis, en catimini. Parce qu’il n’est pas bon de péter les plombs ici. « Pas commencée. » Une œillade en direction de son profil lancée, à l’évidence, nous sommes à égalité, comme si le fait qu’on se ressemble était encore à prouver. Aussi fort qu’il puisse glaner l’inverse à longueur de journée, je me fais forte pour lui rappeler mes façons de penser. « Mais puisque je ne suis pas là pour porter tes sacs… » Autant lier l’utile à l’agréable pas vrai ? « Qui a dit que tu n’étais pas là pour ça ? » après tout, maintenant que l’idée s’est infiltrée dans mon esprit, je ne peux pas le nier, elle me plaît. L’imaginer porter tous mes caprices à bout de bras, esclave de mes volontés, lui qui aime tant me tenir tête, transformé en pantin articulé.

Baladant mes doigts sur un sac de la nouvelle collection, « Alors, tu m’expliques ? » Comment Armani s’est retrouvé avec la sans-papier. « Madame Witter, nous avons des exclusivités si vous le souhaitez. » Je me fais interpeler, mais avant de répondre à l’employée endimanchée, c’est à mon partenaire que je me permets de souffler. « Tu veux peut-être que je m’occupe de celui d’Haiwee ? » Elle l’a plutôt apprécié, non, celui de l’an passé.

Dans mon esprit, ça fuse déjà, car après tout, elle a apprécié le cadeau l’année dernière, n’est-ce pas ? Tu sais bien que sa douceur se marie parfaitement à ma perversité. Que je me délecte du fait de la briser. Fille de rien qui ne sera jamais à sa place au sommet. « Non. Sans façon. » Dommage, je les avais bien ancrées dans ma tête, les images. « Mais tu devrais t’offrir quelques séances de thérapie. » Ma main paume se plaque sur ma poitrine, un soupir craché pour parapher ce mime… « Touchée. » délibérément accentué, car je ne le suis pas le moins du monde, pas même de moitié. M’inviter à aller me faire soigner quand moi je ne désire que jouer. Ca, ce n’est pas très gentil, j’étais à deux doigts de nous penser amis.

Tandis qu’il détourne son attention afin de contempler un costume griffé, je me reconcentre sur le but premier, les foutus cadeaux de Noël et ce que ma mère pourrait désirer, allant jusqu’à me laisser surprendre lorsqu’il ose prononcer. « Au fait elle te remercie pour les deux ensembles, » Mes mâchoires derechef serrées, à l’excès. Pas jalouse mais exécrant l’idée d’avoir pu satisfaire, aviver leur sexualité. « Ils nous ont… beaucoup plu, » voilà c’est sur, on y est, je vais dégobiller. « J’ai toujours apprécié donner de ma personne pour les plus défavorisés. » Mon sourire se fait carnassier, tu sais, les chèques bien placés, que je signe sans prendre le temps de regarder, « Les œuvres de charité… » Comme sa putain de Sans-papier. Mais il est vrai quand dans ma voix, elle n’est pas difficile à déceler, l’irritation que cela peut m’inspirer. Elle est bien loin, la petite conne qui prônait le fait de se réserver pour l’homme qu’elle souhaitait épouser. D’ailleurs, en parlant de mariage, ça me fait penser… « Tu lui as parlé du contrat ? » De cette union qu’il fait mine de ne pas vouloir alors qu’elle imposerait un foutu ordre dans nos histoires. « Ou il faut que je le fasse moi ? » Mon cadeau, plutôt que de lui raconter ce qu’il s’est passé cet été, ça peut aussi être ça.

Le fait est que je ne le comprends pas, ce qu’il peut trouver chez elle, bien sûr, je ne suis pas aveugle, je le vois, qu’elle est belle. Ce n’est pas la jalousie, qui me ronge, mais la différence qui est visible entre nos deux mondes ; Il aurait dû la jeter, après l’avoir déflorer. Jouer de son espoir et se délecter de la voir pleurer. Mais ce n’est pas grave, il n’est jamais trop tard pour apprendre, pas vrai ? Promis, Sheng, je te montrerai. « N’en fais pas trop non plus, » Moi qui pensais que je le jouais plutôt bien, le rôle de la fille qui se soucie de son prochain.

Cela dit, je n’ajoute rien sur ce point, préférant me préoccuper de nos futurs projets, ceux qu’il semble toujours aussi borné à refuser. « Le truc que je n’ai jamais signé ? » Détails, détails, « Et qui n’existe que dans ta tête ? » pour le moment, et c’est d’un sourire vicieux que je souligne les mots de l’étudiants. Les choses que je désire, elles arrivent tout le temps, généralement. C’est si rare, que le non soit la finalité, il devrait savoir que je trouve toujours un moyen de contourner. Alors oui, ce que je veux, je l’obtiendrais. Il suffit simplement que l’idée se fasse un véritable chemin dans son esprit étriqué.

Si lui se préoccupe de ce qu’il se passe à l’entrée du magasin, j’avoue que je ne le relève pas, habituée à ce genre de manifestation, et n’ayant pas de grande envie de prendre part à cette représentation. De toutes les façons, j’ai l’esprit concentré sur mon but premier, cette histoire de cadeau et de devoir satisfaire ou tout du moins effleurer le cœur de Tallulah Miller. « Dans ma tête, pour l’instant. » Je m’aventure à le corriger, « Tu vas bien te décider à être raisonnable. » et je me porte réellement garante pour prévenir sa bien-aimée, de toute ma douceur, je le ferai une vraie promesse que je lui fais. Puis en me retournant vers celle qui me léchait les pieds précédemment, j’ordonne, le ton tranchant, « Et la nouvelle maroquinerie ? » Comme si je commençais à perdre patiente, une princesse Wendy.