Dimanche 24 Octobre. 09:00 pm.

Ce week-end avait marqué un tournant au sein de mon existence. J'avais mis fin à une existence. Mon père était mort. Il ne faisait plus parti de ce monde et je n’avais plus à craindre qu’il m’approche un jour ou qu’il fasse du mal aux personnes qui m’étaient chères. En toute honnêteté, j’aurai aimé croire que tout était terminé à présent et que j’étais en paix. Mes histoires avec la Mafia étaient réglées en grande majorité. Je devais encore aider Rob lorsqu’il en aurait besoin, mais ce n’était pas pareil et je savais que je n’étais pas dans le pétrin. Mes histoires avec mon père avaient pris fin ce week-end. Enfin… C’était ce que je croyais. Parce qu’en vérité, rien n’était vraiment terminé. Mon père avait soufflé des mots qui ne cessaient de tourner en boucle à l’intérieur de ma tête. Tu croyais t’être échappé de mon emprise Gattino, mais j’ai quelqu’un à Boston. Quelqu’un qui te fait du mal sur mes ordres. Quelqu’un responsable du saccage au studio de ton copain, quelqu’un responsable du saccage au Lord Hobo. Quelqu’un qui te torture exactement comme je le souhaite. Quelqu’un qui est bien plus proche de toi que tu ne le penses. Oh bordel, c’était vraiment l’explosion à l’intérieur de mes pensées. Il y avait quelqu’un de mon entourage qui travaillait pour mon père. Parmi mes proches, il y avait un monstre responsable des dernières horreurs. Il y avait quelqu’un qui n’était pas vraiment mon ami sans doute. Cette pensée cognait une nouvelle fois à l’intérieur de ma tête laissant mon cœur battre douloureusement et les frissons d’horreur glisser le long de mon corps. Rien n’était terminé. Tout ne faisait que commencer. J’allais devoir éplucher la liste de mes proches pour tenter de découvrir l’identité de cet être qui travaillait avec mon père. Il fallait que je parvienne à trouver l’ennemi au sein des rangs des amis. Qui pouvait être responsable ? Côme ? Non, sans doute pas. Il m’avait accompagné ce week-end. L’avait-il fait pour cacher la réalité ? Après tout, mon père avait employé ce Gattino généralement utilisé par Côme. Était-ce pour énerver le mafieux qu’il le savait présent avec moi ou était-ce pour m’offrir un indice sur l’identité de son partenaire ? F*ck je n’en savais rien. J’avais du mal à croire Côme capable de ça. Alors qui ? Lukas ? Non. Il avait été victime de l’horreur lui aussi. Ce n’était pas possible que ce soit lui. C’était totalement inimaginable même dans le pire des cas. Katalia ? Je n’avais pas envie d’y croire. Je n’avais pas envie de me dire que mon Ange pouvait être liée à mon père, mais peut-être que c’était possible. Ou peut-être que c’était Nate et que son retour dans mon existence n’était pas si hasardeux que je le croyais. Damn it. Mes pensées s’embrouillaient. Tout le monde devenait possiblement coupable de façon trop aisée. Je ne savais plus à qui faire confiance. Je ne savais plus vers qui me tourner. Je n’étais même pas certain de pouvoir parler de cette réalité avec qui que ce soit. Côme était au courant bien sûr. Il avait entendu la totalité des échanges avec mon père alors il savait. Mais, hormis lui, à qui allais-je confier cette horrible réalité ? Je n’en savais foutrement rien. Je n’étais pas certain d’avoir envie de le faire. Gamin qui préférait se taire pour observer tout le monde. Gosse qui allait attendre de voir qui apprendrait le décès du père sans que les mots ne glissent entre mes lèvres.

Pendant les six heures de vol me ramenant d’Irlande à Boston, je n’avais pas été foutu de dormir. Gêné par les blessures douloureuses de l’être. Bouffé par les mots soufflés par le père décédé à présent. Pendant les six heures de vol me ramenant chez moi, mes pensées s’étaient embrouillées dans tous les sens en quête de la réalité que je ne parvenais pas à saisir. Je voulais découvrir l’identité de l’ennemi, mais je n’avais pas envie de croire qu’un de mes proches pouvait être responsable de ça. Arrivé à Boston, je m’étais précipité dans un taxi après avoir soufflé des remerciements à Côme et lui avoir dit que j’avais besoin d’être seul. J’en avais tellement besoin oui et je savais pourtant que je n’aurais pas beaucoup de temps seul. Mon futur mari n’allait pas tarder à rentrer de son week-end d’enterrement de vie de garçon. J’avais sans doute un peu moins de deux heures devant moi pour vaquer à mes occupations. Il fallait que je fasse bonne figure. Il fallait que je noie mes inquiétudes. Il fallait que j’efface ma fatigue. Et il fallait surtout que je trouve un mensonge expliquant les blessures qui s’étalaient sur mon être. Marmonnant mon adresse, je laissais mon cerveau tourbillonnait tout seul alors que je tentais de somnoler à l’arrière du véhicule. Je me retrouvais bien vite devant mon immeuble et, après avoir laissé quelques billets au conducteur, je m’empressais de rejoindre ma demeure. Mon appartement. Mon chez moi. Un endroit composé de trop de cartons. Un endroit où je me retrouvais seul pour le moment. Soufflant un coup, je me précipitais dans la chambre. Gamin qui savait son temps compté. Gosse qui désirait avoir tout terminé avant l’arrivée de l’amoureux. Je rangeais sagement toutes mes affaires. Vêtements, affaires de toilettes, arme. Je glissais de nouveau le sac de voyage dans un carton vérifiant de nombreuses fois que tout était bien à sa place et ne risquait pas d’éveiller les soupçons de l’homme aimé. Me débarrassant de mes vêtements, je me rendais dans la salle de bain me plantant devant le miroir. Putain j’avais une sale tête. J’étais bien trop blanc. Les cernes marquaient mon visage déjà bien trop amoché par des griffures, des entailles et des bleus. Mes iris sombres se perdaient sur le reste de mon corps. Un corps qui avait pris la couleur bleue voir même violette à certains endroits. Les ecchymoses étaient là marquant trop la peau. Elles ne pourraient pas être invisibles. Le pire restait tout de même les deux autres blessures. Ces deux entailles au couteau seraient peut-être les plus compliquées à expliquer. Une entaille au milieu du ventre. Une entaille à l’épaule droite. Les deux me limitaient dans mes mouvements. Elles étaient foutrement douloureuses et toujours trop vives. Je notais déjà dans un coin de ma tête d’aller voir Nate demain s’il était disponible pour qu’il vérifie l’état de mes blessures. Je ne voulais pas que ça s’infecte. Me glissant sous l’eau de la douche, je prenais le temps de me détendre essayant de ne pas grimacer lorsque l’eau touchait les plaies. Quelques minutes ou peut-être une bonne heure après, je finissais par sortir de la douche. Lukas n’allait pas tarder. M’essuyant rapidement, je m’appliquais à refaire les bandages sur les entailles avant d’enfiler des vêtements. Jogging et sweat. Téléphone à la main, je me rendais dans ma chambre me glissant entre les draps sans penser qu’un moi habillé sous les draps était plus que suspect. J’échangeais quelques messages avec mon amoureux mettant en place l’excuse expliquant les blessures. Une chute sur du verre pendant le travail… Il avait l’air d’y croire et j’espérais qu’il y croirait toujours en se retrouvant face à moi. Ce qui n’allait pas tarder à arriver au vu des derniers messages échangés. Posant le téléphone, je soufflais un grand coup pour me donner du courage. Ne pas avouer la vérité. Rester dans ce mensonge lancé. Et surtout ne pas laisser voir cette inquiétude qui me rongeait à l’idée qu’un de mes proches était en fait un ennemi. Juste être heureux de retrouver mon futur mari que je n’avais pas vu depuis vendredi. Juste profiter de mon amoureux et oublier l’Enfer du week-end. Un week-end qui avait refermé une brèche pour en ouvrir une nouvelle que je n'étais pas prêt à affronter. Gamin soumis à un destin qui ne cessait de le foutre en l'air.

Le week-end avait prit un tournant si imprévu. Avant de m’envoler pour l’Irlande, j’avais pourtant pris soin de dessiner les possibilités qui se dressaient devant moi. J’avais tenté d’étudier tous les chemins afin de ne rien laisser au hasard. Gamin qui n’avait pas envie que le destin vienne tout foutre en l’air. Gosse qui avait juste envie de tout contrôler à la perfection afin de réussir sa mission avec brio. Il était bien trop vain d’y croire. Il était illusoire de se dire que cela pouvait être possible. Les études étaient pourtant si bien faites. Les chemins étaient parfaitement dessinés. Les observations donnaient raison. Malheureusement, tout avait fini par être chamboulé au cours de ce week-end dangereux. Rien ne s’était déroulé comme prévu pendant cette mission presque trop suicidaire. J’avais su trouver mon père grâce à l’aide d’Aaron et de Côme. J’avais su trouver quelqu’un pour attirer le père à l’endroit désiré. Au départ, tout semblait bon. Tout semblait suivre son cours. Néanmoins, à l’instant même où mon père avait franchi la porte de la chambre de l’hôtel, tout avait fini par virer au drame. Un nouveau chemin complètement imprévu s’était ouvert. J’avais été bousculé dans une nouvelle voie. Me retrouvant face au monstre de mon passé, je pensais sincèrement avoir les couilles pour lui faire face. Gosse qui ne les avait pas eu. Gamin bien trop tétanisé. J’avais été incapable de le tuer sur le champs sans attendre. J’avais été incapable d’utiliser l’arme qui m’avait si rapidement échappée des mains. Le lion était devenu l’agneau en un claquement de doigt. Et mon père le savait. Ce père qui s’était amusé de la situation. Ce père s’était mis à tourner autour de moi changeant la donne. L’imprévu s’était invité là dans les mots du paternel. Il avait eu le temps de parler bien trop longtemps. Il avait eu le temps de dessiner le tableau de mon existence me montrant à quel point il maîtriser totalement le plateau. Il savait tout de ma vie à Boston. Et il avait lancé les aveux. Quelqu’un dans mon entourage travaillait avec lui. Quelqu’un se trouvait dans le camp de l’ennemi. Un ami n’était pas réellement un ami. Un ami n’était en fait qu’un monstre responsable des saccages après avoir répondu aux ordres de cet homme qui avait su bouleverser le week-end. C’était la pire information avec laquelle je pouvais revenir. Une information bien trop incomplète. L’identité de l’ennemi me manquait. Le père était mort sans avoir craché un seul mot. Sa mort était bien la seule chose prévu dans ce week-end. Cet affreux moment dont je ressortais blessé mentalement et physiquement. Je portais bien trop de résidus sur la peau. Des résidus qui allaient me valoir de donner des explications à mes proches. À Lukas surtout. Et à Nate éventuellement car j’allais devoir lui demander des soins pour être sûr que les blessures ne s’infectent pas. Il ne fallait pas prendre le risque. J’avais bel et bien envisagé des blessures dans le scénario. Néanmoins, je devais vous confier que je ne les pensais pas aussi grave. Gamin qui croyait avoir la force de maîtriser la situation. Gosse qui pensait pouvoir demeurer le lion tout le temps. Stupide être humain qui n’était rien face au paternel. Le visage était marqué de griffures, d’entailles et de bleus. Le corps était marqué de bien trop d’ecchymoses douloureuses tournant au violet. Le milieu du ventre et l’épaule droite étaient marqués par des entailles au couteau. Putain, comment allais-je pouvoir expliquer tout ça sans rien avouer de ce week-end censé être secret ? Je n’aurai jamais pensé finir aussi mal en point. Et pourtant, je finissais dans un état lamentable. Après six heures d’avion sans pouvoir dormir, je m’étais empressé d’utiliser les deux heures restantes pour tenter de faire quelque chose. Il fallait que je fasse bonne figure. Il fallait que la fatigue soit moins violentes. Il fallait que les blessures paraissent moins importantes. Il fallait que la panique se noie au loin. Il fallait que l’inquiétude disparaisse. Il était hors de question de parler à Lukas de cette découverte avant d’avoir trouvé l’identité de l’ami-ennemi. Il était hors de question de l’embarquer dans l’Enfer. Il était aussi hors de question de lui avouer l’acte commis en Irlande. Une douche était prise pour m’aider à me détendre avant que je ne m’habille pour masquer le maximum de ma peau. Et je me glissais sous les draps. Gamin trop endormi qui ne prenait pas en compte le fait qu’être ainsi sous les draps seraient foutrement suspect. Gosse qui essayait de dessiner une situation à l’amoureux qui allait arriver. Un mensonge qui pourrait passer. Du moins je l’espérais du plus profond de mon cœur.

Les yeux fermés, je sombrais doucement dans le sommeil sans même m’en rendre compte. La fatigue de ce week-end me rattrapait. La fatigue qui n’avait pas su m’assommer dans l’avion semblait savoir le faire maintenant. Je commençais à somnoler sans souffrir. Je commençais à sombrer dans les bras de Morphée sans me faire mordre par les cauchemars. Cependant, je me redressais soudainement lorsque la porte d’entrée s’ouvrait un peu trop soudainement. Le corps tendu, le cœur battant à tout rompre, je ne savais pas retenir le gémissement de douleur qui passait la barrière de mes lèvres. F*ck. Ça faisait mal. Je regrettais ce réveil si brutal d’autant plus que, merde, il n’y avait rien à craindre. La voix enjouée de mon amoureux se faisait entendre dans l’appartement. Ce n’était qui lui qui venait de rentrer chez nous. Juste lui et personne d’autre. Il n’y avait pas de danger. Ce n’était pas cet ami-ennemi qui avait appris la nouvelle du décès de mon père. Ce n’était pas quelqu’un qui venait venger le paternel. Tout allait bien. J’étais en sécurité. Je me détendais rapidement me rallongeant sur le lit et tirant un peu plus les draps sur moi. Le doux sourire s’installait sur mes lèvres tandis que je refermais les yeux comme si je me savais parfaitement en sécurité à présent. Mio Amore était là dans l’appartement. Mon amoureux était vivant à mes côtés. Ouais tout allait bien. Tout irait bien. Au moins cette nuit. Dès demain, la chasse à l’ennemi se lancerait. Cependant, pour ce soir, je voulais juste oublier et me laisser aller. Évacuer le stress de ce week-end. Effacer l’horreur de ces nouvelles. Éradiquer la douleur de ces blessures. Juste profiter pleinement avec mon amoureux. Un amoureux que j’entendais se rapprocher de la chambre et du lit. La question ne tardait pas à tomber me poussant à ouvrir les yeux pour poser mes iris sombres sur lui. Mon copain s’installait sur les couettes et je rétorquais « Déjà oui, mais il manque mon amoureux avec moi… » avec un doux sourire amoureux. Je tentais déjà d’envoyer au loin toutes autres questions. J’essayais déjà de plonger dans un moment romantique avec l’homme aimé. Tout oublié et n’être que Neakas. Tout effacer et vivre dans notre bulle. Juste cette nuit. Mio Amore déposait un doux et tendre baiser sur mes lèvres. Ça picotait un peu, mais ça allait. Je ne frémissais pas de douleur. Je ne pipais mot. Et le murmure se faisait alors entendre me poussant à sourire plus grandement provoquant la douleur. Une douleur face à laquelle je préférais rester silencieux. Ne pas alarmer l’amoureux. Levant doucement ma main, je caressais sa joue avant de confier dans un murmure « Tu m’as manqué aussi Mio Amore… C’est long un week-end sans toi… » Foutrement long oui, surtout depuis que nous avions pris l’habitude de passer presque toutes nos nuits ensemble. Et, même occupé loin de Boston, mon amoureux m’avait manqué. Beaucoup trop. Glissant de nouveau ma main sous les draps, je laissais mon futur mari glisser sa main sur mon visage. Je le laissais faire un peu trop tendu sous les vagues de douleur qui me parcouraient. Je le laissais faire sans rien dire fermant simplement les yeux. Les mensonges seraient plus aisés à souffler si mon regard ne se plantait pas dans le sien. Secouant négativement la tête, je marmonnais « Nan j’me suis pas raté… C’était une sacré chute… » Une chute sur les poings de mon père. Une chute sur le couteau de mon père. Une chute sur la réalité de mon existence. Une chute bien trop violente. Je ne rentrais pas dans les détails. Il ne fallait pas. Mio Amore devait croire à une chute sur du verre. Néanmoins, quelque part, je savais qu’il ne se contenterait pas de cette explication. Je savais à quel point elle était bancale et à quel point elle n’expliquait pas la totalité des blessures marquant mon être. Mordillant nerveusement ma lèvre, je finissais par reprendre « Et… Mmmh… Quand j’suis tombé, j’ai renversé de l’alcool… Sur un mec… Il n’était pas content et il s’en est pris à moi… Ce… Ça explique l’état… » Je m’enfonçais un peu plus loin dans le mensonge. Je plongeais un peu plus profondément dans cette fausse histoire. Cependant, j’utilisais les bons mots et la bonne situation. Cela pouvait parfaitement être possible. Cela rendait la réalité un peu plus correcte. Les plaies sur mon être coïncidaient parfaitement avec les deux explications. La chute sur le verre correspondait aux entailles au ventre et à l’épaule droite. La bagarre avec le mec correspondait à toutes les autres marques. M’enfonçant un peu plus dans le lit, je laissais ma langue glisser sur mes lèvres avant de rouvrir les yeux. Mes iris sombres trouvaient le visage de mon amoureux et je susurrais « Tu viens te glisser dans le lit avec moi ? » Le sourire se dessinait sur mon visage. La question tombait comme pour mettre un point final à l’explication des blessures. L’invitation glissait comme pour souffler au futur mari qu’il n’y avait rien de plus à dire à ce sujet. Et c’était vrai. Il n’y avait rien de plus à dire. Là, maintenant, je voulais juste me glisser dans les bras de mon amoureux pour oublier tout ce week-end bien trop affreux et ce futur instable qui me faisait angoisser.

Cela me déplaisait grandement de mentir à mon amoureux de cette manière. Je n’aimais pas m’enfoncer dans ces mensonges alors que je tentais de changer et d’être plus sincère envers lui. Cependant, dans la situation actuelle, je ne voyais aucune autre solution. Je ne voyais aucun autre moyen de me sortir de cette horrible impasse. Je n’avais pas prévenu Lukas du programme du week-end et je savais que ni Côme ni Aaron n’avaient lancé la vérité. Ils avaient gardé le secret à ma demande. Mais pourquoi garder ces actions secrètes ? Je n’avais rien dit parce que je savais que Mio Amore ne saurait guère rester en place s’il était au courant de mon action. S’il apprenait que je partais en Irlande dans le but de tuer mon père, il risquait d’annuler son week-end de festivité pour rester à la maison à m’attendre nerveusement. Ou pire encore il risquait d’avoir envie de m’accompagner sur place pour être au plus près en cas de besoin. Néanmoins, ce n’était pas la bonne solution. Si je l’avais à mes côtés, je m’inquiéterais beaucoup trop pour lui au point de me concentrer encore moins sur ce que je devais faire. Si Mio Amore m’attendait à Boston nerveusement, ce serait la même chose. Le silence avait été préférable pour ce week-end. Je savais mon amoureux entouré et heureux. Je savais qu’il allait pleinement profiter de son week-end avec ses proches et ça me rassurait. Ça m’empêchait de me focaliser sur lui. Ça m’obligeait à me concentrer sur l’instant. Cet instant qui ne s’était pas déroulé comme je le voulais bien sûr. Oh oui, le père était mort et il ne pourrait plus interférer directement dans la vie. Mais, des vérités avaient glissé entre ses lèvres. Il m’avait confié qu’un de mes amis travaillait pour lui. Avec lui. Quelqu’un de mon entourage le tenait au courant de mon existence. Quelqu’un de mon entourage avait provoqué les saccages sur les ordres de mon père pour détruire une vie que je tentais de construire. Une belle vie. Je n’avais pas obtenu l’identité de cette personne. Gamin perdu qui se retrouvait coincé dans une impasse de nouveau. Gosse effrayé à l’idée qu’un de mes proches ne soit en fait qu’un monstre. Et, surtout, des blessures s’étaient invitées ce week-end. Des blessures beaucoup plus importantes que je ne le pensais. Des blessures qui allaient pousser mon futur mari à se questionner beaucoup trop. Des blessures qui demandaient des excuses parce que, merde, je ne pouvais même pas révéler la vérité à Mio Amore. J’aurai pu tout lui dire dès nos retrouvailles. J’avais prévu de le faire pour tout vous confier. Cependant, le fait d’apprendre qu’il y avait encore un pion sur l’échiquier avait modifié la totalité de la situation. Je ne voulais pas laisser mon amoureux plonger dans un précipice d’angoisse. Je ne voulais pas qu’il se mette à douter de tout et de tout le monde au point de s’enfermer un peu trop. Je ne voulais pas le détruire et l’angoisser. Aussi, il fallait que je garde le silence. Je me devais de me taire jusqu’à ce que l’identité de l’ennemi soit révélée. Une fois que j’aurai cette carte en main, il me serait possible d’avouer la réalité à Mio Amore. Je pourrais tout lui dire à ce moment-là. Mais, pas avant. Surtout pas ce soir. Ce soir, il fallait que je trouve des excuses et que j’arrive à lui faire croire à la réalité de tout ça. Ce soir, j’avais commencé à lancer la roue du mensonge en parlant d’une chute au travail. Une chute sur des bouts de verres qui me valait des griffures, des entailles et des bleus au visage. Une chute sur des éclats de verre qui me valait des entailles sur l’épaule droite et au milieu du ventre. Le mensonge était incertain. C’était pourtant le seul que j’avais en stock et, par message, mon amoureux semblait s’en contenter. Cela ne durerait pas. Encore moins lorsqu’il me trouverait dans notre lit bien trop habillé, bien trop abîmé et bien trop fatigué. Le sommeil qui m’avait fuit jusque là semblait lentement s’inviter. Je n’avais pas été foutu de me reposer sur le trajet du retour. Mais, à présent que j’étais en sécurité entre les murs de mon appartement avec mon amoureux qui arrivait, c’était comme si le poids de la fatigue se lâchait totalement et m’abattait instantanément. J’avais conscience que le danger était toujours présent. L’ennemi rôdait quelque part dans nos existences. L’ennemi était là à Boston dans les rangs de notre entourage. Cependant, ce n’était pas ce qui comptait ce soir. Juste quelques heures. Juste cette nuit. Je voulais oublier l’Enfer qui brûlait encore autour de moi. Je voulais effacer ce danger qui rôdait tout près de nous. Et je voulais juste profiter de mon amoureux. J’étais vivant. Mon  père était mort. Une bataille était gagnée. La guerre ne l’était pas encore. Mais, cette guerre pouvait bien attendre quelques heures supplémentaires. Elle pouvait me laisser un répit au cours duquel je pouvais profiter avec mon amoureux qui débarquait enfin dans notre chambre après m’avoir tiré du sommeil un peu trop en sursaut. Gamin qui gardait les traces du week-end. Gosse qui risquait d’être sur ses gardes pendant un moment.

Les propos glissaient entre mes lèvres à l’interrogation de mon bien-aimé confirmant que j’étais déjà au lit. J’étais foutrement trop fatigué. J’étais bien trop épuisé. Je n’aurai pas été capable de l’attendre sous la douche ou sagement debout n’importe où dans l’appartement. Comment expliquer cette fatigue ? Une éventuelle angoisse suite à la blessure pouvait parfaitement passer. Mio Amore savait à quel point les crises d’angoisse pouvaient me vider de mon énergie bien trop rapidement. Aussi, s’il me questionnait sur cette fatigue avancée, je pourrais toujours babiller ces quelques mots qui n’étaient pas tout à fait vrais. Doux sourire aux lèvres, je me contentais de lui répondre et de l’inviter avec moi dans ce lit où il me manquait. Il ne tardait pas à répondre murmurant qu’il était là sans poser plus de questions. Bien, je n’aurai pas à rajouter de nouveaux mensonges à la liste. Mon amoureux s’approchait de moi pour un tendre et doux baiser qui faisait du bien à l’être. Putain j’étais vivant. J’étais à Boston. J’étais avec mon amoureux. Malgré la tournure catastrophique du week-end, les choses ne se terminaient pas trop mal. Malgré les nouvelles apprises au cours de l’événement de ces derniers jours, la situation était tout de même agréable. Je pouvais plonger dans ma bulle avec mon amoureux et oublier le reste du monde. Pendant quelques heures, je pouvais me blottir dans notre histoire Neakas et effacer l’Enfer qui brûlait autour de nous. Pendant une nuit, je pouvais envoyer au loin le danger qui voulait nous dévorer et me laisser avoir par notre amour si fort. Le murmure de mon futur mari résonnait soudainement et me faisait sourire encore plus. Ça ravivait le cœur. Ça redonnait de l’énergie à l’âme. Ça apaisait les monstres de la tête. Levant la main, je caressais doucement sa joue en confiant quelques mots. Des mots qu’il se contentait de confirmer laissant le sourire demeurer sur mon visage abîmé. Glissant ma main sous les draps de nouveau, je sentais soudainement la main de mon amoureux venir glisser sur mon visage et il se questionnait. C’était prévisible. C’était normal. C’était si logique. Les yeux fermés pour plus de facilité à plonger dans mon mensonge, je marmonnais qu’il s’agissait effectivement d’une sacré chute au cours de laquelle je ne m’étais pas raté. Oh bordel, comme j’aurai aimé lui souffler là tout de suite que mon père était mort. Ma bouche s’ouvrait pour lancer ces mots. J’en crevais d’envie. J’avais tant de désir de lui confier cette réalité pour qu’il sache d’où venait mes blessures et qu’un soulagement pouvait s’inviter dans nos vies. Néanmoins, si je soufflais cette réalité, il faudrait que je fasse l’autre aveu et ça je ne pouvais pas. Je ne me sentais pas capable de lui souffler qu’un danger inconnu était encore là et qu’il était bien trop proche de nous. Alors, mordillant ma lèvre pour ravaler les aveux, je m’enfonçais dans autre chose. Je glissais dans un mensonge qui collait un peu plus à mon état. Je m’enfonçais dans une histoire totalement fausse qui viendrait appuyer la nature de mes blessures. C’était une bonne histoire. C’était un bon mensonge. Et mon copain le confirmait lorsque aucune autre question ne tombait entre nous. Il n’y avait qu’une demande qui glissait. Il voulait que je lui montre parce qu’il n’avait pas envie de faire mal. Secouant négativement la tête, je m’enfonçais un peu plus dans le lit avant de marmonner « Tu ne me feras pas mal… » Mensonge éhonté qui prouvait que l’horreur était là quelque part sur le corps. Malgré toute la douceur dont il pourrait faire preuve, Mio Amore avait un risque de me faire mal. Il y avait un risque qu’il me fasse gémir de douleur à cause d’un mauvais geste parce qu’il n’avait pas mesuré l’ampleur des blessures et qu’il ne parvenait pas à les situer avec exactitude. Je le savais bien. Mais, putain, je ne voulais pas me lever du lit et me déshabiller pour lui montrer mon état. Un état qui inviterait aux questions sans doute parce que mes mensonges sonneraient un peu trop faux alors. Je refusais de lui montrer et, comme pour expliquer encore plus ce choix, je marmonnais un « Suis fatigué… » Une excuse réelle qui me poussait à n’avoir aucune envie de bouger. Une excuse qui pourrait suffire à convaincre mon amoureux qui attendrait sagement le lendemain pour voir l’étendu des dégâts. D’ailleurs, comme pour le pousser dans ce chemin, je susurrais une invitation les yeux rivés sur lui. Une invitation qu’il acceptait. Après un baiser, Mio Amore disparaissait un instant dans la cuisine pour se désaltérer et me ramener une bouteille d’eau qui me faisait tant envie. Je me rendais soudainement compte que j’avais la bouche bien trop sèche. Il revenait bien vite déposant la bouteille sur la table de nuit. Je l’observais se déshabiller et se glisser sous les draps ne me lassant jamais de ce spectacle aussi magnifique qu’hypnotisant. Ce spectacle qui clamait haut et fort que Lukas était mon amoureux. Me redressant, je venais attraper la bouteille d’eau pour en boire quelques gorgées avant de la reposer et de bouger avec précaution pour venir dans les bras de mon bien-aimé. Ses doigts glissaient dans le bas de mon dos tandis que les miens frôlaient son torse au niveau de son cœur. Mes iris se fermaient. Je me sentais apaisé. Je me sentais prêt à m’endormir. Cependant, la voix de mon copain résonnait. Je ne pouvais m’empêcher de sourire aux mots. Bougeant à peine la tête, je déposais un baiser sur le torse de mon amoureux avant de marmonner un « Plus jamais de nuit l’un sans l’autre… » Et, suite à cette promesse, je sombrais bien vite dans les bras de Morphée. Gosse épuisé de ces dernières heures. Gamin qui pouvait enfin se reposer parce qu’il se savait en sécurité. L’amoureux était là. Tout irait bien.