L'art ? Rappelez moi déjà pourquoi j'avais choisi cette branche ? Sortant de l'amphi après trois heures à disserter avec la promo sur la signification d'une virgule jaune au milieu d'un Picasso, ou encore le sens à accorder à ce petit éclat vert là, dans le coin droit de l'oeuvre, ça m'avait complètement ramolli le cerveau. Je suivais le flot d'étudiants dans le couloir bondé à cette heure, l'esprit ailleurs, les neurones encore engourdis, lorsqu'un bruit sourd me tira de mes pensées. Une brune venait de se prendre une porte de casier là, sur ma gauche, s'écroulant sur place. En quelques pas, j'étais prêt de la maladroite, me penchant au dessus d'elle en essayant de la ramener à elle : "Hey, ça va ? Ca va ? Tu m'entends ?" Clignements d'yeux de la jeune femme, c'était bon signe ça ? Elle baragouina qu'elle devait y aller, et je souris : "Oui, tu devrais y aller… A l'infirmerie." soufflai-je alors qu'elle essayait déjà de se remettre sur pied. "Hep, doucement." lui conseillai-je en m'agenouillant près d'elle pour l'empêcher de se relever davantage. Ma main passa sur son front alors que mes yeux la scrutaient pour constater les dégâts  : "C'est déjà en train de gonfler… Tu t'es pas râtée." commentai-je en grimaçant et en imaginant la migraine qui allait accompagner la bosse qui était en train d'apparaitre sur sa tête. Je me remis debout et tendis alors la main à la jeune femme pour lui proposer mon aide. Sully serait fier, j'étais un vrai quincy serviable là. Allez, d'ailleurs, tiens, aujourd'hui serait mon jour de BA : "Je vais t'accompagner à l'infirmerie, faudrait pas que tu tombes dans les vapes blanche neige…" Ou en fait, peut être que si, il faudrait, parce que ça ne serait pas désagréable de réveiller la miss avec un baiser. Oui, elle était plutôt canon la demoiselle. Qui a dit qu'une BA devait être complètement désintéressée ?

L'étourdie revenait peu à peu à elle, mais avec des bafouillements et propos incohérents qui me firent penser qu'elle n'allait pas si bien qu'elle l'affirmait. D'ailleurs, quand elle affirma vouloir y aller, de crainte de me blesser, un petit rire amusé s'échappa malgré moi de mes lèvres : "A moins d'être une porte de casier, je pense que je crains rien en ta présence." Elle était pas russe, donc bon point pour elle. En tout cas, elle n'en avait ni l'accent ni l'allure. Puis, je me découvrais un goût certain pour le rôle de chevalier sauveur, probablement mon côté quincy qui se révélait peu à peu. Ou alors juste l'envie d'ajouter cette brunette maladroite à la liste de mes conquêtes, parce que y'avait un truc charmant dans la façon qu'avaient ses joues de rosir… Je l'aidais finalement à se remettre sur pied, elle vacilla, se rattrapa et je sentis le coton de mon T shirt se tendre. Dans une autre vie, je me serais insurgé craignant pour la soir haut de gamme de ma chemise, aujourd'hui, vu la qualité du T shift, c'était plutôt pour la demoiselle qui s'y suspendait que je m'inquiétais. Ma main glissa naturellement autour de sa taille pour la soutenir alors qu'elle commentait mon parfum… "Merci. Je peux te prêter mon gel douche quand tu veux…" répondis-je avec une lueur de plus en plus amusée dans les yeux. Bon, l'invitation au prêt de gel douche était peut être de trop, surtout que brunette détournait les yeux mal à l'aise, probablement qu'elle était encore sous le coup du choc. J'avais d'ailleurs peur qu'elle retombe dans les vapes, d'où le sobriquet blanche neige, surnom qui l'amusa et elle me corrigea. Elle était belle. "T'es très belle oui, en effet. Mais c'est aussi le cas de blanche neige non ? C'est pas parce qu'elle était trop jolie qu'on lui a fait bouffer une pomme empoisonnée ? " répondis-je sans avoir compris où elle voulait en venir. Pardonnez moi de ne pas être au taquet sur les contes de fée encore, j'étais pas bien sûr de connaitre Blanche neige en intégralité, j'avais surtout en tête la partie du réveil, mais la miss ne semblait pas tourner de l'oeil pour le moment alors je gardais encore mes lèvres à distance.  

Elle m'amusait cette demoiselle en détresse. Me voilà qui en rajoutais, me jouant de son malaise, de ses joues qui rossissaient, de ses prunelles qui évitaient les miennes. Alors peut-être que c'était mon côté quincy qui commençait à se manifester. Peut-être que c'était juste mon éternel côté charmeur. Qu'importe au final, j'étais décidé à ne pas lâcher ma blanche neige, même si elle me reprenait sur ce surnom. Je ne compris pas d'abord cette rectification avec mention du qualificatif 'belle' parce que l'héroïne mentionnée était plutôt réputée pour être belle aussi... Sauf qu'elle clarifia le quiproquo : elle n'avait pas utilisé belle comme adjectif mais comme nom propre, c'était son prénom. "Tes parents ont bien choisi..." commentai-je bien conscient que ça risquait d'accentuer la teinte écarlate de son visage. Et pour ses remerciement et ce que je devais penser d'elle , je la rassurais : "T'en fais pas. Je te trouve juste très jolie. Princesse Belle..." Lançai-je avec un sourire charmeur, resserrant un peu plus ma main autour de sa taille. L'infirmerie se profilait au détour du couloir. Porte close. Fermée ce jour pour cause d'arrêt maladie de la soignante. "Je crois que c'est pas ton jour de chance." Ne joue pas au loto aujourd'hui princesse. "Tu te sens comment ?  Tu veux que je t'accompagne chez un toubib ? " Questionnai-je avant de réaliser que si la demoiselle avait décliné son identité ce n'était toujours pas mon cas. Chose que je rectifiais dès à présent : "Je m'appelle Daniel au fait." .  

Je n'aurais probablement pas du m'amuser du malaise de la demoiselle mais la voir rougir un peu plus au cours de cette discussion devenait presque un jeu et dieu sait comme j'étais joueur. Je redoublais de compliments, sincères et pensés par contre, cette fille avait un physique de rêve. C'était peut être le plus étonnant, qu'elle se sente si embarrassée à l'écoute de mots qui étaient pourtant une évidence. Mais c'était peut être du au choc, d'où le fait que je devrais surement arrêter mon manège. Sauf qu'il n'y avait pas d'infirmières ou de doc sur le campus aujourd'hui, dixit un mot affiché devant nous, et j'avais toujours ma princesse en détresse accrochée à moi et je n'étais pas sûr qu'elle soit en état pour que je l'abandonne. Elle non plus, elle me le confirma, ne parlant pas de médecin par contre, me demandant juste que je reste en sa présence. "Bien sûr. Mais on devrait peut être t'examiner quand même…" J'attrapai la poignée de l'infirmerie de ma main libre pour pousser la porte en entrainant la jeune femme à l'intérieur. Et alors que je déclinais à mon tour mon identité, sa réponse me surprit. Elle savait ? Je venais juste de débarquer de nul part, c'était le cas de le dire, à la fin de l'été, donc la réponse de la jeune femme fit naitre une lueur d'étonnement dans mes yeux : "Comment ça tu sais ? On se connait ?" questionnai-je, tout en avançant dans la salle déserte, attirant la demoiselle jusqu'à une table d'examen. Mes mains sur ses hanches, je la soulevais doucement pour la hisser dessus en lui conseillant : "Je crois que tu devrais t'allonger un peu…"

L'idée de jouer au docteur avec une si jolie patiente était tentante, alors profitant de l'absence des soignants j'entrais dans la salle d'examen vide en entrainant ma princesse étourdie… Sauf que ce fut mon tour de me laisser dérouter durant quelques secondes. Son 'je sais' m'intrigua, me faisant un instant la questionner, sur un ton étonné où teintait une légère nuance de craintes. Pas possible qu'elle sache, je venais d'arriver, comment pouvait-elle savoir ? Et savoir quoi ? Quelques fraction de seconde d'une vague panique interne qui s'évapora à l'instant où elle me répondit, m'expliquant qu'elle m'avait simplement croisé sur le campus, avouant au passage m'avoir trouvé mignon, ce qui finit de souffler toutes craintes de mon esprit, me faisant retrouver mon sourire, mon humour et mon côté fanfaron : "J'ai espéré un instant que tu étais une fan de mes peintures… Dommage…" soufflai-je en prenant un air faussement déçu, jouant les cake pour noyer mon malaise précédent avant de révéler : "Je suis peintre." Mais en la soulevant doucement sur cette table, j'ajoutai : "Mais pour l'heure je vais être apprenti doc." Je m'éloignai ensuite le temps de partir à la recherche d'un stéto ou de trucs de toubib du genre, des accessoires dont j'aurais pu me passer en vrai parce que je n'allais clairement pas savoir m'en servir. Mais bon j'étais comme un gosse dans cette infirmerie. Et pendant ce temps, la demoiselle s'allongeait comme je le lui avais conseillé, me complimentant alors sur mes talents de prince charmant. Je tournai la tête vers elle, me rapprochant alors stéthoscope autour du coup, rectifiant en reprenant la tournure de phrase qu'elle avait utilisée un peu plus tôt : "Je ne suis pas un prince charmant… Je suis la bête." Pourvu que ma culture en terme de contes de fée ne me fasse pas défaut, c'était bien ça le binôme de la Belle dans l'histoire ?