Quand j'ai appris ce qu'il lui était arrivé, forcément que j'avais pensé à Thanksgiving, à quand on avait été drogué puis enlevé par des gens qui ne voulaient juste pas admettre qu'ils étaient moins bien que nous, qu'Harvard en général. Alors ouais, j'avais pas cessé de penser à elle, d'imaginer ce qu'elle avait pu vivre et j'avais répondu à ses messages, incapable de la laisser partir. Camila, c'était... elle représentait beaucoup trop pour moi pour que je réussisse à l'effacer de ma vie, comme elle pouvait le sous-entendre. Forcément que je poussais, encore et encore, pour tenter d'avoir un tête à tête avec elle, ne serait-ce que pour m'assurer qu'elle aille bien. Après avoir fait un tour dans une boutique pour enfants, je ressortais avec une énorme peluche. Et de là, j'avançais jusqu'à son hôtel, à pieds, non sans me faire remarquer, évidemment. Mais je m'en fichais. Je ne m'arrêtais même pas à l'accueil, ils me connaissaient depuis le temps. J'accédais alors à l'ascenseur qui m'emmenait directement à son étage, celui de la PDG, celui qui me faisait rentrer immédiatement dans son intimité. « Cami ? » Elle n'était pas là et la panique s'emparait de moi. Lâchant la peluche, je me précipitais directement dans la salle de bains, de peur de la retrouver mal en point, comme la dernière fois... ou pire encore, avec la ferme intention de mettre fin à ses jours. Mais non, elle n'y était pas. « Cami ? »

je détestais cette situation. je détestais que mon visage ait pu tourner sur les nouvelles pendant des heures et des heures. parce que maintenant, je recevais des tas de messages me demandant comment je me sentais, si j’allais bien. des gens à qui je n’avais pas parlé depuis une éternité, d’autres dont je n’avais même plus le numéro et dans tout ça, rien de dimitri. alors est-ce que j’allais bien ? je servais la même salade à tout le monde parce que ça ne regardait personne mon état et que dans tous les cas, j’avais pas envie de parler. puis le plus exaspérant était probablement pluton en fait. et j’crois qu’avec tout ça, j’avais plus du tout envie de me consacrer à l’amour ou bien aux relations. j’voulais juste qu’on me laisse tranquille en fait. sauf qu’il avait insisté et que j’avais craqué lui permettant de venir me rejoindre s’il en avait tant envie. et en attendant, c’était un verre de whisky pur que je me servais et une cigarette que j’allumais sur le balcon donnant vue à l’ensemble de la ville. puis c’était ta voix que j’entendais et je poussais la porte fenêtre avant de t’interpeller. « respire, je suis là. » et si j’avais vraiment choisi de me foutre en l’air aujourd’hui, j’aurais jamais répondu. je ne t’aurais jamais dit de venir pour la simple et bonne raison que j’aurais pas voulu que tu m’empêches de faire quoi que ce soit. je tire une nouvelle fois sur ma cigarette, l’air un peu absent avant de la jeter dans le vide la regardant jusqu’à ce qu’elle disparaisse de mon champs de vision. « je te sers quelque chose à boire ? » que je finissais par reprendre. et ouais, j’sais même pas quoi te dire. t’es comme un étranger maintenant, pas vrai ?

C’était évident qu’elle n’allait pas bien. Merde quoi, les gens sont cons ou quoi ? Elle venait de se faire kidnapper et peut-être que ça avait été au delà de ça. Quand j’ai appris sa disparition, j’avais bien évidemment été inquiet, repensant à ce qui s’était passé quelques mois auparavant, quand on avait su retrouver du réconfort tous les deux ensemble, alors qu’on était retenus captifs dans une salle. Et ouais, Camila, je la connaissais et je me sentais forcément concerné par son état, d’où le fait que j’allais venir la voir à son hôtel, et pas les mains vides. Il lui fallait une sorte de réconfort, et c’était une énorme peluche qui avait été mon choix arrêté. Au moins, elle aura de quoi prendre quelque chose dans ses bras, si elle voulait pleurer ou avoir juste un peu de réconfort. Mais en arrivant dans sa suite, j’étais incapable de la trouver. Elle n’était pas dans la salle de bains, premier endroit que je regardais à cause de la dernière fois, et forcément, l’inquiétude s’emparait de moi. Mais elle m’avait entendu, elle qui se trouvait sur le balcon et me rassurait par le simple son de sa voix. Elle finissait sa cigarette et jetait le mégot par dessus la rambarde avant de se tourner vers moi. « Non merci je… » Je soufflais avant de m’approcher d’elle, grimpant sur le balcon pour venir la prendre dans mes bras, enfouissant mon visage dans son cou. « J’ai eu tellement peur… » confiais-je alors, me lâchant de tous les sentiments qui s’étaient emparés de moi durant cette semaine où elle vivait certainement un calvaire.

j’pensais pas qu’on pourrait en arriver là toi et moi. depuis le jour où mon chemin avait croisé le tien, j’avais sincèrement pensé que ce serait pour l’éternité. mais l’éternité semblait avoir des limites et peut être qu’on avait atteint celle de notre relation. que ça soit dans la partie amicale ou dans celle où l’on était fou amoureux l’un de l’autre. et je sais que tu m’aimes toujours. je sais que tu resteras probablement amoureux de moi pour une vie encore mais c’est pas suffisant. c’est pas suffisant de ton côté à toi. quelque part, je te regarde sans vraiment te voir. j’ai l’impression d’être déconnectée de la réalité en fait. y a plus rien autour de moi qu’un vide sans fin et cette peur oppressante dans mon estomac. mais tes bras viennent m’entourer, ton visage se planquer dans mon cou et je me laisse aller. y a mes doigts qui caressent doucement la naissance de tes cheveux, mes poumons qui s’imprègnent de ton odeur comme si c’était la plus belle chose au monde. j’voudrais tellement arrêter de t’aimer putain. ça me rend dingue, j’en peux plus. et j’ai le coeur qui bat tellement vite là que ça en devient douloureux. j’ai besoin de taire tout ça. d’étouffer ce que je ressent, d’étouffer mes peurs et mes démons. alors je recule légèrement pour pouvoir te regarder. y a mes doigts qui passent sous ton menton. j’ai la respiration qui s’accélèrent et cette envie qui devient un besoin. comme si le retenir allait me faire suffoquer. alors c’est mes lèvres que je plaque contre les tiennes sachant par avance que tu allais me repousser. que la chute serait brutal parce que tu me prouverais une nouvelle fois que je n’avais plus ma place. mais l’espace d’une seconde, ça fait juste du bien.

Oui j’ai eu peur, quand j’ai appris qu’elle avait disparu. J’ai eu peur parce que malgré tout ce que je pouvais dire, elle était toujours aussi importante pour moi et elle en vivait toujours des vertes et des pas mûres. Que ce soit des accidents, des enlèvements. Elle avait une poisse pas possible. Mais à côté de ça, je la détestais toujours autant d’aimer un autre, celui qui nous avait tué dans l’œuf. Celui qui avait détruit tout ce qu’on était en train de construire. Et peut-être que c’était pour ça que j’avais peur de me relancer une nouvelle fois avec elle dans le fond. On avait tous les deux bien changés en quelques mois, au point d’avoir peur de souffrir de nouveau. J’en aimais une autre, elle en aimait un autre, et les sentiments qu’on se portait l’un à l’autre n’étaient pas suffisants. Je savais pertinemment que Louison n’appréciait pas que je vois Camila, encore plus maintenant que je lui avais dit que mon ex voulait me récupérer. Mais je m’en fichais. Camila était importante et je ne pouvais pas la laisser vivre cette épreuve, toute seule. Personne ne la connaissait comme je la connaissais et il m’était impossible de la laisser comme ça. Inquiet comme jamais, je sentais une vague de soulagement quand elle se mit à me parler, elle qui était sur le balcon. Je venais la rejoindre, me fichant bien de boire, tout ce que je souhaitais c’était de la sentir dans mes bras, de l’aider à aller mieux par cette simple étreinte. Seulement, je sentais qu’elle se reculait et mon visage se trouvait face au sien. Son toucher, son contact, il m’électrisait, j’étais hypnotisé par sa simple présence face à moi et j’étais incapable de bouger. C’était bien pour ça que je ne réagissais pas quand ses lèvres touchaient les miennes. Je ne réagissais pas mais mon cœur s’emballait comme jamais. Je devais la repousser, je n’avais pas le droit de répondre à ce baiser. Je n’y répondais pas mais je la laissais faire, incapable de la repousser. A défaut de le faire, je finissais par rompre le contact, collant mon front au sien, les yeux fermés. Un peu plus tiraillé par l’amour que je lui porte et celui que je porte à Louison.

je devrais pas hein ? ouais, je savais que je ne devrais pas. parce que si quelqu’un te faisais ça alors que tu étais avec moi, concrètement, j’aurais tout retourné sur mon passage. mais.. quelque part, j’arrive pas à contrôler. je t’aime tu sais ? je t’aime tellement même. et j’y arrive pas. j’essaye de toutes mes forces de te laisser dans mon passé mais t’es toujours là. j’peux en aimer un autre mais je ne l’aimerais jamais plus que toi. parce que toi, t’as marqué ma vie au fer rouge. parce que même si tu ne veux plus de moi, tu seras à jamais l’homme de ma vie. c’était toi que j’imaginais tu sais ? quand je serais vieille, à mes côtés, à s’occuper de nos enfants et.. j’veux pas laisser ce rôle là à une autre, j’peux pas. parce que je sais que je le supporterais pas. alors dis moi ce que je suis censée faire quand tu ne veux plus de moi mais que tu ne cesses de revenir à chaque fois ? parce que regarde toi, t’es là. encore une fois t’es là. à me prendre dans tes bras, à vouloir t’occuper de moi. j’peux juste pas passer à côté de ça. je t’aime, t’entends ? et je t’embrasse, je capture tes lèvres même si tu restes statique, même si tu me le rends pas. j’crois que de toute manière, si t’avais cherché à me le rendre j’aurais plus rien contrôlé. et à la seconde où tu décollais tes lèvres des miennes, je me sentais vide une nouvelle fois. ton front contre le mien, ton souffle qui se répand sur mon visage. si proche et pourtant si loin à la fois. je souffle doucement, ma main continuant à caresser tes cheveux doucement. j’ai envie de recommencer. j’ai envie de t’embrasser encore et encore jusqu’à ce que tu me le rendes mais j’peux pas affronter indéfiniment ton manque de réaction. « je t’aime. je t’aime tellement »

Il fallait remettre les choses dans leur contexte. Camila faisait partie de ma vie depuis des années, je l’aimais d’un amour si puissant que même Louison n’arrivait pas à la détrôner. Et peut-être qu’il fallait que je prenne une décision, que je cesse de me voiler la face. Même si la Mather me rendait heureux, Camila restait dans ma tête, elle restait présente, elle qui m’avait marqué au fer rouge. Et je n’avais pas fauté dans notre relation, c’était sa famille qui avait tout fait pour nous séparer. Par contre, par ma présence ici, je fautais dans ma relation avec Louison. J’étais pas clair, j’allais voir Camila dans son dos, sachant pertinemment que ça lui ferait du mal si elle le savait. Mais c’était pas bon, j’allais devoir être honnête auprès d’elle. Surtout avec ce baiser qui venait d’avoir lieu. Mon front collé contre celui de Camila, nos lèvres à présent séparées, je cherchais récupérer un rythme cardiaque normal, et non en plein élan accéléré. Je l’aimais Camila, je l’aimais et ça me tuait d’être loin d’elle. Mais j’aimais aussi Louison et c’était ce qui rendait la situation si… compliquée. « Moi aussi… » soufflais-je doucement, sans forcément dire les mots, mais lui rendant tout de même la notion. Je l’aimais Camila, je l’aimais et c’était dur de la repousser à chaque fois. Je comprenais la douleur qu’elle ressentait à l’époque où elle ne cessait de me repousser. Je finissais par enfouir mon visage dans son cou, humectant son odeur qui m’avait manqué, mine de rien. « J’ai eu peur… tellement peur » 

j’ai bien entendu ? t’as dit « moi aussi » ? parce que j’ai le coeur qui palpite. qui bat extrêmement vite. ça fait autant de bien que ça fait mal. parce que ça ne change rien, pas vrai ? tu m’aimes, je t’aime mais t’es loin. t’as beau être près de moi, dans mes bras, t’es terriblement loin à la fois. c’est paradoxal mais c’est probablement parce que ton coeur appartient à une autre désormais et que j’commence à croire que je ne peux pas lutter contre ça. j’ai lutté de toutes mes forces contre willa, contre lily et j’ai gagné à chaque fois mais là.. louison ? tu me repousses à chaque coup, à chaque essaie. alors sûrement qu’elle t’as plus marquée que les autres, que cette fois, tu l’aimes sincèrement et que je ne peux juste rien faire contre elle. puis je sais que c’est moche de ma part de persister par moment. qu’elle mérite pas ça parce qu’elle n’a rien demandé mais tu sais, j’arrives pas à m’en empêcher. j’ai juste envie de t’avoir avec moi même quand je ne peux pas et c’est difficile. c’est tellement difficile à gérer. « tout vas bien, je suis là » que je soufflais caressant doucement tes cheveux. et ça aussi c’était paradoxal parce qu’en soit, ça n’allait pas du tout. j’étais peut être là mais rien n’allait. ça n’allait pas avant, c’était encore pire après. mais j’crois qu’il fallait que t’arrêtes de te faire du souci pour moi alors je mentais un peu. j’dirais comme aux autres. que j’avais pas souffert, que j’avais été bien traitée. que c’était que pour de l’argent mais que personne ne m’avait touché. j’te dirais tout ce que t’as envie d’entendre même si c’est terriblement faux juste pour que tu partes d’ici avec la conviction que je m’en sortirais.

Oui, moi aussi je l’aimais. Et c’était difficile de l’admettre alors que j’étais amoureux d’une autre. Mais c’était la vérité. Je l’aimais. Je l’aimais tellement que j’en avais mal des fois. Je répondais pas forcément avec ces mots, pour ne pas me sentir coupable mais si, je le suis quand même un peu. Camila ou Louison ne méritaient pas un homme comme moi, incapable de les rendre heureuses. Certes, il y avait des bons moments mais les pires pouvaient rapidement les effacer malheureusement et j’avais peur de ne pas être suffisant. Ni pour l’une, ni pour l’autre. Et si une fois que Camila m’avait de nouveau, elle se rendait compte qu’elle aimait Abelard plus qu’elle ne m’a jamais aimé ? C’était dur de se dire ça quand même, et ça me briserait en bien des morceaux. Notre histoire était atypique mais elle était réelle. La leur avait été forcée pour une histoire de contrat et d’image. Je me sentais alors d’un coup comme le vilain petit canard. Quoiqu’il en soit, je venais me réfugier dans ses bras, mon visage dans son cou, remettant alors mes fonctions olfactives à jour concernant son odeur que j’aimais tant. Cependant, à ses mots, je sentais que c’était un mensonge. C’était Camila, elle minimisait tellement les choses que dans le fond, elle voulait juste rassurer ses proches, quitte à se détruire par la suite. « Non… tout va pas bien. Tu as été séquestrée… Pour la deuxième fois en quelques mois. Ça ne va pas bien.. » disais-je en me reculant pour plonger mon regard dans le sien. « Tu vois quelqu’un…? Pour parler de tout ça, de ces expériences traumatisantes ? » 

même si au fond je sais que je ne m’en sortirais pas. même si je sais que j’ai coulé bien trop en profondeur. même si j’ai pas envie qu’on me sorte de là. je te raconterais tout et n’importe quoi juste pour que tu sois un minimum soulagée. et j’suis douée dans mes mensonges, j’arrive à repousser tout le monde autour de moi sans avoir besoin de faire énormément d’effort. alors t’en fais pas, je ferais la même chose avec toi. et t’auras plus besoin de t’inquiéter pour moi, on aura plus besoin de sombrer dans cette ambiance nocive. « si, ça va. » essaie de t’accrocher à ces mots, d’y croire au moins un peu. laisse de côté la séquestration et les séquelles que ça peut laisser chez moi. vraiment. laisse juste tomber. de toute manière, j’ai trop été malmenée pour que tu puisses faire quoi que ce soit pour moi. je suis comme une poupée de chiffon que l’on a souillée. alors ouais, abandonne juste. « ouais » je souffle re rentrant dans la suite comme si je cherchais soudainement à fuir le contact. puis on m’avait pas laissé le choix que de voir quelqu’un. comme toi, on avait jugé que deux fois c’était trop. qu’en mettant sur le tas les douleurs physiques que je pouvais m’infliger, j’avais besoin d’aide. personne n’avait l’air de vouloir entendre que je voulais juste qu’on me laisse tranquille. « je fais face, j’ai toujours fais face » et même si en réalité je ne le fais pas, je veux que tu y crois. t’es le premier à dire que je suis la personne la plus forte que tu connaisses. alors continue à t’accrocher à cette image et peut être que ça finira par te convaincre toi même.