Quand Alejandro avait entendu parler d'une espèce de petite expédition maritime dans les îles Abacos, il avait tout de suite demander quand et comment, très enthousiaste à cette idée. Déjà qu'Alejandro adore la mer et les endroits exotiques, si en plus, il pouvait être libre d'explorer selon son désir, c'était le meilleur des mondes. Vêtu d'un de ses shorts de bain qu'il a emmené pour ce voyage aux Bahamas, il arriva à l'heure espagnole, c'est à dire en retard à la plage de rendez-vous.  Du coup, il ne restait que des kayaks à deux places. D'un rapide coup d’œil, le beau brun repéra une jeune femme seule, probablement un peu dans la même situation que lui.

-Hola, excuses-moi, il ne reste que des kayaks à deux places. Si tu veux, on explore les îles ensemble? Je te rassure, je suis bon pour ramer.

Il ne sera pas un fardeau, qu'elle se rassure et sans trop se vanter, Alejandro, en forme, est quand même assez doué, bien que cela fasse un bout de temps qu'il n'ait pas fait de kayak de mer.

J’avais passé ma soirée de la veille seule dans mon hôtel particulier. Fachée avec mon meilleur ami Zeus qui avait cru bon de me rappeler que j’étais orpheline, sans faire exprès certainement, mais c’était comme recevoir un couteau dans le coeur. Franklin c’était encore autre chose … Finalement, j’avais besoin de faire de ce Spring Break un réel Break mental. Loin de toutes les personnes susceptibles de faire mal. Dès la matinée, je me préparais à me rendre à l’expédition, seule. J’enfilais un maillot de bain assez échancré Calvin Klein, après tout, les Spring Break étaient faits pour ça, non ? Je laissais la Harper bien sous tout rapports à Cambridge pour retrouver une bien plus badass. Je nouais un paréo autour de la taille et j’étais partie. Malheureusement, j’arrivais trop tard. Tous les kayaks en solo étaient pris. Je fulminais. Je n’avais pas envie de me retrouver à deux sur un canoe ! Tant pis. Alors que je m’appretais à faire demi-tour, une voix masculine m’interpella. -Hola, excuses-moi, il ne reste que des kayaks à deux places. Si tu veux, on explore les îles ensemble? Je te rassure, je suis bon pour ramer. Je me retournais interloquée. Restant tout de même convenable en société, je me priais de faire bonne figure devant ce bel inconnu certes, mais tout de même inconnu. Je tendis alors la main pour qu’il la serre. « Bonjour, Harper Kennedy, enchantée. » Dis-je avec un demi sourire. Je pris mon temps pour réfléchir. Je n’avais pas envie de me retrouver au fond de l’eau après avoir été agressée à mort par un psychopathe. Puis finalement, me disais que la vie était de toute façon bien courte. «  Très bien ! J’accepte ! » Deux minutes plus tard, nous étions déjà installés sur nos kayaks. Je gardais tout de même cette petite angoisse. En temps normal, il est évident que je l’aurais ignoré, mais là … Je ne sais pas, il avait l’air charmant et pas totalement débile. Certainement pas un Mather ou un Winthrop en tout cas ! Enfin j’espère … «  Vous venez de quelle confrérie ? Pour ma part, je suis bizut chez les Eliots. » Mon éducation voulais que je vouvoie chaque inconnu, et je trouvais ça charmant aussi. Nous commencions alors à naviguer doucement, portés par les vagues avec ce magnifique paysage.

C'est d'une façon décontractée et toute américaine qu'Alejandro avait abordé Harper et celle-ci le ramena gentiment à l'ordre. Il n'y a pas si longtemps, il était un eliot, mais aujourd'hui, il était Dunster et demain, il aura fini ces études. Enfin, demain, ce sera à la fin de cette session. Ceci était donc son dernier Spring Break en tant qu'étudiant. Esquissant un petit sourire, Alejandro eut un petit hochement de tête et serra la main de la demoiselle.

-Alejandro Ortega, de même. Pardon pour la familiarité, ce sont les vacances, j'essaie d'être dans l'humeur.

S'excusa-t-il avec un petit sourire. Kennedy? Affilié à LA famille Kennedy? Ce sont des figures de légende à Harvard, le centre Kennedy des relations internationales est même sur le campus. Intrigué, il laissait ce genre de questions de côté, se doutant que la belle Harper devait souvent se faire interroger de la sorte.

-Super. On n'a qu'à ce choisir un kayak alors, mais avant...

Il fait la bise à l'Américaine. On peut le sortir de l'Espagne, mais on ne sortira pas l'Espagne de lui. Puis, c'est toujours une bonne raison pour se rapprocher d'une nouvelle rencontre.

-Maintenant, je suis enchanté.

Ajoutait le beau brun avec un petit sourire charmeur avant de se diriger vers les kayaks. Il n'y a pas photo, ils sont tous semblables, mais le jeune homme opte pour le rouge, si cela convient à Harper bien sûr. Alejandro, l'air de s'y connaître, suggérait que la belle brune monte en avant en premier, il poussera le kayak, puis montera à l'arrière et espérait bien ne pas se planter se faisant, ajouta-t-il en rigolant. Pour Harper c'était plutôt facile, l'Espagnol tenant l'embarcation pour elle. Heureusement, son plan fonctionna et c'est ainsi que pagaie dans les mains, ils pouvaient pagayer et se diriger vers les fameuses îles, tout en faisant connaissance.

-Eliot? J'étais aussi chez les Eliots il y a quelques années, même été candidat à la présidence. Tate Murray a été mon bizut, croies le ou non.

Rien de tout cela ne le rajeunissait, mais en même temps, c'était bon qu'elle sache quoi. Le beau brun donnait de bons coups de pagaie, le kayak avançait bien, Harper avait du rythme aussi.

-Je suis chez les Dunsters maintenant. C'est pas mal, moins prestigieux que la Eliot, c'est certain... Au fait, on peut se tutoyer je pense, puisque nous sommes maintenant dans le même bateau.

C’était finalement à un jeune homme éduqué que je m’adressais. Ayant fréquenté les beaux milieux depuis ma plus tendre enfance, c’était quelque chose que je remarquais très vite. Sans trop savoir pourquoi, je me laissais emporter par sa bonne humeur. Moi Harper, froide, glaciale, sombre. Si mes amis me voyaient, ils ne me reconnaitraient certainement pas. Et tant mieux, j’avais besoin de changement. Une virée en kayak avec un jeune étudiant ne pouvait certainement pas me faire de mal, pensais-je. Alejandro Ortega, de même. Pardon pour la familiarité, ce sont les vacances, j'essaie d'être dans l'humeur. Ortega … Je connaissais bien ce nom. Qui ne le connaissait pas, ce nom pesait plusieurs milliards de dollars, et s’il était étudiant à Harvard, je déduisais qu’il était forcément héritier. Nous étions nombreux à l’être. Je lui serrais la main vivement. « Ce n’est rien, je vous en prie. C’est certainement moi qui devrait me mettre dans l’ambiance à vrai dire. » J’espérais seulement qu’il ne s’adressait pas à la mauvaise personne, je n’avais pas pour habitude de me montrer familière, et il semblait si … Plein de vie. Tandis que moi … Bref. J’essayais. Pour une fois. Maintenant, je suis enchanté. continua t-il avant de me faire la bise. J’esquissais un sourire léger aristocratique tout en me laissant faire avant de le suivre vers un kayak de couleur rouge. Il avait l’air sportif et semblait avoir l’habitude de se retrouver en plein air. Je me laissais donc guider, et lui tendis ma main afin qu’il m’aide à monter à l’avant. Je me sentais également nerveuse de me retrouver seule dans un kayak avec lui. Mais je ne le montrais pas. J’avais une réputation à tenir, et je n’avais certainement pas envie que le moindre signe de faiblesse se laisse paraitre devant autant d’étudiants qui me craignaient. Alejandro monta finalement et pris les choses en mains afin de nous faire avancer. Je l’aidais alors en ramant à mon tour. -Eliot? J'étais aussi chez les Eliots il y a quelques années, même été candidat à la présidence. Tate Murray a été mon bizut, croies le ou non. Lorsque j’entendis cette réponse, je fus subjuguée, et je ne pu empêcher un sourire de se dessiner sur mes lèvres. Ca commençait bien ! Je savais au moins que je naviguais avec quelqu’un qui partageait mes valeurs. -Je suis chez les Dunsters maintenant. C'est pas mal, moins prestigieux que la Eliot, c'est certain... Au fait, on peut se tutoyer je pense, puisque nous sommes maintenant dans le même bateau. Je répondis aussitôt. « Oh vraiment ? J’ai moi-même failli entrer chez les Dunsters. Pour moi elle est tout aussi prestigieuse, quand on sait à quel point l’intellect et la culture manquent de plus en plus cruellement ! » Il m’avait également suggérée de le tutoyer. « Eh bien ma foi, je suis partante ! Tutoyons-nous ! J’espère que vous ne serez pas déçu d’avoir fait ma connaissance une fois arrivés à port, il parait que les Eliots ont sacrée réputation ! » Riais-je consciente que je venais à nouveau de le vouvoyer par habitude. « Très bien Alejandro. Il n’y a pas une petite amie jalouse qui risque de vouloir me jeter à la mer en me voyant avec toi ? » disais-je en riant à moitié. J’avais eu mon lot d’expérience depuis mon arrivée au Bahamas, et je n’avais qu’une envie, retrouver un minimum de sérénité.

Harper était polie, son regard irradiait une intelligence et un sens de l'observation qui n'échappait pas à Alejandro. Bien élevée, elle le vouvoyait et sa façon de se tenir droite, de regarder son interlocuteur dans les yeux, comme lui d'ailleurs, témoignait qu'elle avait été bien élevée. Des signes qu'on reconnait vite à force de côtoyer les gens de la haute société. Avec un petit air amusé, Alejandro rétorqua:

-C'est si difficile?

Le beau brun pouvait comprendre. Comme elle, il étudie à fond pour être parmi les meilleurs, rendre sa famille fière et réussir ses études. Ces vacances sont une occasion de se lâcher, de se sentir plus libre, qu'il ne voulait pas manquer. Décrocher n'est pas toujours si facile pourtant. C'est comme un rythme auquel notre corps s'habitue.

Lancé le kayak à la mer pour ainsi dire n'était pas si facile, mais en travaillant en équipe et en usant de sa tête et un peu de muscles, ils y arrivent et les voici lancer comme d'autres à la mer, prêts à explorer les îles qui les entourent. Le kayak de mer perçait les vagues et avançait à un bon rythme. Alejandro avait jeté un petit coup d’œil à la technique de pagaie de sa complice pour la journée et ça semblait aller de ce côté. Il faut bien enfoncer la pagaie dans l'eau et la vitesse est moins importante que le leste du mouvement ici. La remarque de Harper sur les Dunsters le fit sourire, grandement même.

-Bien d'accord avec vous senorita Kennedy.

Lâchait-il avec un air aristocratique... espagnol bien sûr! L'idée de tutoyer se présenta quand même. Après tout, ils vont probablement passer la journée ensemble.

-Je m'intéresse moins aux Eliots qu'à toi.

Dit Alejandro, toujours aussi charmeur de nature. La belle brune se mit enfin à le tutoyer et il en eut un éclatant sourire qu'elle ne pouvait pas voir malheureusement.

-Non, aucune, je te rassure. Et toi? Belle, intelligente, un nom important, est-ce que je dois faire attention à mes arrières?

Sûrement! Alejandro apercevait maintenant trois îles à l'horizon. La majorité des personnes se dirigeaient vers la plus proche, d'autres vers la deuxième plus proche, dont d'ici, on pouvait voir qu'elle avait une belle plage avec palmiers et tout. Enfin, la troisième, la plus éloignée, ne semblait intéressée personne. Personne saut...

-Qu'est-ce que tu dirais qu'on se dirige vers l'île du fond, un peu plus à l'écart? Sinon, si c'est trop loin à ton goût, on peut toujours suivre le groupe qui se dirige vers celle avec la plage?

Je sentais son regard posé sur moi. J’essayais de ne pas montrer à quel point le sien particulièrement était troublant. Je tentais d’en faire de même, après tout, la vue n’était certainement pas à déplorer. Il avait toutes les qualités d’un homme respectable. Du moins, en apparence, je ne le connaissais que depuis une vingtaine de minutes. -C'est si difficile? Je soupirais intérieurement. Il ne se doutait pas une seconde que la jeune et jolie fille qu’il avait devant lui était sujette aux troubles bipolaires depuis son adolescence du à un gros choc émotionnel survenu lors de ses cinq ans. Je n’aimais pas tellement penser à cette période, malheureusement, ses conséquences m’épuisaient chaque jour qui passait, et je m’usais à coups de médication extrêmement violente pour paraitre normale. C’est pourquoi je finis par sourire devant sa question qui ne pouvait que rester sans réponse. Je souriais simplement, essayant de chasser la mélancolie. -Bien d'accord avec vous senorita Kennedy. Je souris à nouveau avant de répondre avec élégance. « Siempre tengo razón señor Ortega. » Je tentais cette phrase avec un accent très américain. Je parlais espagnol en plus de cinq autres langues. Mon avenir politique voulait ça. Etre la future présidente des Etats-Unis valait bien des heures et des heures de pratique. Mais lui, avait l’air si à l’aise avec les inconnus, était-ce typique des espagnols d’être aussi bon en communication ? -Je m'intéresse moins aux Eliots qu'à toi. Continua t-il. Ou peut-être des charmeurs ? Je ne pu m’empêcher de lâcher un grand rire. « Aurais-je à faire là à un séducteur ? » demandais-je en penchant la tête, un petit sourire en coin, alors qu’il m’apprenait à manier mes pagaies. -Non, aucune, je te rassure. Et toi? Belle, intelligente, un nom important, est-ce que je dois faire attention à mes arrières? J’apprenais finalement que je n’avais rien à craindre d’une potentielle petite amie, il n’en avait pas. Bien qu’une partie de moi trouvait cette information fort interessante, une autre, plus sombre m’empêchait de la prendre trop en compte. Je n’avais pas le coeur fait pour ça. Je n’avais d’ailleurs jamais eu de petit ami. Encore moins d’amoureux. Je n’arrivais pas à ressentir mes émotions. Enfin c’est ce que je croyais. Il s’avérait surtout que la moindre émotion sans prise de mes médicaments pourrait me conduire à la folie. A la véritable folie. Je pourrais être la femme la plus heureuse un temps, puis sombrer dans la noirceur la plus ténébreuse d’un instant à l’autre. Autant l’éviter. Je répondais alors naturellement. « Oh non, tu n’as pas à t’inquiéter pour ça, je suis une grande solitaire ! » finissais-je avec un léger sourire cachant mes pensées intimes. Le beau jeune homme reprit. -Qu'est-ce que tu dirais qu'on se dirige vers l'île du fond, un peu plus à l'écart? Sinon, si c'est trop loin à ton goût, on peut toujours suivre le groupe qui se dirige vers celle avec la plage? Effectivement, tout le monde se dirigeait vers la première ile, et la dernière semblait plus sauvage, presque vierge de tout homme. Je l’observais alors avec envie, envie d’aventure, ce qui était totalement inattendu de ma part ! J’acquiesça alors à Alejandro « Avec plaisir, monsieur l’aventurier ! Allons jouer aux pirates ! » disais-je sans plus trop me prendre au sérieux tout en continuant de ramer.

Lorsqu'Harper se mit à parler espagnol, le cœur d'Alejandro fit un bon. Entendre sa langue lui faisait toujours très plaisir, il appréciait l'effort de l'Américaine et ce petit accent américain était juste... craquant! Ce qu'il ignorait encore, c'est qu'Harper, comme lui, parle plusieurs langues, tous deux éduqués à être des citoyens du monde, des leaders même.

-Oh, tu parles espagnol?

Demandait-il aussi dans sa langue maternelle. Une fois en mer, à pagayer, la conversation reprend de plus belle et la belle brune a vite affaire au charme naturel et un brin désarmant de l'Espagnol, qui ne se cachait pas du reste.

-Je préfère le terme charmeur, c'est plus civilisé. Du reste, c'est vrai, je connais déjà assez bien la Eliot House. Toi en revanche...


À ses yeux, elle était donc plus intéressante. Alejandro n'était pas étonné que la jeune femme demande s'il était célibataire et répondit avant de retourner la question. Il n'y avait pas de soucis à se faire non plus. Harper se décrivit même comme solitaire.

-Oh, je vois...

C'était quand même étonnant, mais peut-être était-ce un choix aussi de la part d'Harper. Le duo fit face ensuite à un choix. Aller à la première île, la plus facile d'accès, mais celle qui sera le plus bondée, aller à la deuxième, avec la jolie plage, mais encore là, il y aura du monde, où bien jouer les aventuriers, forcer à se rendre à la troisième, la plus éloignée de toute? La Kennedy fit le choix qu'espérait Alejandro.

-Ou les conquistadors... C'est parti, direction la troisième île.

Ils allaient devoir pagayer fort pour y arriver. Ils n'ont pas toute la journée non plus. Lançant quelques conseils, encourageant Harper, Alejandro mettait du sien aussi et redoublait d'effort.

-En tout cas, j'espère que cette île en vaut la peine.

Avouait Alejandro, entre deux coups de pagaie.

Le jeune homme eu l’air impressionné que je parle sa langue. Ca me faisait sourire. J’étais persuadée qu’au vu de son statut, ce devait être pareil. « Effectivement, ma condition familiale et politique m’oblige à acquérir certaines facultés, tout comme toi, j’imagine ? » demandais-je poliment. Nous discutions tous les deux très aisément. Je me rendais alors compte combien parfois avoir une conversation avec un inconnu pouvait s’avérer bien plus facile qu’avec un proche. Il était intéressant, drôle, cultivé, et plutôt beau garçon. D’ailleurs, Alejandro ne tarda pas à me reprendre -Je préfère le terme charmeur, c'est plus civilisé. Du reste, c'est vrai, je connais déjà assez bien la Eliot House. Toi en revanche... J’acquiesçais avec le sourire tout en amenant la main à mon coeur, faisant signe de me pardonner « Oh pardon Alejandro, charmeur ce sera dans ce cas. » riais-je avant de continuer « Et non tu ne me connais pas, et crois-moi tu n'en as pas envie ... » J’espérais seulement qu’il ne me prenne pas pour l’une de ces filles faciles qu’il pouvait avoir quand il voulait. Cela avait l’air d’être un jeu pour lui, mais je n’étais pas de ces filles là. Non pas que la tentation manquait, mais je ne supportais pas le fait d’être rabaissée au rang de vulgaire catin de bas étages. Un peu comme cette soit-disant Eliot d’Athénaëlle qui arrivait à se faire engrosser avec ses bêtises. Aucun avenir, quelle tristesse. Alors que nous approchions de la fameuse ile, ma nervosité reprenait de plus belle. Me retrouver seule avec lui ? Je savais qu’il était un véritable gentleman, tout irait pour le mieux me disais-je. Bientôt le kayak se heurtait lentement au sable fin et ralentissait notre course. Je me levais alors et Alejandro m’aidait en prenant ma main pour descendre telle une lady. -En tout cas, j'espère que cette île en vaut la peine. répliqua Alejandro. Je l’observa quelques secondes avant de retourner mon regard sur ce magnifique paysage. C’était grandiose. « Comment ne peut-elle pas. J’ai envie de sauter dans ce paysage et d’y danser tant il est merveilleux d’être ici. » Je me sentais bien. Drôlement bien. Bizarrement bien. Je regarda à nouveau Alejandro droit dans les yeux avant de continuer avec un léger sourire. « Que dirais-tu d’une petite balade au bord de la plage ? Sauf si tu as mieux à proposer ? »

Harper revint à l'anglais, cela en était presque triste, mais l'Espagnol fit de même. La question de la jeune femme était... intrigante.

-Être le petit fils de l'homme le plus riche d'Europe apporte son lot de responsabilités, c'est vrai.

Hors contexte, cette phrase pouvait paraître prétentieuse, mais autant cracher le morceau tout de suite et dire qu'il est, enfin, être le petit fils d'Amancio Ortega n'est pas qu'il est, ou si, juste une partie seulement. Alejandro aime à penser qu'il est une personne entière et pas seulement un fils de riche.

Comme Harper, il rit quand elle l'appelle Alejandro le charmeur. C'est ça! La seconde phrase le prit de cours par contre. Cela témoignait d'une sorte de... comment dire... mal être? Ou c'était juste une phrase comme ça, mais le jeune homme a tendance à croire qu'il n'y a pas de phrase comme ça.

-Donnes-toi une chance, je t'en donne une.

Il ne doit pas y avoir tant de risque que cela de toute façon. Leurs efforts pour atteindre la troisième île porte fruits. Alejandro avait les bras qui l'élançait un peu, était essoufflé, mais ils avaient réussi et pas un chat à l'horizon. Il quitte le kayak, aide Harper à descendre, toute contente d'être arrivée, des projets plein la tête on dirait.

-On le fera, sauter, danser. L'île est à nous ahah.

Il aimait l'enthousiasme, l'énergie soudain de l'Eliot. Pagayer jusqu'à cette île ne semblait pas l'avoir fatiguée le moins du monde. Il prit la main de la belle brune après, juste un instant, pour l'entraîner à marcher avec lui.

-Non, non, allons-y, faisons le tour de cette île.

Ils marchaient ainsi, à explorer les abords de cette île, les pieds qui parfois, se faisaient atteindre par la mer qui grimpait jusqu'à eux. La mer, le paysage, était magnifique à souhait et Alejandro doit avouer que ses regards furtifs vers Harper trouvait que la beauté de cette femme éclipsait presque ce paysage. Ah oui, il aime les femmes le Alejandro, encore plus les jolies filles. Silencieux, c'était un peu comme s'il n'osait pas que ces mots gâchent ce petit moment de paix et de quiétude. Néanmoins, le grand aventurier qu'il est se trouva vite un nouvel intérêt. Le beau brun aperçut un cocotier et s'esclaffa aussitôt, accourant vers l'arbre:

-Hey, c'est un cocotier! Et... oh, il y a des noix de cocos. Je vais essayer de grimper et d'aller nous en chercher.

Tout un défi, mais il était confiant de pouvoir y arriver. Se frottant les mains, Alejandro s'agrippe au tronc de l'arbre comme il peut et commence à grimper jusqu'à atteindre la cime. En tendant le bras, il pouvait attraper une première noix.

-Attention en bas!

Il en larguait une, puis une autre. Puis, Alejandro redescendait comme il pouvait et glissait un brin à la fin, s'éraflant le bras, mais il était à nouveau sur le sable, sain et sauf. Fallait maintenant trouver une roche pour essayer de casser ces noix!

Apparemment il était sur la plage ce fameux soir. Trop occupée avec mon petit monde, je ne l’avais malheureusement pas remarqué. J’acquiecais lentement le sourire aux lèvres avant qu’il ne continue. -D'autres au contraire seraient bien contents d'être à notre place. Je suis plutôt de cette catégorie. Puis, ce n'est pas comme si on n'avait pas pagayé pendant presque une heure pour arriver jusqu'ici. Je souriais de plus belle. Effectivement, certains. Moi, malgré le fait que je me retrouve avec l’homme le plus séduisant d’Harvard, je en pouvais m’empêcher d’être nerveuse. Mais chaque mot qu’il prononçait éloignait ce sentiment. C’était sans compter sur cette noix de coco de malheur qui s’abattit sur ma tête ! Les yeux fermés, j’entendais la voix grave et sensuel d’Alejandro qui me fit ouvrir les yeux. Le pauvre avait l’air plus angoissé que moi désormais. Etait-ce contagieux ? Il m’empêchait de me relever afin de m’examiner, malheureusement le choc m’avait complètement désinhibée. « Oh bah alors Alejandro ? Tu angoisses pour rien ? » riais-je bêtement. Assomée par cette maudite noix de coco, j’étais méconnaissable de par mon comportement. Il souriait devant ma réaction des plus saugrenues et m’aidait à m’installer sous le cocotier. « J’espère qu’une deuxième ne va pas me tomber dessus avec ma poisse … » pensais-je à voix haute. Je touchais mon front du bout des doigts et senti du sang couler le long de ma tempe. Je grimaça. Je n’aimais pas particulièrement avoir des blessures, cela faisait tache sur une jeune femme de ma condition lors des diners mondains. Après tout, je représentais tout de même les Kennedy, et parfois mon pays à l’étranger. Bientôt, je me retrouvais avec mon maillot de bain taché de sang. Qu’allais-je inventer comme bêtises pour camoufler ce malencontreux événement ? Je n’arrivais plus à y penser lorsqu’Alejandro déposa un baiser sur mon front. Je tiqua, mais fini par sourire. J’aimais bien ça je crois. Avais-je été frappée si fort ? Il me fit boire un peu de lait de coco et j’observais le jeune homme monter sur le kayak, déchirer une sorte de toile avant de revenir vers moi. Alors qu’il me bandait le front, il répliqua -Ce n'était peut-être pas une si bonne idée de venir sur cette île finalement... Je leva les sourcils en sursauta légèrement tout en tenant le bandage. « Oh non, on ne va pas partir maintenant ! On a même pas fait les pirates comme on avait dit ! Avec mon bandage j’aurais pu avoir l’air encore plus crédible ! » disais-je avec une petite moue enfantine. Je lui fis alors de grands yeux de pitié, pour qu’il me laisse encore un peu profiter de sa compagnie. Je ne voulais pas retourner là-bas, j’étais bien ici, avec lui. Malgré la noix de coco sur mon crâne. « Ce n’est peut-être pas si grave ! Et si ça l’est, je mourrai heureuse au moins ! » rigolais-je.