Je me présente à toi, enfin, après toutes ces années. Cette fois, je saurai comment te retrouver et tu sauras comment me retrouver aussi. Enfin après... Harvard est tellement grand, un nom ne fait pas tout. Je décide donc d'arrêter d'avoir l'air bizarre à être complètement silencieuse et tendue devant toi, et me prépare à te dire au revoir. Non, j’ai pas de cours. Je sors tout juste d’un et, j’allais rentrer… Ah ? Ah oui... c'est vrai que la journée est terminée... Pour moi aussi d'ailleurs. Putain, t'as réussi à me faire perdre la notion du temps. Tu veux venir? What ? Tu veux que je vienne ? Un jour, faudrait peut-être songer à arrêter de s'envoyer la balle, parce que ce jeu de ping pong m'étourdit un peu. Je passe ma langue sur mes dents avant d'échanger quelques mots. Ouais, j'veux bien.

« Tu veux que je vienne ? » C’est une question à double sens? Non, ta gueule Serah. C’est pas comme si les nanas se baladaient dans les couloirs en proposant aux autres d’avoir des orgasmes. J’suis conne quand je m’y mets. J’hoche simplement la tête, décidant qu’il vaut mieux que je ferme ma gueule pour l’instant. « Ouais, j'veux bien. » J’hausse les sourcils comme si je ne m’attendais pas à ce que tu acceptes et souris finalement. « Okay. » Je passe devant, encore un peu maladroite, mais me détendant à chaque pas alors qu’on sort enfin du bâtiment principal pour se diriger vers la rivière Charles près de laquelle se trouve la Mather House. « Ça fait longtemps que t’es à Harvard? »

Tu m'invites chez toi et ça m'étonne. En fait, on ne se connait pas du tout quand on y pense bien, mais j'ai l'impression qu'on se connait depuis toujours tellement j'ai pensée à toi. J'accepte ta proposition, mais je t'avoue que je ne sais pas du tout c'que j'fais. J'me dis qu'on verra au fil du temps, au pire je me trouverai une excuse pour partir ou quelque chose comme ça... Okay. Je franchis les premiers pas et me joint à toi pour la marche, côte à côte. Ça fait longtemps que t’es à Harvard? Voilà une question qui peut couper le malaise ! Non. Quelques années seulement... Et toi ? Je baisse les yeux pour regarder où je met les pieds. Tu habites loin ?

Allez Serah, c’est bien ça. Une question tout à fait anodine qui risque de dissiper un peu le malaise. Puis, au fond, j’ai vraiment envie de connaitre la réponse. Parce que je me demande si tu as pensé à moi, si tu m’as cherché et s’il y a une raison au fait qu’on ne se retrouver que maintenant. Qui sait, peut-être que c’était ton dernier soir en Californie, ça expliquerait bien des choses… « Non. Quelques années seulement... Et toi ? » Quelques années… c’est déjà pas mal. Mais ça sous-entend aussi que t’as été en Californie quelques années après notre rencontre. « Depuis septembre.. » On traverse la rue au passage piéton et tu demandes si j’habite loin. « Non, c’est quelques rues par-là, j’vis à la Mather House… tu connais? » Ouais, parce que j’crois que tout le monde connait, mais on sait jamais. C’est grand Harvard. Je veux tout savoir de toi maintenant qu’on a commencé à parler. Genre, tu fais partie d’une maison toi Marzia? Merde, c’est drôle d’avoir un prénom pour ton visage.

Une simple question me faisait du bien. J'avais l'impression de faire des pas de bébé, d'apprendre à te connaître... Mais ça me fais tout drôle de me dire que tu as été dans mes rêves, dans mes pensées pendant 5 ans et que j'apprends à te connaître rien qu'après. C'est complètement fou. Depuis septembre.. C'est donc très récent. J'hoche la tête, te faisant comprendre que j'ai écoutée et assimilée ta réponse. Puis, je te demande si tu habites loin. Non, c’est quelques rues par-là, j’vis à la Mather House… tu connais? Encore une fois, j'hoche la tête. Ouais. Je n'y suis jamais allée par contre, comme dans n'importe quel maison. J'habite en appartement... Je te fais un petit sourire avant de rebaisser les yeux vers le sol. Je connais notre destination maintenant, alors j'ai un peu moins l'impression de te suivre puisque je connais le chemin. Ça va, t'aime bien la vie universitaire ? Apparemment les Mathers font les meilleures fêtes. Putain je ne sais vraiment pas quoi te dire... et bien que j'en ai trop envie, je n'ose pas te regarder non-plus.

« Ouais. Je n'y suis jamais allée par contre, comme dans n'importe quelle maison. J'habite en appartement... » Donc, tu n’fais partie d’aucune maison. C’est probablement un choix puisque je ne vois pas comment tu aurais pu être refusé où que ce soit. T’es parfaite Marzia. J’ai pas besoin de te connaitre pour le savoir. Rien qu’en partageant ce baiser avec toi y’a 5 ans, j’ai tout de suite su. « Ça va, t'aime bien la vie universitaire ? Apparemment les Mathers font les meilleures fêtes. » Si j’aime la vie universitaire… mh, voyons voir. « J’aime tous les à côté, surtout les fêtes de la Mather.. » Mais pas la vie d’étudiante en soit. J’vous explique, en fait, j’aime pas l’école. J’ai jamais aimé même si j’suis carrément doué. C’est pour mon père que j’suis là, rien d’plus. « J’suis pas fan de l’école… J’suis qu’en troisième de journalisme et j’ai l’impression que j’m’en débarrasserai jamais. » Je ris un peu en secouant la tête, continuant de marcher vers la MH.

Vivre dans une maison, peu pour moi. Pourtant, je pourrais être acceptée dans n'importe laquelle - ou presque. J'ai tout simplement pas envie... pas de temps à perdre. J’aime tous les à côté, surtout les fêtes de la Mather.. C'est bien c'que j'pensais. Bon, on s'est rencontré dans un party, que tu aimes faire la fête c'est un peu la seule chose que je sais réellement de toi au final. J’suis pas fan de l’école… J’suis qu’en troisième de journalisme et j’ai l’impression que j’m’en débarrasserai jamais. Ah ? Pourquoi t'étudies dans la plus grande université au monde, la plus sévère aussi. Je ne préfère pas commenter, puisque je me dis que tu dois avoir tes raisons. Je vois. J'espère pour toi que ce sera bientôt terminé alors. J'hausse les épaules et relève les yeux lorsque nous sommes enfin arrivées. Ugh, cette maison est vraiment moche. T'es sure que j'peux entrer ?

« Je vois. J'espère pour toi que ce sera bientôt terminé alors. » Tu sembles perplexe, après tout, c’est probablement normal vu ma réponse et ce choix d’université qui semble contredire un peu tout ça. J’explique donc; « C’est mon père qui a insisté pour que je vienne ici… J’étais à Berkeley pour les deux premières années. » Je pince les lèvres et poursuis. « Si ce n’était que de moi, je ne serais probablement même pas allé à l’université. Mais bon, ça a ses bons côtés. » Je laisse mon regard glisser sur toi sans grande subtilité. Après tout, on s’est déjà embrassé sans même connaitre nos noms… et puis, j’ai tellement rêvé de toi durant ces cinq dernières années, j’peux bien enregistrer un maximum de détail de ton physique juste au cas où on ne se reverrait pas, non? La vérité, c’est que j’suis mal à l’aise et que j’ai aucune idée de ce que je devrais dire ou comment agir. Alors voilà, total improv’, j’t’invite à ma chambre comme si c’était normal et voilà que tu t’inquiètes « T'es sure que j'peux entrer ? » Je pousse la porte de la maison et la tiens ouverte alors que je te réponds simplement : « Ouais, t’inquiète, tout le monde invite tout le monde ici. C’est comme un moulin, viens. » J’esquisse un sourire et m’engouffre à l’intérieur, montant vers ma chambre.

Personne ne viens étudier à Harvard s'ils n'ont pas réellement envie d'étudier, si ? Pourtant, tu réussis encore à m'impressionner en me disant le contraire. C’est mon père qui a insisté pour que je vienne ici… J’étais à Berkeley pour les deux premières années. Ouais bah ton père sonne un peu comme un asshole. Mais du coup, pour une meuf qui n'aime pas l'école... c'est encore plus impressionnant de savoir que tu as été admise ici. C'est pas facile, les admissions à Harvard. Si ce n’était que de moi, je ne serais probablement même pas allé à l’université. Mais bon, ça a ses bons côtés. Ton regard sur moi en dit long et t'inquiète pas, j'ai compris le message. J'en suis même hyper flattée d'ailleurs... et ça me donne un peu plus de courage à te suivre jusqu'à ta chambre... où il y a ta vie, tes affaires, ton lit, tu vois... En tout cas, ton père serait fier. - et c'est tout c'que j'trouve à te dire. Mais pour être honnête, je m'en fous un peu de tes études, surtout si toi tu t'en fous. Arrivée devant la Mather House, je m'assure que je puisse entrer sans me faire tacler par une bande de fous fêtard. Ouais, t’inquiète, tout le monde invite tout le monde ici. C’est comme un moulin, viens. Bon, très bien. J'y met les pieds, monte avec toi jusqu'à ta chambre. Il y a deux lits, ce qui me laisse croire que tu as une coloc de chambre. Je ne sais pas du tout quel côté de chambre t'appartiens, mais il y en a une qui est plus bordélique que l'autre. Alors... c'est ici que tu crèches ? Pas mal. C'est... petit. Je préfère mon appartement, sans offense !

« En tout cas, ton père serait fier. » Ouais.. y’a rien de moins sûr en fait parce que mon père est probablement l’homme le plus difficile à satisfaire sur terre. Mais qu’importe. J’m’en fiche de mon paternel, c’est pas comme s’il était ici pour me surveiller H24 –et heureusement. Je monte avec toi jusqu’à ma chambre et pose mes choses sur ma commode avant de me retourner pour te faire face. « Alors... c'est ici que tu crèches ? Pas mal. » J’hoche la tête et esquisse un sourire. « C’est pas le grand luxe, mais après avoir vécu dans une maison énorme et terriblement vide durant 20 ans, c’est rafraichissant d’être ici. » Voilà, si tu doutais de mon âge Marzia, tu sais maintenant que j’ai atteint la vingtaine cette année. Rien que ça. Je m’appuie contre ma commode et te détaille un peu sans savoir quoi ajouter. Eh merde, pas ce malaise again!