La semaine est terminée, je peux enfin rentrer chez moi, mais je dois faire un passage à la salle de bain d'abord. Je ramasse mes cahiers et met tout dans mon sac, avant de sortir de la salle de classe. L'examen que je venais de passer, avait été très dur, mais j'avais bien étudié la veille alors j'étais prête. Bref, je me rends à la première salle de bain que je trouve dans cette grande université et cherche une cabine de libre. Je n'étais définitivement pas seule ici, puisqu'au même moment où je suis entrée dans la cabine, une fille est ressortie de la sienne. Je termine mes besoins et m'approche des lavabos pour me laver les mains. Ton regard croise le mien dans le miroir et je blanchis, après avoir assimilé ta présence dans mon esprit. Mais... est-ce que c'est vraiment toi ? Tu te ressembles, mais t'as changé... t'es plus grande, plus... femme, plus blonde, plus belle. Désolée tu m'as fait penser à une amie. Je me suis trompée de personne. Dis-je, en continuant de me laver les mains.

Quand je mets les pieds dans la salle de bain des filles, j’ai l’habitude que ce soit flanqué de mes potes en mode; on prend la place, poussez-vous. Sauf qu’aujourd’hui, j’suis seule et c’est sans grand remous que je vais simplement pisser. Lorsque je ressors de la cabine, je ne porte pas vraiment attention aux autres nanas présentes, donc pas à toi non plus. Je me regarde dans le miroir, te vois dans la glace, mais ne réalise pas, passe mes doigts dans mes cheveux, prend le temps d’appliquer du gloss sur mes lèvres pulpeuses et sens finalement ton regard sur moi. Je te regarde bien en face et j’ai comme un coup au ventre. « Désolée tu m'as fait penser à une amie. Je me suis trompée de personne. » Sauf que je ne peux pas regarder ailleurs maintenant. Et j’essaie de garder ma contenance, mais j’y arrive pas alors que je demande, toute maladroite. « S.. Sanchez? » C’est tout ce que je sais de toi, ma cendrillon.

Je te fixais, tu m’obnubilait, tellement tu ressemblais à Cendrillon. Tout ce que tu m'avais laissée en partait ce soir là, toi, c'est mes souvenirs. Je ne savais pas ton nom, je ne savais pas où tu habitais, je ne savais même pas quelle âge tu avais ou à quelle école tu allais... Je ne savais rien. Alors j'ai l'impression de voir un fantôme dans le miroir, je m'excuse de te fixer aussi longuement avant de reprendre mes activités. Sauf que voilà... J'entends mon nom de famille, celui que je considère le plus vrai même si ce n'est pas vraiment mon nom, "Sanchez". Je relève les yeux pour te regarder et tu me laisses la bouche entrouverte, toute surprise. J'suis à court de souffle. C'est toi ? Bêtement, je ne peux m'empêcher de sourire et finalement, de rire nerveusement.

C’est pas possible. Ça ne peut pas être toi. Et pourtant, je pose la question. Je lâche ton nom comme une ligne à la pêche alors que je n’ai aucune idée de ce que je ferai lorsque ça mordra à l’autre bout. Tu me regardes à nouveau, bouche entre ouverte et yeux grands ouverts. Tu vas te foutre de ma gueule, j’en suis certaine, mais non. « C'est toi ? » J’avale de travers. C’est pas possible. Je le redis, c’est pas possible. T’es en Californie, pas au Massachussetts. But then again, moi aussi c’est là-bas que je devrais être. Alors je fais un pas vers toi, ne sachant toujours pas quoi dire. « J’imagine? » Parce que je n’sais pas ce que tu as en tête, si tu penses à ce que je pense. Si toi aussi, tu commences à trouver qu’on a un truc pour les salles de bain. Quoi qu’il en soit, j’ai le cœur qui bat fort et les mains moites bien que je vienne tout juste de les laver.

Mais c'est toi, comment est-ce que ça peut être toi ? On s'est rencontrée en Californie, j'ai cherché partout pour te retrouver... Si on m'avait dit que je te retrouverais à Harvard, à Boston, je ne l'aurais pas cru. Pourtant te voilà, plus belle qu'en rêve, plus vrai que mes souvenirs. On se laisse dans une salle de bain, on se retrouve dans une salle de bain. Tu fais un pas vers moi et je me tourne pour te faire complètement face. J’imagine ? J'hausse les épaules parce que je ne sais pas quoi dire. Mes mains sont moites et je peux jurer que mes pieds aussi. J'ai tellement rêvée de ce moment qui n'est jamais arrivé et j'ai abandonnée depuis des années... Maintenant que tu es là, je ne sais pas comment réagir. Est-ce que je dois t'embrasser ? Ou est-ce que t'es en couple maintenant ? Je ne peux même pas te demander c'que tu es devenue, parce que je ne sais même pas ce que tu étais. Est-ce que tu pensais à moi, comme je pensais à toi ? Putain... Je me racle la gorge, me rendant compte que ce silence était beaucoup trop long et probablement awkward.

Tu te tournes, me fait face, me fixe et puis…. Silence. Un long silence qui, avec les secondes, semble s’épaissir et me rend de plus en plus mal à l’aise. Qu’est-ce que j’suis supposé dire ou faire moi? Te sauter dessus? Ouais parce qu’en vrai, c’est un peu ce que j’ai envie de faire. Mais j’ai pas non plus envie que tu me repousses en mode; c’est quoi ton problème!? Tu te racles la gorge et je sursaute presque, clignant rapidement des yeux. « J’devrais y aller. » Je ramasse rapidement mes affaires sur le comptoir et te contourne pour aller vers la porte. Mais qu’est-ce que j’fais là moi merde!? Je marche vite, mais j’ai l’impression qu’à tout moment je risque de me prendre les pieds dans les lignes du plancher. Eh merde!

Putain ce silence est lourd. Mais qu'est-ce que je peux te dire ? Tu ne m'as même pas confirmé que c'était toi... En même temps, tu ne dois pas trop savoir de quoi je parle, ou si on pense à la même chose. Il faudrait peut-être que je pense à éclaircir, mais je bloque. J'ai peur que tu ne t'en rappelles plus, que ça ne soit pas toi en fait, ou je sais pas... J'ai pas envie de me faire rejeter, sans doute. J’devrais y aller. Ta voix me tire de mes pensées et j'élargis un peu mon regard. Tu me contournes après avoir pris tes affaires et te dirige vers la porte. C'est maintenant ou jamais... je ne sais même pas ton prénom, again. C'est pas vrai que je vais laisser l'occasion passer sous mes yeux sans rien faire. Je me retourne, tu n'es plus là. Fuck. Murmurai-je, avant de courir jusqu'à la porte pour l'ouvrir. T'es encore là, à deux pas de moi. C'est quoi ton nom ? Demandai-je. Mon cœur bat fort, bat vite, bat trop. Je sens que je vais exploser.

Je marche aussi vite que mes pieds me le permettent et que mes jambes veulent bien vu qu’elles tremblent incontrôlablement. Je tire sur la porte pour l’ouvrir et la laisse se refermer sans me retourner, ralentissant la cadence comme dans l’espoir de l’entendre s’ouvrir à nouveau dans mon dos. J’suis une trouillarde en fait, rien de plus. Et, heureusement pour moi, t’as les couilles de me suivre. « C'est quoi ton nom ? » Je fais volte-face et lève les yeux vers toi. Merde, t’as encore grandit ou c’est moi qu’à rapetissé? « Serah. Serah Bushnell. » Si c’est réellement toi, cette fois je ne ferai pas l’erreur de rester dans l’anonymat. Si tu veux me retrouver, tu pourras le faire… « Et toi? » Ouais, parce que même si j’ai la trouille, j’vais peut-être trouver le courage de te contacter à nouveau.

Il faut que je te rattrape. Je m'en voudrais encore pendant 5 ans et qui sait, peut-être même toute ma vie si je ne te rattrape pas maintenant. Il faut que je sache ton nom, il faut que j'apprenne à te connaître. Alors je cours, j'ouvre la porte et te retrouve pas très loin d'où je m'arrête. J'ouvre ma bouche et le reste, ça se fait tout seul. Tu te retournes en un mouvement, limite, on dirait que tu m'attendais. Je te regarde, tu me regardes, je ne sais pas qu'est-ce que c'est mais il y a quelque chose qui se passe, là. Serah. Serah Bushnell. Tu aurais pu m'envoyer chier, t'aurais pu me traiter de freak, me demander d'arrêter de te parler parce que t'as aucune idée de qui je suis... mais non, tu m'as répondue. Et juste ça en fait, ça me donne l'étrange feeling qu'en fait, c'est vraiment toi. En fait, c'est vraiment toi, tu sais comment je m'appelle... Et toi? J'avale ma salive. La seule chose qu'on peut entendre, là, c'est ma respiration pas du tout contrôlée. Je tremble de partout. Marzia Sanchez. Je ne prends même pas la peine de te dire que je m'appelle Prada, puisque tu connais déjà mon 2e nom de famille. Mh, je te laisse y aller, tu vas être en retard pour les cours.

Tu me dévisages, mais je m’en fiche parce que je fais pareil. T’as la bouche entre-ouverte, juste un peu, pas assez pour avoir l’air d’un poisson rouge, mais suffisamment pour que j’entende clairement ta respiration laborieuse. « Marzia Sanchez. » Alors c’est vraiment toi. Impossible que la coïncidence aille jusqu’à mettre une meuf avec le même nom et la même tête que toi sur ma route. Sauf si t’as une jumelle. Oh merde, j’t’en prie, n’ai pas de jumelle. « Mh, je te laisse y aller, tu vas être en retard pour les cours. » Hein? Oh. « Non, j’ai pas de cours. Je sors tout juste d’un et, j’allais rentrer… » J’avale difficilement ma salive, regarde autour comme en espérant qu’un truc nous tombe sur la tête pour qu’on n’ait pas à vivre ce moment embarrassant plus longtemps et m’entend finalement dire. « Tu veux venir? »