Peu à peu, je m'intégrais dans Harvard, me faisant quelques potes par-ci, par-là. Je commençais à reconnaître quelques têtes, en plus de celle de ma meilleure amie et des potes, dont un certain Kol qui me plaisait bien et avec qui j'avais bien l'intention d'aller plus loin que de sortir de temps en temps ensemble. J'étais chez les Quincys, mais malgré tout, je fréquentais des personnes de toutes les confréries. Tout le monde était cool à Harvard, l'ambiance était plus détendue qu'à Yale j'trouve. (Bon, t'as juste une maison qui se dit d'être de l'Elite et qui me fait rire mais sinon tout va bien.) Y avait d'ailleurs des soirées de temps en temps, à thème ou non, pour se retrouver, passer du bon temps, s'amuser.. j'avais mis que peu de temps avant de commencer à me faire inviter dans ce genre d'endroits et depuis, je ne peux pas passer une semaine sans y être allée au moins une fois. Je me prêtais avec grand plaisir à tous les jeux qui s'y faisaient, j'étais à fond. Je préférais largement ça que de rester dans ma chambre avec Nevada à jouer au Uno ou un truc de grands-parents, même si elle était loin d'être comme ça. Disons que j'voulais pas prendre d'habitude. Arrivée dans la soirée avec mon gilet tigrou, j'répera rapidement des gens que je connaissais et alla leur taper la bise. Bon, contrairement à des mathers que j'avais aperçu en Mario ou encore en pompier, j'avais fait dans le sobre aujourd'hui. J'avais hésité à me mettre en lapin.. mais finalement non. La soirée battait son plein, les gens criaient, dansaient, c'était la fête. A force de rire, de bouger, j'commença à avoir soif et me tourna pour aller vers le bar. Je ne faisais pas attention aux personnes près de moi, je me frayais un chemin à travers eux. Ce n'est seulement quand j'arriva près du bar, que je fis gaffe aux personnes autour de moi. Et c'est là.. là que j'vis sa tête, ses yeux, ses lèvres.. lui.. Putain.. Nan pas possible, j'devais avoir trop bu, seule solution. Il s'était barré loin d'ici, j'pouvais quand même pas l'avoir retrouvé ici à Harvard, le destin serait juste machiavélique là. Si t'es bien qui j'pense, tu risques de prendre cher lui dis-je froidement, tout en buvant ma boisson, ne le quittant pas du regard. Si c'était pas lui, pas cet enfoiré qui m'avait laissé alone à Chicago sans nouvelles, je n'aurai qu'à prétendre que l'alcool me fait délirer, rien de plus simple.

Je bus une gorgée de ma boisson, j'sais même pu ce que j'avais pris, pour ne pas penser, pour ne pas laisser le flot de souvenirs remonter à la surface. J'espérais au plus profond de moi-même que c'était pas lui, pour ne pas avoir à me rappeler. Jordan. Il était jamais parti de mes pensées, toujours bien là, quelque part. Il m'avait fait grandir, il avait été le premier.. et le dernier en même temps. L'amour ? Conneries. J'étais qu'un passe-temps pour lui, sinon il se serait pas barré comme ça. « - Malheureusement.. c'est bien moi. » Bien. Ca c'était fait ma foi. Il avait le courage de décliner son identité, j'pourrais pas dire le contraire. Je baissa les yeux pour essayer de me contenir et non pas par crainte. J'avais pas peur de lui. Ca devait être le contraire plutôt. Je réfléchissais à ce que j'allais pouvoir faire en me concentrant sur le sol : si j'restais calme, lui souhaiter une bonne soirée et année scolaire (loin de moi) ou si au contraire je lui crachais tout ce que j'avais à lui dire depuis longtemps. « - Ça fait cinq ans Briony.. J'pensais que tu serai passé à autre chose. » Deuxième solution. C'est lui qui l'avait cherché là, on est bien d'accord ? Je leva mon regard d'ébène vers lui, furieux. T'as pu t'acheter une nouvelle carte sim et avoir un nouveau portable ? Car j'crois que les anciens avaient des bugs. Nan mais il croyait quoi le coco ? Que j'avais un seul instant oubliait la façon dont il m'avait traité ? Grave erreur. Depuis notre histoire, j'avais bien changé. J'avais appris à être plus forte, notamment après mon viol, je me suis endurcie malgré moi. Il risquait de l'apprendre à ses dépens. Tiens.. j'ai pas tilté tout de suite.. tu te souviens de moi ? Tu te souviens de la meuf que t'as laissé comme une conne à Chicago ?

« - Tout fonctionne à merveille, merci de t'en soucier. Aujourd'hui comme autrefois, d'ailleurs. » Va juste falloir m'expliquer pourquoi, malgré les cinq années qui s'étaient passées depuis son départ de Chicago, pourquoi j'avais autant mal en l'entendant dire ça ? Pourquoi j'étais aussi sensible à ce qu'il disait ? Moi qui croyait m'être complétement endurcie, faut croire que revoir mon ex qui m'avait lâchement abandonné du jour au lendemain me rendait plus.. fragile. Je releva les yeux vers lui et le voir aussi satisfait, aussi fier de son coup, de m'avoir fait mal me blessa encore plus et m'énerva. Les deux à la fois. Ce qui donnait un cocktail plutôt explosif. Va falloir que j'essaie de me rappeler pourquoi j'suis sortie avec toi parce que tu me dégoûtes plus qu'autre chose. Mais je savais très bien les raisons de ça. Je l'avais aimé. Vraiment. Il était le seul mec qui avait pu avoir cette place dans mon coeur. Coeur qu'il avait piétiné naturellement. Est-ce qu'il m'avait ne serait-ce qu'un jour aimé ? Nan, mais j'veux dire par là vraiment. La réponse s'imposa aussi sec : nan. Je déglutis et termina d'une traite mon verre. Tant pis si il me voyait divaguer, j'en avais rien à foutre de lui faire mauvaise impression. « - Stop Briony, j'ai bien compris que tu m'en veux. Et c'est bien ton droit, j'vais te dire le contraire. Mais j'avais mes raisons, si j'ai agi ainsi. » Hum hum. Des raisons. Bon eh bien il essaie de se justifier un peu c'est déjà pas mal, j'avais un peu de considération. Il ne soutenu pas mon regard très longtemps et le baissa vers le bar. J'avais l'impression qu'il cachait quelque chose.. C'était quelque chose de grave en rapport avec sa famille ? Jamais l'idée qu'il ait pu se passer un accident dans sa famille éloignée ou un truc dans le genre m'avait effleuré l'esprit. Pourquoi ? Parce que sa mère, son beau père, ses soeurs je les avais revu de loin par la suite. Et quand j'étais allée leur demander le pourquoi du comment j'avais été rapidement rejeté. J'avais juste su que Jordan était en vie. Bah tiens donc. Et j's'rai bien contente de savoir ce que tu vas pouvoir dire pour ta défense. Je ne savais pas quoi penser. Je le détestais et pourtant.. il y avait encore quelque chose. Un je-ne-sais-quoi qui rendait la conversation étrange. Putain Jordan, un sms ça t'aurait tué ?! J'me suis inquiétée, j'ai cru qu'il t'était arrivé un truc grave, même que t'étais mort ! Si ta famille ne m'avait pas dit dès le début que tu t'étais juste barré loin d'ici, j'serai sûrement morte d'inquiétude. Pourquoi j'lui dévoilais autant mes émotions ? Bonne question.

« - Briony.. arrête de te faire du mal. » Je déglutis. Il avait raison. Je me faisais plus mal qu'autre chose en restant près de lui, en essayant d'avoir des explications à son départ soudain il y a plusieurs années. Pourquoi remuer le côté dans la plaie à part pour remarquer qu'en fait, elle ne s'était jamais refermée ? J'croyais beaucoup avoir été complétement anesthésiée.. comme quoi, le revoir me faisait découvrir des choses sur moi-même. Il aura servi à quelque chose au moins ce soir. « - Arrête de vouloir à tout prix savoir ce qu'il m'a poussé à partir dans ces conditions quand j'suis moi même incapable de te l'expliquer. Laisses tomber, restes avec cette image que t'as de moi. Ça vaut mieux. » Je le regarda, ne pouvant pas détacher mes yeux de son visage baissé vers le bar. Incapable d'expliquer ce qui s'était passé ? Vraiment ? Merveilleux. J'crois que j'suis face à un mytho, à un mec qui assume pas ce qu'il a fait dans le passé et qui par-dessus le marché est un lâche qui va au bout de rien. Pourquoi continuer à me faire du mal sur la longueur au lieu de tout lâcher ce soir et me blesser profondément à cet instant ? L'image que j'ai de toi actuellement est celle d'un connard lâche et par-dessus tout qui est un profiteur et manipulateur. Ce portrait te convient-il ou pas ? Tu veux que j'garde cette image de toi ? dis-je non sans ironie. J'tenais à savoir la vérité et j'pense sincèrement qu'il en était conscient. Il veut juste reculer l'échéance, mais à quoi bon ? Il me connaissait parfaitement et ca doit être un de mes seuls traits de caractères qui n'a pas changé. Eh oui, c'est embêtant, n'est-ce pas ? « - Ça fait 5 ans et ça te sert plus à rien d'essayer de comprendre. » Il était en boucle là. J'avais même l'impression qu'il essayait de se persuader lui même que ça n'avait pas d’intérêt. Je m'avanca vers lui et prit son visage entre mes mains pour le forcer à me regarder. J'sais pas quel regard j'avais à cet instant. Ca devait être entre la fureur, la tristesse, la nostalgie, la déception, la joie de le retrouver.. un mix qui devait être difficile à interpréter je suppose. Comment tu peux croire une seule seconde que pour moi ça n'a plus d'importance de comprendre, même après cinq ans ? J'veux savoir Jordan. Et tu sais très bien que j'vais pas te lâcher avant de connaître les détails. Après l'avoir obligé à entendre mes paroles, je le relâcha et je me recula tout en me retournant vers le barman pour redemander une nouvelle boisson.

« - Peut être bien. J'en sais rien, si ça peut t'aider à m'oublier une bonne fois pour toute Briony. » Hein ? Comment est-ce qu'il osait ne serait-ce penser cela ? Comment pouvait-il croire que j'voulais l'oublier ? Oui, soyons honnêtes, je le détestais. De tout mon être, pour toute la souffrance que j'avais enduré à cause de lui. Mais putain c'était avec lui que j'avais été la plus heureuse des femmes, avec lui que j'avais connu l'amour selon moi.. pour la première et dernière fois. Car même si il me l'avait fait connaître, il m'avait également vacciné contre. Bah oui, tant qu'à faire, autant faire les deux. J'veux pas t'oublier, t'as pas capté ça ? Tu fais partie de moi. Il m'avait aidé à plusieurs instants de ma vie, avec la guerre des clans dans mon quartier à Chicago, quand j'avais eu des embrouilles avec ma famille, notamment ma mère, ou encore quand j'avais eu un ou deux passages à vide. Il avait été là. Puis il s'était barré, me laissant seul. Pourquoi ? J'en savais fichtrement rien. Et au nom de toutes les larmes que j'avais versé, au nom de la souffrance, de la haine, que j'ai ressenti, j'estime que j'ai le droit de connaître la vérité, aussi dur soit-elle. Il avait une autre petite amie à l'époque ? Et il voulait toujours pas me le dire ? Des problèmes dans sa famille ? J'en savais rien du tout et il me donnait aucun indice, j'pouvais pas deviner. « - Non, c'est sûr. Rien ne t'empêche de vouloir essayer de comprendre. Comme rien ne m'empêche de vouloir garder ça pour moi. » Dialogue de sourds bonjour. C'était ça le défaut de notre couple. L'un aussi têtu que l'autre. Pas moyen de lâcher le morceau. A croire que ça recommençait aujourd'hui, dans notre première rencontre depuis pourtant quelques années. Comme quoi, on ne change vraiment pu après l'adolescence, on a le même caractère. Pour essayer de te racheter ptete ? Qu'est-ce qu'il en avait à foutre de se confesser, d'avoir une place au paradis sérieux ? Il en avait strictement rien à faire, mais j'étais prête à tous pour connaître. J'avsis fait quelque chose de mal ? Bah oui c'est vrai ça.. je n'avais jamais vraiment pensé à ça, mais peut-être que c'est à cause de moi qu'il n'était pas resté à Chicago.