Il te tapotait la tête en souriant, s'abaissant à ton niveau, grand comme il était. Il avait un sourire si beau, il était si beau, il était si gentil. Il était ton grand frère. Il te protégeait, il portait l'espoir de tes parents et cela te permettait de ne pas à subir de pression d'autrui. Tu pouvais ainsi profiter de ta jeunesse. Jusqu'à ce que ce soit la fin. Jusqu'à ce que la mort tape à votre porte et brise vos vies.

Ce n'est qu'à 12 ans qu'on apprit que ton frère, alors âgé d'une quinzaine d'années souffrait d'un cancer. Tu ne comprenais pas. Après tout, tes parents étaient des médecins reconnus, ils auraient dû repérer cela bien avant. Mais non. Et la sentence s'abattit. Des médicaments en passant par toutes sortes de traitements, rien n'y faisait. La maladie restait incrustée au fond de ton grand frère chéri. Elle prenait de la place et ton frère maigrissait à vue d'oeil. Ses beaux cheveux n'étaient plus et son sourire n'était plus qu'une trace du passé. Il souffrait encore et toujours et tu ne pouvais rien faire. Toi qui était si petite, si insignifiante. Le temps passa et le début de la fin.

Deux ans passèrent. Tu étais affalé sur la chaise, tenant la main de ton frère qui avait cessé de vivre. Ses yeux étaient fermés, son corps commençait déjà à perdre de sa chaleur. Tu n'entendras plus jamais sa voix. Seuls les souvenirs de lui demeurent. Ses derniers mots étaient pour toi, tu les avais entendus distinctement. "Je t'aime. Profite bien de la vie." Des larmes tombèrent gouttes par gouttes de ta joue, mouillant ton pantalon, mais tu t'en fichais bien. Tu tenais encore sa main, sa main qui paraissait si blanche comparée à toi. Tu ne réalisais pas, tu ne voulais pas réaliser que la personne qui t'avait protégé jusqu'à maintenant n'était plus. Que maintenant, le dernier enfant de la famille, toi, tout reposait sur tes épaules les espoirs de tes parents. Devenir un médecin renommé. Des parents qui n'étaient plus.

Ils n'étaient plus que des fantômes. Ils se disputaient, rejetant la faute sur l'un ou l'autre, sur la médecine et d'autres bêtises de ce genre. Ils te forçaient à bien te conduire, à reprendre le flambeau, à faire médecine. Tu ne le fis pas pour eux, mais pour ton frère. Tu ne voulais pas que des familles et de petites sœurs perdent ainsi leur grand frère. Le temps passa et tu te rendis compte que les gens ne pensaient qu'à eux-mêmes. Que les filles ne te parlaient que pour ta richesse et la renommée de tes parents, crachant derrière ton dos. Toi, la jeune fille souriante, tu n'étais plus. Tu usais de ton argent pour faire plonger ces filles, les piétiner et qu'elles te demandent pardon. Les garçons venaient pour la même chose. Tous les mêmes. Pour tes fesses et ton beau visage. Ils étaient reçus par ton regard de glace et par ta voix tranchante. Un seul homme avait réellement compté dans ta vie et il n'était plus.

Tous les soirs, tu révisais, encore et toujours, visant simplement la perfection, tes parents sur ton dos. Tu ne pouvais relâcher la pression que le soir dans ton lit, quand tu serrais la peluche offerte par ton frère, pleurant discrètement dedans, revivant encore et toujours tes souvenirs de lui.

Aujourd'hui encore, malgré ton entrée à Harvard, tu gardes la peluche près de toi. Plus le temps avait passé, plus ton coeur avait refroidi. Les personnes ne couraient autour de toi que pour ton argent et à ta renommé, non pour toi-même où ne s'intéressant même pas à ce que tu pouvais ressentir au fond de toi. A tes vraies ambitions, tes vraies rêves. Alors, l'argent était devenu ton ami, celui qui te permettait de piétiner ceux qui n'étaient rien. Ton ambition est simplement de dépasser tes parents pour devenir plus forte qu'eux. Pour essayer de guérir une maladie prénommée : cancer. Néanmoins, sous cette couche de glace, une jeune fille pleure toutes les larmes de son corps. Tu es si seule. Tu n'as plus personne sur qui te reposais ni même avec qui t'amuser ou qui te protégeait. Tu demeures dans le passé, là où tes souvenirs étaient heureux. Néanmoins, tu dois te ressaisir et quelqu'un doit t'aider à surmonter cette pente. À revenir dans le présent, à profiter de la vie comme furent les derniers mots de ton frère. Tu restes enraciné dans ta couche de glace et tu risques de finir seule. Le veux-tu jeune fille ?

Cela doit changer. Quelqu'un doit te changer. Le serez-vous ?