Il est un idéaliste, une personne qui rêve du meilleur, qui veut une vie aussi belle qu’heureuse. Mais Agathe est plus terre à terre, plus rationnelle. Des deux, elle est celle qui ramène toujours Aisling sur Terre, qui le ramène à la réalité et l’empêche parfois de trop rêver. Mais il ne peut s’y empêcher le blond. Ses rêves, c’est ce qui le fait avancer. C’est ce qui le motive à vivre chaque jour. Et il a rêvé tellement de fois de la famille qu’il allait former avec Agathe qu’il ne pouvait pas s’empêcher de vouloir ce bébé, de le vouloir alors que rien n’était fait pour autours d’eux. Il ne répond plus, un peu déçu de sa réponse mais s’y faisant une raison. Il sait bien que ce n’est pas le bon moment, mais il n’empêche qu’il vit dans un monde de fantaisie et de rêve, d’espoir d’un jour meilleur. Alors ouais, sa décision lui fait mal mais il prend sur lui. Il est ramené à la réalité par sa fiancée. Il est ramené sur Terre par les raisons pratiques de la venue d’un enfant. Et le verbe avorter est employé. Le mot qu’il redoutait mais qui était nécessaire. Son coeur lui fait mal, il a du mal à accepter ça, mais il devra le faire. Il sait bien que c’est la bonne décision, ça n’empêche pas qu’elle soit douloureuse. Il pose sa main sur sa bouche, et la passe dans ses cheveux le ramenant en arrière. C’est dur. Lui qui a toujours été assez protéger de cet aspect de la vie s’y retrouve plongé directement tête la première. « Tu veux faire ça quand ? On part demain. Aucun hôpital ne voudra faire ça maintenant. Y’a toute une procédure avant de le faire.» Il refuse de dire le mot avortement. Ce sera sans doute le cas jusqu’à ce que la procédure se déroule. « Ce n’est pas ce que je veux qui compte. C’est ce qui est la meilleure chose à faire qui est important.» Il est pas con Aisling, il est naïf, doux, mais pas idiot. Ce n’est pas une situation pour avoir un bébé.

Elle s'en fichait à cet instant de passer pour une égoïste ou non. Après tout, c'était elle qui devrait le porter, elle qui subirait neuf long mois d'une grossesse non désirée, elle encore qui devrait le mettre au monde et.. Ouais, elle préférait être égoïste pour le coup parce qu'il était juste hors de question qu'elle ait le monde enfant. Pas maintenant. Et elle le voyait sur le visage d'Ais qu'elle était en train de le décevoir mais clairement, fallait pas trop lui en demander. Disons que là, c'était le summum du truc en trop et la blonde, elle n'était pas prête à faire la moindre concession de ce côté là. "S'il faut que je rentre plus tôt, je rentrerais plus tôt." Et elle s'en fout dans le fond des procédures et tout le reste. Y a rien qui ne se paye pas avec de l'argent. Alors même si elle doit tricher pour obtenir ce qu'elle veut, elle le fera. Mais elle n'attendrait certainement pas qu'il soit trop tard pour mettre un terme à tout ça. "La meilleure chose à faire c'est de ne pas le garder, tu le sais très bien." Et encore une fois, elle impose les choses. Donne l'ordre. Ne lui laisse pas vraiment le choix que de dire par lui même ce qui pourrait être bien ou non. Mais elle est bornée Agathe. Assez pour savoir que non, ce serait la pire idée au monde que de s'aventurer dans le rôle de maman. Puis gosh, ils avaient pas vraiment une relation stable les deux, un jour ça allait, le lendemain ils étaient prêt à s'hurler dessus alors non, c'était pas l'environnement dans lequel on pouvait accueillir qui que ce soit en fait. "Je suis désolée que ça soit pas la réponse que t'attendais.." Qu'elle conclus. Désolée mais il est hors de question qu'elle change d'avis de toute façon. C'est comme ça, pas autrement.

Il comprenait, il comprenait même un peu trop. Il n’avait pas envie de passer sur cette opportunité, mais en même temps, il voyait bien que rien ne serait réuni pour qu’ils puissent être heureux après ça. Elle lui en voudrait toute sa vie Agathe, et l’enfant en serait le réceptacle. Lui même serait mis à l’écart et il se sentirait plus qu’isolé dans une famille qui était censée être unie. Alors ouais, il comprend, tellement bien qu’il en avait le coeur brisé. Qu’il ne savait plus comment réagir. « A t’écouter, tu l’aurais fait maintenant. » Et elle l’aurait fait. Il connaît Agathe. Elle a les moyens et la motivation de faire tout ce qu’elle veut, y compris un avortement en urgence. Alors oui, elle le ferait si elle le voulait. Sauf que la législation et la loi l’en empêche, seul frein dans sa démarche. Elle a un droit sur cet enfant qu’Aisling n’a pas du tout. Il a beau être le père, c’est elle qui le porte, c’est en elle qu’il est implanté, pas le contraire. « Je sais. » qu’il répond en prenant sa main, la serrant dans la sienne en se convainquant que ses paroles sont vraies. Car elles le sont. Aussi difficile que ce soit, les paroles d’Agathe ont du sens, sont vraies et surtout raisonnables. Elle pense pour eux trois là. Quel avenir ce bébé aurait-il pu avoir dans les circonstances actuelles ? Aucun. Il aurait été trop aimé d’un côté, pas assez de l’autre, il aurait vogué dans une famille dysfonctionnelle puis sans doute séparé par un divorce prématuré. Alors non, Aisling est résigné à ne pas avoir cet enfant, pas tout de suite. « Ne t’inquiète pas pour moi. Je m’y attendais. Tu as au moins le courage de me dire la vérité, c’est essentiel pour nous. » Elle lui dit ce qu’elle pense, sans filtre et c’est un geste honnête que peu de personne aurait pu faire. Déposant un baiser sur son front, il se lève doucement. Il a besoin d’être un peu seul pour faire le deuil d’un enfant encore invisible. « Je reviens, ne t’inquiète pas. » qu’il dit en prenant son paquet de clope, son téléphone et ses clés. Il a besoin de prendre l’air, de s’évacuer l’esprit afin de penser à autre chose.

Et elle savait dans le fond que c'était terriblement égoïste d'agir de la sorte. Elle savait qu'elle aurait du accorder probablement bien plus de crédit à son avis à lui, chercher à en discuter peut-être un peu plus longtemps et ne pas prendre de décision hâtive mais dans sa tête, c'était déjà tout fait. Elle n'aurait pas d'enfant, pas aussi tôt, pas aussi jeune, pas alors que tout restait à construire autour d'eux. Leurs proches respectifs n'étaient même pas encore en train d'accepter pleinement leur relation, ils avaient du faire avaler la pilule du mariage et elle n'était clairement pas prête à annoncer qu'ils allaient être parents. Alors elle resterait sur son "non" quoi qu'il advienne. "Ouais, bah ouais." Et tant pis si ça ne plaisait pas. Tant pis si c'était brut de décoffrage, si elle avait pu, elle aurait probablement foncé chez le médecin pour avorter directement. "Ouais.." Mais la vérité n'était pas toujours bonne à entendre, elle le savait que trop bien. D'ailleurs, il déposait un baiser sur son front, quittant le canapé. Et ouais, il prenait la fuite, probablement pour réfléchir seul dans son coin à tout ça. Sûrement parce que c'était trop pour lui et qu'il devait lui aussi digérer la pilule. Ouais, dans le fond elle pouvait comprendre et ne protestait donc pas. Elle le laissait prendre ses affaires et s'en aller sans un mot, restant alors seule sur le canapé, l'air un peu hagard. Ouais, fallait croire qu'il n'y avait jamais rien qui fonctionnait réellement bien pour eux.

rp terminé