Elizabeth ne regrettait absolument pas sa décision de venir au bal. La fête était très réussite. La musique était bonne - ce qui n'était pas toujours le cas à une soirée étudiante, croyez-en son expérience - le décor sublime - la mise en oposition du feu et de la glace un peu cliché mais aussi rare, les bals tournant souvent autour de thèmes "anges ou démons", colorés, ou cinématographies - et le peux qu'elle avait mangé était très bon - et aussi très beau. Elle avait du se retenir de prendre en photo le buffet en arrivant. Rien à voir avec les soirées organisées à la fac de Santa Fe, où la nourriture était de la pizza et le thème quasiment à chaque fois : la plage. Mais bon, elle suppose que c'est ça, la vraie différence entre un collège communautaire et une université de la Ivy League. Eli devait avouer qu'elle se sentais presque comme une princesse dans sa robe de soirée. Elle ne portait par contre pas de bracelet, n'ayant pas envie de ce prêter au jeu. Vous pouvez la traiter de rabat-joie, Eli avait déjà assez embrassé de crapauds dans sa vie comme ça... merci beaucoup.

Après avoir mangé et dansé, Elizabeth devait avouer qu'elle commençait à fatiguer. Elle fit signe à ses amis qu'elle devait boire quelque chose, simplement en mimant le geste, ne voulant pas crier, sachant pertinemment que ça ne changerait pas grand chose, et s'avança vers leur table, s'écroulant à moitié sur sa chaise, sa tête vibrant presque avec le volume de la musique, ses yeux piquants sous les couleurs du thèmes, et ses pieds la faisant légèrement souffrir. La personne qui avait inventé les chaussures à talons aiguilles était sans aucun doute un homme. Elle pris le pichet d'eau et se servit un grand verre, le buvant presque d'une traite.

Alors qu'elle se reposait, ses yeux parcourir l'assemblée. Elle sourit légèrement en apercevant de nombreuses têtes connues, en train de danser, de rire, de se prendre en photo, et même se prêtant au jeu du Kiss & Drink au bar. Eli secoua sa tête. C'était vraiment pas pour elle. En voyant ses amis, elle se mise alors à penser à Erin. Eli savait qu'Erin attendait avec impatience cette soirée et était très curieuse de voir qui était son prince charmant pour la soirée.

@James Thompston @Erin H. Duncan

Elizabeth resta assise à sa table pendant quelques minutes de plus, écoutant vaguement les chansons qui passaient d'un rythme lent à un rythme plus rapide avant de repasser à un rythme plus lent. Eli adorait danser, ne disait presque jamais non à faire la fête, surtout avec ses amis, mais cela faisait toujours du bien de se poser aussi, surtout quand l'atmosphère commençait à devenir... trop, comme maintenant par exemple. Donc elle resta assise à l'écart, regardant vite fait ses messages, secouant sa tête à certains snaps envoyés par d'autres amis présent au bal. Certains prenaient apparemment le jeu du Kiss & Drink très au sérieux.

Elle était perdue dans sa petite bulle quand elle entendit soudain une voix derrière elle qu'elle crut reconnaître. Elle sursauta quand elle l'entendit, sentant soudain quelqu'un derrière elle. Se retournant soudainement pour voir qui avait l'audace de faire ça, elle laissa s'échapper un soupir de soulagement quand elle vit que ce n'était qu'Erin, sa meilleure amie. "Erin !" Elizabeth se leva d'un seul coup et admira la tenue de son amie avant de la prendre dans ses bras. Celle-ci déposa un bisou sur sa joue avant de reculer et de lui demander où été son cavalier. "Oh je suis juste venue avec un groupe d'amis d'un de mes cours de psychologie." Elle fit un vague signe de la main pour montrer ses amis, qui semblait s'amuser comme des fous, dansant comme des idiots et faisant signe à Eli de les rejoindre. Elle fit non de la tête avec un léger sourire et secoua sa tête avant de reporter son attention sur Erin. "Et toi ?" elle lui demanda, son sourire s'agrandissant, impatiente de voir avec qui son amie était venue.

Cependant son sourire ne resta pas longtemps en place. Erin se décala et fit un geste en direction de son cavalier pour le présenter à Eli et vice versa. Quand les yeux d'Elizabeth se posèrent sur James, elle retenu sa respiration, surprise de le voir devant elle.

La première chose qui lui vint en tête fut de se traiter d'idiote. Au fond d'elle, elle savait que James avait de grandes chances d'être ici. Elle savait qu'il était étudiant à Harvard. N'était-ce pas là la raison même de sa venue à Cambridge ? Pourquoi était-elle donc si surprise ? Mis à part le fait qu'il était au bal avec Erin.

Sa deuxième réaction fut l'inquiétude. Elle lui avait pardonné de l'avoir abandonnée. Des années de thérapie et une cure de désintox lui avait appris à tourner la page et à pardonner. Mais il y avait une différence entre pardonner et oublier. Et si Elizabeth ne se souvenait toujours pas des événements qui l'avaient conduite à l'hôpital, elle se souvenait très bien de l'immense peine qui avait suivit, quand elle avait appris que James avait disparu et quand elle n'avait jamais eu de nouvelle de lui par la suite. Alors ce soir, bien sûr qu'elle était inquiète. Elle était inquiète de ce qui allait se passer maintenant qu'il était là, devant elle, maintenant qu'ils ne pouvaient plus s'ignorer. Techniquement, elle savait qu'un jour ou l'autre, ça devait arriver, qu'elle allait revoir. Après tout, encore une fois, il était la raison pour laquelle elle était à Cambridge, mais il y a une différence entre espérer le revoir et se tenir face à lui alors que sa meilleure amie n'a aucune idée de ce qu'il se passe. Dans sa tête, Elizabeth s'était imaginée qu'elle trouverait James avant qu'il ne la voit et donc qu'elle aurait le temps de réfléchir et de planifier ce qu'elle lui dirait. Ce soir, ce plan là tombait à l'eau. Et puis il fallait l'avouer, Elizabeth était inquiète pour Erin. Si elle était au bal avec James, c'était surement parce qu'il y avait quelque chose entre eux. Au delà de la peine qu'elle ressentait à cette idée, Elizabeth espérait réellement que James ne ferait aucun mal à Erin. Elle le lui avait pardonné, certes, mais ça, elle ne le laisserait pas passer.

Au final, Elizabeth respira un grand coup, en espérant qu'Erin ne se doute de rien, et offrit à James un de ses sourires les plus poli. Elle hésita quelques instants avant de lui tendre sa main pour la serrer. "Enchantée, je m'appelle Elizabeth." Et intérieurement, elle leva les yeux au ciel parce que Oui, Eli. Erin l'a déjà dit, ça...

Le moment où James serra sa main, Elizabeth ne put s'empêcher de retenir sa respiration, alors que ses yeux se posèrent sur leurs deux mains, le premier contact physique en 3 ans. Elle les fixa des yeux, presque fascinée par le contraste entre les deux, l'une plus pâle mais plus grande que l'autre. Elle entendit à peine James se présenter, préférant se concentrer sur ce contact, comme si c'était là seule chose qui la maintenait debout à ce moment. Et trop vite, c'était fini. James retira sa main et Erin tenta une plaisanterie, mais comment Elizabeth pouvait-elle rigoler à ça?

Jalouse. Etait-ce donc une confirmation qu'il y avait bien quelque chose entre James et Erin ? Elizabeth ne put s'empêcher de regarder sa meilleure amie tenir le bras de son ex-petit-ami. Elle détourna très rapidement son regard.

Et puis Erin continua à parler et continua à enfoncer, malgré elle, James et Elizabeth dans leur malaise. "Je sais qu’elle est bien plus canon que moi et qu’elle est intimidante, mais de là à rester muet." Les yeux d'Elizabeth s'écarquillèrent à ça. Elle regarda Erin, sa meilleure amie, grande, blonde, sublime dans sa robe rouge. Eli aurait presque pu secouer sa tête si elle ne se sentait pas si paralysée. Au lieu de ça, elle offrit un sourire crispé à Erin et évita du mieux qu'elle le put les yeux de James. Et dans ce lourd silence très gênant, Erin continua à parler.

Elle leur annonça qu'elle avait vu un de ses ami et qu'elle lui avait promis une danse. Elizabeth acquiesça, son cerveau de comprenant pas tout de suite ce qu'Erin était vraiment en train de dire. Jusqu'à... "Eliz, je te confie mon cavalier, prenez le temps de faire connaissance.". Eli la regarda, la suppliant du regard de rester mais se doutant bien que son amie ne comprendrait pas ce qu'elle voulait, encore moins quel était le problème. De toute façon, Erin n'aurait pas pu la voir, puisqu'elle déposa un baiser sur la joue de James, Elizabeth incapable de regarder ailleurs, et s'éloigna, laissant James et Elizabeth seuls.

Elizabeth aurait mentit s'il avait dit que ce simple petit baiser sur la joue ne lui avait pas brisé le coeur. Mais que pouvait-elle faire ? Elle n'avait plus son mot à dire, n'avait aucun droit sur James. Et Erin méritait tellement d'avoir quelqu'un à aimer, qui l'aimait tout autant en retour. Alors elle ne dit rien, ne bougea pas, et laissa le silence plus que gênant les entourer et les envahir.

Lorsque James se mit à parler, Elizabeth sursauta presque, ne s'étant pas attendu à ce qu'il dise quoi que ce soit. Doucement, elle leva ses yeux vers lui, écoutant attentivement ce qu'il avait à dire. Il disait qu'il la comprenait, savait ce qu'elle pouvait ressentir... Mais qu'est ce qu'il en savait vraiment ? Il était partit, l'avait laissé derrière sans donner aucune nouvelle. James n'avait aucune idée de ce qu'Elizabeth avait vécue ces dernières années, ne savait rien de sa cure, de la thérapie qu'elle suivait toujours, ou même de son déménagement à Santa Fe. Et il osait se tenir devant elle et dire qu'il était conscient de sa souffrance ? Cela lui faisait une belle jambe. Mais reconnaître ses tords n'effaçait en rien ce qu'il s'était passé. Encore une fois, Elizabeth lui avait accordé son pardon, certes, car elle avait guérit et qu'en tant que catholique, accorder son pardon était très important pour elle-même mais aussi pour ceux qui lui avaient fait du mal à l'origine, mais cela ne voulait en rien dire qu'elle oubliait tout ça.

Elizabeth écouta, quand même, tout ce que James avait à lui dire et elle pouvait très bien voir l'immense peine dont il souffrait. Et voir cela ne la laissait absolument pas indifférent. Au contraire, c'était comme revivre tout ce qu'il s'était passé une nouvelle fois et donc, revivre toute la souffrance aussi.

"James tu..." Elizabeth commença, ne sachant absolument pas ce qu'elle allait dire. Elle se mordit la lèvre inférieur et regarda sur le côté, ses yeux balayant l'assistance et son cerveau cherchant quelque chose à dire. "Il s'est passé tellement de choses. J'ai tout fait, tout fait, pour t'oublier, tourner la page, guérir... Et quand tout semblait fini, quand j'avais enfin l'impression d'aller mieux, je t'ai envoyé ce message... Tu ne m'a jamais répondu, je... Qu'est ce qu'il s'est passé ?" Elle finit par demander, sa première phrase ayant vraiment du sens. "Je... Pourquoi ? Pourquoi est-ce que tu m'as laissée là-bas ? Qu'est ce qu'il s'est passé ?" Elle répéta, cette question ayant tourné sans cesse dans sa tête toute ses années, la volonté de savoir ce qui avait bien pu ruiner leur relation, qui semblait si parfaite. "Est-ce que c'est de ma faute ? Est-ce que j'ai fait quelque chose ?" Elle lui demanda, le suppliant des yeux de ne pas mentir, de lui dire la vérité.

Elizabeth est nerveuse, c'est le moins qu'on puisse dire. Sa soirée venait de basculer en un rien de temps et elle n'avait rien pu faire pour stopper cela. C'était comme être témoin d'un accident de voiture au ralentit et être incapable de faire quoi que ce soit pour l'empêcher. Il était trop tard. James savait qu'Eli était à Harvard – en vie et en pleine santé – Elizabeth était forcée de faire face à ce pour quoi elle avait déménagé à Cambridge à l'origine, et Erin… Pauvre Erin… Elizabeth lui avait gâché sa soirée et son amie n'en avait aucune idée.

En fin de compte, peut être que nerveuse est le mauvais mot. Peut être que des adjectifs tels qu'anxieuse, terrifiée, paralysée, tétanisée, brisée sont plus appropriés…

Elle est incapable de détourner son regard ou son attention de James. C'était comme si elle était captivée par le jeune homme se tenant devant elle, son ex, celui qu'elle avait tant aimé avant que tout leur explose à la figure, celui qui l'avait, en quelque sorte sauvée, qui lui avait donné la force de quitter Sullyvan, qui l'avait assurée que sans lui, elle n'était pour autant pas seule.

Elle garde ses yeux sur James et le voit regarder l'assistance, comme s'il voulait s'assurer que personne n'espionne leur conversation. Et puis, il lui reprend la main, avec une tendresse qui donne presque à Elizabeth l'envie de pleurer. Ce geste, si simple, déclenche tant de souvenirs, ceux des fois où James avait fait la même chose, quand ils étaient heureux, avant qu'ils ne sombrent et coulent, coulent, coulent, jusqu'à atterrir plus bas que terre. Ce geste laisse Elizabeth sans voix. Elle n'a aucune envie de lâcher cette main, elle souhaite la tenir, s'y accrocher, et ne plus jamais la laisser partir, plus jamais le laisser partir, mais d'un autre côté, elle est trop inquiète, a trop peur de ce qui viendrait ensuite, et de ce qu'il pourrait faire.

Quand James parle, sa voix est basse, juste assez haute pour qu'Elizabeth puisse l'entendre. Et ce qu'il dit n'aide en rien Elizabeth, perdue dans un mélange de sentiments et d'émotions qui lui donne l'impression qu'elle va exploser d'une minute à l'autre. Mais elle l'écoute. Plus que ça, elle est pendue à ses lèvres. Parce qu'Elizabeth n'a qu'une vague idée de la raison pour laquelle elle s'est retrouvée à l’hôpital. Elle se souvient qu'à cette époque, elle était dans un état affreux et qu'elle se droguait, et elle se souvient qu'à son réveil, on lui avait annoncé qu'elle avait fait une overdose. Cela ne l'avait en rien surprise. Par contre, elle était toujours incapable de se rappeler des 24 heures qui avaient précédé son hospitalisation. Ne pas savoir, avoir perdu toute une journée de son passé a toujours terrifiée Elizabeth et depuis, elle s'est toujours accroché au moindre détail concernant cette journée. Et même si les informations que lui donne James son peu nombreuse, elle n'en reste pas moins attentive.

James ne nie donc pas l'avoir laissé pour morte mais Eli commence à comprendre un peu mieux. Elle sait que dans une situation où les rôles avaient été inversés, elle aurait été en état de choque. Voir le corps de James immobile, le croire mort… Elle ne s'en serait sans doute pas remis. Une petite voix lui dit de s'énerver contre James, qui aurait pu rester à ses côtés, attendre l'ambulance, attendre de savoir avant de la rayée de sa vie. Mais Elizabeth ignore cette voix, bien trop rassurée à l'idée que même à cette époque, James tenait toujours à elle. Elizabeth s'était résignée. Si elle avait sombré dans la drogue, s'était en grande partie à cause du décés de son père, et de son malêtre suite à ça, mais aussi parce qu'elle se sentait abandonnée, délaissée par son copain, qui jurait pourtant qu'il l'aimait.

Quand il lui avoue penser que le sms venait de Sullyvan, plutôt qu'elle, les yeux d'Elizabeth s'écarquillent et sans s'en apercevoir, elle sert la main de James. Il est facile pour elle d'imaginer à quel point cette idée aurait pu atteindre James, Elizabeth sachant très bien à quel point il déteste Sullyvan.    

Quand James prend son autre main, Eli le laisse faire, l'accepte beaucoup plus rapidement, et se laisse apprécier ce contact, juste pour cet instant.

"James… J'en avais aucune idée…" Elizabeth ne savait pas quoi dire d'autre. Tout semblait trop… impossible. Comment cela était-il possible que James était devant elle, que ses mains tenaient les siennes, qu'il étaient en train de parler, après tout ce temps… "Il faut que tu saches que quand je me suis réveillée à l'hôpital et que tu n'étais pas là… ça m'a brisé le cœur. J'étais effondrée, et j'avais peur. Parfois, je me disais qu'il t'était arrivé la même chose." Elle marque une pause, avant d'ajouter, "Mais je m'en suis remise. Et ça m'a pris du temps, c'est vrai. J'ai du travailler dur, mais je vais mieux. Je vais bien. Alors… Arrête de t'en vouloir, d'accord ?" Et rassemblant tout son courage, Elizabeth lâche une des mains de James pour la poser sur sa joue. "Je ne t'en veux plus. Je te pardonne." Elle fixe ses yeux, espérant qu'il la croit.

"Je dois t'avouer quelque chose," elle continue, baissant les yeux, légèrement gênée par ce qu'elle s’apprête à lui dire. "Après t'avoir envoyé le message et quand tu ne m'as pas répondu… J'ai appelé tes parents. Je leur ai demandé où tu étais." Elle tente un bref regard dans ses yeux, avant de les baisser à nouveau. "Quand ils m'ont dit que tu étais inscrit à Harvard J'ai… J'ai postulé à mon tour. C'est pour ça que je suis venue à Harvard. Pour toi," elle ajoute à voix basse.