« Tu sais Caleb, je t’aime.. sincèrement. – Un silence, puis une réponse de l’homme – Moi aussi. » Un simple baiser mais qui scelle ma naissance. Mon prénom ne me vient pas de mon paternel biologique, mais bien celui qui a su faire briller l’amour dans le cœur d’une mère, lui redonner l’espoir et le gout à la vie. Alors pourquoi ne pas apprécier un prénom quand on sait qu’une personne proche porte le même ? On est liés d’un lien que l’on ne soupçonne pas mais qui est prouvé par les actes. C’est en fin d’année qu’a lieu l’heureux événement. Ma mère est présent et Caleb bien sûr. Le meilleur ami de Maman. L’amitié évolue et lorsqu’elle énonça – à bout de souffle – le prénom qu’elle donne à son second enfant, encore un garçon, c’est Caleb qui pleure. Honorer bien plus qu’il ne devrait l’être. Papa n’est pas là, mais la troisième personne sur qui mon regard de nouveau-né se pose est mon grand-frère, Devan. Voici les trois personnes les plus importantes pour moi, à jamais.

Mon enfance se passe de manière calme et ordonné, apprenant les bases du respect et suivant toujours l’exemple de mon grand-frère. Ainsi est l’image que l’on donne à l’extérieur. Une belle petite famille comme il faut. A part un père qui n’en est pas un et un meilleur ami qui est un père. L’amour de ma mère et de son meilleur ami devient tel qu’elle finit par demander le divorce de mon père biologique, la première raison étant qu’il l’a trompée avec maintes et maintes femmes. L’image de Caleb comme étant notre père nous correspondait mieux et à nos petits âges nous allaient bien, nous n’en étions pas perturbés. Même si en grandissant, nous apprenions réellement qui est notre père, un homme sans visage. Un homme sans foi ni loi, une coquille vide où seule le désespoir et l’amertume règne. Mon père ne nous a pas aimés. Du moins, je ne pense pas qu’il m’a aimé moi. Cela ne l’a pas empêchés quelques années plus tard de frapper mon grand-frère, puis moi. Plusieurs fois, on ne disait rien et ça ne se voyait pas et pourtant... . Peut-être parce que je l’appelais par son prénom et non par l’appellation « Papa » ? C’est la question qui me taraude l’esprit et qui me hantait à chaque fois que j’allais le voir. Lorsque j’ai voulu vérifier mes dires, un jour je l’ai appelé Papa. Il s’est mis dans une colère noire, je n’ai pas compris pourquoi, je sais juste qu’il m’a frappé tellement fort que je me suis évanoui et me suis réveiller dans les bras de ma mère à l’hôpital. Inconsciemment je m’étais protégé lors de la correction de mon père, m’occasionnant une fracture féroce sur le bras gauche. Le scandale éclata comme la vérité. La garde exclusive fut accorder à ma mère et notre vie changea, accompagné seulement de Caleb et de Maman. Nous grandissimes tranquillement, à l’abri du retour d’un père qui n’en était pas un et ignorant les plans d’un homme qui voulait devenir le nôtre (Kaleb n’a pas connaissance de l’envie d’adoption de Caleb). Suivant toujours l’ombre de mon frère, voulant lui ressemblait en pas mal de choses, il est mon modèle. Pourtant, ma vie est sur le point de changer ainsi que ma vision de celle-ci.

Il n’est pas tard mais la nuit est tombé et quelqu’un toque à la porte. J’ouvre fatalement la porte, Maman près de moi, sans savoir ce qu’il va se passer par la suite, je ne remarque que le visage de mon véritable père mais il est trop tard. Il lève son bras droit et je me recroqueville de peur qu’il ne me frappe, sans avoir vu qu’il avait un revolver. Le coup de feu retentit tout près de moi, il me sonne, me choque. Je ne bouge pas. Je vois Maman tombé, des cris et des larmes. Le monde continue à tourner mais j’ai perdu ma mère. Pourquoi ai-je ouvert cette foutue porte ? Je ne sais pas, mais à cause de moi maman est morte. C’est la phrase que je me répète les trois premiers mois après sa mort. Caleb nous aide bien, même beaucoup. Il ne le sait pas encore mais pour moi, mon père c’est lui. Je n’ose pas demander des nouvelles du meurtrier de ma mère pendant les deux premières années après sa mort. Mais je me contrains à passer outre, à ouvrir les yeux à avancer. Je demande même à avoir une psychologue. Pour me déculpabiliser, c’est ce que je dis à tout le monde mais surtout pour avouer une faiblesse que j’ai à présent : celle des armes, leur maniement, leur bruit, leur coup de feu, je ne les supporte pas. Ma petite fierté d’homme de quatorze ans m’oblige à agir en tant qu’homme. La vie m’a donné une leçon et m’a forger une carapace, un caractère plus évasif que celui de mon frère et surtout plus mature dans la vie de famille. Devan suit le chemin tracé par Caleb, voulant lui ressembler alors que moi je traîne, ne le suivant plus trop, traçant mon propre chemin. Je me tourne tout au long de mon adolescence vers l’aide à l’autre. Le bénévolat, les œuvres de charités deviennent mon échappatoire pour ne plus penser à ma propre misère, ma propre peur que j’apprends à affronter seul.

Je deviens rapidement un homme avec les qualités qu’il faut, travaillant mon corps pour me sentir fort et mon mental pour devenir respectueux comme il se doit. Assez vieux jeu, restant parfois un peu trop gentleman j’ai appris ça de Caleb. Toujours prendre soin des femmes et en parlant de femme, ma demi-sœur en ai une sur qui je fonde de grand espoir. Je veux la voir heureuse et ne pas connaître ce que j’ai connu : la douleur. Elle a dû en souffrir comme moi de la disparition du jour au lendemain de Maman, mais ainsi est la vie, on doit l’affronter ainsi. Je prends beaucoup soin d’elle tout en essayant de rendre la monnaie à Caleb, Papa comme je dis souvent. Notre deuxième Papa mais plus proche d’un vrai père que d’un second père. Il est devenu mon autre modèle après Devan. Devan qui est parti étudier à Berkeley puis qui a rejoint Harvard. Loin de nous et de notre famille. J’ai appris qu’il avait doucement fondé la sienne lorsque nous avons déménagés à New-York et qu’un jour qu’il nous rapporte son fils, Randy. Le lien qui s’était éloigné entre lui et moi ne pouvait se détruire ainsi et de fil en aiguille nous avons rattrapé l’éloignement qui nous a fait grandir. Nous savons pratiquement tout l’un sur l’autre, à part nos petits secrets. Parfois je lui rendais visite avec Randy, comment résister à un gosse quand il vous dit « Tonton Kaleb ». J’ai fait quelques rencontres quand j’allais le voir, notamment d’une belle brune nommée Sally est qui est gravé dans ma chair alors qu’elle n’y a pourtant pas planté ces ongles. Elle m’intrigue totalement. Cependant, je fais moi-même mes études en Psychologie tout en profitant d’une association avec qui je peux me permettre de faire de courts voyages humanitaires dans le monde, que ce soit l’aide aux hommes ou bien à la planète. Un voyage écologique et de sensibilisation a été fait à Chypre, à Nicosie plus précisément. Mon premier voyage si loin de ma terre natale. Celui qui m’a fait ouvrir les yeux sur moi-même et la richesse du monde, celui qui m’a encore fait détester le pays dans lequel je vis et qui s’évertue à vendre la mort via des armes. Mon retour m’a permis de savoir ce que je voulais faire et de profiter de l’instant présent. Caleb s’occupe bien de Sharone et de Randy, après en avoir discuté avec lui j’ai postulé à la grande université d’Harvard pour finir mes études en Psychologie.

C’est donc âgé de 26 ans que je passe le test de sélection d’Harvard. La vie m’a forgé pour que je fasse mes propres choix et le fait de venir à Harvard en est un gros. Rejoindre mon frère, nous lier de nouveau et pourquoi ne pas y faire ma vie aussi. Mais ceci, ce n’est pas encore une histoire écrite.